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13/07/2021 | FRANCE | N°21MA00574

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 13 juillet 2021, 21MA00574


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... F... a demandé au tribunal administratif de Montpellier à titre principal, d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2018 par lequel la présidente de la région Occitanie l'a admise à la retraite pour inaptitude à compter du 1er janvier 2019 et l'a radiée des cadres à compter de cette date.

Par un jugement n° 1901527 du 11 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 27 décembre 2018 et a enjoint à la présidente de la région Occitanie de reconstituer jurid

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... F... a demandé au tribunal administratif de Montpellier à titre principal, d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2018 par lequel la présidente de la région Occitanie l'a admise à la retraite pour inaptitude à compter du 1er janvier 2019 et l'a radiée des cadres à compter de cette date.

Par un jugement n° 1901527 du 11 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 27 décembre 2018 et a enjoint à la présidente de la région Occitanie de reconstituer juridiquement sa carrière à compter de son éviction illégale et d'examiner la possibilité actuelle de sa réintégration effective dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 février et 8 juin 2021, la région Occitanie, représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 11 décembre 2020 ;

2°) de rejeter la demande de Mme F... devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de Mme F... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 avait été méconnu ;

- les autres moyens soulevés par Mme F... devant le tribunal ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2021, Mme F..., représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la région Occitanie d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par la région Occitanie ne sont pas fondés.

Un mémoire enregistré le 23 juin 2021 présenté pour Mme F... n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant la région Occitanie, et de Me E..., représentant Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. La région Occitanie fait appel du jugement du 11 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, annulé l'arrêté du 27 décembre 2018 de sa présidente admettant à la retraite pour invalidité, à sa demande, Mme F..., agent polyvalent de gestion administrative et financière, à compter du 1er janvier 2019, et prononçant sa radiation des cadres, et a, d'autre part, enjoint à la présidente de la région Occitanie de reconstituer juridiquement sa carrière à compter de son éviction illégale et d'examiner la possibilité actuelle de sa réintégration effective dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Pour annuler l'arrêté du 27 décembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a estimé que celui-ci avait été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière.

3. Aux termes de cet article : " " Le secrétariat de la commission informe le médecin du service de médecine professionnelle et préventive, pour la fonction publique territoriale, (...), compétent à l'égard du service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission. (...) Ces médecins peuvent obtenir, s'ils le demandent, communication du dossier de l'intéressé. Ils peuvent présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion de la commission. (...)". Selon l'article 108-2 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les services des collectivités et des établissements mentionnés à l'article 2 doivent disposer d'un service de médecine préventive, soit en créant leur propre service, soit en adhérant aux services de santé au travail interentreprises ou assimilés, à un service commun à plusieurs collectivités ou au service créé par le centre de gestion. (...) Le service est consulté par l'autorité territoriale sur les mesures de nature à améliorer l'hygiène générale des locaux, la prévention des accidents et des maladies professionnelles et l'éducation sanitaire. Le service de médecine préventive a pour mission d'éviter toute altération de l'état de santé des agents du fait de leur travail, notamment en surveillant les conditions d'hygiène du travail, les risques de contagion et l'état de santé des agents (...)". Par ailleurs, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé l'intéressé d'une garantie.

4. Il est constant que le médecin du service de médecine professionnelle et préventive de la région Occitanie n'a pas été informé de la tenue de la réunion du 9 mars 2018 de la commission de réforme au cours de laquelle elle a émis un avis favorable sur la mise à la retraite pour invalidité de Mme F... et qu'il n'a ni présenté des observations devant la commission ni assisté à la séance. Si les missions de ce médecin, notamment rappelées à l'article 108-2 précité de la loi du 26 janvier 1984, ne se confondent pas avec celles du médecin agréé dont le rapport a été communiqué à la commission de réforme, toutefois, il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme était saisi d'avis qu'elle a regardé comme convergents émanant tant du médecin agréé consulté que du médecin traitant de Mme F..., que le comité médical précédemment consulté sur l'ultime prolongation de son congé de longue maladie avait émis un avis favorable en précisant que cette dernière prolongation serait suivie de sa mise à la retraite pour invalidité, étant précisé que cette mise à la retraite était alors sollicitée par l'intéressée elle-même, sans que la commission de réforme ne dispose d'aucun élément permettant de mettre en doute le caractère libre et éclairé de cette demande. Dans ces conditions, l'absence d'information du médecin de prévention n'a, en l'espèce, ni privé l'intéressée d'une garantie, ni été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise. Dès lors, la région Occitanie est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les dispositions de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 avaient été méconnues.

