Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... E... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler les décisions du 13 août 2019 par lesquelles le préfet de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour et une autorisation de travail, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et l'a assigné à résidence.
Par un jugement n° 1902815 du 19 août 2019, le tribunal administratif de Nîmes a renvoyé en formation collégiale les conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour et d'autorisation de travail et rejeté sa demande concernant l'obligation de quitter le territoire français et l'assignation à résidence.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 12 septembre 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes du 19 août 2019 ;
2°) d'annuler les décisions du 13 août 2019 par lesquelles le préfet de Vaucluse l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et l'a assigné à résidence ;
3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " et de lui restituer son passeport.
Il soutient que :
- il remplissait les critères d'une admission exceptionnelle par le travail ainsi que celles de la délivrance d'un titre salarié et il fait état de considérations humanitaires ;
- les décisions portent atteinte à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison du bannissement par sa famille nucléaire et de sa vie privée constituée en France.
La procédure a été régulièrement communiquée au préfet de Vaucluse qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... relève appel du jugement du 19 août 2019 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 13 août 2019 par lesquelles le préfet de Vaucluse l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et l'a assigné à résidence.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / (...) ". Aux termes de l'article 13 de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la circulation et le séjour des personnes du 1er août 1995 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation respective des deux États sur l'entrée et le séjour des étrangers sur tous les points non traités par la convention. ". L'article 6 de la même convention stipule que : " Les ressortissants de chacun des Etats contractants désireux d'exercer sur le territoire de l'autre État une activité professionnelle (...) doivent être munis du visa de long séjour prévu à l'article 4 après avoir été autorisés à exercer cette activité par les autorités compétentes de l'Etat d'accueil. ". En outre, aux termes du deuxième alinéa du paragraphe 321 de l'article 3 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires, dans sa rédaction issue de l'article 3 de l'avenant du 25 février 2008, entré en vigueur le 1er août 2009 : " La carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", d'une durée de douze mois renouvelable, ou celle portant la mention "travailleur temporaire" sont délivrées, sans que soit prise en compte la situation de l'emploi, au ressortissant sénégalais titulaire d'un contrat de travail visé par l'Autorité française compétente, pour exercer une activité salariée dans l'un des métiers énumérés à l'annexe IV. ".
3. A supposer que M. A... ait entendu exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées, il ressort des pièces du dossier qu'il n'était pas titulaire d'un visa long séjour et ne pouvait donc se voir délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ". Dans ces conditions, même si M. A... exerçait préalablement un des métiers énumérés par l'annexe IV de l'accord franco sénégalais, le préfet ne pouvait que rejeter sa demande de titre de séjour.
4. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 31 de l'avenant précité du 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention " salarié " s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail.- soit la mention " vie privée et familiale " s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels. ". Il ressort de ces dispositions que le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il appartient en tel cas à l'intéressé de présenter à l'appui de sa demande l'ensemble des éléments caractérisant sa situation personnelle de nature à justifier l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions de cet article.
5. En l'espèce, à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle, M. A... se prévaut de son emploi exercé en 2014 et 2015 auprès de l'entreprise JMA bâtiment restauration puis de son emploi de cuisiner exercé depuis juin 2016 auprès de l'entreprise BRA restauration. Toutefois il ressort des pièces du dossier que ce dernier emploi a été obtenu grâce à l'utilisation d'une fausse carte de résident. Dans ces conditions, il ne peut justifier de motifs exceptionnels sur le seul fondement de son ancienneté de travail. En outre, la circonstance, à la supposer établie, que M. A... aurait été rejeté par sa famille en raison de son orientation sexuelle ne saurait suffire à caractériser des " circonstances humanitaires " au sens des dispositions précitées. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de séjour ne peut qu'être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
7. A supposer que l'intéressé se prévale de la méconnaissance de ces stipulations en faisant état de ses craintes en cas de renvoi au Sénégal, il n'établit par aucune pièce avoir été banni en raison de son orientation sexuelle ou être exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est en couple avec un ressortissant français depuis le mois de mars 2018, soit depuis un an et demi seulement au jour des décisions en litige. S'il indique vouloir conclure un pacte civil de solidarité en 2020, il n'établit pas avoir signé un tel engagement. Il n'apporte également aucun élément sur une vie commune avec son conjoint. En outre, il n'établit pas être dépourvu de toute attaches familiales dans son pays d'origine, et n'établit pas non plus, comme il a été dit auparavant, avoir été banni en raison de son orientation sexuelle. Dans ces conditions, et nonobstant la circonstance qu'il a effectivement travaillé plusieurs années sur le territoire français, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de Vaucluse aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa requête.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
11. Par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A..., il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2020 où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 janvier 2021.
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N° 19MA04329
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