La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/03/2021 | FRANCE | N°18MA01540

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 15 mars 2021, 18MA01540


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cejip Entretien a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le groupement d'intérêt public (GIP) Avitem à lui verser la somme, à parfaire, de 41 587,44 euros en règlement de prestations réalisées au titre du marché public de nettoyage des locaux et des vitreries de la Villa Méditerranée, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de sa requête, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'une s

emaine à partir de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 16...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cejip Entretien a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le groupement d'intérêt public (GIP) Avitem à lui verser la somme, à parfaire, de 41 587,44 euros en règlement de prestations réalisées au titre du marché public de nettoyage des locaux et des vitreries de la Villa Méditerranée, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de sa requête, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'une semaine à partir de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1608291 du 22 février 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 10 avril 2018 et les 8 et 12 novembre 2019, la société Cejip Entretien, représentée par Me F..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de condamner le groupement d'intérêt public (GIP) Avitem à lui verser la somme, à parfaire, de 41 587,44 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de sa requête, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'une semaine à partir de la notification de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge du GIP Avitem le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement, qui a estimé à tort sa demande irrecevable, encourt l'annulation ;

- contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, le courrier de mise en demeure du 26 avril 2016 n'a pas fait naître un différend au sens de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de fournitures et de services dans la mesure où il n'avait d'autre but que celui d'obtenir le paiement d'une facture correspondant à l'exécution non contestée de prestations ; le délai de huit jours fixé dans ce courrier ne constitue pas, en tout état de cause, un élément suffisant pour faire naître un différend à son expiration, ce délai étant inférieur à celui stipulé à l'article 37 du CCAG-FCS ;

- à supposer que ce courrier de mise en demeure soit regardé comme un mémoire en réclamation, il répond aux conditions posées à l'article 37 du CCAG-FCS ;

- les stipulations du CCAG-FCS ne sont pas applicables au litige dans la mesure où les articles 25, 26 et 30 du CCAP du marché instituaient une procédure spécifique en cas de difficultés d'exécution ;

- des mises en demeure similaires concernant d'autres prestations, qui ont été adressées au GIP, ont permis d'obtenir le règlement des prestations effectuées ;

- le courrier du 9 juin 2016 ne constitue pas une simple mise en demeure dès lors qu'il comporte l'énoncé du différend et détaille les montants des sommes réclamées justifiées par des factures ;

- elle est titulaire d'une créance incontestable, les prestations commandées le 21 janvier 2016 pour un montant de 12 616,20 euros TTC ayant été réalisées en février 2016 et les prestations forfaitaires du mois d'avril 2016 ayant été exécutées ;

- le GIP ne saurait prétendre un défaut de service fait et un non-respect du cahier des charges pour justifier son refus de paiement des factures n° 3F160271, n° 3F160272, n° 3F160543 et n° 3F160584 en l'absence d'établissement, sur le fondement des stipulations du CCAP, d'un constat de défaut de qualité ;

- sa requête d'appel répond aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 juin 2018, le GIP Avitem, représenté par la SELARL D4 avocats associés, agissant par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Cejip Entretien au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'appel de la société Cejip Entretien est irrecevable faute de contester le bien-fondé du jugement attaqué ;

- la demande de l'appelante, qui n'a pas respecté la procédure prévue à l'article 37.2 du CCAG-FCS, est irrecevable ;

- la mise en demeure du 26 avril 2016 reçue par ses services le lendemain a fait naître un différend, le délai de huit jours imparti n'ayant pas été respecté ;

- la mise en demeure du 9 juin 2016 ne peut être regardée comme un mémoire en réclamation au sens de l'article 37.2 du CCAG-FCS dans la mesure où elle renvoie à la précédente mise en demeure s'agissant des deux premières factures et ajoute deux nouvelles factures ;

- deux différends sont nés, l'un le 5 mai 2016 pour les factures n° 3F160271 et n° 3F160272 et l'autre le 18 juin 2016 pour les factures n° 3F160543 et n° 3F160584 et il appartenait à l'appelante de présenter un mémoire en réclamation au plus tard le 6 juillet 2016 pour les deux premières factures et au plus tard le 19 août 2016 pour les deux dernières factures ;

- la procédure des constats d'anomalie dans l'exécution du marché est sans rapport avec le règlement des différends ;

- en tout état de cause, les demandes en paiement sont infondées, les prestations n'ayant pas été exécutées correctement ainsi qu'en attestent les nombreux courriels et la transmission des constats d'anomalie.

