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10/12/2020 | FRANCE | N°19MA01467

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 10 décembre 2020, 19MA01467


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Beaucaire et le syndicat intercommunal de la piscine de Beaucaire-Tarascon (SIPBT) à lui verser une indemnité globale de 226 289,70 euros, à parfaire à la date du jugement, en réparation des préjudices résultant de leurs manquements à l'obligation de garantir sa sécurité et de lui rechercher des possibilités de reclassement, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2012.

Par un jugement n° 1

603674 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Nîmes a admis l'intervention d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Beaucaire et le syndicat intercommunal de la piscine de Beaucaire-Tarascon (SIPBT) à lui verser une indemnité globale de 226 289,70 euros, à parfaire à la date du jugement, en réparation des préjudices résultant de leurs manquements à l'obligation de garantir sa sécurité et de lui rechercher des possibilités de reclassement, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2012.

Par un jugement n° 1603674 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Nîmes a admis l'intervention de la caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée ", a condamné le SIPBT à verser à M. B... la somme de 12 500 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2016, a condamné la société Dalkia à garantir le syndicat à hauteur de 30 % de cette condamnation, a mis à la charge du syndicat les frais d'expertise ainsi que des frais de procédure et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 mars 2019, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 29 janvier 2019 en ce qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre la commune de Beaucaire et, statuant par la voie de l'effet dévolutif, de prononcer la condamnation solidaire de la commune et du SIPBT au versement de l'indemnité allouée ;

2°) de réformer ce jugement en ce qu'il a limité à la somme de 12 500 euros le montant de cette indemnité et de porter ce montant à la somme de 226 289,70 euros, à parfaire à la date de l'arrêt à intervenir ;

3°) de réformer ce jugement en ce qu'il n'accorde les intérêts au taux légal qu'à compter du 24 novembre 2016 au lieu du 12 juin 2012 ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Beaucaire et du SIPBT, outre les entiers dépens, la somme de 2 600 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- la commune de Beaucaire, qui intervient dans la gestion de la piscine intercommunale dont elle reste propriétaire, est responsable, à l'instar du SIPBT, des conséquences du mauvais entretien de cet ouvrage public ;

- ce mauvais entretien, attesté par plusieurs rapports d'audit et de contrôle, caractérise un manquement à l'obligation de préservation de la santé et de l'intégrité physique des agents et usagers ;

- la commune et le SIPBT ont également manqué, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, à leur obligation de rechercher des possibilités de reclassements sur un poste compatible avec son état de santé ;

- les pertes de gains professionnels liées à la non-perception de ses primes et au passage retardé à l'échelon supérieur doivent être évaluées à 21 810,70 euros au 31 août 2016, et à 606 euros mensuels à compter de cette date ;

- il subit en outre, depuis le 1er août 2018, une perte de 180 euros mensuels résultant de la perte de chance d'accéder au 6ème échelon de son grade à cette date ;

- il subit, enfin, une perte de chance d'accéder à un grade catégorie A et de percevoir les traitements qui s'attachent à cette catégorie, outre des incidences sur ses droits à la retraite, soit un manque à gagner estimé à 99 979 euros ;

- son déficit fonctionnel temporaire doit être évalué à la somme de 4 500 euros ;

- il a enduré des souffrances physiques dont il sera fait une juste réparation en lui allouant la somme de 60 000 euros ;

- le déficit fonctionnel permanent dont il est atteint a été évalué à 5 % par l'expert et devra être réparé par le versement d'une somme de 20 000 euros ;

- son préjudice d'agrément, résultant de l'impossibilité de fréquenter des bassins de piscine, doit être évalué à la somme de 5 000 euros ;

- il subit un préjudice d'incidence professionnelle, résultant de l'impossibilité de continuer à exercer ses fonctions de maître-nageur sauveteur, pour la réparation duquel il est en droit de percevoir la somme de 5 000 euros ;

