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23/04/2021 | FRANCE | N°19MA04246

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 23 avril 2021, 19MA04246


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 16 novembre 2017 par lequel le président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a défini l'alignement au droit de sa propriété.

Par un jugement n° 1801026 du 12 juillet 2019, le tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 septembre 2019, le département des Bouches-du-Rhône, représenté par

la SELARL UGGC Avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 16 novembre 2017 par lequel le président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a défini l'alignement au droit de sa propriété.

Par un jugement n° 1801026 du 12 juillet 2019, le tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 septembre 2019, le département des Bouches-du-Rhône, représenté par la SELARL UGGC Avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 juillet 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de M. C... le versement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a entendu exclure du domaine public routier l'accotement de la voie départementale alors qu'en raison de son aménagement celui-ci constituait l'accessoire indispensable de cette voie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 janvier 2020, M. C..., représenté par Me F... conclut à titre principal au non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête, à titre subsidiaire au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du département des Bouches-du-Rhône une somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice pour procédure abusive et une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête a perdu son objet en raison de la caducité qui a frappé l'arrêté en litige un an après son édiction ;

- la requête est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir du département des Bouches-du-Rhône ;

- les moyens soulevés par le département des Bouches-du-Rhône ne sont pas fondés ;

- le recours abusif du département lui crée un préjudice dont il est fondé à demander réparation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la voirie routière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., substituant Me B..., représentant le département des Bouches-du-Rhône.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... est propriétaire, sur le territoire de la commune de Cornillon-Confoux, de la parcelle cadastrée section C n° 377, située à l'intersection de la rue des Jardins, classée dans la voirie communale, et de la route départementale n° 70A dite du pont de Rhaud. En vue de l'aménagement d'un trottoir et d'une piste cyclable le long de ces deux voies, la commune de Cornillon-Confoux a sollicité du président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône la délivrance d'un arrêté individuel d'alignement tendant à constater les limites matérielles de la voirie départementale au droit de la propriété de M. C.... Par un arrêté du 16 novembre 2017, le président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a défini l'alignement de cette voie au droit de cette propriété. Le département des Bouches-du-Rhône relève appel du jugement du 12 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande de M. C..., l'arrêté du 16 novembre 2017.

Sur l'exception de non-lieu soulevée par M. C... :

2. Aux termes de l'article L. 112-1 du code de la voirie routière : " L'alignement est la détermination par l'autorité administrative de la limite du domaine public routier au droit des propriétés riveraines. Il est fixé soit par un plan d'alignement, soit par un alignement individuel. (...) / L'alignement individuel est délivré au propriétaire conformément au plan d'alignement s'il en existe un. En l'absence d'un tel plan, il constate la limite de la voie publique au droit de la propriété riveraine. ".

3. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 112-1 du code de la voirie routière que l'alignement individuel, qui, en l'absence d'un plan d'alignement, constate la limite de la voie publique au droit de la propriété riveraine, est un acte purement déclaratif qui reste valable, en ce qui concerne la délimitation de la voie publique, tant qu'il ne se produit pas de fait nouveau, alors même que l'autorité qui le délivre aurait fixé un délai pour la réalisation des travaux en vue desquels l'alignement a été demandé.

4. Il ressort de son article 2, que l'arrêté en litige du 16 novembre 2017 a été délivré pour une durée de validité d'un an à compter de la date de sa délivrance et a prévu qu'il serait périmé de plein droit s'il n'en était pas fait usage avant l'expiration de ce délai. S'il est soutenu par M. C... qu'il n'a été fait aucun usage de cet arrêté dans le délai d'un an qu'il avait prescrit, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'un fait nouveau justifierait la caducité de l'alignement qu'il constate. Par suite, la requête du département des Bouches-du-Rhône conserve un objet.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

5. En vertu des principes généraux de la procédure tels qu'ils sont rappelés à l'article R. 811-1 du code de justice administrative, le droit de former appel des décisions de justice est ouvert aux personnes qui ont été parties à l'instance sur laquelle la décision qu'elles attaquent a statué.

