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05/10/2021 | FRANCE | N°19MA01882

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 05 octobre 2021, 19MA01882


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la société Orange à lui verser une indemnité de 199 544,64 euros et d'enjoindre à cette société de lui verser le montant de l'indemnité différentielle " reclassement-reclassification " à compter du mois de janvier 2017 sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de notification du jugement.

Par un jugement n° 1700655 du 5 mars 2019, le tribunal administratif de Nîmes a condamné la société Orange

à verser à M. A... une somme de 3 000 euros en réparation de ses préjudices, mis à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la société Orange à lui verser une indemnité de 199 544,64 euros et d'enjoindre à cette société de lui verser le montant de l'indemnité différentielle " reclassement-reclassification " à compter du mois de janvier 2017 sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de notification du jugement.

Par un jugement n° 1700655 du 5 mars 2019, le tribunal administratif de Nîmes a condamné la société Orange à verser à M. A... une somme de 3 000 euros en réparation de ses préjudices, mis à la charge de la société Orange une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 avril 2019 et le 21 août 2020, M. A..., représenté par Me Heulin, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 5 mars 2019 en tant qu'il a limité à 3 000 euros la condamnation de la société Orange à indemniser ses préjudices ;

2°) de condamner la société Orange à lui verser les sommes de :

- 117 415,84 euros en réparation des préjudices liés à la perte d'une chance sérieuse d'obtenir un avancement entre 1993 et 2003 ;

- 55 000 euros en réparation des préjudices nés de la violation du principe d'égalité de traitement ;

- 23 890,80 euros en réparation du préjudice né du calcul erroné de l'indemnité différentielle dite " de reclassement / reclassification " ;

- 3 238 euros en réparation du préjudice né de la suppression illégale de l'autorisation de remisage à domicile de son véhicule de service ;

2°) d'enjoindre à la société Orange de lui verser le montant de l'indemnité différentielle " reclassement-reclassification " correspondant au grade de reclassement " chef de district " (CDIS), à compter du mois de janvier 2017 sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de la société Orange une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... soutient que :

- il a perdu une chance sérieuse de bénéficier, entre 1993 et 2004, d'un avancement au grade de chef de secteur, de chef de district ou d'inspecteur, du fait de l'absence fautive de mise en place, par la société Orange, d'un dispositif de promotion interne des fonctionnaires reclassés ;

- la faute de la société Orange lui a causé un préjudice de carrière évalué à 86 895,84 euros, un préjudice de retraite évalué à la somme de 26 520 euros et un préjudice moral évalué à la somme de 4 000 euros ;

- la responsabilité de la société Orange est engagée du fait de sa méconnaissance du principe d'égalité de traitement, en ce qu'elle a permis une évolution de carrière plus favorable pour les fonctionnaires ayant opté pour un grade de reclassement que pour les fonctionnaires ayant opté pour l'intégration dans un grade de classification, ces derniers ne bénéficiant pas du dispositif de promotion interne prévu par le décret n° 2004-1300 du 26 novembre 2004, alors que les fonctionnaires de ces différents corps se trouvent dans la même situation ; à la différence des fonctionnaires qui ont été maintenus dans leur grade de classement après la parution du décret précité, il n'a pu bénéficier en 2003 de la simulation de l'évolution de sa carrière selon qu'il opterait pour son maintien dans un grade de reclassement ou pour l'intégration dans un grade de reclassification ;

- cette différence de traitement illégale lui a causé un préjudice financier, de retraite et moral évalué à la somme de 55 000 euros ;

- postérieurement à son choix d'intégrer un grade de reclassification, il a été privé de toute promotion du fait de son activité syndicale ;

- le calcul de l'indemnité différentielle " reclassement-reclassification " qui lui a été attribuée est erroné, ce qui lui a causé un préjudice évalué à la somme de 23 890,80 euros ;

- il s'est vu supprimer illégalement l'autorisation de remisage à domicile de son véhicule du 12 mars 2013 au 16 février 2014, ce qui lui a causé un préjudice évalué à la somme de 3 238 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 juin 2020 et le 14 septembre 2020, la société Orange, représentée par l'AARPI De Guillenchmidt et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Orange soutient que :

- à titre principal, les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, le préjudice de carrière pour la période de 1993 à 2003 devra être évalué à de plus justes proportions ;

- la demande relative à l'indemnisation d'un préjudice du fait de la suppression de l'autorisation de remisage à domicile du véhicule professionnel de M. A... est irrecevable en l'absence de réclamation préalable.

