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25/03/2021 | FRANCE | N°20MA01818

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 25 mars 2021, 20MA01818


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1906864 du 26 mars 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 12 mai et 8 juillet 2020, M.

E..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1906864 du 26 mars 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 12 mai et 8 juillet 2020, M. E..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 mars 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 juillet 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... relève appel du jugement du 26 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 3-1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. E... est père d'une enfant de nationalité française née le 5 septembre 2017 qui vit avec sa mère. M. E..., marié avec une ressortissante française depuis le 27 avril 2019, a conclu avec la mère de l'enfant une convention parentale le 26 mars 2019 reconnaissant l'exercice de l'autorité parentale conjointe sur l'enfant, un droit de visite, ainsi que le versement d'une pension alimentaire. Le juge aux affaires familiales a également, par un jugement du 9 juillet 2019, reconnu l'autorité parentale conjointe, fixé le droit de visite un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires, et fixé la pension alimentaire. Il ressort des pièces du dossier que M. E... se conforme à cette décision et participe à l'entretien et à l'éducation de son enfant. Si les pièces produites ne permettent pas de satisfaire à la condition de durée prévue par les dispositions de l'article 371-2 du code civil, elles démontrent toutefois un investissement dans l'éducation de l'enfant qui voit son père tous les quinze jours pendant les week-ends ainsi que la moitié des vacances scolaires. Dans ces conditions, eu égard notamment à la relation nouée entre le père et l'enfant, une séparation et un renvoi du père au Maroc serait de nature à porter atteinte à l'intérêt supérieur de cet enfant. M. E... est donc fondé à soutenir que les décisions en litige méconnaissent les stipulations précitées.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et à demander l'annulation du jugement et de l'arrêté précité.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".

6. L'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement, compte tenu de la portée du moyen retenu, et dès lors qu'il n'est fait état d'aucun changement dans les circonstances de droit et de fait concernant la situation de l'intéressé, que le préfet de l'Hérault délivre à M. E... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. Il y a lieu en conséquence de lui adresser une injonction en ce sens et de lui impartir, pour y satisfaire, un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu toutefois d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais exposés dans l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à la présente instance, la somme de 1 500 euros à verser à Me A..., sous réserve de sa renonciation à percevoir l'indemnité correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 mars 2020 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 octobre 2019 portant refus d'admission au séjour et obligation de quitter le territoire français est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. E... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'État versera à Me A... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2021 siégeaient :

- M. Poujade, président,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2021

4

N° 20MA01818

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01818
Date de la décision : 25/03/2021
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : SELARL SYLVAIN ALET AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-03-25;20ma01818 ?
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