- il subit un préjudice moral et d'atteinte à sa réputation, résultant des manquements des collectivités dans les recherches de reclassement sur un poste compatible avec son état de santé, dont il sera fait une juste réparation en lui allouant la somme de 10 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 15 juin 2020, la caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée ", représentée par Me G... et Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son intervention est recevable ;

- elle s'en remet à la sagesse de la cour pour statuer sur la responsabilité du SIPBT ;

- contrairement à ce que soutient M. B..., les intérêts au taux légal courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ;

- les préjudices invoqués par M. B... ne sont pas établis ou bien ont fait l'objet d'une juste indemnisation par les premiers juges, à l'exception du préjudice d'agrément qui a fait l'objet d'une indemnisation excessive et qu'il y a lieu de ramener à la somme de 2 500 euros.

Par un mémoire enregistré le 24 octobre 2020, la société Dalkia conclut à la réformation du jugement du 29 janvier 2019 en ce qu'il la condamne à garantir le SIPBT des condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci à hauteur de 30 %, de rejeter les conclusions de M. B... tendant à l'élévation du montant de l'indemnité allouée en réparation de ses préjudices, de rejeter toutes conclusions présentées à son encontre et de mettre à la charge du SIPBT la somme de 3 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucun manquement dans l'exploitation des installations de la piscine de Beaucaire-Tarascon ne peut lui être reproché ;

- aucun lien de causalité ne peut être établi entre la surexposition au chlore à l'origine des préjudices de M. B... et cette exploitation.

La clôture de l'instruction a été fixée au 6 novembre 2020, par application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du même jour.

Des mémoires en défense ont été enregistrés le 14 novembre 2020, pour la commune de Beaucaire et le syndicat intercommunal de la Piscine de Beaucaire-Tarascon, postérieurement à la clôture de l'instruction, et n'ont pas été communiqués.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 6117 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office tirés de l'irrégularité du jugement du tribunal administratif de Nîmes en ce qu'il a admis la recevabilité de l'intervention de la caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée " et de l'irrecevabilité, en conséquence, de ses conclusions d'appel.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ;

- le décret du 30 septembre 1985 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant M. B..., de Me E..., représentant le SIPBT et la commune de Beaucaire, et de Me G..., représentant la caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée ".

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., éducateur territorial des activités physiques et sportives principal de 1ère classe, exerçait depuis le 15 juillet 2002, les fonctions de chef de bassin de la piscine intercommunale de Beaucaire-Tarascon, gérée par le syndicat intercommunal de la piscine de Beaucaire-Tarascon (SIPBT). Il a été déclaré inapte à exercer ses fonctions en raison d'une rhinite allergique reconnue imputable au service par décision du président du SIPBT du 11 octobre 2012. M. B... relève appel du jugement du 29 janvier 2019 en tant que par celui-ci, le tribunal administratif de Nîmes a limité à 12 500 euros le montant des indemnités réparant les préjudices résultant de son inaptitude mises à la charge du seul SIPBT et demande que le SIPBT et la commune de Beaucaire soient solidairement condamnés à lui payer une indemnité d'un montant, à parfaire, de 226 289,70 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2012.

Sur la régularité du jugement attaqué et les conclusions d'appel de la caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée " :

2. Sont seules recevables à former une intervention, dans les litiges de plein contentieux, les personnes qui peuvent se prévaloir d'un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier. La caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée ", qui s'est bornée à relever qu'elle est l'assureur du SIPBT sans alléguer être subrogée dans les droits de cet établissement, ne justifie pas d'un tel droit. Dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué en ce qu'il a admis cette intervention et, statuant par voie d'évocation, de la rejeter comme irrecevable. Doivent être également rejetées, dès lors, ses conclusions d'appel.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la responsabilité :

S'agissant du manquement à l'obligation de sécurité :

3. Il résulte de l'instruction qu'entre les années 2003 et 2011, au cours de ses fonctions de chef de bassin de la piscine intercommunale de Beaucaire-Tarascon, M. B... a été exposé à plusieurs reprises à des concentrations anormalement élevées en chloramines en raison de la vétusté des installations, en particulier des dispositifs de pompage du chlore, de ventilation de l'air et de filtration de l'eau du petit bassin.

4. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font cependant pas obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité.

5. L'article 23 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 garantit aux fonctionnaires " des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique durant leur travail. ". Selon l'article 2-1 du décret susvisé du 10 juin 1985 : " Les autorités territoriales sont chargées de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité. ". Enfin, aux termes de l'article 2 du même décret : " Dans les collectivités et établissements mentionnés à l'article 1er, les locaux et installations de service doivent être aménagés, les équipements doivent être réalisés et maintenus de manière à garantir la sécurité des agents et des usagers. (...) "

6. D'une part, il résulte de l'instruction, et il ne saurait être sérieusement contesté, que M. B... était employé par le SIPBT, sous l'autorité exclusive duquel il exerçait ses fonctions de chef de bassin. Il en découle que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la responsabilité de la commune de Beaucaire est engagée à son égard sur le fondement des dispositions citées au point 4, la responsabilité du SIPBT étant seule susceptible d'être recherchée sur un tel fondement.

7. Il est, d'autre part, constant que la compétence en ce qui concerne la gestion et l'entretien de la piscine intercommunale de Beaucaire-Tarascon a été transférée au SIPBT par arrêté du 23 janvier 1992 pris sur le fondement des dispositions désormais codifiées à l'article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales, ce dont il résulte que le SIPBT est seul investi de l'ensemble des responsabilités incombant au maître d'ouvrage à l'égard des installations en cause. Il suit de là que M. B... n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la responsabilité de la commune de Beaucaire serait engagée en raison de manquements dans l'entretien et la gestion de la piscine intercommunale en invoquant les circonstances, sans incidence à cet égard, tirées de ce que cette commune est restée propriétaire du bâtiment et qu'elle interviendrait de fait dans la gestion de la piscine intercommunale à la faveur d'un service de ressources humaines mutualisé aux attributions mal définies ou encore de personnels de direction exerçant leurs fonctions auprès de chacune de ces deux collectivités.

8. En dépit des nombreuses alertes adressées par M. B... à sa hiérarchie ainsi que des rapports d'analyse établis, notamment, par le contrôleur de sécurité de la caisse régionale d'assurance maladie Languedoc-Roussillon, par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Gard et par l'agence régionale de santé, assortis de préconisations précises, le SIPBT n'a procédé, ni fait procéder, aux travaux de rénovation nécessaires pour mettre fin à ces dysfonctionnements relevés dès l'année 2003. Dans ces conditions, le SIPBT a commis, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, une faute de nature à engager sa responsabilité présentant un lien de causalité direct avec les séquelles que M. B... conserve de ces expositions répétées à une concentration anormale en chloramines. Il est, dans ces conditions, fondé à demander l'indemnisation intégrale des préjudices résultant de ces séquelles à la charge du seul SIBPT.

S'agissant des insuffisances dans les recherches de reclassement :

9. L'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 dispose que " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi, emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. (...) " En outre, aux termes de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985 : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale ou le président du centre national de la fonction publique territoriale ou le président du centre de gestion, après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadres d'emplois. "

10. Comme cela a été rappelé au point 5, la commune de Beaucaire n'est pas l'employeur de M. B.... Elle n'avait, par suite, aucune obligation de reclassement à son égard. Le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la responsabilité de cette commune serait engagée pour avoir failli à une telle obligation, ni à se plaindre, dans le cadre du présent litige, de ce qu'elle ne lui a pas proposé de se porter candidat à un poste de rédacteur de marchés publics.

11. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'avis de la commission de réforme du 27 septembre 2012, que M. B... est inapte à exercer tout poste l'exposant à l'inhalation de particules de chlore, et notamment celui de chef de bassin qu'il occupait jusqu'alors, mais qu'il reste apte à exercer tout autre poste correspondant à son grade. Contrairement à ce que soutient M. B..., le SIPBT établit avoir activement recherché, notamment au cours des années 2013 et 2014, puis de l'année 2017, des possibilités de le reclasser en son sein, au moyen d'un aménagement de poste, et parmi les effectifs de collectivités et établissement publics géographiquement proches. En se bornant à soutenir que les recherches de reclassement n'ont pu valablement débuter avant que le comité médical ait été saisi, à alléguer, sans nullement l'établir, que le SIPBT s'est abstenu de communiquer son curriculum vitae aux employeurs publics contactés, à relever que les courriers adressés à ceux-ci par son employeur mentionnaient son inaptitude, à faire état de ce qu'un poste vacant au sein du SIPBT a été pourvu avant qu'il soit déclaré inapte et à se plaindre des procédures, étrangères au présent litige, diligentées pour le placer à la retraite d'office, M. B... ne conteste pas sérieusement la réalité de ces recherches.

En ce qui concerne les préjudices :

S'agissant des préjudices patrimoniaux :

12. M. B... n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de ses allégations selon lesquelles la rémunération qu'il percevait, avant son inaptitude, en contrepartie d'heures supplémentaires de travail serait en réalité une prime déguisée versée indépendamment de son temps de travail mensuel.

13. Il ne résulte pas de l'instruction que le passage de M. B... à l'ancienneté maximale au 5ème échelon de son grade par arrêté du 27 août 2013, qui n'est au demeurant pas contesté dans la présente instance, reposerait sur le motif tiré de la situation d'inactivité dans laquelle il se trouve ou de son inaptitude à exercer ses fonctions de chef de bassin. Il n'est, par suite, pas fondé à demander l'indemnisation du préjudice financier résultant de ce qu'il n'a pu bénéficier d'un avancement d'échelon à l'ancienneté minimale au 5ème échelon puis, pour les mêmes raisons, aux échelons successifs.

14. M. B... n'apporte pas la preuve des démarches qu'il aurait entreprises, avant d'être déclaré inapte à ses fonctions, en vue de devenir conseiller territorial des activités physiques et sportives. Il ne saurait, dès lors et en tout état de cause, prétendre au versement d'une indemnité compensant la différence entre son traitement et celui qu'il aurait perçu s'il avait accédé à ce corps.

S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux :

15. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du docteur Proust, que M. B... a subi un déficit fonctionnel temporaire partiel pendant les périodes au cours desquelles les symptômes résultant de son exposition aux chloramines l'ont contraint à bénéficier de congés maladie, entre les 1er et 7 décembre 2003, entre les 23 septembre et 2 novembre 2011, entre les 10 et 14 novembre 2011, entre les 20 novembre et 4 décembre 2011, et entre les 2 mars et 12 juin 2012, date de consolidation de son état de santé. Il sera fait une juste indemnisation de ce préjudice en le fixant à la somme de 1 000 euros.

16. Il résulte encore de l'instruction, et particulièrement de l'expertise, que M. B... subit un déficit fonctionnel permanent, évalué par l'expert à 5 %, depuis le 12 juin 2012, alors qu'il était âgé de quarante-neuf ans. Les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de ce préjudice en le fixant à la somme de 5 000 euros.

17. En réparation des souffrances physiques qu'il a endurées, évaluées à 4 sur une échelle de 1 à 7 par l'expert, M. B... est fondé à demander le versement d'une indemnité de 8 000 euros.

18. M. B..., qui invoque un préjudice d'établissement, doit en réalité être regardé comme demandant l'indemnisation de la part personnelle du préjudice d'incidence professionnelle résultant de la perte de chance d'intégrer le corps des conseillers territoriaux des activités physiques et sportives. Toutefois, ce préjudice, qu'il impute indistinctement aux manquements relevés au point 7 et à un refus du SIPBT de le laisser participer à une formation, dont la légalité n'est pas débattue dans la présente instance, ne revêt pas de caractère certain dès lors que les séquelles dont il demeure atteint ne l'empêchent pas de se présenter à l'examen professionnel d'accès à ces fonctions.

