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09/04/2021 | FRANCE | N°19MA01052

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 09 avril 2021, 19MA01052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La région Occitanie a déféré devant le tribunal administratif de Montpellier M. C... E... comme prévenu d'une contravention de grande voirie pour avoir, avec le navire " Phyllirhoe " dont il est propriétaire, endommagé les installations du port de Sète.

Par un jugement n° 1702415 du 5 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a condamné M. E..., d'une part, à payer une amende de 200 euros, d'autre part, à verser à la région Occitanie la somm

e de 4 270 euros pour la remise en état de l'ouvrage endommagé.

Procédure devant la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La région Occitanie a déféré devant le tribunal administratif de Montpellier M. C... E... comme prévenu d'une contravention de grande voirie pour avoir, avec le navire " Phyllirhoe " dont il est propriétaire, endommagé les installations du port de Sète.

Par un jugement n° 1702415 du 5 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a condamné M. E..., d'une part, à payer une amende de 200 euros, d'autre part, à verser à la région Occitanie la somme de 4 270 euros pour la remise en état de l'ouvrage endommagé.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mars 2019, M. E..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 juillet 2018 ;

2°) de le relaxer des poursuites de contravention de grande voirie engagées à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de la région Occitanie la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le procès-verbal de contravention de grande voirie a été établi par une personne incompétente ;

- le délai de 10 jours prévu à l'article L. 7742 du code de justice administrative pour notifier le procèsverbal de contravention de grande voirie n'a pas été respecté et ses droits de la défense ont été méconnus :

- le procès-verbal de contravention de grande voirie est fondé sur des constatations postérieures à son établissement et est par conséquent irrégulier ;

- ce procès-verbal ne fait pas état de manière suffisamment précise des circonstances de l'infraction ;

- une personne poursuivie ne saurait être condamnée que lorsqu'il est démontré qu'elle a effectivement commis l'infraction de contravention de grande voirie qui lui est reprochée ou que la chose dont elle a la garde est effectivement à l'origine de cette infraction ;

- en l'espèce, ce n'est pas le bateau amarré qui a endommagé le quai, détérioration au demeurant très circonscrite, mais le frottement de la chaine qui entoure le pneu servant de défense de quai disposé par les autorités portuaires ;

- la région a de sa propre initiative amarré son bateau sans l'en informer et sans préalablement recueillir un quelconque accord de sa part, le plaçant dans l'incapacité de mettre en oeuvre toute mesure de nature à éviter les dégradations reprochées ;

- aucune défense de quai empêchant le bateau de heurter celui-ci n'était plus implantée à l'endroit de l'amarrage et le prétendu endommagement du quai résulte donc soit d'un cas de force majeure, soit d'un fait de l'administration assimilable à un cas de force majeure.

Par un mémoire en défense, enregistrés le 4 juin 2019, la région Occitanie, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que la requête est irrecevable et qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des transports ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 14 février 2017, un agent du port de Sète a constaté que le navire Phyllirhoe appartenant à M. E... avait endommagé les installations portuaires, à savoir " le couronnement et la façade du quai ". Ce constat a donné lieu à un procèsverbal de contravention de grande voirie. La région Occitanie, gestionnaire de ce port, a déféré M. E... devant le tribunal administratif de Montpellier. Par jugement du 5 juillet 2018, le magistrat désigné par le président de ce tribunal, a par l'article 1er, condamné l'intéressé à payer une amende de 200 euros, et par l'article 2, l'a condamné à verser à la région Occitanie la somme de 4 270 euros pour la remise en état de l'ouvrage endommagé. M. E... relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur du procès-verbal de contravention de grande voirie, celui tiré de la méconnaissance de l'article L. 7742 du code de justice administrative et, partant, des droits de la défense, ainsi que ceux tirés de ce que le procès-verbal serait fondé sur des constatations postérieures à son établissement et serait dès lors irrégulier et qu'il ne ferait pas état de manière suffisamment précise des circonstances de l'infraction par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 2132-2 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les contraventions de grande voirie sont instituées par la loi ou par décret, selon le montant de l'amende encourue, en vue de la répression des manquements aux textes qui ont pour objet, pour les dépendances du domaine public n'appartenant pas à la voirie routière, la protection soit de l'intégrité ou de l'utilisation de ce domaine public, soit d'une servitude administrative mentionnée à l'article L. 2131-1. ". Aux termes de l'article L. 5337-1 du code des transports : " Sans préjudice des sanctions pénales encourues, tout manquement aux dispositions du chapitre V du présent titre, à celles du présent chapitre et aux dispositions réglementant l'utilisation du domaine public, notamment celles relatives aux occupations sans titre, constitue une contravention de grande voirie réprimée dans les conditions prévues par les dispositions du présent chapitre ". Aux termes de l'article L. 5335-2 du même code : " Il est interdit de porter atteinte au bon état et à la propreté du port et de ses installations, notamment de jeter dans les eaux du port tous déchets, objets, terre, matériaux ou autres ".

