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29/06/2021 | FRANCE | N°19MA03009

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 29 juin 2021, 19MA03009


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 21 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de Lézignan-Corbières a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1800759 du 11 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 3 juillet 2019 et le 1er avril 2020, M. B..., représenté par la SELARL Magrini Avocats,

demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 11 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 21 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de Lézignan-Corbières a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1800759 du 11 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 3 juillet 2019 et le 1er avril 2020, M. B..., représenté par la SELARL Magrini Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 11 juin 2019 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Lézignan-Corbières du 21 décembre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lézignan-Corbières la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que :

- il justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- le jugement attaqué est irrégulier et a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire dès lors que le tribunal n'a pas répondu aux nouveaux moyens, ou à tout le moins aux nouvelles branches de moyens, invoqués dans son mémoire enregistré le 22 mai 2019 ;

- le tribunal n'a pas répondu à la seconde branche de son moyen tiré du non-respect de l'exigence de cohérence entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme, ainsi que de la contradiction existant entre ces documents, et a insuffisamment motivé sa réponse à la première branche de ce moyen ;

- le tribunal a écarté à tort comme inopérant son moyen tiré du défaut de caractère exécutoire de la délibération prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé à son point 25 ;

- le jugement attaqué est entaché de plusieurs erreurs de droit, ainsi que de dénaturations des faits.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 janvier 2020, la commune de Lézignan-Corbières, représentée par la SCP CGCB et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le requérant ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

Par une lettre du 5 mai 2021, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de mettre en oeuvre la procédure prévue par l'article L. 6009 du code de l'urbanisme et invitées à présenter leurs observations sur ce point.

Un mémoire en observations présenté pour M. B... a été enregistré le 12 mai 2021.

Un mémoire en observations présenté pour la commune de Lézignan-Corbières a été enregistré le 28 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 21 décembre 2017, le conseil municipal de Lézignan-Corbières a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. M. B... relève appel du jugement du 11 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.

Sur la recevabilité de la requête :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est propriétaire de plusieurs parcelles situées sur le territoire de la commune de Lézignan-Corbières. Il justifie ainsi d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de la délibération contestée approuvant le plan local d'urbanisme de cette commune. Par suite, et sans qu'ait à cet égard une quelconque incidence la circonstance que l'intéressé ait vendu, postérieurement à cette délibération, certaines des parcelles dont il était propriétaire, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Lézignan-Corbières doit être écartée.

Sur la régularité du jugement :

3. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir appelé l'affaire à une première audience qui s'est tenue le 23 avril 2019, le tribunal administratif de Montpellier a, le 29 avril suivant, informé les parties de son renvoi à l'audience du 28 mai 2019 et leur a précisé que, en l'absence d'une ordonnance fixant la clôture de l'instruction de cette affaire, l'instruction serait close trois jours francs avant cette dernière date. Par un mémoire enregistré le 22 mai 2019 au greffe du tribunal administratif de Montpellier, soit antérieurement à la clôture de l'instruction intervenue trois jours francs avant l'audience publique du 28 mai suivant en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, M. B... a notamment invoqué le moyen tiré du caractère insuffisant de la note explicative de synthèse au regard des exigences de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales. Les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen qui était opérant et qu'ils n'ont d'ailleurs pas visé. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens d'irrégularité invoqués, M. B... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

4. Il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier.

Sur la légalité de la délibération contestée :

En ce qui concerne les mesures de publicité :

5. En premier lieu, l'article R. 12324 du code de l'urbanisme alors en vigueur énonce que la délibération qui prescrit l'élaboration ou la révision du plan local d'urbanisme et définit les modalités de la concertation fait l'objet des mesures de publicité et d'information édictées à l'article R. 12325, lequel prévoit un affichage pendant un mois en mairie et l'insertion d'une mention de cet affichage, en caractères apparents, dans un journal diffusé dans le département. Ces mêmes dispositions, aujourd'hui codifiées aux articles R. 15320 et R. 15321, soumettent le caractère exécutoire de la délibération à l'exécution de ces formalités.

