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05/07/2021 | FRANCE | N°21MA00928

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 05 juillet 2021, 21MA00928


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une décision n° 437527 du 3 mars 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt n° 18MA03754 de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 novembre 2019 et renvoyé l'affaire devant cette même cour.

Procédure devant la cour :

Par un mémoire récapitulatif, enregistré le 29 mars 2021, la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales, la mutualité sociale agricole Grand Sud et le régime social des indépendants du Languedoc-Roussillon, représent

es par la SCP Cauvin Leygue, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 juin 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une décision n° 437527 du 3 mars 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt n° 18MA03754 de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 novembre 2019 et renvoyé l'affaire devant cette même cour.

Procédure devant la cour :

Par un mémoire récapitulatif, enregistré le 29 mars 2021, la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales, la mutualité sociale agricole Grand Sud et le régime social des indépendants du Languedoc-Roussillon, représentées par la SCP Cauvin Leygue, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 20 mars 2017 prononçant à l'encontre de l'EURL Eric B... Ambulances VSL Perpignan sa mise hors convention nationale des transporteurs sanitaires pour une durée de trois ans à compter du 28 avril 2017 ;

2°) de condamner reconventionnellement l'EURL Eric B... Ambulances VSL Perpignan à leur verser la somme de 10 000 euros chacune pour procédure abusive ;

3°) de mettre à sa charge les dépens, ainsi que la somme de 9 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la présence et l'intervention d'agents des organismes d'assurance maladie lors de la séance de la commission départementale de concertation des transporteurs sanitaires n'ont pas vicié la procédure d'adoption de la décision contestée ;

- l'existence d'une procédure pénale antérieure suffit pour caractériser le caractère abusif du recours formé à l'encontre de la décision de mise hors convention ;

- la société a en outre cherché par fraude à faire obstruction à l'exécution de la décision de mise hors convention, qui présente le caractère d'une décision de justice ;

- les autres moyens soulevés par l'EURL B... Ambulances VSL Perpignan ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense récapitulatif, enregistré le 19 avril 2021, l'EURL B... Ambulances VSL Perpignan, représentée par la SCP Nicolau-Malavialle-Gadel-Capsie, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête présentée par la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales et autres ;

2°) de mettre à leur charge la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'action conventionnelle des caisses de sécurité sociale était prescrite en application de l'article 2224 du code civil ;

- le grief relatif à la prise en charge d'assurés sociaux au moyen de véhicules sanitaires légers au lieu d'ambulances n'est pas établi ;

- l'indication erronée de personnel absent ne concerne que six cas pour 20 000 transports effectués par an ;

- le juge pénal n'a pas retenu la réalité des griefs relatifs au transport d'assurés sociaux dans des véhicules non agréés par l'agence régionale de santé ;

- les signatures contrefaites d'assurés sociaux sur les imprimés établis après transport n'étaient en réalité pas nécessaires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code pénal ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales, la mutualité sociale agricole Grand Sud et le régime social des indépendants du Languedoc-Roussillon font appel du jugement du 12 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé leur décision du 20 mars 2017 prononçant à l'encontre de l'EURL B... Ambulances VSL Perpignan une sanction de mise hors convention de la convention nationale des transporteurs sanitaires privés prévue à l'article L. 322-5-2 du code de la sécurité sociale pour une durée de trois ans.

Sur le bien-fondé du moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Par la décision n° 437527 du 3 mars 2021 susvisée, le Conseil d'Etat a jugé que la simple présence des agents de la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales et l'intervention de l'un d'entre eux lors de la réunion de la commission départementale de concertation prévue à l'article 24 de la convention nationale des transporteurs sanitaires privés n'avait pas vicié la procédure d'adoption de la décision contestée. Compte tenu de l'autorité de la chose jugée qui s'attache à la décision du juge de cassation, c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a retenu ce moyen pour annuler cette décision.

3. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'EURL B... Ambulances VSL Perpignan dans son mémoire récapitulatif.

Sur les autres moyens :

4. La mise en oeuvre, par les organismes d'assurance maladie compétents, de la procédure de mise hors convention prévue aux articles 17 et 18 de la convention nationale des transporteurs sanitaires privés, ne résulte pas d'une action personnelle ou mobilière introduite par le titulaire d'un droit, mais de l'exercice d'une compétence relevant de prérogatives de puissance publique. L'EURL B... Ambulances VSL Perpignan ne peut donc utilement invoquer la prescription quinquennale prévue à l'article 2224 du code civil.

