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11/05/2021 | FRANCE | N°20MA04881

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 11 mai 2021, 20MA04881


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 et de la cotisation d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de la même année à raison d'une plus-value de cession de biens immobiliers.

Par un jugement n° 1505086 du 8 février 2018, le tribunal adminis

tratif de Nice a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 et de la cotisation d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de la même année à raison d'une plus-value de cession de biens immobiliers.

Par un jugement n° 1505086 du 8 février 2018, le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales litigieuses.

Par un arrêt n° 18MA02567 du 15 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement, remis à la charge de M. D..., en droits et pénalités, les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge, à hauteur des montants résultant de l'imposition au taux forfaitaire de la plus-value de cession des titres de la SARL Paradisio et des intérêts relatifs au paiement différé du prix de cession de ces parts, et rejeté le surplus des conclusions du ministre de l'action et des comptes publics.

Par une décision n° 436718 du 24 décembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, sur pourvoi du ministre de l'action et des comptes publics, annulé l'arrêt du 15 octobre 2019 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de la requête d'appel du ministre et renvoyé l'affaire à la Cour dans la limite de la cassation ainsi prononcée.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Les parties ont été informées, le 5 janvier 2021, de la reprise de l'instance après cassation et de la possibilité qui leur était offerte de produire, dans le délai d'un mois, de nouveaux mémoires ou observations.

Par un mémoire complémentaire, enregistré 27 janvier 2021, non communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au maintien de ses conclusions.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a désigné, par décision du 19 mars 2021, Mme Mylène Bernabeu, présidente, pour assurer les fonctions de présidente par intérim de la 3ème chambre à compter du 20 mars 2021, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la SARL Paradisio, dont M. D... est associé et gérant, celui-ci a fait d'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2009 et 2010. A la suite de ce contrôle, M. D... a été assujetti, selon la procédure de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2009, pour un montant global de 1 803 402 euros correspondant à une plus-value imposable au titre de la cession de parts sociales, à des intérêts sur cession de parts sociales et à des revenus distribués. Par un jugement du 8 février 2008, le tribunal administratif de Nice a déchargé l'intéressé de l'ensemble de ces impositions au motif qu'elles étaient prescrites à la date à laquelle il avait reçu notification de la proposition de rectification du 21 décembre 2012. Par un arrêt en date du 15 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a d'une part, annulé partiellement ce jugement pour irrégularité en ce qu'il a prononcé une décharge supérieure au quantum contesté dans la réclamation préalable, à hauteur de 35 336 euros et, d'autre part, remis partiellement à la charge de M. D... les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 correspondant à l'imposition au taux forfaitaire de la plus-value de cession des titres de la SARL Paradisio ainsi que des intérêts relatifs au paiement différé du prix de cession de ces parts. La Cour a, en revanche, rejeté les conclusions du ministre tendant au rétablissement, en droits et pénalités, de l'imposition afférente à la somme de 980 000 euros dans la catégorie des revenus distribués. Le ministre de l'action et des comptes publics s'est pourvu en cassation contre cet arrêt du 15 octobre 2019 en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande. Par une décision du 24 décembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de la requête d'appel du ministre, au motif que la Cour a méconnu l'autorité de la chose jugée par le juge pénal. Le Conseil d'Etat a ainsi renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Marseille dans cette mesure.

Sur les sommes facturées à la SARL Paradisio par la société Lepum International :

2. L'article 111 du code général des impôts dispose que : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

3. En outre, la constatation par le juge pénal qu'un contribuable a appréhendé une certaine somme dans des conditions matérielles données fait obstacle à ce que l'intéressé conteste ces faits devant le juge administratif pour demander la décharge de l'impôt établi sur ces bases.

4. Il ressort des pièces du dossier que, d'une part, le vérificateur a constaté que la SARL Paradisio a déduit de ses résultats de l'exercice clos en 2009 une charge afférente à une prestation de recherche d'acquéreur pour un bien immobilier, à concurrence de 980 000 euros, facturée par la société Lepum International, dont le siège social est situé aux Iles Vierges britanniques, et que la facture correspondant à cette charge a été réglée par le virement de cette somme sur un compte bancaire ouvert dans les écritures d'un établissement bancaire italien au nom de M. D.... La somme de 980 000 euros a ainsi été regardée comme un avantage occulte au profit de ce dernier. D'autre part, par un arrêt devenu définitif du 15 janvier 2019, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a condamné M. D... du chef de fraude fiscale en constatant qu'il avait appréhendé cette somme de 980 000 euros de revenus perçus fin 2009 sous couvert d'un faux contrat de prestation de service et dans le cadre d'un montage offshore. Ces constatations de fait, qui sont le support nécessaire de la condamnation prononcée, sont revêtues de l'autorité de la chose jugée et font obstacle à ce que l'intéressé conteste ces faits devant le juge administratif pour demander la décharge de l'impôt établi sur ces bases. Dans ces conditions, M. D... doit être regardé comme ayant effectivement appréhendé cette somme.