4. Il résulte de l'instruction que, saisie par l'établissement public régional Port Sud de France, gestionnaire du port de Sète par délégation consentie par la région Occitanie, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a, par ordonnance du 20 août 2013, enjoint à M. E... de procéder dans le délai de huit jours à l'enlèvement de son navire Phyllirhoe de l'emplacement auquel il était alors amarré, dans le bassin du Midi Sud, et a autorisé l'établissement, en cas d'inexécution de cette injonction, à procéder d'office à cet enlèvement. A défaut pour M. E... d'avoir déféré à cette injonction, Port Sud de France a, le 27 septembre 2013, déplacé le Phyllirhoe pour l'amarrer dans le port de commerce, au bassin des Pétroles. L'établissement public a ensuite déplacé le navire à deux reprises, lequel se trouvait dernièrement amarré au poste G0 du quai G dans le bassin Colbert.

5. Il résulte encore de l'instruction, particulièrement des énonciations du cahier de rapport tenu par le service en charge de la maintenance des installations du port de Sète, qu'à la date du 14 février 2017, M. B..., lieutenant de port, s'est rendu au bout du quai G pour une intervention en urgence, le rapport indiquant que " le chalutier amarré au bout du quai a perdu une défense à cause de la houle. Le bateau a endommagé une partie du nez de quai " et qu'une défense de remplacement avait été mise en place. Le constat de cette détérioration des installations portuaires, portant sur " le couronnement et la façade du quai " a été regardé comme étant constitutif d'une " infraction prévue par le code des transports et au règlement particulier du port de commerce de Sète, et au code général de la propriété des personnes publiques " et a fondé le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 28 février 2017 à l'encontre de M. E..., en sa qualité de propriétaire du navire en cause.

6. La région Occitanie ne conteste pas les affirmations de M. E... selon lesquelles, d'une part, il n'a pas personnellement amarré son navire à ce quai, d'autre part, il ignorait totalement où les autorités portuaires avaient amarré celui-ci, faisant ainsi obstacle à ce qu'il soit en capacité de prendre toute mesure de nature à éviter les dégradations reprochées, enfin qu'aucune défense de quai qui aurait pu empêcher le bateau de le heurter n'était plus implantée à l'endroit de l'amarrage. Toutefois, à supposer même que, ainsi qu'il le soutient, les dommages causés au quai auquel était amarré le Phyllirhoe résulteraient de l'absence de mise en place de défenses par les autorités portuaires, qui ont seules procédé à cet amarrage, entre la coque du navire et le quai, M. E... ne saurait valablement invoquer la commission par l'administration d'une faute assimilable à un cas de force majeure, qui l'exonérerait de sa responsabilité et justifierait sa relaxe des fins de procès-verbal dressé à son encontre dès lors que, en tout état de cause, il demeurait gardien de la chose, les autorités portuaires n'ayant agi qu'en raison de sa propre abstention à exécuter l'ordonnance du tribunal administratif de Montpellier mentionnée au point 4 ci-dessus.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. M. E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font toutefois obstacle à ce que soit mise à la charge de la région Occitanie, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. E... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. E... la somme réclamée par la région Occitanie au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la région Occitanie tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... et à la région Occitanie.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président-assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2021.

2

N° 19MA01052

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01052
Date de la décision : 09/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

24-01-03-01 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SELARL ITINERAIRES AVOCATS CADOZ - LACROIX - REY - VERNE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-04-09;19ma01052 ?
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