6. L'absence de caractère exécutoire de la délibération du conseil municipal prescrivant l'élaboration ou la révision du plan local d'urbanisme et précisant les modalités de concertation ne remet pas en cause l'existence juridique de cet acte, ni ne fait obstacle à ce que son annulation soit recherchée devant le juge de l'excès de pouvoir. Elle ne s'oppose pas davantage à ce que soit utilement invoqué, à l'encontre de la délibération approuvant le plan local d'urbanisme, tout moyen relatif à la régularité du déroulement de la concertation au regard des modalités définies par la délibération en prescrivant l'élaboration ou la révision. Par suite, le moyen tiré de ce que la délibération du 16 novembre 2005 prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières ne serait pas devenue exécutoire ne peut, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoqué à l'encontre de la délibération litigieuse approuvant ce document d'urbanisme. Il en va de même du moyen analogue dirigé contre la délibération du 30 mai 2016, laquelle se borne à préciser l'un des objectifs fixés dans la délibération du 16 novembre 2005.

7. En deuxième lieu, l'absence de caractère exécutoire de la délibération arrêtant un projet de plan local d'urbanisme ne remet pas en cause l'existence juridique de cet acte et ne fait pas obstacle à ce que son annulation soit recherchée devant le juge de l'excès de pouvoir. Il suit de là que le moyen tiré de ce que la délibération du 22 mars 2017 arrêtant le projet de plan local d'urbanisme ne serait pas devenue exécutoire, faute d'avoir été affichée en mairie pendant un mois ainsi que le prévoit l'article R. 153-3 du code de l'urbanisme, ne peut, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoqué à l'encontre de la délibération litigieuse approuvant ce document d'urbanisme.

8. En troisième lieu, il ressort du certificat d'affichage produit par la commune de Lézignan-Corbières que l'arrêté de son maire du 1er août 2017 prescrivant l'ouverture de l'enquête publique relative notamment au plan local d'urbanisme a fait l'objet d'un avis d'enquête publique qui a été affiché en plusieurs lieux de la commune et publié sur le site internet communal. Dans ces conditions, et alors au demeurant que M. B... n'invoque la méconnaissance d'aucune disposition du code de l'environnement, le moyen imprécis tiré de ce que cet arrêté du 1er août 2017 n'aurait pas fait l'objet des mesures de publicité requises ne saurait, en tout état de cause, être accueilli.

9. En quatrième et dernier lieu, à la supposer même établie, la circonstance que la délibération litigieuse du 21 décembre 2017 approuvant le plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières n'aurait pas fait l'objet des mesures de publicité requises demeure sans incidence sur sa légalité.

En ce qui concerne les convocations des élus :

10. En premier lieu, le moyen tiré de l'irrégularité de la convocation des élus à la séance du conseil municipal du 16 novembre 2005 n'est assorti d'aucun commencement de justification. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que la délibération du 16 novembre 2005 prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme de Lézignan Corbières était entrée en vigueur depuis plus de six mois à la date à laquelle M. B... a invoqué, à l'appui de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Montpellier, l'irrégularité, au regard des dispositions alors en vigueur des articles L. 212110 et L. 212112 du code général des collectivités territoriales, de la convocation des conseillers municipaux à la séance du conseil municipal au cours de laquelle cette délibération a été adoptée, de sorte qu'aucune illégalité tirée d'un vice de forme ou de procédure ne peut plus être soulevée à son encontre en application des dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que les conseillers municipaux n'auraient pas été convoqués au moins cinq jours francs avant la séance du 16 novembre 2005 et de ce qu'aucune note explicative de synthèse ne leur aurait été adressée à cette occasion, ne peuvent qu'être écartés.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors en vigueur : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée ". L'article L. 2121-12 du même code dispose que : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) / Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs (...) ". Le défaut d'envoi, avec la convocation aux réunions du conseil municipal d'une commune de 3 500 habitants et plus, de la note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour prévue à l'article L. 212112 du code général des collectivités territoriales entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés une justification détaillée du bienfondé des propositions qui leur sont soumises.

12. Il ressort des mentions de la délibération du 30 mai 2016, complétant celle du 16 novembre 2005 ainsi qu'il a été dit, que les conseillers municipaux ont été convoqués plus de cinq jours francs avant la séance au cours de laquelle cette délibération a été adoptée. En l'absence de tout élément de nature à contredire ces mentions qui font foi jusqu'à preuve du contraire, M. B..., qui n'établit pas que les élus n'auraient pas reçu, en même temps que leur convocation à la séance du 30 mai 2016, une information adéquate leur permettant d'exercer utilement leur mandat, n'est pas fondé à soutenir que cette délibération, qui se borne à préciser l'un des objectifs poursuivis par la révision du plan d'occupation des sols sous la forme d'un plan local d'urbanisme, serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions citées ci-dessus du code général des collectivités territoriales.

13. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en dépit de la mesure d'instruction diligentée sur ce point, que les membres du conseil municipal de Lézignan-Corbières auraient été régulièrement convoqués au moins cinq jours francs avant la séance du 22 mars 2017 au cours de laquelle la délibération arrêtant le projet de plan local d'urbanisme de la commune a été adoptée, ni qu'une note explicative de synthèse, ou des documents leur permettant de disposer d'une information adéquate, leur aurait été adressée. Dans les circonstances de l'espèce, ces vices tenant au non-respect des exigences de l'article L. 212112 du code général des collectivités territoriales sont susceptibles d'avoir exercé une influence sur le sens de la délibération approuvant le plan local d'urbanisme en litige. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que la délibération litigieuse a été approuvée à l'issue d'une procédure irrégulière.

14. En quatrième et dernier lieu, M. B... invoque l'irrégularité de la convocation des membres du conseil municipal de Lézignan-Corbières à la séance du 21 décembre 2017 au cours de laquelle a été adoptée la délibération litigieuse approuvant le plan local d'urbanisme en litige.

15. D'une part, la convocation à la séance du conseil municipal de Lézignan-Corbières du 21 décembre 2017 a été adressée aux membres de cette assemblée délibérante par un courrier électronique émis le 15 décembre 2017. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de ce courrier électronique ainsi que des attestations établies par plus des deux tiers des élus concernés, dont aucun élément avancé par M. B... ne permet de remettre en cause l'authenticité, que la convocation dématérialisée à cette séance comportait son ordre du jour ainsi qu'un lien permettant aux intéressés de télécharger la note de synthèse relative à chacune des affaires, notamment celle concernant l'approbation du plan local d'urbanisme de la commune. A cet égard, M. B... ne fait état d'aucun élément précis et circonstancié de nature à établir que, contrairement à ce qu'indique le maire de Lézignan-Corbières dans son attestation établie le 26 avril 2019, ce lien de téléchargement n'aurait pas permis aux élus de consulter les documents mis à leur disposition antérieurement à la séance du 21 décembre 2017. Si la commune de Lézignan-Corbières n'établit pas que l'ensemble des conseillers municipaux ont donné leur accord pour recevoir les convocations par voie dématérialisée, elle produit néanmoins les attestations d'adhésion à un tel procédé établies par plus des deux tiers des conseillers municipaux à la suite de l'adoption de la délibération du 6 juillet 2017 relative à l'envoi dématérialisé des convocations aux séances du conseil municipal. Il ressort des pièces du dossier que les élus étaient présents ou représentés lors de la séance du 21 décembre 2017, à l'exception de six d'entre eux, dont cinq figurent parmi les conseillers municipaux ayant attesté avoir reçu la convocation dématérialisée le 15 décembre 2017. En outre, la circonstance alléguée que le courrier électronique évoqué ci-dessus émane du secrétariat général de la mairie n'est pas de nature à établir que la convocation en cause n'aurait pas été faite par le maire au sens et pour l'application de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales. Les mesures de publicité prévues par ces dispositions pour la convocation du conseil municipal n'étant pas prescrites à peine de nullité des délibérations, M. B... ne peut utilement soutenir que la convocation à la séance du conseil municipal du 21 décembre 2017 n'aurait pas été mentionnée au registre des délibérations, ni affichée ou publiée. Dans ces conditions, au vu tant des mentions de la délibération attaquée qui fait état d'une convocation effectuée le 15 décembre 2017 que de l'ensemble des pièces produites par la commune, le moyen tiré de l'irrégularité de cette convocation au regard des exigences des dispositions citées ci-dessus des articles L. 212110 et L. 212112 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.

16. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la note de synthèse relative au plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières adressée aux élus rappelle les deux orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables de ce plan et comporte notamment, en annexe, la liste des changements apportés à la suite de l'enquête publique pour tenir compte des avis des personnes publiques associées, des observations du public ainsi que des recommandations du commissaire enquêteur. Dans ces conditions, le moyen tiré du caractère insuffisant de la note explicative de synthèse au regard des exigences de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ne saurait être accueilli.

