La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2020 | FRANCE | N°19MA03667

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 01 décembre 2020, 19MA03667


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par l'article 1er du jugement n° 1703215 du 7 juin 2019, le tribunal administratif de Nice a prononcé un nonlieu à statuer sur les conclusions de leur demande à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance et par l'

article 2 a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par l'article 1er du jugement n° 1703215 du 7 juin 2019, le tribunal administratif de Nice a prononcé un nonlieu à statuer sur les conclusions de leur demande à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance et par l'article 2 a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 août 2019 et le 6 novembre 2020, M. et Mme B..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 7 juin 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et des pénalités en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal administratif n'a pas statué sur le moyen tiré de ce que c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction des résultats de la société à responsabilité limitée (SARL) Regency d'une charge exceptionnelle correspondant à la perte du fonds de commerce, et regardé la somme correspondante comme un revenu réputé distribué ;

- la proposition de rectification du 27 octobre 2014 est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

cette proposition de rectification est insuffisamment motivée au regard des énonciations de la doctrine administrative référencée BOICFIOR1040, n° 190 ;

- c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction des résultats de la société à responsabilité limitée (SARL) Regency d'une charge exceptionnelle correspondant à la perte du fonds de commerce, et regardé la somme correspondante comme un revenu réputé distribué ;

- il n'est pas démontré que M. B... aurait appréhendé les revenus réputés distribués par la SARL Regency.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre de l'année 2011, à l'issue duquel l'administration les a assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à raison de revenus regardés comme distribués par la SARL Regency. M. et Mme B... ont contesté ces impositions et les pénalités correspondantes devant le tribunal administratif de Nice, qui, par jugement du 7 juin 2019, a constaté le nonlieu à statuer sur les conclusions à fin de décharge de la demande à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance et rejeté le surplus des conclusions de la demande. M. et Mme B... font appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges ont omis de répondre au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction des résultats de la SARL Regency d'une charge exceptionnelle correspondant à la perte du fonds de commerce, et regardé la somme correspondante comme un revenu réputé distribué. Ils ont ainsi, dans la mesure où ils ont rejeté le surplus des conclusions de la demande, entaché d'irrégularité leur jugement qui doit dès lors, dans cette seule mesure, être annulé.

3. Il y a lieu pour la Cour de se prononcer immédiatement sur le surplus des conclusions de la demande présentée par M. et Mme B... devant le tribunal par la voie de l'évocation.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ".

5. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification adressée le 27 octobre 2014 à M. et Mme B... fait référence à la vérification de comptabilité de la SARL Regency et indique qu'elle a donné lieu à des rectifications. Après avoir exposé les raisons pour lesquelles M. B... doit être regardé comme ayant appréhendé les bénéfices distribués par cette société, elle précise le montant de l'imposition au titre des revenus de capitaux mobiliers à laquelle M. et Mme B... seront assujettis au titre de l'année 2011. Si elle ne mentionne pas précisément les motifs qui ont conduit l'administration à rehausser les bases imposables de la SARL Regency, elle fait néanmoins référence à la proposition de rectification adressée le 8 juillet 2014 à la SARL Regency, dont une copie a été envoyée à M. B..., qui ne conteste pas l'avoir réceptionnée antérieurement à la notification de la proposition de rectification en litige. Dans ces conditions, M. et Mme B... doivent être regardés comme ayant disposé des informations leur permettant de présenter des observations utiles. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté.

6. En second lieu, l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) ".

7. M. et Mme B... ne sauraient se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOICFIOR1040 dès lors que, relative à la procédure d'imposition, elle n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

8. En premier lieu, l'article 109 du code général des impôts dispose que : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) ".

9. L'administration a notamment réintégré dans les résultats imposables de la SARL Regency au titre de l'exercice clos en 2011 une somme de 249 755 euros correspondant à une charge exceptionnelle comptabilisée au titre de la perte du fonds de commerce de résidence hôtelière qu'elle exploitait, et regardé cette somme comme un revenu distribué sur le fondement de l'article 109,1-1° du code général des impôts. Le ministre fait valoir que si la commission communale de sécurité de la ville de Nice a dressé le 13 avril 2011 un procès-verbal émettant un avis défavorable à la poursuite de l'exploitation et prescrit de réaliser des travaux de mise en conformité de l'établissement avant le 4 août 2011, la société n'a produit aucune décision administrative d'interdiction d'exploitation ni aucun élément de nature à justifier que le coût des travaux de mise en conformité aurait impliqué des dépenses excessives au regard de la valeur de la résidence hôtelière prise à bail. Par suite, il doit être regardé comme démontrant que la dépréciation du fonds de commerce exploité par la SARL Regency n'était pas irréversible. Les requérants, en se bornant à invoquer l'impact financier des travaux nécessaires, l'absence de trésorerie suffisante et la décision de la société de cesser son activité, sans produire aucun élément de justification à l'appui de leurs allégations, ne justifient pas du caractère déductible de la charge en cause. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a réintégré la charge exceptionnelle dans les résultats imposables de la SARL Regency au titre de l'exercice clos en 2011 et regardé cette somme comme un revenu réputé distribué sur le fondement de l'article 109,1-1° du code général des impôts.

10. En second lieu, aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 ". Ni les dispositions de l'article 117 précité, ni celles d'aucun autre texte législatif ne font obstacle, dans le cas où la personne morale interrogée a refusé ou s'est abstenue, dans le délai imparti, de lui fournir les indications demandées, à ce que l'administration s'efforce d'identifier le véritable bénéficiaire de l'excèdent de distribution et impose celui-ci à son nom, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, dès lors qu'elle est en mesure d'établir que la personne concernée a effectivement appréhendé les sommes correspondantes. L'administration est, toutefois, dispensée de cette justification lorsque, même après l'expiration du délai de trente jours prévu par l'article 117 du code général des impôts, le dirigeant de la personne morale s'est lui-même désigné comme étant le bénéficiaire des sommes dont il s'agit. Dans ce cas et s'il entend contester l'imposition à son nom de ces sommes, il appartient à l'intéressé de démontrer qu'en réalité, il ne les a pas appréhendées.

11. En réponse à la demande que l'administration lui avait adressée en application des dispositions de l'article 117 du code général des impôts, il n'est pas contesté que la SARL Regency, a, par lettre du 21 octobre 2014 sous la signature de son gérant, M. B..., désigné celui-ci comme bénéficiaire des revenus réputés distribués. Dans ces circonstances, M. B... doit être regardé comme ayant appréhendé les revenus réputés distribués, à défaut de preuve contraire apportée devant le juge de l'impôt, sans qu'ait d'incidence la circonstance qu'il n'aurait procédé à cette désignation que pour éviter l'application à la société de la pénalité prévue à l'article 1759 du code général des impôts. Par conséquent, le moyen tiré de ce que M. B... n'aurait pas appréhendé les revenus réputés distribués par la SARL Regency doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à demander la décharge du surplus des impositions et pénalités en litige.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent M. et Mme B... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nice n° 1703215 du 7 juin 2019 est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. et Mme B... devant le tribunal administratif de Nice ainsi que leurs conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2020 où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er décembre 2020.

6

N° 19MA03667


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award