Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du
20 septembre 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an avec signalement dans le système d'information Schengen.
Par un jugement n° 1905693 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 20 janvier 2020, M. F... C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 décembre 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2019 du préfet des Pyrénées-Orientales ;
3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le préfet a entaché le refus d'accorder le séjour régulier d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle aux motifs qu'il réside en France depuis presque
6 années où il a fixé le centre de ses intérêts et où il justifie entretenir une relation intime avec une ressortissante française ; il souffre d'une cataracte congénitale avec un glaucome bilatéral mal équilibré et il est reconnu travailleur handicapé ; l'Algérie n'assure pas le traitement de son affection et il n'y dispose d'aucune couverture médicale ; il a travaillé en France et y a suivi des formations outre qu'il parle aisément le français ; il ne représente aucune menace pour l'ordre public ;
- les 5° et 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ont été méconnus ;
- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;
- l'obligation de quitter le territoire français qui entraîne des conséquences graves sur sa situation personnelle ainsi que la décision fixant le pays de renvoi sont illégales par voie de conséquence de celle du refus de délivrance du titre de séjour sollicité ;
- l'auteur de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français n'a pas été signée par le préfet seul compétent pour prendre un tel acte ; l'article L. 511-1 III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu, outre que l'interdiction de retour sur le territoire national porte gravement atteinte au droit à sa vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2020, le préfet des Pyrénées-Orientales conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la requête de M. C... qui est identique à sa demande de première instance est irrecevable au motif qu'elle ne présente aucun moyen d'appel ; pour le surplus il fait valoir que les moyens du requérant sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier :
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien, né le 12 mai 1993 à Ain Témouchent (Algérie), est entré en France le 11 février 2014 muni d'un visa de court séjour délivré pour raisons médicales, a bénéficié d'un certificat de résidence algérien en qualité d'étranger malade valide jusqu'au
17 septembre 2016. Il a sollicité le 25 février 2019 le renouvellement de son titre de séjour au titre de la vie privée et familiale. Il relève appel du jugement du 19 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du
20 septembre 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination de sa reconduite, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an avec signalement dans le système d'information Schengen.
Sur les conclusions d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, la décision contestée comporte dans ses visas et motifs toutes les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière du requérant au regard des stipulations et dispositions législatives et réglementaires applicables. Plus particulièrement, la décision contestée mentionne la situation familiale et personnelle de l'intéressé, les conditions de son séjour en France, et comporte l'appréciation de l'administration sur celles-ci. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que cette décision est insuffisamment motivée.
3. En deuxième lieu, aux termes, d'une part, de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) " (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ".
4. Aux termes, d'autre part, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., est célibataire et sans enfants. S'il se prévaut d'une relation intime avec une ressortissante française, il ne l'établit pas. Certes, la soeur, le frère, le grand-père et la cousine de M. C... résident en France. Mais, ses parents vivent toujours en Algérie, pays où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 21 ans. En outre, M. C... ne justifie pas d'une insertion particulière en France. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir, premièrement, que les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord précitées ont été méconnues, et deuxièmement, que le préfet des Pyrénées-Orientales aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en lui refusant l'admission au séjour eu égard aux buts poursuivis par cette mesure.
6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, et plus particulièrement de la demande de délivrance de titre de séjour souscrite le 25 février 2019, que M. C... n'a pas sollicité son admission en qualité d'étranger malade. Au surplus, par une décision du
15 mai 2017, notifiée à l'intéressé le 20 mai 2017 pour avoir été présentée à son domicile mais non réclamée, le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté sa demande de titre de séjour à ce titre, notamment au motif que le médecin inspecteur de santé publique a rendu le 24 septembre 2016 l'avis que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existe un traitement approprié en Algérie. Dans ces conditions, et alors et au demeurant, que M. C... ne démontre pas que sa cataracte congénitale avec glaucome bilatéral ne pourrait pas être soignée dans son pays d'origine, le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, doit être écarté.
7. En quatrième lieu, à supposer que M. C... invoque la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'aile relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale, ce moyen est inopérant à l'égard d'un ressortissant algérien dont la situation est entièrement réglée par l'accord franco-algérien susmentionné.
8. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
9. Les éléments caractérisant la vie personnelle et familiale de M. C..., entré en 2014 en France, qui est célibataire et sans enfants, dont les parents vivent en Algérie, qui ne justifie que de périodes temporaires d'embauches en 2016, période où il disposait d'un certificat de résidence algérien en qualité d'étranger malade, ce qui n'est plus le cas, et qui ne justifie d'aucune ressource régulière, ne sont pas de nature à justifier une mesure de régularisation à titre exceptionnel. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet des Pyrénées-Orientales aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. En premier lieu, il résulte des motifs exposés aux points 2 à 9 que le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à M. C... n'est pas entaché d'illégalité. Par suite, l'exception d'illégalité de ce refus de titre soulevée à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écartée.
11. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte-tenu de ce qui a été dit aux points 5 à 9, que le préfet des Pyrénées-Orientales aurait entaché sa décision faisant obligation à M. C... de quitter le territoire français d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de celle-ci sur sa situation personnelle ou d'une méconnaissance de son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
12. Il résulte de tout ce qui vient d'être dit, que le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à M. C... n'est pas entaché d'illégalité. Par suite, l'exception d'illégalité de la décision fixant le pays de renvoi doit être écartée.
En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
13. Aux termes du III de l'article L. 511-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence des cas prévus au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". Il ressort des termes mêmes des dispositions de cet article que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
14. En premier lieu, la décision attaquée a été signé par M. E... D..., directeur de la citoyenneté et de la légalité de la préfecture des Pyrénées-Orientales en vertu d'un arrêté n° 2018155-005-1 du 4 juin 2018, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs du même jour, par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a donné délégation pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige, doit être écarté.
15. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué vise l'article cité au point 13, et précise notamment que M. C... a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement à laquelle il n'a pas déféré, qu'il a été interpellé le 31 août 2019 pour conduite sous l'emprise d'alcool et de stupéfiant, qu'il s'est déclaré célibataire et sans enfant, qu'il dispose en Algérie de liens familiaux, et que sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public. L'arrêté fixe une interdiction de retour sur le territoire français pendant une année. Comme dit par les premiers juges, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordé à chaque critère. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté attaqué sur ce point, doit être écarté.
16. En troisième lieu, au vu des considérations précédemment énoncées aux points 5 et 15, le moyen tiré du caractère manifestement disproportionné de la décision d'interdiction de retour, doit être écarté, ainsi que celui de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
17. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de
non-recevoir opposée par le préfet des Pyrénées-Orientales, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2020, où siégeaient :
- M. Badie, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2020.
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N° 20MA00257