Par une ordonnance du 16 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au

6 juillet 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 90-1225 du 31 décembre 1990 ;

- le décret n° 93-514 du 25 mars 1993 relatif aux dispositions statutaires applicables au corps des cadres supérieurs de La Poste et au corps des cadres supérieurs de France Télécom et les décrets du même jour : nos 93-513, 93-514, 93-515, 93-516, 93-517, 93-518 et 93-519 ;

- le décret n° 2004-1300 du 26 novembre 2004 relatif aux dispositions statutaires applicables à certains corps de fonctionnaires de France Télécom ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Renault,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me Dutard, substituant Me Heulin, représentant M. A... et, à titre exceptionnel, de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., fonctionnaire de l'Etat, agent des postes et télécommunications depuis le 18 novembre 1982, en qualité d'agent d'exploitation, puis, à la suite de sa réussite au concours, de conducteur de travaux ligne (CDTXL), à compter du 28 décembre 1987, a opté pour le maintien dans son corps d'origine dit de " reclassement " lors du changement de statut de son employeur, avant d'être promu, à compter de 2003, dans un corps de reclassification au niveau II.3, en tant que chargé d'affaires. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 15 mars 2019 en tant qu'il a limité à 3 000 euros la condamnation de la société Orange à l'indemniser des différents préjudices qu'il estime avoir subis du fait des fautes commises par cette dernière.

Sur la perte de chance sérieuse de bénéficier d'un avancement :

2. En ne permettant pas aux fonctionnaires demeurés dans les corps dits " de reclassement " de bénéficier de mesures de promotion interne dans le cadre de ces corps, avant comme après l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 1996 modifiant les dispositions précitées de l'article 29-1 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, la société Orange, venue aux droits de France Telecom, a commis une illégalité engageant la responsabilité de la société.

3. En premier lieu, il incombe à M. A... de prouver le caractère réel, direct et certain de son préjudice de carrière. Or, en l'absence de la production de tout élément d'évaluation ou qui aurait permis d'apprécier ses mérites particuliers en comparaison de ceux de fonctionnaires du même corps et du même grade, M. A... n'établit pas qu'il aurait été privé d'une chance sérieuse de bénéficier d'une promotion dès 1993, les circonstances qu'il a été nommé en 2003 au niveau II.3 de son corps de reclassification, qu'il a assuré le tutorat d'un agent en 2012 et des missions complexes exigeant des compétences élevées ne permettant pas, à elles seules, de le démontrer. Il n'est dès lors pas fondé à demander la réparation des préjudices de carrière et de retraite qu'il invoque à ce titre.

4. En second lieu, bien que M. A... ne démontre pas, ainsi qu'il a été dit au point précédent, qu'il a été privé d'une chance sérieuse de bénéficier d'une promotion, l'impossibilité de prétendre à un telle promotion, compte tenu de son investissement dans l'entreprise, lui a causé un préjudice moral dont il sera fait une juste appréciation en l'évaluant à 4 000 euros. Il résulte de ce qui précède que la somme que la société Orange a été condamnée à verser à M. A... en réparation de son préjudice moral doit être portée de 3 000 à 4 000 euros.

Sur la méconnaissance du principe d'égalité de traitement :

5. En premier lieu, M. A... soutient que la société Orange a commis une faute en offrant, postérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 26 novembre 2004 relatif aux dispositions statutaires applicables à certains corps de fonctionnaires de France Télécom, des possibilités de promotion différenciées entre fonctionnaires se trouvant dans la même situation, selon qu'ils avaient choisi d'être maintenus dans un corps " de reclassement " après l'entrée en vigueur du décret ou avaient choisi d'intégrer un corps de " reclassification ", en méconnaissance du principe d'égalité de traitement. Il fait valoir que trois fonctionnaires ayant intégré plus tard que lui le grade des CDTXL et ayant choisi comme lui, après 1993, d'être maintenus à ce grade dans un corps de reclassement, ont pu bénéficier en 2014 et 2015 de promotions au grade de chef de district (CDIS), à des indices supérieurs à celui dont il relevait en ayant intégré un corps de reclassification au niveau II-3, équivalent selon lui aux grades de chef de secteur (CSEC) et CDIS, alors que son choix d'intégrer en 2003 le niveau II-3 du corps de classification lui interdisait de bénéficier d'une telle promotion aux grades de CSEC et de CDIS. Il soutient, en outre, qu'il a été mis dans une situation d'inégalité, par rapport aux collègues s'étant maintenus dans le grade de reclassement CDTXL, dès lors que ces derniers ont pu bénéficier d'une simulation de l'évolution de leurs carrières selon qu'ils optaient pour leur maintien dans un corps de reclassement ou pour l'intégration dans un corps de reclassification, ce qui leur a permis de faire un choix éclairé, alors qu'il n'a pu lui-même bénéficier d'une telle simulation en 2003.