6. En l'espèce, le département des Bouches-du-Rhône était défendeur dans l'instance dans laquelle le tribunal administratif de Marseille s'est prononcé par le jugement attaqué du 12 juillet 2019, qui a été rendu contrairement à ses conclusions. Dès lors, la fin de non-recevoir tirée de ce que le département ne serait pas recevable à relever appel de ce jugement au motif qu'il n'aurait pas intérêt pour agir car celui-ci ne lui ferait pas grief ne peut qu'être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 16 novembre 2017 du président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône :

7. Il résulte des dispositions de l'article L. 112-1 du code de la voirie routière mentionnées au point 2, qu'en l'absence de plan d'alignement, l'alignement individuel, qui est un acte déclaratif et n'emporte aucun effet sur le droit de propriété des riverains, ne peut être fixé qu'en fonction des limites actuelles et de fait de la voie publique en bordure des propriétés riveraines.

8. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a fixé l'alignement au droit de la propriété de M. C... à une distance de 4,20 mètres à 4,90 mètres par rapport à l'axe de la chaussée. Cet arrêté a pour effet d'imposer à M. C... un retrait d'environ, 2, 30 mètres par rapport à la limite existante de la voie départementale, matérialisée en l'espèce par la bande de roulement. Si le département fait valoir que la voie et ses dépendances s'étendent jusqu'au pied du talus qui supporte la chaussée, d'une part, ce talus n'existe que sur une longueur d'environ 12 mètres au droit de la propriété de M. C... et, d'autre part, le pied de talus ne s'étend à cet endroit qu'à environ 1,50 mètre de la bande de roulement. Si par ailleurs, le département se prévaut de l'installation sur l'accotement de la voie d'une borne à incendie et d'un coffret d'alimentation électrique, d'une part, aucune des pièces du dossier et notamment pas le plan produit, ne permet de déterminer précisément la distance entre ces équipements et le bord de la chaussée et, d'autre part et en tout état de cause, leur implantation ne saurait à elle seule justifier l'existence d'un accotement de 2,30 mètres sur toute la longueur de la propriété. Il résulte également très clairement des photos produites que les panneaux de signalisation implantés en bordure de la chaussée l'ont été à proximité immédiate de la bande de roulement. Enfin, il n'existe au droit de la propriété de M. C... aucun trottoir aménagé le long de la route départementale. Ainsi, en incorporant à la voie publique une bande de terre de 2, 30 mètres, alors qu'elle n'en constituait pas sur une telle largeur l'accessoire nécessaire, l'arrêté en litige est entaché d'illégalité.

9. Il résulte de ce qui précède que le département des Bouches-du-Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 16 novembre 2017 précité.

Sur les conclusions reconventionnelles indemnitaires présentées par M. C... :

10. En l'espèce, la requête du département des Bouches-du-Rhône ne caractérise pas un usage abusif de son droit de relever appel d'un jugement qui lui est défavorable. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions de M. C... tendant à la condamnation du département des Bouches-du-Rhône à lui verser une indemnité pour recours abusif doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône la somme de 2 000 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. C..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du département des Bouches-du-Rhône est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. C... tendant à ce que le département des Bouches-du-Rhône soit condamné à lui verser une indemnité pour recours abusif sont rejetées.

Article 3 : Le département des Bouches-du-Rhône versera à M. C... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au département des Bouches-du-Rhône et à M. D... C....

Délibéré après l'audience du 9 avril 2021, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. A..., président assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2021.

2

N° 19MA04246

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04246
Date de la décision : 23/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Application dans le temps - Caducité.

Voirie - Régime juridique de la voirie - Alignements - Arrêtés individuels d'alignement.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : LSCM et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-04-23;19ma04246 ?
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