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16/02/2021 | FRANCE | N°20MA00246

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 16 février 2021, 20MA00246


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 1910129 du 9 décembre 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la co

ur :

Par une requête enregistrée le 20 janvier 2020, M. C..., représenté par Me A..., demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 1910129 du 9 décembre 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 janvier 2020, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 28 novembre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui ne pouvait être fondée sur le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est dépourvue de base légale ;

- cette décision, qui est entachée d'une erreur de fait, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation ;

- la décision de refus de délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ;

- cette décision n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;

- elle méconnaît le 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu des circonstances particulières dont il justifie.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant tunisien né en 1987, est entré régulièrement en France le 10 septembre 2010 muni d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant ". Il s'est ensuite vu délivrer une carte de séjour temporaire portant cette mention et régulièrement renouvelée jusqu'au 31 octobre 2017. A l'occasion de la demande de renouvellement de son titre de séjour, l'intéressé a sollicité un changement de statut et la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " commerçant ". Par un arrêté du 14 septembre 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande et a notamment assorti ce refus d'une mesure d'éloignement. L'intéressé, qui s'est maintenu sur le territoire français, a été interpellé le 28 novembre 2019 à la suite d'un contrôle d'identité. Par un arrêté du même jour, le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. M. C... relève appel du jugement du 9 décembre 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 28 novembre 2019.

2. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., qui résidait en France depuis plus de neuf ans à la date de l'arrêté contesté, a exercé, parallèlement à ses études supérieures et ainsi qu'il y était autorisé, une activité professionnelle à temps partiel du 2 mars 2012 au 16 mai 2017 au sein d'une entreprise du secteur du bâtiment. L'intéressé a créé, le 1er décembre 2017, une entreprise de peinture et de rénovation qu'il dirige depuis lors. Les nombreuses pièces produites pour la première fois en appel par M. C... permettent d'établir la viabilité de son entreprise régulièrement créée à une date à laquelle il était titulaire d'un récépissé de demande de titre de séjour en cours de validité et l'autorisant à exercer une activité professionnelle non salariée. Dans les circonstances très particulières de l'espèce, compte tenu, en particulier, de la durée de la présence en France de M. C... ainsi que de son intégration professionnelle réussie, et alors même qu'il est célibataire et sans charge de famille, le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement en litige sur la situation personnelle de l'intéressé. Par suite, M. C... est fondé à demander l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ainsi que, par voie de conséquence, celle des décisions, également contenues dans l'arrêté contesté, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination.

3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des BouchesduRhône du 28 novembre 2019.

4. L'exécution du présent arrêt n'implique pas qu'un titre de séjour soit délivré à M. C.... L'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement que le préfet des BouchesduRhône, conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, procède au réexamen de la situation de M. C... et munisse l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour. Par suite, il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à cette autorité de procéder au réexamen de la situation de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui remettre, sans délai, une autorisation provisoire de séjour.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille du 9 décembre 2019 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet des BouchesduRhône du 28 novembre 2019 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des BouchesduRhône de procéder au réexamen de la situation de M. C... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui remettre sans délai une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 7611 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des BouchesduRhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille.

Délibéré après l'audience du 2 février 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Simon, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme E..., première conseillère,

- M. B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2021.

4

N° 20MA00246


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00246
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIMON
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : GONAND

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-02-16;20ma00246 ?
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