6. Le principe d'égalité de traitement des fonctionnaires n'est susceptible de s'appliquer, pour ce qui concerne le déroulement de leur carrière, qu'entre agents appartenant à un même corps. La circonstance que les fonctions exercées par les fonctionnaires relevant des grades CSEC et CDIS du corps de reclassement soient comparables à celles qui sont exercées par les fonctionnaires relevant du grade II-3 du corps de reclassification ne permet pas de considérer que ces agents appartiennent au même corps. Par suite, M. A... n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance du principe de l'égalité de traitement entre le corps d'agents dits " reclassifiés " auquel il appartient depuis 2003 et la situation d'autres agents appartenant toujours au corps des agents dits " reclassés ".

7. En second lieu, dès lors que n'étaient pas entrées en vigueur, à la date à laquelle M. A... a fait le choix d'intégrer le corps de reclassification au grade II-3, les dispositions du décret du 26 novembre 2004, et que les agents auxquels se compare M. A..., qui ont bénéficié d'une simulation de carrière selon qu'ils optaient pour le maintien dans un corps de reclassement ou l'intégration dans un corps de reclassification, n'avaient pas fait le choix de rejoindre, avant l'entrée en vigueur de ces dispositions, un corps de reclassification, ces derniers n'étaient pas placés dans une situation identique et l'intéressé n'est par suite pas fondé, à soutenir, sur ce second fondement, qu'a été méconnu le principe d'égalité de traitement.

8. Il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de faute de la société Orange démontrée par M. A..., les conclusions à fin d'indemnisation du préjudice né de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement doivent être rejetées.

Sur la discrimination alléguée :

9. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison [...] de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à [...] une race. ". Aux termes du premier alinéa de l'article 4 de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations : " Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. ".

10. De manière générale, il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes. S'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la mesure en cause repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si la mesure contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

11. M. A... soutient, pour la première fois en appel, qu'il n'a pu bénéficier d'aucune promotion interne dans un des grades du corps de reclassification qu'il avait rejoint en 2003, en raison de son activité syndicale, ce qui constitue une discrimination susceptible d'engager la responsabilité de la société Orange. Il fait valoir que les seuls dispositifs de promotion accessibles aux fonctionnaires dits " reclassifiés " consistaient en une voie de promotion nommée " aptitudes et potentiel " et une autre voie nommée " reconnaissance des compétences " et que des trois candidatures qu'il a faites aux niveaux de reclassement III-2 ou IV-1, aucune n'a été retenue. Au soutien de ce moyen, il se prévaut de la lettre que l'inspection du travail a adressé au directeur de l'unité d'intervention Rhône Durance de la société le 17 octobre 2011, lui demandant de mettre un terme aux entraves au droit syndical que pouvait constituer l'instruction donnée au destinataire d'un courriel, dont l'identité et la fonction au sein de l'entreprise ne sont pas connues, de " suivre de très près les heures de délégation de M. A... " ainsi que de la lettre de l'inspection du travail du 3 juin 2013 rappelant qu'a été entamée une procédure de danger grave imminent reposant sur " les circonstances estimées brutales et illicites, par les personnes concernées et le CHSCT, de la dénonciation de l'usage relatif à la possibilité de remisage à domicile " des véhicules de certains salariés. Il fait valoir, enfin, qu'il a été l'une des 129 parties civiles, dont il n'est ni établi ni allégué qu'elles appartenaient toutes à un syndicat ou détenaient un mandat syndical, à avoir obtenu du tribunal correctionnel de Paris, par jugement du

20 décembre 2019, une indemnisation pour le harcèlement moral institutionnalisé mis en œuvre par la direction de l'entreprise entre 2007 et 2010, dont il avait été personnellement et directement victime. Toutefois, ces circonstances, alors que M. A... a pu participer aux procédures de sélection aux postes auxquels il avait postulé et qu'il n'apporte pas d'éléments suffisants pour apprécier si ses candidatures présentaient des mérites tels qu'elles auraient dû être retenues, ne permettent pas de présumer qu'une discrimination aurait été perpétrée à son encontre, afin de lui interdire toute possibilité de promotion, en raison de son activité syndicale.

Sur l'indemnité différentielle " reclassement- reclassification " :

12. L'indemnité différentielle dite " reclassement-reclassification " a été mise en place par France Telecom, devenue société Orange, à compter du 1er janvier 1993, en application du point 2.2 de l'accord social sur le cadre général de la réforme des classifications du personnel des PTT du 9 juillet 1990. En vertu de cet accord, lorsque l'indice du grade de reclassement est plus favorable que l'indice du grade de classification, une indemnité différentielle, égale à la différence entre les montants bruts des indices réels, est versée. L'indemnité différentielle cesse d'être versée, dès que l'indice du grade de classification est au moins égal à l'indice que l'agent aurait eu dans son grade de reclassement.