En ce qui concerne l'enquête publique :

17. Aux termes de l'article R. 12319 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " Le commissaire enquêteur (...) établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contrepropositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur (...) consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet (...) ". Si ces dispositions n'imposent pas au commissaire enquêteur de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent à indiquer, en livrant ses conclusions, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

18. Il ressort des pièces du dossier que le commissaire enquêteur a examiné, dans son rapport, les observations du public, notamment celles de M. B... concernant le classement de l'unité foncière dont il est propriétaire en zone AUCe du plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières. La circonstance que, dans sa réponse aux observations présentées par M. B..., le commissaire enquêteur n'ait pas, à l'instar du maire, tenu compte des nouvelles références cadastrales des parcelles incluses dans l'unité foncière de l'intéressé, laquelle a fait l'objet d'une modification parcellaire au cours de l'année 2016, ne saurait révéler une quelconque carence du commissaire enquêteur ni une absence d'expression par ce dernier d'une position personnelle, alors, au demeurant, que ce dernier n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des observations formulées au cours de l'enquête. Par ailleurs, le commissaire enquêteur a suffisamment indiqué, dans ses conclusions, les raisons qui déterminent le sens de son avis favorable au projet de plan, qu'il a assorti de deux recommandations. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 12319 du code de l'environnement doit être écarté.

En ce qui concerne la zone AUCe :

19. M. B... conteste l'institution, par le plan local d'urbanisme en litige, de la zone à urbaniser AUCe au lieu-dit " Roumenguière ", zone destinée à accueillir des équipements publics ou d'intérêt collectif, dans laquelle sont notamment incluses plusieurs parcelles dont il est propriétaire.

20. En premier lieu, à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceuxci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

21. D'une part, le projet d'aménagement et de développement durables du schéma de cohérence territoriale de la région lézignanaise fixe notamment un objectif visant à " favoriser le renouvellement urbain dans les centres de ville, bourgs et village " et évoque à ce titre " la revitalisation (et) la valorisation de l'habitat, des espaces et équipements publics et du stationnement ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que les auteurs de ce schéma de cohérence territoriale auraient, en énonçant cet objectif de renouvellement urbain, entendu interdire l'implantation des équipements publics en dehors des centres des villes, bourgs et villages. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le plan local d'urbanisme en litige, en tant qu'il institue, en dehors du centre de la commune de Lézignan-Corbières, la zone AUCe destinée à accueillir des équipements publics ou d'intérêt collectif, serait incompatible avec l'objectif ainsi énoncé par le projet d'aménagement et de développement durables du schéma de cohérence territoriale de la région lézignanaise.

22. D'autre part, M. B... soutient que la création, par le plan local d'urbanisme en litige, de la zone AUCe, dédiée aux équipements publics ou d'intérêt collectif, n'est pas compatible avec les objectifs de création de logements fixés par le projet d'aménagement et de développement durables du schéma de cohérence territoriale de la région lézignanaise, lequel évalue notamment, au point 2-5 de son objectif n° 2, le besoin en logements à l'horizon 2020 à environ 6 900 nouveaux logements. S'il relève en particulier que la zone AUCe est située à proximité d'une zone urbaine UC et d'une zone à urbaniser AUCh à vocation d'habitat, le requérant ne fait toutefois état d'aucun élément de nature à établir l'incompatibilité alléguée entre l'institution de la seule zone AUCe et les objectifs de création de logements fixés, à l'échelle du territoire qu'il couvre, par ce schéma de cohérence territoriale.

23. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 1518 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 1011 à L. 1013 ".

24. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

25. D'une part, l'orientation n° 1 du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières comporte un objectif 1.1, intitulé " Equilibrer les fonctions urbaines et la préservation de l'environnement ", dont l'" action 3 " fixe notamment " les objectifs de consommation d'espace pour les équipements et services publics à environ 7,5 hectares, soit un objectif de modération consistant à réduire d'environ 69 % la consommation observée sur les dix dernières années ". Cette même orientation n° 1 comprend également un objectif 1.2, intitulé " Répondre aux besoins de la population lézignanaise et aux besoins de la " ville-centre " de la communauté de communes ". L'" action 1 " attachée à cet objectif prévoit de " poursuivre la politique de développement des services à la population et des équipements publics (pôle éducatif, équipements et services à la population, etc.) ".

26. Il ressort des pièces du dossier que la création de la zone AUCe, d'une superficie de 8,75 hectares et dont une partie de près de 0,9 hectare est d'ores et déjà bâtie, s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre de l'objectif, énoncé dans le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières, visant à poursuivre la politique de développement des services à la population et des équipements publics. La seule circonstance que la superficie de cette zone, destinée à accueillir des équipements publics ainsi que des équipements d'intérêt collectif, dépasse légèrement l'objectif approximatif de modération de la consommation des espaces dédiés aux " équipements et services publics " rappelé au point précédent ne saurait suffire, eu égard à ce qui a été dit au point 24, à établir une incohérence entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme en litige en ce qui concerne la zone AUCe. En outre, l'allégation selon laquelle la création de la zone AUCe serait contraire à l'objectif, évoqué au point précédent, consistant en la réduction d'environ 69 % de la consommation d'espace observée sur les dix dernières années n'est pas assortie de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

27. D'autre part, l'objectif 1.1 de l'orientation n° 1 du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières présente, dans son " action 2 " qui vise à " poursuivre le développement résidentiel et celui des fonctions qui l'accompagnent ", le scénario démographique retenu ainsi que les besoins en logements en découlant. Le besoin en logements supplémentaires au cours de la période 2017-2027 y est évalué à " environ 1 252 à 1 445 logements ".