Par ordonnance du 12 novembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 novembre 2019.

Un mémoire a été enregistré le 28 novembre 2019 pour le GIP Avitem qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 19 janvier 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... H..., rapporteure,

- les conclusions de M. B... Thielé, rapporteur public,

- et les observations de Me C... substituant Me F..., représentant la société Cejip Entretien.

Considérant ce qui suit :

1. L'établissement public Villa Méditerranée a confié le 30 avril 2014, pour une durée d'un an, reconductible trois fois, à la société Cejip Entretien, l'exécution de prestations de nettoyage des locaux et des vitreries des bâtiments occupés par l'établissement à Marseille comprenant la Villa Méditerranée implantée sur le quai J4 et les locaux administratifs implantés au n° 43 rue de l'Evêché. Ce marché a été conclu à un prix global et forfaitaire de 332 292,09 euros toutes taxes comprises et à bons de commande sans montant minimal ni maximal. A la suite de la dissolution de l'établissement public Villa Méditerranée, le marché a été cédé au groupement d'intérêt public (GIP) Avitem par un avenant conclu le 1er février 2015. En cours d'exécution du marché, la société Cejip Entretien a, par lettres des 26 avril 2016 et 9 juin 2016, mis en demeure le GIP Avitem de lui régler des prestations effectuées. En l'absence de règlement des factures correspondantes, la société Cejip Entretien a saisi le tribunal administratif de Marseille en vue d'obtenir la condamnation du GIP Avitem à lui verser la somme de 41 587,44 euros. La société Cejip Entretien relève appel du jugement du 22 février 2018 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le GIP Avitem :

2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que les conclusions soumises au juge / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. ".

3. L'appel de la société Cejip Entretien comporte l'exposé des faits et l'énoncé des moyens sur lesquels elle entend se fonder pour demander l'annulation du jugement du 22 février 2018 du tribunal administratif de Marseille. Une telle motivation répond aux conditions de recevabilité posées par les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le GIP Avitem et tirée de ce que cette requête ne satisfait pas aux exigences de motivation résultant des dispositions précitées, ne saurait être accueillie.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Aux termes des stipulations de l'article 37.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS) approuvé par l'arrêté du 19 janvier 2009 et qui est au nombre des pièces contractuelles du marché en litige, en application de l'article 37 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) : " Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'un mémoire de réclamation exposant les motifs et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Ce mémoire doit être communiqué au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion. ".

5. Il résulte de l'instruction que, par lettre du 26 avril 2016 réceptionnée le 27 avril suivant par le GIP Avitem, la société Cejip Entretien a mis en demeure ce dernier de lui régler, dans un délai de huit jours, la somme de 40 434,59 euros dont la somme de 12 616,20 euros correspondant aux factures n° 3F160271 et n° 3F160272 pour des montants respectifs de 7 974,60 euros et de 4 641,60 euros. Cet envoi adressé par courrier recommandé avec accusé de réception, intitulé " MISE EN DEMEURE ", précisait qu'à défaut de respecter ledit délai, une action judiciaire serait engagée afin d'obtenir le recouvrement de ces créances. Il résulte également de l'instruction que, par lettre du 9 juin 2016 réceptionnée le 10 juin suivant par le GIP Avitem, la société Cejip Entretien a mis en demeure ce dernier de lui régler, dans un délai de huit jours, la somme de 69 405,83 euros dont la somme de 28 971,24 euros correspondant aux factures n° 3F160543 et n° 3F160584 pour des montants respectifs de 27 818,39 euros et de 1 152,85 euros ainsi que, à nouveau, la somme de 12 616,20 euros correspondant aux factures n° 3F160271 et n° 3F160272. Cet envoi adressé par courrier recommandé avec accusé de réception, intitulé " MISE EN DEMEURE ", précisait qu'à défaut de respecter ledit délai, une action judiciaire à son encontre serait engagée afin d'obtenir le recouvrement de ces créances.