5. La décision contestée se fonde sur le fait que son gérant a fait l'objet d'une condamnation pénale définitive par un arrêt du 15 janvier 2015 rendu par la cour d'appel de Montpellier pour avoir, entre le 1er janvier 2010 et le 25 février 2011, facturé des transports d'assurés sociaux effectués au moyen de véhicules sanitaires légers alors que les prescriptions médicales étaient établies pour un transport en ambulance, indiqué faussement la présence de personnels en réalité absents lors des transports, avoir effectué des transports au moyen d'un véhicule personnel, avoir effectué des transports au moyen d'un véhicule de type " LOTI " non agréé par l'agence régionale de santé pour le transport sanitaire, et avoir fait apposer par son épouse la signature contrefaite des assurés transportés sur les factures de transport.

6. L'arrêt du 15 janvier 2015 de la cour d'appel de Montpellier condamne M. B... à huit mois d'emprisonnement pour escroquerie dans le cadre d'un système frauduleux fondé sur le transport en véhicule sanitaire léger de patients pour lesquels le transport en ambulance était médicalement prescrit. Il a en outre condamné son épouse pour faux et usage de faux. En revanche, la cour d'appel, après avoir prononcé la nullité de la citation en raison de son imprécision sur les faits reprochés, a expressément relaxé M. B... des infractions relatives au transport d'assurés sociaux au moyen de véhicules n'ayant pas été soumis au contrôle de l'agence régionale de santé, d'une part, et au transport sanitaire terrestre par des équipages dont la composition est non conforme, d'autre part, au motif que les faits visés étaient trop imprécis pour permettre d'en apprécier la réalité. En outre, les motifs de fait retenus par la cour d'appel à l'appui des qualifications d'escroquerie, de faux et usage de faux ne prennent partie ni sur la transmission de fausses déclarations aux caisses d'assurance maladie concernant la composition des équipages, ni sur l'absence d'agrément des véhicules de transport par l'agence régionale de santé. Ainsi, trois des cinq griefs retenus par les organismes d'assurance maladie, qui ont seulement entendu se fonder sur l'autorité de la chose jugée par la cour d'appel de Montpellier, prêtent à l'arrêt du 15 janvier 2015 une portée qu'il n'a pas, et sont donc matériellement inexacts.

7. En outre, si l'épouse de M. B... a contrefait la signature d'assurés sociaux et a été condamnée à ce titre, les représentants des requérantes ont reconnu devant les juridictions pénales que ces signatures n'étaient en réalité pas nécessaires au remboursement des prestations. Il n'est pas contesté que ces agissements constituaient un expédient face à l'incohérence du système de facturation mis en place par les organismes d'assurance maladie, qui émettaient en fin de mois, après transport, des imprimés comportant une rubrique destinée à la signature de l'assuré transporté.

8. Toutefois, les faits d'escroquerie pour lesquels M. B... a été condamné, concomitamment avec l'infraction de faux et d'usage de faux, sont suffisamment graves par eux-mêmes pour justifier une mise hors convention de la société pour une durée de trois ans. Dès lors, il résulte de l'instruction que les caisses d'assurance maladie auraient pris la même décision si elles s'étaient uniquement fondées sur ces deux griefs.

9. Il résulte de ce qui précède que les caisses requérantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé leur décision du 20 mars 2017. La demande présentée par l'EURL B... Ambulances VSL Perpignan devant le tribunal doit en conséquence être rejetée.

Sur les conclusions accessoires :

10. Contrairement à ce que soutiennent les caisses d'assurance maladie, la circonstance qu'une décision administrative soit fondée sur une procédure pénale antérieure ne conduit pas à considérer que le recours pour excès de pouvoir formé à son encontre serait nécessairement abusif. En outre, la mise hors convention d'un transporteur sanitaire par trois caisses d'assurance maladie n'est pas, contrairement à ce qu'elles affirment, une " décision de justice " que la société sanctionnée aurait chercher à frauder. La demande d'agrément au profit d'une nouvelle société auprès de l'agence régionale de santé est sans rapport avec le caractère abusif du présent recours. Le demande de l'EURL B... Ambulances VSL Perpignan ne revêt pas un tel caractère. Les conclusions reconventionnelles des trois caisses doivent donc être rejetées.

11. Aucuns dépens n'ont été exposés dans le cadre de la présente instance, contrairement à ce que soutiennent les requérantes. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 12 juin 2018 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'EURL Eric B... Ambulances VSL Perpignan devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales, à la mutualité sociale agricole Occitanie, au régime social des indépendants du Languedoc-Roussillon, et à l'EURL Eric B... Ambulances VSL Perpignan.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2021, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2021.

2

No 21MA00928


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00928
Date de la décision : 05/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-01-02 Santé publique. Protection générale de la santé publique. Transports sanitaires.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS CAUVIN - LEYGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-07-05;21ma00928 ?
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