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01/12/2020 | FRANCE | N°19MA03669

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 01 décembre 2020, 19MA03669


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Home Invest a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011 et 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1703224 du 7 juin 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 août 2019 et

le 3 novembre 2020, la SCI Home Invest, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Home Invest a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011 et 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1703224 du 7 juin 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 août 2019 et le 3 novembre 2020, la SCI Home Invest, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 7 juin 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que l'administration a remis en cause une partie des amortissements correspondants aux travaux immobilisés en 2007, et donc une partie du déficit reportable à l'ouverture de la période vérifiée ;

- le mode de calcul des amortissements dont la déduction a été remise en cause n'est pas pertinent ;

- selon la doctrine administrative référencée BOI-CF-IOR-50-20 n° 200 et 210, le service des impôts doit s'attacher à faire une évaluation aussi exacte que possible des éléments qui concourent à la détermination des bases d'imposition ;

- le mode de calcul de la valeur résiduelle des appartements cédés entre 2009 et 2012, et donc des plus-values réalisées présente un caractère théorique ;

- c'est à tort que l'administration a regardé le solde créditeur du compte courant d'associé à l'ouverture de la période vérifiée comme un passif injustifié ;

- l'administration ne pouvait regarder la somme de 742 698 euros comme un revenu distribué au titre de l'exercice clos en 2012 ;

- cette somme fait l'objet d'une double imposition.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SCI Home Invest ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la SCI Home Invest.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Home Invest, qui a opté pour l'impôt sur les sociétés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013. Elle fait appel du jugement du 7 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été ainsi assujettie au titre des exercices clos en 2011 et 2012, et des pénalités correspondantes.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ".

3. La SCI Home Invest, dont les suppléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2011 et 2012 ont été régulièrement établis selon la procédure de taxation d'office, supporte la charge de la preuve de l'exagération de ses bases d'imposition.

4. En premier lieu, aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation (...) ". Aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ". Aux termes de l'article 211-1 du plan comptable général : " Un actif est un élément identifiable du patrimoine ayant une valeur économique positive pour l'entité, c'est-à-dire un élément générant une ressource que l'entité contrôle du fait d'évènements passés et dont elle attend des avantages économiques futurs ".

5. La SCI Home Invest avait fait l'acquisition, en 2003, de plusieurs appartements et caves situés dans un ensemble immobilier à Nice, qu'elle a revendus au cours des années 2009 à 2012, après avoir réalisé des travaux en 2007, qui ont été immobilisés pour un montant global de 717 009,78 euros. Le vérificateur a estimé que ces travaux, à hauteur de 604 013,53 euros, n'ont pas été réalisés pour la réfection des locaux dont la société est propriétaire. Il a remis en cause dans cette mesure la déduction des amortissements correspondants au cours des exercices clos en 2007, 2008, 2009 et 2010, et par conséquent la valeur résiduelle des éléments d'actif déduite du résultat pour les locaux cédés en 2009 et la valeur résiduelle à retenir pour déterminer les plus-values de cession réalisées au cours des années 2011 et 2012. Ces rectifications ont conduit à l'annulation du déficit reportable à l'ouverture de la période vérifiée et à l'imposition au titre des années 2011 et 2012 de plus-values sur cession d'actifs calculées en tenant compte des valeurs résiduelles ainsi déterminées.

6. D'une part, la SCI Home Invest, qui supporte la charge de la preuve, ainsi qu'il a été dit précédemment, ne produit aucun élément de nature à démontrer que l'ensemble des travaux immobilisés au cours de l'exercice clos en 2007 ont été réalisés pour la réfection des locaux dont elle était propriétaire à Nice, alors qu'elle n'a pas présenté au vérificateur l'ensemble des factures, et que les factures qui ont été présentées ne précisaient pas l'adresse du chantier, ne correspondaient pas aux locaux en cause, correspondaient à l'adresse personnelle du gérant ou étaient relatives à des travaux sans rapport avec l'ensemble immobilier, et notamment des travaux relatifs à la construction d'une maison individuelle avec piscine. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les travaux correspondants n'auraient pas dû être immobilisés et remis en cause la déduction des amortissements dans cette mesure.

