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11/02/2021 | FRANCE | N°19MA05377

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 11 février 2021, 19MA05377


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... G... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2017 par lequel le maire de la commune d'Apt a mis fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directrice générale des services et l'a remise à disposition de son administration d'origine à compter du 1er octobre 2017, et, d'autre part, d'enjoindre à la commune de la réintégrer dans ses fonctions, dans un délai d'un mois à compter du jugement et sous astreinte de 150 euros par jour de retard

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Par un jugement n° 1703106 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... G... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2017 par lequel le maire de la commune d'Apt a mis fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directrice générale des services et l'a remise à disposition de son administration d'origine à compter du 1er octobre 2017, et, d'autre part, d'enjoindre à la commune de la réintégrer dans ses fonctions, dans un délai d'un mois à compter du jugement et sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1703106 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés le 6 décembre 2019 et le 13 janvier 2020, Mme G..., représentée Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 3 octobre 2019 ;

2°) de faire droit à sa demande devant le tribunal administratif de Nîmes ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Apt le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas revêtu des signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- ce jugement est insuffisamment motivé ;

- les premiers juges n'ont pas fait usage de leurs pouvoirs d'instruction afin de s'assurer de la véracité des allégations de la commune ;

- ils ont dénaturé les pièces du dossier et entaché leur jugement de défaut de base légale ;

- elle a été privée d'une garantie, faute d'avoir bénéficié de l'entretien préalable prévu par l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- en mettant fin à son détachement à compter du 1er octobre 2017, l'arrêté en litige a méconnu l'article 53 précité qui prévoit que la fin du détachement prend effet le premier jour du troisième mois ;

- les agissements et carences invoquées par la commune pour justifier la perte de confiance ne sont pas établis ;

- cet arrêté est entaché de détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2020, la commune d'Apt, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme G... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme G... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

- et les observations de Me B..., représentant Mme G..., et de Me D..., substituant Me A..., représentant la commune d'Apt.

Une note en délibéré a été présentée pour Mme G... le 2 février 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Mme G..., attachée d'administrations parisiennes, a été placée en position de détachement sur un emploi fonctionnel de directrice générale des services au sein des effectifs de la commune d'Apt pour une durée de quatre ans par arrêté du 15 juillet 2016. Elle relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire du 31 juillet 2017 mettant fin à son détachement sur cet emploi et la remettant à disposition de son administration d'origine à compter du 1er octobre 2017.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte les signatures manuscrites du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience.

3. Contrairement à ce que soutient Mme G..., le jugement attaqué répond de façon précise aux moyens invoqués en première instance et notamment à celui portant sur le bien-fondé de la perte de confiance sur laquelle repose l'arrêté contesté. Par suite, ce jugement est suffisamment motivé.

4. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties. Le cas échéant, il revient au juge de mettre en oeuvre ses pouvoirs généraux d'instruction des requêtes et de prendre toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments utiles de nature à lui permettre de former sa conviction. En l'espèce, le tribunal, qui disposait de tous les éléments nécessaires afin de trancher le litige, n'a pas méconnu son office en s'abstenant de faire usage de ses pouvoirs généraux d'instruction afin de solliciter de la commune, notamment, la production d'un rapport d'observation adressé à la chambre régionale des comptes.

5. Les moyens tirés de ce que les premiers juges auraient dénaturé les pièces du dossier et entaché leur décision d'erreur de droit, qui relèvent de l'office du juge de cassation et non de celui du juge de l'appel, ne sont pas de nature à remettre en cause la régularité du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 53 de la loi susvisée du 26 janvier 1984, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire occupant un emploi fonctionnel mentionné aux alinéas cidessous et que la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, celui-ci peut demander à la collectivité ou l'établissement dans lequel il occupait l'emploi fonctionnel soit à être reclassé dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis, soit à bénéficier, de droit, du congé spécial mentionné à l'article 99, soit à percevoir une indemnité de licenciement dans les conditions prévues à l'article 98. / (...) La fin des fonctions (...) est précédée d'un entretien de l'autorité territoriale avec les intéressés et fait l'objet d'une information de l'assemblée délibérante et du Centre national de la fonction publique territoriale ou du centre de gestion ; (...) ".

7. La commune ne justifie pas, en se bornant à se référer aux mentions figurant sur l'arrêté litigieux, avoir informé le centre national de la fonction publique territoriale de la fin des fonctions de Mme G.... Toutefois, contrairement à ce que soutient la requérante, il n'entre pas dans les attributions de cet organisme de pallier les manquements de l'employeur à l'obligation qui lui incombe d'informer l'agent des droits listés au premier alinéa de l'article 53 précité. Dès lors, l'omission de cette formalité n'a privé Mme G... d'aucune garantie. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette circonstance a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de l'arrêté contesté.

8. En deuxième lieu, il peut être mis fin au détachement des agents occupant les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 53 précité pour des motifs tirés de l'intérêt du service. Eu égard à l'importance du rôle des titulaires de ces emplois et à la nature particulière des responsabilités qui leur incombent, le fait pour le directeur général des services d'une commune de s'être trouvé placé dans une situation ne lui permettant plus de disposer de la part de l'autorité territoriale de la confiance nécessaire au bon accomplissement de ses missions peut légalement justifier qu'il soit déchargé de ses fonctions. Il appartient en ce cas au juge de l'excès de pouvoir de contrôler notamment si l'appréciation portée par la collectivité territoriale sur le comportement de l'intéressée n'est pas entachée d'une erreur manifeste.

9. Il résulte des termes mêmes de l'arrêté contesté que, pour décider de mettre fin à compter du 1er octobre 2017, au détachement Mme G... sur l'emploi fonctionnel qu'elle occupait, le maire s'est fondé sur sa perte de confiance en l'intéressée, en raison de ses retards dans la réalisation des objectifs qui lui avaient été fixés s'agissant, en particulier de l'élaboration et de la mise en oeuvre de la politique managériale des services, de l'animation de l'équipe de direction, de la stratégie et des politiques de ressources humaines et de finances.

10. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des échanges de courriels et des attestations d'agents et d'élus que la commune d'Apt a versés au dossier, que dès les premières semaines de sa prise de poste, Mme G... a rencontré des difficultés à s'adapter à l'organisation en place, à entretenir des relations de travail saines avec ses collaborateurs, et à accepter sa place de directrice générale des services, en particulier par rapport aux élus. Ces difficultés ont été à l'origine de nombreux dysfonctionnement et retards dans le fonctionnement des services communaux, en ce qui concerne notamment la mise en place d'un plan de formation des agents de la commune, la constitution de dossiers de subvention, le renouvellement de contrats d'équipements sportifs, la transmission à la chambre régionale des comptes d'un rapport de progression et le recrutement de personnel. Dans ces conditions, et quelle que soit la qualité du travail qu'elle aurait effectué par ailleurs, c'est à bon droit que le tribunal a considéré que Mme G... se trouvait dans une situation ne lui permettant plus de disposer de la part de l'autorité territoriale de la confiance nécessaire au bon accomplissement de ses missions et, par suite, que le maire d'Apt a pu, sans commettre d'erreur de fait ou d'erreur manifeste d'appréciation, prendre la décision contestée en se fondant sur un tel motif.

11. En dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Il s'ensuit que sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Mme G... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune d'Apt et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.

Article 2 : Mme G... versera à la commune d'Apt une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... G... et à la commune d'Apt.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président,

- Mme F..., présidente-assesseure,

- M. C..., conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.

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N° 19MA05377


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA05377
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Détachement et mise hors cadre - Détachement.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Divers.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre SANSON
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : HERREN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-02-11;19ma05377 ?
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