13. La circonstance, au demeurant non établie, ainsi qu'il a été dit au point 3, que M. A... aurait dû être promu dans le grade des CDIS s'il avait pu bénéficier d'une promotion entre 1993 et 2003, ne permet pas de retenir que l'indemnité différentielle mentionnée au point précédent aurait été calculée de manière erronée dès lors que le grade de reclassement auquel appartenait M. A... avant d'intégrer le niveau II-3 de son corps de reclassification était bien le grade de CDTXL et non celui de CDIS et qu'en fixant pour l'intéressé l'indemnité différentielle correspondant à ces premières fonctions, la société n'a fait qu'appliquer les termes de l'accord.

14. Il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de faute de la société Orange démontrée par M. A..., les conclusions à fin d'indemnisation du préjudice né du calcul erroné de l'indemnité différentielle qui lui aurait été versée doivent être rejetées.

Sur la suppression de l'autorisation de remisage à domicile du véhicule de service :

15. M. A... demande l'indemnisation du préjudice qui a résulté pour lui, durant la période du 12 mars 2013 au 16 février 2014, de la décision par laquelle la société Orange a supprimé les autorisations de remisage à domicile des véhicules de cinq chargés d'affaires, dont il établit faire partie, à compter du 1er janvier 2013.

En ce qui concerne la fin de non-recevoir soulevée par la société Orange :

16. Il résulte de l'instruction que, dans sa réclamation préalable en date du

18 octobre 2016, dont la société a accusé réception le 19 octobre 2016, M. A... a expressément demandé à être indemnisé du préjudice né de la suppression de cette autorisation. La société Orange n'est par suite pas fondée à soutenir que M. A... n'avait pas fait une telle demande préalablement à l'introduction de son recours indemnitaire, en faisant valoir que les courriers adressés à la société antérieurement à cette réclamation préalable ne demandaient pas réparation d'un tel préjudice.

En ce qui concerne le bien-fondé de la demande :

17. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 18 novembre 2015, la cour de cassation a confirmé la suspension, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, de la décision mentionnée au point précédent. Il ressort des termes de cet arrêt, en date du 16 janvier 2014, que la suspension de la décision de la société Orange, du fait de son irrégularité, est motivée par la circonstance qu'il ne peut être mis fin à un droit accordé à un salarié par l'usage sans respecter un délai de prévenance des institutions représentatives du personnel et des salariés concernés suffisant pour permettre d'éventuelles négociations.

18. Si le juge administratif ne saurait conférer aux motifs d'un arrêt rendu par le juge judiciaire l'autorité de la chose jugée qui s'attache au seul dispositif, il peut tenir compte des motifs pour comprendre la portée de ce dernier. Or il résulte de ce qui a été exposé au point précédent que la suppression de l'autorisation de remisage à domicile du véhicule professionnel de M. A... constitue une faute de nature à lui causer un préjudice, susceptible d'engager la responsabilité de la société Orange.

19. Contrairement à ce que soutient la société Orange, M. A..., qui réside à 25 km de son lieu de travail, établit le lien direct et certain entre la suppression irrégulière de cette autorisation et son préjudice, qui s'élève à 3 238 euros, somme calculée sur la base du montant des indemnités kilométriques pour une distance hebdomadaire de cinq fois 50 km, pour

40 semaines durant une période de près d'une année. Il y a lieu, par suite, de condamner la société Orange à verser à M. A... une telle somme en réparation de son préjudice.

20. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de porter la somme que le tribunal administratif de Nîmes a condamné la société Orange à verser à M. A... à 7 238 euros, dont sera déduit, s'il a déjà été versé, le montant de 3 000 euros.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

21. Le présent arrêt n'implique aucune mesure particulière d'exécution au regard des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions du requérant aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées.

Sur les conclusions relatives aux frais d'instance :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par la société Orange. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de cette dernière la somme de 2 000 euros, à verser à M. A..., sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 3 000 euros que la société Orange a été condamnée à verser à M. A... par le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 5 mars 2019 est portée à 7 238 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 5 mars 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La société Orange versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. A... et les conclusions présentées par la société Orange au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la société Orange.

Délibéré après l'audience publique du 21 septembre 2021, où siégeaient :

' M. Badie, président,

' M. Revert, président assesseur,

' Mme Renault, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 octobre 2021.

5

N° 19MA01882


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01882
Date de la décision : 05/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-06-02 Fonctionnaires et agents publics. - Notation et avancement. - Avancement.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Thérèse RENAULT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL GOLDMANN ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-10-05;19ma01882 ?
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