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10/03/2021 | FRANCE | N°19MA03773

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 10 mars 2021, 19MA03773


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour au titre de l'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1904532 du 4 juillet 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a r

ejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 août 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour au titre de l'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1904532 du 4 juillet 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 août 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 4 juillet 2019 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire l'autorisant à travailler dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me A... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet en refusant de lui accorder l'asile ou la protection subsidiaire ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête de M. C... a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit d'observations.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les observations de Me A..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né en 1989, a présenté une demande d'asile le 3 octobre 2017 auprès de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Celle-ci a été rejetée par une décision du 29 juin 2018 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 9 avril 2019. Par un arrêté du 7 mai 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour au titre de l'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

2. M. C... fait appel du jugement du 4 juillet 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

3. La reconnaissance de la qualité de réfugié ou l'octroi du bénéfice de la protection de la protection subsidiaire relève de la compétence de l'OFPRA, en application de l'article L. 721-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous le contrôle de la CNDA. Saisi d'un recours dirigé contre l'arrêté préfectoral mentionné au point 1, le tribunal a requalifié le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant d'accorder l'asile à l'intéressé, invoqué avec maladresse en première instance, comme tendant en réalité à contester l'appréciation portée par le préfet quant à la décision fixant le pays de renvoi. Ce moyen est écarté au point 8 du jugement attaqué. Le tribunal n'a ce faisant commis aucune irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Le préfet des Bouches-du-Rhône était en situation de compétence liée pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. C... en qualité de réfugié ou de bénéficiaire de la protection subsidiaire après les décisions de l'OFPRA et de la CNDA. Il a en outre estimé au troisième considérant de son arrêté que M. C... ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 sans s'être cru lié par ces décisions. Ce moyen doit donc être écarté.

5. En raison de cette situation de compétence liée, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté en tant qu'il refuse de délivrer un titre de séjour à M. C... en qualité de réfugié ou de bénéficiaire de la protection subsidiaire est inopérant.

6. L'arrêt du 9 avril 2019 par lequel la CNDA a rejeté le recours de l'intéressé retient notamment que s'il apparaît plausible que M. C... a exercé en qualité de policier, son récit s'est révélé incohérent et insuffisamment personnalisé en ce qui concerne ses activités visant à dénoncer la corruption et les trafics qu'il observait, que la copie d'un rapport rédigé en 2016 par ses soins ne saurait établir la réalité des faits allégués en l'absence de déclarations claires et cohérentes de sa part, qu'il a narré les circonstances de son arrivée en France en 2014 de façon confuse et lacunaire et n'a pas été en mesure d'expliquer les motifs de son retour en Algérie en 2017 alors même qu'il avait voulu déposer une demande d'asile auprès des autorités françaises dès 2014, qu'il s'est borné à une explication évasive et dénuée de conscience politique sur son opposition à la candidature du président Bouteflika à un quatrième mandat, et qu'il n'a fourni aucune indication tangible, fondée sur des éléments factuels précis et crédibles, en ce qui concerne les recherches diligentées à son encontre par les autorités algériennes du fait d'une vidéo en sa possession.

7. Devant la cour, M. C... se prévaut d'un entretien réalisé avec une journaliste de la chaîne Al-Amal TV réalisé " en 2018 ". Cet entretien porte principalement sur un mouvement de protestation de policiers algériens en 2014, dont certains auraient ultérieurement fait l'objet de représailles sur leur carrière administrative. M. C..., qui indique avoir quitté la police algérienne, n'est pas exposé à de telles représailles, qui en tout état de cause ne revêtent pas le caractère d'un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La contestation du pouvoir en place et de ses dysfonctionnements s'est largement répandue dans la société algérienne, notamment dans le cadre du mouvement Hirak. La formulation de critiques n'expose pas par elle-même à des traitements inhumains ou dégradants en Algérie, et M. C... n'apporte pas d'éléments circonstanciés sur le fait qu'il y serait personnellement exposé. Il ne peut sérieusement soutenir être dans la même situation que le général Hocine Benhadid, arrêté le 12 mai 2019. Par suite, la décision fixant le pays de renvoi ne méconnaît pas l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. L'Etat, qui n'est pas tenu aux dépens, n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font en conséquence obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. C... sur leur fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... C..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 15 février 2021, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mars 2021.

4

No 19MA03773


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03773
Date de la décision : 10/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : KAMENI

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-03-10;19ma03773 ?
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