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11/05/2021 | FRANCE | N°19MA03300

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 11 mai 2021, 19MA03300


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile SST a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012.

Par un jugement n° 1704224 du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure de

vant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2019, la société SST, représentée pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile SST a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012.

Par un jugement n° 1704224 du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2019, la société SST, représentée par la SELARL Quesnel et Associés société d'avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 mai 2019 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la notification de la proposition de rectification du 16 juillet 2015 adressée à M. D... B... est irrégulière dès lors qu'il n'était plus ni associé, ni représentant légal de la société et ne pouvait être qualifié de gérant de fait ;

- les courriers du service vérificateur précédant la proposition de rectification du 16 juillet 2015 ont été envoyés à une adresse inconnue ; ce faisant, l'administration a privé la société des garanties auxquelles elle pouvait prétendre ;

- l'opposition à contrôle fiscal ne peut être caractérisée dès lors que l'absence des opérations de vérification est la résultante du comportement du vérificateur et non du contribuable ;

- l'administration ne pouvait reconstituer le chiffre d'affaires à partir des encaissements et décaissements enregistrés sur son compte bancaire, dès lors que le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée se situe à la date de la facturation du prix, et qu'en matière d'impôt sur les sociétés, la comptabilité de caisse doit être écartée au profit d'une comptabilité fondée sur les créances acquises et les dettes certaines ;

- l'ensemble des mouvements portés sur son compte à la Société Générale se rattache à un exercice nécessairement antérieur à l'exercice 2011.

Par un mémoire en défense, enregistré 21 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a désigné, par décision du 19 mars 2021, Mme Mylène Bernabeu, présidente, pour assurer les fonctions de présidente par intérim de la 3ème chambre à compter du 20 mars 2021, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- et les conclusions de Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. La SARL STL Stock a été créée le 6 juillet 2010 avec pour objet social la vente de meubles, le commerce de détail et de gros et la vente import-export. Le 7 février 2012, son gérant et associé unique, M. H... B..., a cédé la totalité de ses parts, pour la valeur symbolique de 1 euro, à deux sociétés de droit britannique, HLGT Ltd et RBK CAPITAL Ltd, respectivement dissoutes en octobre 2012 et juillet 2013. L'assemblée extraordinaire de la société tenue le 14 février 2012 a entériné la démission du gérant de droit, la transformation de la SARL STL Stock en société civile SST, ainsi que le changement de la domiciliation du siège social et de l'objet social de la société consacré dorénavant à la gestion de patrimoine immobilier. La société SST a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. Constatant une situation d'opposition à contrôle fiscal, l'administration a évalué d'office le chiffre d'affaires imposable à la taxe sur la valeur ajoutée ainsi que le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés en application de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales. A l'issue de ce contrôle, par proposition de rectification datée du 16 juillet 2015, l'administration a opéré des rectifications au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2012 en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et d'impôt sur les sociétés, selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. Ces rectifications ont été assorties de l'intérêt de retard visé par l'article 1727 du code général des impôts, de la majoration de 100 % pour opposition à contrôle fiscal visée à l'article 1732 de ce code, de l'amende sur les distributions occultes visée à l'article 1759 du même code égale à 100 % des sommes distribuées, la société n'ayant pas désigné de bénéficiaire, ainsi que de l'amende de 5 % prévue par l'article 1788 A-4 dudit code au titre de la TVA intracommunautaire déductible non déclarée. Ces impositions supplémentaires ont été mises en recouvrement le 16 novembre 2015 pour un montant total de 451 024 euros. La société civile SST relève appel du jugement du 24 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers ".

3. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 16 juillet 2015, que le 26 janvier 2015, l'administration a adressé au siège de la société SST situé " Mercure C, 485 rue Marcelin Berthelot, 13851 Aix-en-Provence " identifié dans le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire de la société du 14 février 2012, un avis de vérification de comptabilité mentionnant une première intervention du vérificateur dans les locaux de la société le 23 février suivant. Ce pli est retourné au service avec la mention " défaut d'accès ou d'adressage ". La première intervention sur place n'a pu ainsi avoir lieu. Le 19 février 2015, le vérificateur a adressé à nouveau au siège social de la société et à M. J... C..., représentant légal de la société RBK Capital Ltd, un courrier accompagné de l'avis de vérification de comptabilité et de la charte du contribuable vérifié et fixant un nouveau rendez-vous le 12 mars 2015 au siège social de la société. Ces plis sont retournés au service avec la mention " destinataire inconnu à l'adresse ". Par un courrier du 26 février 2015, l'avis de vérification de comptabilité a de nouveau été adressé à M. J... C... à une adresse différente de la précédente. Ce pli a été retourné au service avec la mention " pli avisé et non réclamé ". Du fait de l'absence du contribuable le jour prévu, le vérificateur, qui a constaté sur place l'absence de boîte aux lettres au nom de la société SST et celle d'enseigne commerciale, n'a pu débuter les opérations de contrôle. M. C... a été avisé d'un nouveau rendez-vous fixé au 16 avril 2015 dans les locaux de la direction des finances publiques Sud-Est par courrier du 19 mars 2015 qu'il n'a pas réclamé. En dépit des avertissements des 20 et 27 mars 2015, respectivement adressés à M. H... B... au " 48 rue Aladin Miqueau, 33320 Eysines " et à M. I... A..., représentant de la société HGLT Ltd, dont les avis de passage mentionnent que les plis n'ont pas été retirés, le vérificateur a de nouveau constaté l'absence de tout représentant légal de la société SST le 16 avril 2015 dans les locaux de l'administration. Le courrier du 21 mai 2015, distribué le 2 juin 2015 à M. C... l'avisant d'un nouveau rendez-vous fixé le 10 juin 2015, est resté tout aussi infructueux. Enfin, aucun représentant légal de la société ne s'est présenté le 3 juillet 2015 malgré deux nouveaux courriers en date du 10 juin 2015 adressés à M. D... B... à la fois au " 1, impasse du docteur Daureillan à Eysines ", domiciliation figurant sur l'acte de cession des parts sociales en date du 7 février 2012, qu'il n'a pas retiré et à l'hôtel de ville d'Eysines où, selon ses propres écritures, il a élu domicile et où par ailleurs il a réceptionné la proposition de rectification du 16 juillet 2015. Dans ces conditions, la société SST doit être regardée comme ayant valablement reçu notification de l'avis de vérification de comptabilité, ainsi que des différentes propositions d'entretien. La grande inertie dont la société requérante a fait preuve a rendu matériellement impossible le déroulement de la vérification, de sorte qu'elle s'est placée dans une situation d'opposition à contrôle fiscal. Par suite, l'administration était légalement fondée à faire usage, à son encontre, de la procédure d'évaluation d'office de ses bases d'imposition prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales.

4. En deuxième lieu, il résulte des dispositions combinées du dernier alinéa de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales et du second alinéa de l'article L. 67 de ce livre que, lorsque les bases de l'imposition d'un contribuable ont été évaluées d'office à la suite de son opposition au contrôle fiscal, le législateur a entendu priver l'intéressé, qui s'est de lui-même placé en dehors des règles applicables à la procédure d'imposition, des garanties dont bénéficient les contribuables, qu'ils soient imposés selon la procédure contradictoire ou selon une procédure d'imposition d'office et, notamment, de celles tenant à l'envoi de la notification de redressement prévue par l'article L. 76 du livre des procédures fiscales.

5. Alors même que, ainsi qu'il est dit au point 3 du présent arrêt, l'administration a adressé au contribuable la notification de la proposition de rectification du 16 juillet 2015, les bases d'imposition ayant été évaluées d'office à la suite de l'opposition à contrôle fiscal du contribuable, les irrégularités entachant celle-ci ne sont pas de nature à vicier la procédure d'imposition. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la notification de la proposition de rectification est inopérant.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

6. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ".

7. Les impositions en litige ayant été établies d'office conformément à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, il incombe à la société civile SST, en application des dispositions précitées de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération des cotisations d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie.

En ce qui concerne la détermination du résultat imposable à l'impôt sur les sociétés et du chiffre d'affaires imposable à la taxe sur la valeur ajoutée :

8. La société requérante reprend le moyen soulevé en première instance tiré de ce que l'administration ne pouvait reconstituer le chiffre d'affaires à partir des seuls encaissements et décaissements enregistrés sur son compte bancaire correspondant à un exercice nécessairement antérieur à l'exercice 2011, sans pour autant apporter des éléments nouveaux au soutien de ce dernier, qu'il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Marseille au point 7 du jugement contesté.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société SST n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société SST est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile SST et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2021, où siégeaient :

- Mme Bernabeu, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme F..., première conseillère,

- Mme G..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 mai 2021.

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N° 19MA03300

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03300
Date de la décision : 11/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal.


Composition du Tribunal
Président : Mme BERNABEU
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : QUESNEL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-05-11;19ma03300 ?
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