28. M. B..., qui se borne pour l'essentiel à soutenir qu'il aurait été plus opportun de dédier la zone AUCe en litige à l'habitat, afin de respecter les objectifs de création de logements fixés de façon approximative dans le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme, ne soumet à la cour aucun élément probant de nature à établir une incohérence entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables.

29. En troisième lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées aux points 26 et 28, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le classement de la zone AUCe auquel procède le plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières serait en contradiction avec le projet d'aménagement et de développement durables de ce plan.

30. En quatrième lieu, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

31. Aux termes de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce en vertu du VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 visé ci-dessus, dont les dispositions sont aujourd'hui reprises en substance à l'article R. 151-20 du même code : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement définissent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone. Les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement (...) ".

32. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles de M. B..., qui étaient dépourvues de construction à la date de la délibération attaquée, forment un tènement inclus dans la zone AUCe du plan local d'urbanisme en litige, zone à urbaniser destinée à accueillir des équipements publics ou d'intérêt collectif. Ce tènement est bordé, au nord et à l'ouest, par une vaste zone UC et, au sud, par une zone AUCh à vocation principale d'habitat. M. B... ne saurait utilement soutenir que les parcelles en cause, situées au lieu-dit " Roumenguière ", auraient dû être classées en zone U, voire en zone AUCh, dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur l'opportunité du classement retenu par les auteurs d'un document local d'urbanisme. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Lézignan-Corbières avait déjà décidé, à la date d'approbation du plan local d'urbanisme en litige, d'implanter des équipements publics ou d'intérêt collectif précisément identifiés sur les parcelles de M. B.... Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la commune aurait entendu créer une réserve foncière sur ses parcelles, ni qu'un emplacement réservé aurait dû y être institué. Compte tenu du parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières dans le secteur en cause, de la configuration des lieux, ainsi que des caractéristiques des parcelles de M. B..., le classement de ces dernières en zone AUCe n'apparaît entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

33. En cinquième et dernier lieu, le classement des parcelles de M. B... en zone AUCe du plan local d'urbanisme en litige n'a ni pour objet ni pour effet de le priver de son droit de propriété. Eu égard à ce qui vient d'être dit au point précédent, les limitations apportées à l'exercice du droit de propriété de M. B... sur ses parcelles situées sur le territoire de la commune de Lézignan-Corbières sont justifiées par l'intérêt général. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

Sur la mise en oeuvre de l'article L. 6009 du code de l'urbanisme :

34. Aux termes de l'article L. 6009 du code de l'urbanisme : " Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre (...) un plan local d'urbanisme (...), estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'une illégalité entachant l'élaboration ou la révision de cet acte est susceptible d'être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation et pendant lequel le document d'urbanisme reste applicable, sous les réserves suivantes : (...) / 2° En cas d'illégalité pour vice de forme ou de procédure, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité a eu lieu, pour (...) les plans locaux d'urbanisme, après le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables. / Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations (...) ".

35. Les vices retenus au point 13, tirés du non-respect des exigences de l'article L. 212112 du code général des collectivités territoriales préalablement à la séance du 22 mars 2017 au cours de laquelle la délibération arrêtant le projet de plan local d'urbanisme de Lézignan-Corbières a été adoptée, sont susceptibles d'être régularisés. Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt afin que le conseil municipal de Lézignan-Corbières approuve une délibération régularisant les vices entachant la procédure d'adoption de la délibération du 22 mars 2017 arrêtant le projet de plan local d'urbanisme.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 11 juin 2019 est annulé.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de M. B... jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, imparti à la commune de Lézignan-Corbières pour notifier à la cour une délibération régularisant les vices entachant la procédure d'adoption de la délibération du 22 mars 2017 arrêtant le projet de plan local d'urbanisme.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et à la commune de Lézignan-Corbières.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme Simon, présidente assesseure,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2021.

11

N° 19MA03009


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03009
Date de la décision : 29/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-01-06 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Légalité des plans. Procédure d'élaboration. Approbation.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : MAGRINI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-29;19ma03009 ?
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