6. Il est constant, qu'à la suite de la réception de ces deux mises en demeure adressées par lettres recommandées avec accusés de réception, le GIP Avitem n'a pas procédé au règlement des sommes réclamées, à hauteur de 12 616,20 euros et de 28 971,24 euros correspondant aux factures n° 3F160271, n° 3F160272, n° 3F160543 et n° 3F160584, dans le délai de huit jours fixé par son auteure au-delà duquel elle considèrerait l'absence de réponse à sa demande comme signifiant un rejet ni, au demeurant, postérieurement à ce délai. Dès lors, et ainsi que l'a jugé le tribunal, un différend opposant la société Cejip Entretien au GIP Avitem est né, au sens des stipulations de l'article 37.2 du CCAG-FCS, avec les refus implicites de payer les sommes réclamées par ces deux mises en demeure, ainsi exprimés par le GIP Avitem les 5 mai 2016 et 18 juin 2016.

7. La société Cejip Entretien ne peut, pour démontrer que les stipulations du CCAG-FCS ne sont applicables au présent litige et qu'aucun différend n'est né aux dates retenues par les premiers juges, se prévaloir des articles 25, 26 et 30 du CCAP du marché dont elle est titulaire et qui institueraient une procédure spécifique en cas de difficulté d'exécution, ces dispositions ayant seulement vocation, d'une part, à régir des situations, tels des défauts d'intervention ou de qualité ou encore des ruptures d'approvisionnement, menant à la rédaction de " constat d'anomalies " permettant d'appliquer, le cas échéant, des pénalités et, d'autre part, de décrire la procédure d'établissement des factures et des conditions de paiement. Par ailleurs, l'article 37 du CCAP du marché litigieux relatif aux " Dérogations ", qui déroge aux articles 4, 11 et 14 du CCAG-FCS, n'entend pas déroger à son article 37. Enfin, est sans incidence, la circonstance alléguée que des mises en demeure similaires à celles des 26 avril 2016 et 9 juin 2016 adressées au GIP Avitem lui auraient permis de recouvrer d'autres sommes impayées.

8. Par suite, en vertu de l'article 37.2 du CCAG-FCS cité au point 4, il appartenait à la société Cejip Entretien d'adresser au GIP Avitem un mémoire de réclamation dans le délai de deux mois suivant le jour où chacun des deux différends est ainsi apparu. Il ne résulte d'aucune des pièces versées aux débats que l'appelante a adressé au GIP Avitem avant l'expiration du délai de deux mois qui a commencé à courir les 5 mai et 18 juin 2016 un tel mémoire indiquant de manière précise et détaillée les chefs sur lesquels portaient ses réclamations et justifiant le montant de la somme réclamée. Contrairement à ce que soutient l'appelante, les mises en demeure des 26 avril 2016 et 9 juin 2016 ne sauraient, en conséquence, être regardées comme des mémoires en réclamation au sens des stipulations précitées. Dans ces conditions, faute d'avoir présenté de tels mémoires conformément aux stipulations contractuelles, la demande de la société Cejip présentée devant le tribunal administratif tendant à la condamnation du GIP Avitem à lui verser la somme totale de 41 587,44 euros, correspond aux factures n° 3F160271 et n° 3F160272 pour des montants respectifs de 7 974,60 euros et de 4 641,60 euros et aux factures n° 3F160543 et n° 3F160584 pour des montants respectifs de 27 818,39 euros et de 1 152,85 euros, était irrecevable.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Cejip Entretien n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué du tribunal administratif de Marseille est entaché d'une irrégularité pour avoir rejeté sa demande comme irrecevable.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

10. Par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins d'annulation et de condamnation présentées par la société Cejip Entretien, il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du GIP Avitem, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Cejip Entretien demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, au contraire, de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la société Cejip Entretien, à verser au GIP Avitem sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Cejip Entretien est rejetée.

Article 2 : La société Cejip Entretien versera la somme de 2 000 euros au GIP Avitem sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cejip Entretien et au groupement d'intérêt public Avitem.

Délibéré après l'audience du 22 février 2021, où siégeaient :

- Mme D... G..., présidente de la Cour,

- Mme E... H..., présidente assesseure,

- M. Philippe Grimaud, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mars 2021.

2

N° 18MA01540


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA01540
Date de la décision : 15/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Règlement des marchés.

Marchés et contrats administratifs - Règles de procédure contentieuse spéciales - Recevabilité.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : BOUTEILLER

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-03-15;18ma01540 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award