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28/06/2021 | FRANCE | N°20MA04395

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 28 juin 2021, 20MA04395


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1910669 du 12 mars 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de Mme E....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mém

oire enregistrés les 24 novembre et 21 décembre 2020,

Mme D... E..., représentée par Me C..., dan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1910669 du 12 mars 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de Mme E....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 novembre et 21 décembre 2020,

Mme D... E..., représentée par Me C..., dans le dernier état de ses écritures, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 mars 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le préfet a méconnu l'article L. 313-1 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales, dès lors qu'elle justifie d'une communauté de vie en France avec son compagnon, devenu son mari le 25 juillet 2020, union dont est né B..., le

23 novembre 2017 à Marseille ; elle a établi en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux ; c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il ne démontrait pas l'ancienneté et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France ;

- l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;

- le préfet n'a pas fait l'usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 puisque son retour au Cap-Vert entrainerait une séparation avec son fils.

Par décision du 23 octobre 2020, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à

Mme E....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., de nationalité cap-verdienne, née le 1er août 1994 à Praia, déclare être entrée en France en juillet 2015 dans des conditions indéterminées et s'y maintenir depuis cette date malgré l'édiction à son encontre le 12 juillet 2016 d'un premier refus de séjour portant obligation de quitter le territoire français. Elle a sollicité à nouveau le 9 août 2018 son admission au séjour sur le fondement de la vie privée et familiale. Elle relève appel du jugement du 12 mars 2020 du tribunal administratif de Marseille qui rejette sa requête contre l'arrêté du

26 juillet 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

Sur les conclusions d'annulation :

2. Premièrement, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article

L. 311-7 soit exigée. (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme E... s'est irrégulièrement maintenue en France en dépit de la décision du 12 juillet 2016 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire national. A la date de l'arrêté attaqué, elle déclare vivre en concubinage avec un ressortissant cap-verdien titulaire d'une carte de résident valable 10 ans jusqu'en 2022, union dont est né un enfant, B..., le 23 novembre 2017, à Marseille. La circonstance que

Mme E... a contracté mariage le 25 juillet 2020 avec le père de son enfant est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué qui s'apprécie à la date de son édiction, et qui est antérieur à cette union. Si sa mère et sa soeur résident régulièrement en France, ainsi que son

demi-frère, l'intéressée, qui a vécu en-dehors du territoire national jusqu'à l'âge de 21 ans, qui ne dispose d'aucune ressource, ne justifie pas d'une insertion particulière en France en faisant seulement valoir qu'elle y demeure depuis l'année 2015, sans préciser la durée de son concubinage, alors même qu'un passeport lui a été délivré à Lisbonne le 17 avril 2018. Mme E... ne soutient ni même allègue qu'elle ne dispose pas d'attaches familiales ou privées dans son pays d'origine, et qu'il y aurait un obstacle à ce qu'elle et sa famille s'établissent au Cap-Vert. Eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, et au fait qu'elle n'invoque aucun motif empêchant qu'elle mène une vie familiale normale dans le pays dont elle a la nationalité qui est aussi celle de son compagnon devenu son époux, Mme E... n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, ainsi que, pour le même motif, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle.

4. Deuxièmement, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article

L. 311-7 (...) ".

5. En se bornant à se prévaloir de sa situation familiale, Mme E... ne justifie d'aucune considération humanitaire ou d'un motif exceptionnel, au sens des dispositions de l'article L. 313-14, de nature à justifier une admission exceptionnelle au séjour. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

6. Troisièmement, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet a entaché la décision litigieuse d'une erreur manifeste d'appréciation en ne procédant pas dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire à une régularisation de la situation administrative de la requérante.

7. Quatrièmement, aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

8. Si Mme E... fait valoir que son départ porterait atteinte à l'intérêt supérieur de son fils, qui ainsi serait séparé de sa mère, la recomposition de la cellule familiale est possible hors de France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de

l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2021, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juin 2021.

2

N° 20MA04395


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA04395
Date de la décision : 28/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : IBRAHIM

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-28;20ma04395 ?
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