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25/06/2021 | FRANCE | N°20MA01521

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 25 juin 2021, 20MA01521


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... épouse A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2019 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1903923 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de délivrer à Mme

B... épouse A... C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale "...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... épouse A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2019 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1903923 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de délivrer à Mme B... épouse A... C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 avril 2020, le préfet du Var demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 mars 2020 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... épouse A... C... devant le tribunal administratif de Toulon.

Il soutient que :

- la décision querellée ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par ordonnance du 24 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 9 décembre 2020.

Un mémoire, présenté par Mme B... épouse A... C..., enregistré le 20 mai 2021, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- et les observations de Mme D... B... épouse A... C... et de son mari.

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet du Var relève appel du jugement du 5 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a, par son article 1, annulé son arrêté du 30 septembre 2019 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme B... épouse A... C..., ressortissante tunisienne, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement, et par son article 2, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... épouse A... C... a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un avis rendu le 26 août 2019 dans le cadre de l'instruction de cette demande, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge était susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut y bénéficier d'un traitement approprié, précisant que cet état de santé lui permettait de voyager sans risque vers le pays de renvoi.

5. Si le certificat médical produit devant le tribunal par Mme B... épouse A... C..., établi le 20 octobre 2019 par le docteur Oueslati qui la suit médicalement pour son cancer du sein, indique que l'intéressée " a été hospitalisée dans le service de gynécologie depuis le 20/10/2019 pour fièvre à 40°C et éruption cutanée du sein et de l'hémi thorax gauche " et que " son état de santé nécessite un suivi régulier et une prise en charge spécialisé pour sa maladie du sein ", ces indications, peu circonstanciées, ne permettent pas de considérer que ce traitement ou ce suivi devraient impérativement être effectués en France et n'est ainsi pas de nature à contredire valablement l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. C'est dès lors à tort que les premiers juges se sont fondés sur ce certificat médical pour juger que l'arrêté du 30 septembre 2019 du préfet du Var était entaché d'erreur de droit au regard des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'erreur manifeste d'appréciation et qu'il y avait lieu, outre d'annuler cet arrêté, d'enjoindre au préfet de délivrer à l'intéressée un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

6. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... épouse A... C... tant en première instance qu'en appel.

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... épouse A... C..., n'a soulevé aucun autre moyen devant le tribunal à l'encontre de l'arrêté du 30 septembre 2019 du préfet du Var et qu'elle n'a pas produit d'écritures devant la Cour. Eu égard aux pièces qu'elle a produites devant la Cour, soit postérieurement à la décision contestée, selon lesquelles son état de santé s'est détérioré, il lui appartient, si elle s'y croit fondée, de déposer auprès des services préfectoraux une nouvelle demande de délivrance d'un titre de séjour assortie de ces pièces.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Var est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé son arrêté du 30 septembre 2019.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 5 mars 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme D... B... épouse A... C... devant le tribunal administratif de Toulon est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme D... B... épouse A... C....

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222 26 du code de justice administrative,

- M. Coutier, premier conseiller,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2021.

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N° 20MA01521

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01521
Date de la décision : 25/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. GUIDAL
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-25;20ma01521 ?
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