Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B..., représenté par Me Blanc, a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté n° DP 1302916E0007 en date du 2 juin 2016, par lequel le maire de Cornillon-Confoux s'est opposé à sa déclaration préalable déposée le 18 février 2016 pour régulariser des travaux sur une toiture existante.
Par un jugement n° 1606420 du 21 décembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté attaqué.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 février 2019, la commune de Cornillon-Confoux, représentée par Me Boulan, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1606420 du 21 décembre 2018 ;
2°) de rejeter la requête de M. B... ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision d'opposition du 2 juin 2016 ne peut être qualifiée de décision de retrait d'une décision de non-opposition tacite ;
- en tout état de cause, la décision de retrait est légale, dès lors que M. B... se trouvait dans une situation illégale, que le principe du contradictoire n'a pas été méconnu et que le tribunal a dénaturé les faits ;
- la décision d'opposition est suffisamment motivée ;
- eu égard aux caractéristiques de la construction en cause, aux taxes versées par M. B... et aux relevés effectués, il ne peut qu'être relevé l'existence d'un changement illégal de destination ;
- le plan local d'urbanisme s'oppose au changement de destination ;
- il y a eu changement de destination d'une exploitation agricole vers une habitation sans autorisation administrative ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2019, M. B..., représenté par Me Blanc, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune de Cornillon-Confoux à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la décision du 2 juin 2016 doit être regardée comme une décision de retrait de la décision tacite de non-opposition née le 9 mars 2016 ;
- la décision tacite de non-opposition n'était pas illégale ;
- les faits n'ont pas été dénaturés ;
- la décision de retrait a été prise au terme d'une procédure irrégulière qui n'a pas respecté le principe du contradictoire posé par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle n'est pas motivée en violation des dispositions des articles L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et A. 424-4 du code de l'urbanisme ;
- elle n'est pas fondée dès lors que le bâtiment sur lequel les travaux ont été réalisés a toujours été à usage d'habitation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Quenette,
- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique,
- et les observations de Me Manenti substituant Me Boulan, représentant la commune de Cornillon-Confoux, et de Me Bocognano substituant Me Blanc, représentant M. B....
Une note en délibéré, présentée par M. B... a été enregistrée le 21 septembre 2021.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est propriétaire, sur la commune de Cornillon-Confoux, d'un domaine appelé Saint-Antoine lieu-dit Saint-Georges situé en zone Aa " zone agricole ordinaire de la commune " du plan local d'urbanisme. Par une décision du 2 juin 2016, le maire s'est opposé à la déclaration préalable, DP n° 1302916E0007, qu'il a déposée le 18 février 2016 en vue de régulariser des travaux effectués sur la toiture de l'un des bâtiments existants. La commune de Cornillon-Confoux relève appel du jugement du 21 décembre 2018, par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du maire.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction de droit commun est de : a) Un mois pour les déclarations préalables (...) ". Aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : a) Décision de non-opposition à la déclaration préalable (...) ". Aux termes de l'article R. 423-38 du code de l'urbanisme : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou, dans le cas prévu par l'article R. 423-48, un courrier électronique, indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. ". Aux termes de l'article R. 423-39 du même code : " L'envoi prévu à l'article R. 423-38 précise : a) Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ; b) Qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l'objet d'une décision tacite de rejet en cas de demande de permis ou d'une décision tacite d'opposition en cas de déclaration ; c) Que le délai d'instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie ". Il résulte de ces dispositions qu'une décision de non-opposition à déclaration préalable naît un mois après le dépôt de celle-ci, en l'absence de notification d'une décision expresse de l'administration ou d'une demande de pièces complémentaires adressée au pétitionnaire dans le délai d'un mois laquelle a pour effet d'interrompre ce délai. Lorsqu'une décision de demande de pièces complémentaires a été retirée par l'administration, ce retrait ne rend pas le demandeur titulaire d'une décision implicite de non-opposition du fait de l'écoulement d'un délai d'un mois à compter de la date de dépôt de la déclaration préalable.
3. Il ressort des pièces du dossier que moins d'un mois après le dépôt le 18 février 2016, de la déclaration préalable DP n° 1302916E0007, la commune de Cornillon-Confoux a, par courrier du 10 mars 2016, demandé à M. B... d'indiquer l'ensemble des parcelles de l'unité foncière concernée par le projet et de fournir une justification de l'existence légale du bâtiment existant. Sur recours gracieux de l'intéressé, notifié le 27 avril 2016, la commune, par décision du 2 juin 2016 a retiré sa demande de pièces complémentaires. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 qu'un tel retrait a interrompu le délai d'instruction de la déclaration préalable déposée le 18 février 2016. Par suite, la commune de Cornillon-Confoux est fondée à soutenir qu'aucune décision tacite de non-opposition n'était née à la date de ce retrait. La commune ayant opposé un refus exprès le jour même de ce retrait, aucune nouvelle décision implicite d'acceptation n'était née à la date de ce refus. Dès lors, le tribunal administratif de Marseille ne pouvait regarder la décision du 2 juin 2016 par laquelle le maire de Cornillon-Confoux s'est opposé à sa déclaration préalable comme une décision retirant une décision tacite de non-opposition et la considérer comme illégale à défaut d'avoir respecté le principe du contradictoire.
4. Il y a lieu, dès lors, pour la Cour d'annuler le jugement du tribunal et saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... en première instance et en appel.
