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24/12/2020 | FRANCE | N°18MA04911

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 24 décembre 2020, 18MA04911


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2016 du préfet du Gard approuvant le plan de prévention des risques d'inondation sur le territoire de la commune de Vers-Pont-du-Gard ainsi que la décision du 13 décembre 2016 par laquelle cette autorité a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1700119 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et u

n mémoire complémentaire, enregistrés le 22 novembre 2018 et le 19 février 2020, Mme A... B... ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2016 du préfet du Gard approuvant le plan de prévention des risques d'inondation sur le territoire de la commune de Vers-Pont-du-Gard ainsi que la décision du 13 décembre 2016 par laquelle cette autorité a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1700119 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 22 novembre 2018 et le 19 février 2020, Mme A... B... née E..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 septembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2016 du préfet du Gard ainsi que la décision du 13 décembre 2016 de cette autorité rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la commission d'enquête a insuffisamment motivé ses conclusions en méconnaissance de l'article R. 123-19 du code de l'environnement ;

- en violation des prescriptions de ce même article, les conclusions de la commission d'enquête ne font pas l'objet d'un document séparé ;

- à défaut pour le préfet d'avoir levé la réserve qui assortissait l'avis favorable rendu par la commission d'enquête sur le projet de PPRi, cet avis est réputé défavorable ;

- la qualification en " zone non urbaine " de la partie haute de sa parcelle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement en " zone non urbaine avec aléa résiduel - R-NU " de cette parcelle est entaché d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que, la hauteur d'eau y étant estimée nulle, elle ne saurait donc être exposée à un risque d'inondation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2020, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... née E... relève appel du jugement du 25 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande présentée par sa mère, Mme D... E..., tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 septembre 2016 du préfet du Gard approuvant le plan de prévention des risques d'inondation sur le territoire de la commune de Vers-Pont-du-Gard ainsi que la décision du 13 décembre 2016 par laquelle cette autorité a rejeté son recours gracieux. Au regard des écritures de la requérante, cette demande doit être regardée comme tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Gard en tant seulement qu'il classe la parcelle cadastrée B 912 sur la commune de Vers-Pont-du-Gard en zone " non urbaine avec aléa résiduel - R-NU ".

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies./ Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public./ Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...) ".

3. D'une part, si la commission d'enquête n'est pas tenue de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête, elle doit porter une analyse sur les questions soulevées par ces observations et émettre un avis personnel sur le projet soumis à enquête en indiquant, au moins sommairement, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

4. Il ressort des énonciations du rapport de la commission d'enquête établi le 30 juin 2016, à l'issue de l'enquête publique, que celle-ci a procédé à l'analyse des réponses apportées par la direction départementale des territoires et de la mer à chaque observation émise par les participants, au cours de l'enquête. Elle a ainsi fait mention du caractère satisfaisant ou insatisfaisant des réponses apportées dans ce cadre et a développé, lorsqu'elle l'a estimé nécessaire, les justifications de son appréciation. La commission a conclu en émettant un avis favorable sur le projet, sous réserve que le plan de prévention des risques d'inondation finalisé prenne en compte l'ensemble des modifications par rapport au dossier initial telles que retenues par la direction départementale des territoires et de la mer dans son mémoire en réponse et que les documents règlementaires soient modifiés en conséquence. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation de l'avis de la commission d'enquête doit être écarté.

5. D'autre part, à supposer même que le préfet n'aurait pas repris dans le plan qu'il a approuvé l'intégralité de ces modifications, il n'était en tout état de cause, tenu ni de suivre les recommandations de la commission d'enquête, ni de faire suite à la réserve qu'elle a émise.

6. Enfin, si l'article R. 123-19 précité du code de l'environnement prévoit que le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne ses conclusions " dans un document séparé ", cette disposition n'est pas méconnue lorsque, comme en l'espèce, les conclusions de l'enquête, sans faire l'objet d'un document séparé, figurent dans une partie distincte du rapport, aisément identifiable.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I.- L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. (...) ".

8. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et n'est pas contesté par la requérante, que la parcelle cadastrée section B 912 en litige est située en périphérie de la commune, à proximité de quelques constructions dispersées au sein d'une vaste zone naturelle et agricole, et n'est elle-même pas construite. Si, certes, par délibération du 16 mars 2016, le conseil municipal de Vers-Pont-du-Gard, appelé à émettre un avis sur le projet de plan de prévention des risques d'inondation de la commune, a proposé de retirer du zonage projeté, entre autres, le secteur au sein duquel se situe la parcelle en litige ou de requalifier ce secteur de " zone non urbaine avec aléa résiduel - R-NU " en " zone urbaine avec aléa résiduel - RU ", il ressort des pièces du dossier que la commune n'a pas été en mesure de justifier auprès du service instructeur de la faisabilité effective des projets d'aménagements collectifs qui, selon la requérante, motivaient cette demande, la seule production de cette délibération, qui ne fait nullement mention desdits projets, ne pouvant tenir lieu de réponse à la demande de précisions formulée par la direction départementale des territoires et de la mer. Dans ces conditions, eu égard aux caractéristiques du secteur en cause, et alors même que le préfet aurait finalement classé, dans le plan, des parcelles non bâties en zone urbaine RU et une parcelle bâtie, directement contiguë à la parcelle en litige, en zone non urbaine R-NU, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que l'arrêté querellé serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, s'agissant du classement de la partie haute de la parcelle en litige en zone non urbaine.

9. D'autre part, il ressort du rapport de présentation du plan en litige qu'outre les objectifs tenant à assurer la sécurité des personnes, à ne pas augmenter les enjeux exposés et à diminuer les dommages potentiels en réduisant la vulnérabilité des biens et des activités dans les zones exposées, ce plan entend également " préserver les capacités d'écoulement et les champs d'expansion des crues pour ne pas aggraver les risques dans les zones situées en amont et en aval ". Pour atteindre cet objectif, qui constitue une application des dispositions précitées du 2° du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, l'autorité administrative a pu légalement déterminer, en sus des aléas fort et modéré retenus pour délimiter les zones relevant de l'application des dispositions du 1° du II de ce même article, un " aléa résiduel ". Cet aléa est défini au point 4.6 du rapport de présentation, en ces termes : " L'aléa est qualifié de résiduel dans les secteurs qui ne sont pas directement exposés aux risques d'inondation au regard de la crue de référence, mais susceptibles d'être mobilisés pour une crue supérieure à la crue de référence. Ils jouent un rôle majeur de stockage de ces crues. En limite d'aléa calculé par modélisation, l'approche hydrogéomorphologique peut délimiter une zone plus large que le calcul hydraulique. Le risque y est inférieur à celui de la zone modérée et des projets d'urbanisation peuvent y être envisagés dans les zones urbanisées, tout en conservant la capacité de stockage dans les zones non urbanisées. ".

10. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la parcelle B 912 se situe au sein du lit majeur d'un cours d'eau et dans un secteur qui, s'il n'est effectivement pas directement exposé aux risques d'inondation au regard de la crue de référence, est susceptible d'être mobilisé en cas de survenance d'une crue supérieure à la crue de référence et pourra ainsi servir de champ d'expansion des eaux. Une telle fonction entre dans le cadre des prévisions des dispositions précitées du 2° du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement. Mme B... n'est donc pas fondée à soutenir que le classement de sa parcelle est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, au motif que " la hauteur d'eau pour la crue de référence est nulle " et que l'aléa résiduel ainsi défini serait alors inexistant.

11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par suite, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... née E... et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme F..., présidente de la Cour,

- M. Guidal, président-assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 décembre 2020.

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N° 18MA04911

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA04911
Date de la décision : 24/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-05-08 Nature et environnement. Divers régimes protecteurs de l`environnement. Prévention des crues, des risques majeurs et des risques sismiques.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SCP LEMOINE CLABEAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-24;18ma04911 ?
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