Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 juin 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier d'Avignon a rejeté sa demande préalable du 17 mai 2018 et, d'autre part, de condamner ledit centre hospitalier à lui payer 1 254 euros au titre de l'indemnité de précarité et à lui verser les sommes de 2 740,92 euros et 5 000 euros respectivement à titre de dommages et intérêts et en réparation de son préjudice moral subi.
Par un jugement n° 1802540 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 11 août 2020 et le 15 avril 2021, M. B..., représenté par Me Lenzi, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 11 juin 2020 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler la décision du 11 juin 2018 du directeur du centre hospitalier d'Avignon ;
3°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier d'Avignon à lui payer 1 254 euros au titre de l'indemnité de précarité, 2 740,92 euros en compensation de la perte de salaires et 5 000 euros en réparation de son préjudice moral subi et, à titre subsidiaire, de condamner le centre hospitalier d'Avignon à lui payer 1 254 euros au titre de l'indemnité de précarité ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Avignon, outre les dépens, le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier, son expédition n'ayant pas été signée par le greffier en chef du tribunal ;
- le jugement est irrégulier, les premiers juges ayant insuffisamment répondu au moyen développé devant eux, selon lequel le contrat le liant au centre hospitalier d'Avignon devait être qualifié de contrat à durée indéterminée ;
- la prime de précarité de 10%, correspondant à la somme de 1 254 euros, lui est due en application des dispositions combinées des articles R. 6152-418 du code de la santé publique et L. 1243-8 du code du travail ;
- le caractère accessoire des revenus tirés de son contrat avec le centre hospitalier est sans incidence sur sa situation principale de retraité ;
- le contrat du 9 mai 2016 méconnait les dispositions de l'article R. 6152-415 du code de la santé publique ;
- le centre hospitalier disposait de la possibilité de renouveler son contrat, l'article R. 6152-402 du code de la santé publique autorisant un praticien à bénéficier, au sein d'un même établissement de recrutement successifs de praticien contractuel pour une durée maximale de trois ans ;
- le contrat conclu sur le fondement des dispositions du 2° de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique aurait dû être conclu sur le fondement des 4° ou 5° de cet article qui autorisent des périodes de renouvellement pour une durée totale d'engagement de deux ans ;
- du fait du dernier renouvellement irrégulier limité à une période de deux mois, son préjudice financier s'élève à la somme de 2 740,92 euros ;
- il a droit également à l'indemnisation de son préjudice moral, constitué par le refus obstiné du centre hospitalier de le maintenir à son poste pendant quatre mois supplémentaires et l'humiliation ressentie après avoir été " éjecté " par l'établissement de soins dans lequel il a exercé avec ferveur et conscience professionnelle durant une quarantaine d'années.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 mars 2021, le centre hospitalier d'Avignon conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Le mémoire présenté pour le centre hospitalier d'Avignon enregistré le 6 mai 2021 à 10 heures 46 n'a pas été communiqué.
Par ordonnance du 16 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 mai 2021 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteure,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Lenzi représentant M. B... et de Me Marc représentant le centre hospitalier d'Avignon.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, a exercé ses fonctions au sein du centre hospitalier d'Avignon du 1er octobre 1978 au 1er mai 2016, date à laquelle il a fait valoir ses droits à la retraite. Par un contrat du 9 mai 2016, il a été recruté par le même établissement hospitalier en qualité de praticien contractuel, dans le cadre du dispositif de cumul emploi-retraite (CER), pour une période de six mois du 2 mai au 1er novembre 2016. Par deux avenants, respectivement du 30 septembre 2016 et du 24 avril 2017, le contrat de M. B... a été renouvelé pour la même durée de six mois, le dernier contrat prenant fin au 1er novembre 2017. Alors que M. B... avait sollicité, avant le terme de son dernier contrat, par lettre du 28 octobre 2017, la poursuite de son activité professionnelle au sein du centre hospitalier d'Avignon pour une ultime période de six mois, le directeur du centre hospitalier a renouvelé son contrat pour une durée de deux mois par une décision du 7 novembre 2017, soit jusqu'au 31 décembre 2017. Par une décision du 11 juin 2018, le directeur du centre hospitalier d'Avignon a rejeté le recours préalable formé le 17 mai précédent par M. B... tendant à obtenir réparation de ses préjudices résultant du refus de l'administration de renouveler son dernier contrat pour une durée de six mois. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier d'Avignon du 11 juin 2018 et la condamnation du centre hospitalier d'Avignon à lui verser les sommes de 1 254, 2 740,92 et 5 000 euros au titre, respectivement, de l'indemnité de précarité, de dommages et intérêts du fait de sa situation en fin de période contractuelle et du préjudice moral subi.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, si aux termes de l'article R. 751-2 du code de justice administrative : " Les expéditions des décisions sont signées et délivrées par le greffier en chef ou, au Conseil d'Etat, par le secrétaire du contentieux ", le fait que cette expédition du jugement attaqué ne comportait pas la signature du greffier en chef est sans influence sur la régularité de ce jugement.
