Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2000534 du 20 mai 2020, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 juin 2020, sous le n° 20MA02033, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler ce jugement du 20 mai 2020 du tribunal administratif de Nice ;
3°) d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2020 ;
4°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, Me C..., en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation ;
- il est entaché d'une erreur de fait ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cet arrêté est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il viole les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 septembre 2020.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 2 janvier 1970 et de nationalité sénégalaise, est entré irrégulièrement en France le 8 août 2019 et a présenté, le 14 août 2019, une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) par une décision du 31 octobre 2019, qu'il a contestée devant la Cour nationale du droit d'asile, le 17 décembre 2019. M. B... relève appel du jugement du 20 mai 2020 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
2. Par décision du 4 septembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille a statué sur la demande d'aide juridictionnelle présentée par le requérant et a admis celui-ci au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale pour la présente instance d'appel. Dès lors, les conclusions présentées par M. B... tendant à ce que la Cour l'admette provisoirement à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet à la date du présent arrêt.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. M. B... reprend en appel le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, il y a lieu d'écarter ce moyen, qui ne comporte aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à juste titre par le premier juge.
4. L'arrêté en litige après avoir visé les textes applicables et notamment l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lequel il se fonde, comporte les considérations de droit et de fait relatives à M. B.... Même s'il mentionne, en son article 1er, que " la demande de délivrance de titre de séjour de M. B... est rejetée ", l'arrêté contesté ne peut être regardé ni comme statuant sur la demande d'asile de l'intéressé, le rejet de cette demande procédant de la décision prise par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 31 octobre 2019, ni même comme lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. A cet égard, si le requérant fait valoir qu'il a déposé une demande de titre de séjour sur le fondement l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, reçue en préfecture le 2 janvier 2020, il produit un courrier du 13 février 2020 du préfet des Alpes-Maritimes l'informant de ce que cette demande est incomplète, qu'elle ne peut être instruite en l'état et qu'elle est irrecevable. Par suite, la circonstance que l'arrêté contesté ne vise pas l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est sans incidence sur sa motivation qui est suffisante. Pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est pas entaché d'un défaut d'examen de sa situation, plus particulièrement de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour qui a été rejetée par la décision du 13 février 2020 précitée.
5. Si l'arrêté contesté mentionne à tort que l'intéressé n'a pas sollicité son admission au séjour sur un autre fondement juridique que celui de l'asile alors qu'il établit avoir déposé une demande d'admission exceptionnelle au séjour laquelle a été rejetée par la décision du 13 février 2020, le préfet des Alpes-Maritimes aurait pris la même décision en se fondant sur l'autre motif de cet arrêté tiré de ce que sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 31 octobre 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides.
6. Si M. B... soutient que l'arrêté en litige est frappé d'incohérence dès lors qu'il mentionne que la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides lui a été notifiée le 30 décembre 2019 alors que sa demande d'aide juridictionnelle a été déposée antérieurement à la Cour nationale du droit d'asile le 17 décembre 2019, cette circonstance à la supposer établie est sans incidence dès lors que le préfet ne peut légalement exécuter la mesure d'éloignement en litige qu'après sa notification.
7. Aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. " Selon l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) / 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 ; (...) ". L'article L. 723-2 du code précité dispose que : " I. - L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 (...) ". Selon l'article L. 743-3 du même code : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI ". Aux termes de l'article L. 511-1 du code précité : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) "
8. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile formulée par M. B..., ressortissant du Sénégal, pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, statuant en procédure accélérée au titre de l'article L. 723-2 du code précité, le 31 octobre 2019. Dans ces conditions, il ne bénéficiait plus du droit de se maintenir sur le territoire français et le préfet des Alpes-Maritimes pouvait en conséquence, en application des dispositions précitées, édicter à son encontre l'arrêté contesté, alors même que M. B... a formé, le 17 décembre 2019, un recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides auprès de la Cour nationale du droit d'asile. Compte tenu de ce qui a été dit au point 4, le requérant ne peut utilement soutenir que sa demande d'admission exceptionnelle au séjour étant en cours, il avait le droit de se maintenir sur le territoire français et ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement.
9. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
10. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., célibataire et sans charge de famille, est entré irrégulièrement en France le 8 août 2019. Ainsi, à la date de l'arrêté contesté, il bénéficie d'une durée de séjour brève de moins de deux ans. Par ailleurs, M. B... n'établit ni même n'allègue être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 49 ans. Dans ses conditions, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, l'arrêté en litige n'a pas porté une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
11. Compte tenu de ce qui a été dit au point 4, M. B... ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de l'arrêté contesté, sur lesquelles le préfet des Alpes-Maritimes n'a par ailleurs pas fait porter son examen.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 24 janvier 2020.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de M. B....
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que le conseil de M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire présentée par M. B....
Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 11 juin 2021, où siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Coutier, premier conseiller,
- Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 juin 2021.
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N° 20MA02033
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