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01/12/2020 | FRANCE | N°19MA02938

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 01 décembre 2020, 19MA02938


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Youpass a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1803339 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 juin 2019, le 4 oc

tobre 2019, le 28 janvier 2020 et le 4 mars 2020, la SAS Youpass, représentée par Me A..., demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Youpass a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1803339 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 juin 2019, le 4 octobre 2019, le 28 janvier 2020 et le 4 mars 2020, la SAS Youpass, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 26 avril 2019 ;

2°) de transmettre à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle relative à l'interprétation du principe de neutralité fiscale issu de l'article 203 de la directive 2006/112/UE dans le cas d'une prestation financière fournie par l'intermédiaire d'un service de paiement mobile ;

3°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, et des pénalités correspondantes ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- nonobstant les dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts, la seule circonstance que les factures qu'elle a émises pour être payées par les sociétés de micro-paiement mentionnent la taxe sur la valeur ajoutée ne justifie pas qu'elle soit redevable de cette taxe dès lors que c'est à tort que les opérateurs téléphoniques ont débité les forfaits téléphoniques des particuliers en soumettant à la taxe sur la valeur ajoutée la composante " S " (service) des numéros " SVA " (service à valeur ajoutée) qu'ils ont utilisés pour obtenir la monétisation des crédits téléphoniques ou de la fraction des cartes prépayées qu'ils n'avaient pas consommés ;

- les incertitudes portant tant sur le traitement fiscal de la composante " S " des numéros " SVA ", qui devrait être regardée comme une opération de paiement exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en application du c) du 1° de l'article 261 C du code général des impôts, que sur les prestations financières fournies grâce à l'utilisation d'un numéro " SVA ", qui devraient être appréciées au niveau de l'opération économique d'ensemble, justifient la saisine de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) de questions préjudicielles ;

- l'absence de saisine de la CJUE méconnaît l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Youpass ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 27 août 2020 a prononcé la clôture de l'instruction à la date de son émission en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment son article 267 ;

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code monétaire et financier ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la société Youpass.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Youpass exploite un site internet qui propose à ses clients d'obtenir le remboursement en euros de la part de leur forfait correspondant aux crédits téléphoniques ou à la fraction de leur carte prépayée qu'ils n'ont pas utilisés. Pour y parvenir, les clients doivent d'abord appeler un numéro téléphonique surtaxé mis à la disposition de la SAS Youpass par des sociétés de micro-paiement. Le coût de la communication, entièrement soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, est déduit du forfait téléphonique non utilisé et l'opérateur de télécommunication verse une partie des montants qui lui ont été ainsi payés aux prestataires de micro-paiement qui, eux-mêmes, reversent une partie de ces montants à l'exploitant du site internet, la SAS Youpass, afin qu'elle " rembourse " ses clients. Celle-ci fait appel du jugement du 26 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, et des pénalités correspondantes.

2. En premier lieu, aux termes du 3 de l'article 283 du code général des impôts : " Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation ". Il résulte de l'instruction, et il est d'ailleurs constant, que les rappels de taxe réclamés à la SAS Youpass correspondent aux montants, déduction étant faite des droits de taxe spontanément acquittés par la société sur la marge qu'elle a réalisée, qu'elle a mentionnés dans les factures qu'elle a émises pour être payée par les sociétés de micro-paiement. Pour ce seul motif, et alors qu'elle n'a pas émis en tout état de cause de factures rectificatives, elle est redevable de ces rappels. Par suite, la circonstance selon laquelle, en payant à ses clients un montant incluant la taxe sur la valeur ajoutée, elle leur permettait d'avoir un remboursement correspondant à celui dont ils auraient dû bénéficier si les opérateurs téléphoniques n'avaient pas soumis à la taxe sur la valeur ajoutée des prestations financières en méconnaissance du 1° de l'article 261 C du code général des impôts est sans incidence sur les rappels de taxe en litige.

3. En second lieu, aux termes de l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " La Cour de justice de l'Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel : (...) b) sur la validité et l'interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l'Union. / Lorsqu'une telle question est soulevée devant une juridiction d'un des États membres, cette juridiction peut, si elle estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de statuer sur cette question (...) ". L'article 203 de la directive du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée dispose que : " La TVA est due par toute personne qui mentionne cette taxe sur une facture ". Ces dernières dispositions sont similaires à celles précédemment citées du 3 de l'article 283 du code général des impôts. Dès lors que les rappels réclamés correspondent aux montants de taxe sur la valeur ajoutée mentionnés sur les factures émises par la SAS Youpass, il n'y a pas lieu de demander à la CJUE d'indiquer si l'utilisation d'un service téléphonique payant pour obtenir le remboursement en euros de la fraction du forfait téléphonique non utilisée constitue, au moins en partie, une opération de paiement exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée. Les questions proposées par la SAS Youpass n'étant pas nécessaires pour rendre le présent arrêt, l'absence de saisine de la CJUE ne méconnaît pas son droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Youpass n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la SAS Youpass au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Youpass est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Youpass et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2020, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. B..., président assesseur,

- Mme Carotenuto, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er décembre 2020.

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N° 19MA02938

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02938
Date de la décision : 01/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Communautés européennes et Union européenne - Application du droit de l'Union européenne par le juge administratif français - Renvoi préjudiciel à la Cour de justice.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : TAIEB

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-01;19ma02938 ?
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