3. En second lieu, M. B... soutient que le jugement est irrégulier faute pour les premiers juges d'avoir suffisamment répondu au moyen selon lequel son contrat conclu avec le centre hospitalier d'Avignon " devait être qualifié de contrat à durée indéterminé ". Toutefois, il ne résulte pas des écritures de première instance de M. B... que ce moyen était développé devant eux. Il résulte, en revanche, de ces écritures que M. B... s'interrogeait sur la nature du contrat qui le liait à l'établissement hospitalier en envisageant, soit un contrat à durée déterminée de deux ans conclu sur le fondement des dispositions de l'alinéa 4 de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique, soit un contrat conclu pour une durée indéterminée, sans toutefois prendre parti pour l'une ou l'autre de ces deux hypothèses. Le tribunal ayant suffisamment répondu à ce " questionnement " au point 5 de son jugement, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions combinées des articles R. 6152-418 du code de la santé publique et L. 1243-8 du code du travail :
4. L'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8 du code du travail étant destinée à compenser la précarité de la situation du salarié dont les relations contractuelles avec son employeur ne se poursuivent pas, à l'issue d'un contrat à durée déterminée, par un contrat à durée indéterminée, elle ne saurait s'appliquer aux contrats passés avec les personnels médicaux hospitaliers autorisés à prolonger leur activité au-delà de la limite d'âge, dès lors que de tels contrats sont, dès leur signature, insusceptibles de se poursuivre par un contrat à durée indéterminée.
5. Il résulte de l'instruction que le centre hospitalier d'Avignon a recruté M. B... par un contrat signé le 9 mai 2016 pour exercer ses fonctions au sein du service de gynécologie-obstétrique - pôle " Femme, mère, enfant " à raison de deux demi-journées hebdomadaires pour la période du 2 mai au 1er novembre 2016 dans le cadre d'un cumul emploi-retraite (CER) valant prolongation d'activité, l'intéressé ayant fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er mai précédent. Il résulte également de l'instruction que ce contrat, conclu pour une durée de six mois, a été renouvelé à deux reprises pour la même durée puis à une troisième reprise pour une durée de deux mois afin de permettre à M. B... d'assurer les consultations programmées de ses patientes. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'erreur de fait alléguée qu'aurait commise le tribunal en qualifiant d'accessoires les revenus perçus dans le cadre du cumul emploi-retraite, M. B... ne peut prétendre au versement de l'indemnité de précarité au titre des contrats qui l'ont lié au centre hospitalier d'Avignon dans le cadre de sa prolongation d'activité à compter du 2 mai 2016 jusqu'au 31 décembre 2017, ces contrats étant insusceptibles de se poursuivre par un contrat à durée indéterminée, ainsi qu'il a été dit au point précédent.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions de l'article R. 6152-415 du code de la santé publique :
6. Contrairement à ce que soutient M. B..., le contrat du 9 mai 2016 le liant le centre hospitalier d'Avignon n'avait pas à reproduire intégralement les dispositions de l'alinéa 2 de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique sur le fondement desquelles il a été conclu. Par ailleurs, et comme les premiers juges l'ont retenu à bon droit, la circonstance que ce contrat ne contient aucune stipulation relative au préavis prévu par le 5° de l'article R. 6125-415, est demeurée sans incidence préjudiciable sur la situation du requérant dès lors que le préavis prévu par ces dernières dispositions ne doit être envisagé que dans le cas où l'une des parties entend mettre fin aux relations contractuelles avant le terme initialement convenu et non dans le cas où, comme en l'espèce, l'administration a décidé de ne renouveler le contrat initial que pour une durée inférieure à celle souhaitée par le bénéficiaire. Il suit de là que, contrairement à ce que soutient M. B..., la lettre du 7 novembre 2017 par laquelle le directeur du centre hospitalier d'Avignon l'a informé qu'il était autorisé à exercer ses activités professionnelles dans le cadre du dispositif de CER jusqu'au 31 décembre 2017 afin d'honorer les rendez-vous de consultations d'ores et déjà planifiés pour les mois de novembre et décembre de l'année en cours, ne constitue pas une lettre de résiliation anticipée de son contrat lui ouvrant droit au bénéfice du préavis prévu par les dispositions du 5° de l'article R. 6152-415 du code de la santé publique.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique :
7. Il résulte de l'instruction que M. B... a été recruté par le centre hospitalier d'Avignon par un contrat à durée déterminée signé le 9 mai 2016 pour une durée de six mois, du 2 mai au 1er novembre 2016, sur le fondement du deuxième alinéa de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique et que ce contrat a été renouvelé, sur le même fondement réglementaire, par un premier avenant du 30 septembre 2016 pour une durée de six mois, du 2 novembre 2016 au 1er mai 2017, puis par un deuxième avenant du 24 avril 2017, pour une durée de six mois, du 2 mai au 1er novembre 2017, et par un troisième avenant du 7 novembre 2017 pour une durée de deux mois, du 1er novembre au 31 décembre 2017. Dans la mesure où le contrat dont a bénéficié M. B... sur le fondement du 2° de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique peut être conclu dans la limite d'une durée totale d'engagement d'un an, le centre hospitalier d'Avignon a méconnu ces dispositions en signant les deuxième et troisième avenants sans recourir à la faculté qui lui était offerte par le dernier alinéa de cet article en proposant à l'intéressé un contrat basé sur un fondement réglementaire différent de celui de son contrat initial. En revanche, M. B... n'est pas fondé à soutenir que du seul fait du dépassement de la limite d'une durée totale d'engagement d'un an, son contrat doit être regardé comme ayant été conclu, non sur le 2° de l'article R. 6152-402 comme explicitement mentionné à l'article 1 de son contrat, mais sur le 4° de cet article qui autorise une durée totale maximale d'engagement de deux ans qui lui aurait ainsi permis d'exercer jusqu'au 30 avril 2018 comme il en avait manifesté le souhait dans son courrier du 28 octobre 2017.
En ce qui concerne les préjudices :
8. L'illégalité des renouvellements de son contrat initial au-delà de la durée totale d'engagement prévue par les dispositions susmentionnées de l'alinéa 2 de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique constitue une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier à l'égard de M. B..., qui peut ainsi prétendre à la réparation des préjudices directs et certains que lui a causé cette illégalité.
9. D'une part, M. B... soutient avoir subi un préjudice financier à hauteur de 2 740,92 euros, correspondant aux salaires non perçus pendant quatre mois, son dernier contrat ayant été renouvelé pour une période limitée à deux mois au lieu de six. D'autre part, M. B... soutient avoir été " blessé dans son amour-propre " et avoir subi un préjudice moral à hauteur de 5 000 euros en raison du refus obstiné du centre hospitalier de le maintenir à son poste pendant quatre mois supplémentaires alors qu'il a servi avec ferveur et conscience professionnelle pendant près d'une quarantaine d'années au sein de cet établissement de santé. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, le centre hospitalier d'Avignon a commis une faute, non pas en limitant à deux mois la durée du dernier renouvellement de son contrat mais en ayant renouvelé son contrat initial par les avenants des 24 avril 2017 et 7 novembre 2017 au-delà de la durée maximale d'une année fixée au 2° de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique. Par suite, ces demandes, dépourvues de lien avec la faute commise par le centre hospitalier d'Avignon, doivent être rejetées.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les dépens :
11. La présente instance n'ayant pas donné lieu à des dépens, les conclusions présentées par M. B... devant la Cour sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier d'Avignon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'appelant une somme de 2 000 euros à verser au centre hospitalier d'Avignon sur le fondement de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera au centre hospitalier d'Avignon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative une somme de 2 000 euros.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au centre hospitalier d'Avignon.
Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 octobre 2021.
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N° 20MA02924
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