5. Toutefois, il y a lieu pour la Cour, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme F... tant en première instance qu'en appel.

6. En premier lieu, il résulte des articles 3 et 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière que, dans les cas où il est manifeste, au vu des éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste doit être regardée comme privant l'intéressé d'une garantie et comme entachant la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée.

7. En l'espèce, pour les motifs exposés au point 4, l'absence d'un médecin spécialiste de la pathologie de l'intéressée lors de la séance du 9 mars 2018 n'est pas de nature à avoir privé Mme F... d'une garantie qui aurait entaché la procédure suivie devant la commission ni à avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise.

8. En second lieu, aux termes du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales: " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande ". L'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 dispose que : " Le fonctionnaire territorial reconnu, par suite d'altération de son état de santé, inapte à l'exercice de ses fonctions peut être reclassé dans un emploi d'un autre cadre d'emplois ou d'un autre corps ou dans un autre emploi, en priorité dans son administration d'origine ou à défaut dans toute autre administration ou établissement public (...) s'il a été déclaré en mesure de remplir les fonctions correspondantes ".

9. Si, conformément aux deux avis concordants émis par le comité médical le 21 avril 2017 et par la commission de réforme le 9 mars 2018 pour prendre l'arrêté en litige et d'un rapport médical établi par le docteur Legouffe certifiant que Mme F... est inapte définitivement à exercer toutes fonctions, la présidente de la région Occitanie a, aux termes de la décision attaquée, admis cette dernière à faire valoir ses droits à la retraite, il ressort du rapport de ce même médecin agréé destiné à la commission de réforme du 10 octobre 2017 qu'il avait alors constaté que Mme F... souffre de douleurs invalidantes du rachis cervical, dorsal et lombaire et avait seulement indiqué " station assise et station débout prolongée impossible " et " inaptitude définitive à son poste ". La requérante soutient, pour sa part, qu'elle est en mesure d'exercer une activité professionnelle, à la condition de ne pas rester en position statique de manière prolongée. Dans ces conditions, l'état du dossier ne permet pas à la cour d'apprécier l'étendue de l'inaptitude physique de Mme F.... Dès lors, il y a lieu, d'ordonner avant dire droit une expertise aux fins précisées ci-après et de réserver, jusqu'en fin d'instance, les droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt.

D É C I D E :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête susvisée, procédé par un expert désigné par la présidente de la Cour, à une expertise médicale avec pour mission de :

1°) se faire communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de Mme F... et notamment les différents rapports d'expertise déjà réalisés et les documents qui ont pu être établis à l'occasion de la saisine des instances qui ont eu à se prononcer sur le cas de cet agent ; convoquer et entendre les parties et tous sachants ; procéder à l'examen sur pièces de son dossier médical ;

2°) décrire l'état pathologique de Mme F... et indiquer le déficit fonctionnel permanent partiel dont elle est atteinte ; préciser si son état est susceptible d'évolution ;

3°) déterminer si Mme F... est apte à exercer les fonctions d'un agent administratif et préciser, le cas échéant, la nature des fonctions qu'elle serait apte à exercer et à quels aménagements de ses conditions de travail, la reprise d'une activité professionnelle devrait être subordonnée.

Article 2 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la cour. L'expert déposera son rapport au greffe de la cour en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par la présidente de la cour dans sa décision le désignant.

Article 3 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent jugement, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la région Occitanie et à Mme B... F....

Délibéré après l'audience du 29 juin 2021, où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,

- Mme A..., présidente assesseure,

- Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2021.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00574
Date de la décision : 13/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-02 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite sur demande.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: Mme Frédérique SIMON
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELASU FAURENS AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-07-13;21ma00574 ?
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