5. M. D... fait valoir que la prescription était acquise lorsqu'il a reçu notification de la proposition de rectification du 21 décembre 2012. Toutefois l'administration justifie, en produisant l'original de l'avis de réception, de la présentation régulière du pli recommandé contenant la proposition de rectification, le 27 décembre 2012, soit avant l'expiration du délai de reprise prévu par l'article L. 169 du livre des procédures fiscales qui expirait le 31 décembre 2012. Si M. D... a retiré ce pli le 9 janvier 2013, soit postérieurement à l'expiration du délai de reprise dont disposait l'administration au titre de l'année 2009, cette circonstance est sans incidence sur le caractère interruptif de prescription de la proposition. En outre, l'intéressé ne démontre pas avoir changé d'adresse courant 2012 ni en avoir dûment informé l'administration, en se bornant à produire un contrat de souscription à une boîte postale au nom de la SCI Diva 2000 daté du 6 juillet 2012, alors qu'il résulte de l'instruction que, dans plusieurs courriers adressés à l'administration fiscale postérieurement au mois de décembre 2012, il a continué de faire état de l'adresse du " 8 avenue des Pins à Cannes ". Par suite, le moyen tiré de ce que la prescription était acquise lorsque le contribuable a reçu notification de la proposition de rectification du 21 décembre 2012 ne saurait être accueilli.

6. M. D... soutient enfin que la commission facturée par la société Lepum International ne peut être regardée pour la SARL Paradisio, comme un acte anormal de gestion. Toutefois, cette circonstance est sans incidence sur l'appréciation de l'existence d'une rémunération occulte, laquelle est caractérisée, ainsi qu'il a été dit précédemment au point 4 du présent arrêt, par l'appréhension par M. D... de la somme concernée, constatée par le juge pénal, quelle que soit la qualification donnée à cette somme au regard de la société.

7. Par suite, l'administration fiscale a pu légalement retenir que la somme de 980 000 euros devait être regardée comme constituant un avantage occulte imposable entre les mains de M. D... au titre de l'année 2009 sur le fondement de l'article 111 c du code général des impôts.

Sur la majoration pour manoeuvres frauduleuses :

8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d'application de l'article 792 bis. ".

9. L'administration fiscale apporte la preuve des manoeuvres frauduleuses opérées par M. D... afin de dissimuler des revenus d'un montant de 980 000 euros en relevant que le paiement de cette commission a été enregistré dans la comptabilité de la SARL Paradisio au nom de la société Lepum International alors que le versement correspondant a été effectué sur le compte bancaire personnel italien de l'intéressé, dont l'existence a été découvert par l'administration fiscale dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès du notaire en charge de l'acte de cession. Par suite, l'administration justifie l'application des pénalités prévues par l'article 1729 du code général des impôts.

10. Il résulte de ce qui précède, que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a déchargé M. D..., en droit et pénalités, de l'imposition d'un avantage occulte d'un montant de 980 000 euros.

Sur les frais liés au litige :

11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par M. D... au titre des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 8 février 2018 est annulé en tant qu'il a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. D... a été assujetti à raison de la taxation de la somme de 980 000 euros, majorée de 1,25, dans la catégorie des revenus distribués.

Article 2 : Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contribution sociales, ainsi que les pénalités correspondantes, dont les premiers juges ont prononcé la décharge sont remis à la charge de M. D... à hauteur des montants résultant de l'imposition de la somme de 980 000 euros constituant un avantage occulte au profit de M. D....

Article 3 : Les conclusions présentées par M. D... au titre des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. A... D....

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2021, où siégeaient :

- Mme Bernabeu, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme C..., première conseillère,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 mai 2021.

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N° 20MA04881

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA04881
Date de la décision : 11/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-05-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices non commerciaux. Personnes, profits, activités imposables.


Composition du Tribunal
Président : Mme BERNABEU
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : MODAS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-05-11;20ma04881 ?
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