Sur les autres moyens soulevés à l'encontre de l'arrêté du 2 juin 2016 :
5. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 3, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision du 2 juin 2016 par laquelle le maire de Cornillon-Confoux s'est opposé à sa déclaration préalable soit regardée comme une décision retirant une décision tacite de non-opposition. Par suite, le moyen selon lequel elle serait illégale à défaut d'avoir respecté le principe du contradictoire est inopérant.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ". Aux termes de l'article L. 424-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6 ".
7. Aux termes des considérants de l'arrêté attaqué : " l'article A1 du règlement du plan local d'urbanisme interdit le changement de destination des bâtiments agricoles ; / Le changement de destination du bâtiment agricole, objet de la déclaration préalable, en bâtiment d'habitation est irrégulier ; / La déclaration préalable se limite aux travaux de " réfection et de modification de toiture, sans création de surface de plancher, pour partie du Mas Saint Antoine " ; / La déclaration préalable ne porte pas sur les travaux antérieurs ayant permis le changement de destination du bâtiment, mais uniquement sur les travaux projetés ". Cette motivation est suffisamment précise pour permettre au pétitionnaire de connaître les motifs de l'opposition à la déclaration préalable de travaux. Par suite, et alors même que l'arrêté attaqué ne précise pas les travaux antérieurs qui auraient modifié la destination des lieux sans autorisation, il doit être regardé comme suffisamment motivé.
8. En troisième lieu, lorsqu'une construction a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de déposer une déclaration ou de présenter une demande de permis portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé ou de changer sa destination.
9. Aux termes des dispositions de l'article A1 de la zone A du plan local d'urbanisme : " Types d'occupations et utilisations du sol interdites : le changement de destination des bâtiments agricoles, sauf pour les bâtiments désignés à l'article A2 ". Aux termes de l'article A2 de la zone A du même plan : " les constructions à usage d'habitation, l'agrandissement ou la réhabilitation des habitations existantes, dans la limite d'une construction par exploitation et d'une Surface de Plancher maximale totale de 180 m² extensions comprises, sous réserve que ces constructions soient nécessaire au fonctionnement de l'exploitation, et sous réserve de l'existence d'au moins un bâtiment technique soumis à permis de construire régulièrement édifié à proximité du lieu projeté pour édifier cette construction ".
10. La commune de Cornillon-Confoux soutient que la construction sur laquelle porte la déclaration préalable de M. B... n'était pas une construction à usage d'habitation existante, mais un bâtiment agricole dont le requérant a changé la destination. Elle produit à l'appui de ses allégations un acte notarié qui précise que la propriété d'assiette du projet en litige contient " une maison de maître élevée d'un étage sur rez-de-chaussée à la suite de laquelle se trouvent une maison de ferme, remise, écurie, grenier, poulailler, hangar, cave et autres dépendances le tout attenant ". Si M. B... soutient que les bâtiments agricoles visés dans l'acte notarié ne sont pas contigus à la maison de maître, en sorte qu'ils ne pourraient être concernés par la déclaration préalable de travaux, cette allégation est dénuée de tout fondement dès lors que l'acte précise que ces bâtiments sont attenants à la maison de maître. Les autres bâtiments mentionnés ultérieurement dans l'acte tels que la bergerie ou le grand hangar sont localisés dans l'acte notarié par rapport à ces bâtiments, y compris les dépendances attenantes, qui forment nécessairement un ensemble. Au contraire, et ainsi que le soutient utilement la commune de Cornillon-Confoux, il ressort des plans et des éléments graphiques produits dans la déclaration préalable que le bâtiment en litige se distingue nettement de la maison de maître en étant construit à un niveau de sol inférieur à celui de la maison principale et en possédant une ouverture en façade sud qui s'apparente à une ancienne ouverture de grange. Il ressort par ailleurs de la liste du bâti de la commission communale des impôts directs qu'une nouvelle habitation de 164 m² a été créée sur le terrain d'assiette en 2014. Si M. B... soutient qu'il s'agit d'une scission en deux de l'habitation préexistante, il n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations. Il ressort au contraire des avis de taxe d'habitation que l'une des habitations a été créée en 1850 et l'autre, concernée par les travaux en litige, en 2013. Par suite, la commune de Cornillon-Confoux est fondée à soutenir que le bâtiment en cause est un bâtiment agricole dont M. B... a changé la destination.
11. Il ressort de la déclaration préalable en litige qu'elle ne porte que sur les travaux de rehaussement du toit et non sur la régularisation des travaux ayant antérieurement permis le changement de destination du bâtiment agricole. Par suite, le maire de la commune de Cornillon-Confoux était fondé à s'opposer à la déclaration préalable déposée par M. B... en vue de régulariser les seuls travaux effectués sur la toiture de l'un des bâtiments existants dès lors que cette demande ne portait pas sur l'ensemble de la construction et que le changement de destination ne pouvait qu'être refusé en application des dispositions de l'article A1 précité de la zone A du plan local d'urbanisme.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision en date du 2 juin 2016 par laquelle le maire de Cornillon-Confoux s'est opposé à sa déclaration préalable n° DP1302916E0007 déposée le 18 février 2016 pour régulariser des travaux sur une toiture existante.
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cornillon-Confoux, la somme que M. B... lui demande au titre des frais exposés non compris dans les dépens. En application des mêmes dispositions il convient de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Cornillon-Confoux et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1606420 du 21 décembre 2018 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Marseille et ses conclusions d'appel tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : M. B... versera à la commune de Cornillon-Confoux la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cornillon-Confoux et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 16 septembre 2021, où siégeaient :
- M. Chazan, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Quenette, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 octobre 2021.
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N° 19MA00872
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