7. D'autre part, le vérificateur, après avoir examiné les factures relatives aux travaux immobilisés, et en l'absence de présentation d'un plan d'amortissement détaillant les dotations comptabilisées au titre de chaque facture et de comptabilité analytique, a déterminé pour chaque compte d'immobilisation un taux forfaitaire d'admission des amortissements. Dans ces conditions, la SCI Home Invest n'est pas fondée à soutenir que le mode de calcul des amortissements dont la déduction a été remise en cause ne serait pas pertinent.

8. Enfin, le vérificateur a constaté qu'au cours de l'exercice clos en 2009, la SCI Home Invest a vendu la moitié des locaux qu'elle possédait dans l'ensemble immobilier situé à Nice, et a procédé à la sortie de la moitié de la valeur des immobilisations initialement inscrites à son actif. Faute de présentation de tout élément relatif au mode de détermination de ces sorties, il a remis en cause la déduction de la moitié des valeurs nettes comptables comptabilisées pour tenir compte de la remise en cause partielle des amortissements. S'agissant des ventes des années 2011 et 2012, qui n'ont pas été comptabilisées, en l'absence de présentation de tout élément permettant de déterminer la surface des lots vendus, il a déterminé les plus-values imposables en tenant compte des valeurs résiduelles des actifs au prorata du prix de vente global des lots au cours des deux années, elles-mêmes déterminées en tenant compte de la remise en cause partielle des amortissements. Dans ces conditions, la SCI Home Invest, qui ne produit aucun élément permettant de rattacher les opérations comptabilisées à chacun des lots cédés, n'est pas fondée à soutenir que le mode de calcul de la valeur résiduelle des locaux, et donc des plus-values réalisées, présenterait un caractère théorique.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) / 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit (...) ".

10. Le vérificateur a regardé comme un passif injustifié le solde créditeur du compte courant ouvert dans les écritures de la SCI Home Invest à l'ouverture de la période vérifiée, soit 672 409,36 euros. La société requérante, en se bornant à soutenir que la somme correspondrait à un prêt consenti par la société Habitat-Création-Innovation en 2006 à son gérant, M. A..., et que ce dernier aurait mis ces fonds à sa disposition, sans produire aucun élément de justification à l'appui de ses allégations, et alors que M. A... n'est pas associé de la SCI, ne démontre pas l'existence de la dette alléguée. La requérante soutient par ailleurs que le remboursement de l'apport qui lui aurait ainsi été consenti par M. A... aurait permis la conclusion de prêts consentis aux sociétés Cannes Live Agency, Résidence Hôtelière du Golf de Mougins et Insitu, pour des montants respectifs de 80 000 euros, 114 000 euros et 548 000 euros, et que ces sommes auraient été remboursées au cours de l'année 2015 par le reversement des sommes à la société Axe Cash, dont Mme A... est associée, et à laquelle elle aurait avancé des fonds par le biais de ce remboursement. Toutefois, les requérants ne produisent aucun élément de nature à démontrer l'existence des prêts allégués, se bornent à produire des copies de chèques dont il ressort que les sociétés Cannes Live Agency, Résidence Hôtelière du Gold de Mougins et Insitu n'ont versé, respectivement, que 42 000 euros, 58 500 euros et 72 000 euros à la société Axe Cash, soit un montant global inférieur aux sommes prétendument prêtées, et ne démontrent pas, en tout état de cause, que les formalités prévues à l'article 1690 du code civil relatif à l'opposabilité des cessions de créances auraient été respectées. C'est, par suite, à bon droit que l'administration a réintégré la somme globale de 672 409,36 euros dans le résultat imposable de la SCI Home Invest au titre de l'exercice clos en 2011.

11. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que l'administration ne pouvait pas valablement regarder une somme de 742 698 euros comme un revenu distribué au titre de l'exercice clos en 2012 est sans incidence sur le présent litige, dès lors que les impositions mises à la charge de la SCI Home Invest ne procèdent pas de la réintégration à ses résultats de cette somme.

12. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré de ce que la somme de 742 698 euros aurait fait l'objet d'une double imposition doit être écarté.

13. En dernier lieu, la SCI Home Invest n'est pas fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures, les paragraphes n° 200 et 210 de la doctrine administrative référencée BOI-CF-IOR-50-20, dès lors qu'ils ne comportent pas une interprétation différente de la loi fiscale de celle dont il est fait application par le présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SCI Home Invest au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Home Invest est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Home Invest et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2020, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er décembre 2020.

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N° 19MA03669


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