19. S'il est constant qu'il n'est pas parvenu à retrouver un emploi adapté à son état de santé, M. B... n'impute le préjudice moral et l'atteinte à la réputation qui, selon lui, en résultent, non aux manquements à l'obligation de sécurité de l'employeur mais à l'insuffisance des recherches de reclassement qu'il lui reproche. Il n'est, dès lors, eu égard à ce qui a été dit au point 10, pas fondé à demander l'indemnisation d'un tel préjudice.

20. Les premiers juges ont fait une juste évaluation du préjudice d'agrément de M. B..., résultant de sa contre-indication médicale à la fréquentation des bassins de piscine, en lui allouant à ce titre la somme de 2 500 euros.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à demander que l'indemnisation allouée par les premiers juges soit portée à la somme de 16 500 euros.

En ce qui concerne l'appel en garantie de la société Dalkia :

22. Il résulte de l'instruction que la société Dalkia, titulaire entre les années 2002 et 2011 d'un marché d'entretien et d'exploitation des installations de la piscine de Beaucaire-Tarascon, a commis plusieurs manquements dans la mission qui lui incombait, en vertu de l'article 5.1.5.9 du cahier des clauses techniques particulières, d'entretien du matériel installé en local technique, en laissant notamment subsister plusieurs années, et en dépit des nombreuses alertes qui lui ont été adressées, une fuite dans le circuit d'aspiration de la pompe de fond du petit bassin et une défectuosité dans le mécanisme de fonctionnement de la pompe doseuse de chlore. Contrairement à ce que soutient la société, il résulte notamment des rapports du 23 septembre 2009 du ministre du travail, du 22 juin 2010 de l'assurance maladie et du 27 septembre 2011 de l'ARS que ces anomalies sont à l'origine des taux anormalement élevés de chlore et de chloramines régulièrement relevés tout au long de l'exécution du contrat. En outre, si la société Dalkia fait valoir que la vétusté globale des installations de la piscine, relevée notamment dans l'audit de fin d'exploitation réalisé le 22 juin 2011, nécessitait d'importants travaux de rénovation, elle ne conteste pas sérieusement avoir, à cet égard, manqué à son devoir de conseil vis-à-vis du maître d'ouvrage. Dans ces conditions, la société Dalkia n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal l'a condamnée à garantir le SIPBT des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de 30 %.

En ce qui concerne les intérêts :

23. En vertu des dispositions de l'article 1231-6 du code civil, les intérêts au taux légal ne sont dus qu'à compter de la mise en demeure de payer et non, comme M. B... le soutient, à compter du 12 juin 2012, date de la fin de son congé pour maladie imputable au service. Il y a donc lieu d'accorder ces intérêts à compter de la demande indemnitaire préalable que M. B... a adressée au SIPBT le 21 septembre 2016 par courrier recommandé avec demande d'avis de réception dont il n'est pas contesté qu'elle a été reçue au plus tard le 26 septembre 2016.

Sur les frais liés au litige :

24. Il y a lieu de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du SIPBT la somme de 2 000 euros à verser à M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, les conclusions présentées sur ce même fondement par la société Dalkia et la caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée " doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 29 janvier 2019 est annulé.

Article 2 : L'intervention de la caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée " devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : La somme de 12 500 euros que le SIPBT a été condamné à verser M. B... par le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 29 janvier 2019 est portée à 16 500 euros. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2016.

Article 4 : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 29 janvier 2019 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 6 : Le SIPBT versera à M. B... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 7: Les conclusions d'appel incident de la société Dalkia sont rejetées.

Article 8 : Le présent jugement sera notifié à M. A... B..., à la commune de Beaucaire, au syndicat intercommunal de la piscine de Beaucaire-Tarascon, à la caisse régionale d'assurance mutuelles agricoles méditerranée " Groupama Méditerranée et à la société Dalkia.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme H..., présidente assesseure,

- M. C..., conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2020.

4

N° 19MA01467

kp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01467
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie - Accidents de service.

Procédure - Incidents - Intervention - Recevabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre SANSON
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : TURMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-10;19ma01467 ?
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