Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Domaine de la Palombière a demandé au tribunal administratif de Nice :
- par une première demande, d'annuler l'arrêté du 19 août 2016 par lequel le maire de la commune de Saint-Jeannet a prononcé la fermeture de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) " La Palombière " ;
- par une deuxième demande, d'annuler la décision du 2 septembre 2016 par laquelle le maire de la commune de Saint-Jeannet a indiqué maintenir l'arrêté du 19 août 2016 décidant la fermeture de l'EHPAD " La Palombière ", d'enjoindre au maire d'abroger cet arrêté et d'autoriser la réouverture de l'établissement, dans un délai de cinq jours à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
- par une troisième demande, d'annuler l'arrêté du 20 août 2016 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a prononcé la fermeture de l'EHPAD " La Palombière ".
Par un jugement n° 1603660, 1604695, 1603655 du 8 janvier 2019, le tribunal administratif de Nice a joint ces trois demandes et les a rejetées.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 14 mars 2019, le 18 janvier 2020, le 11 mars 2020, le 27 juillet 2020 et le 31 juillet 2020, la SARL Domaine de la Palombière, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 8 janvier 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Saint-Jeannet du 19 août 2016, la décision de cette autorité du 2 septembre 2016 et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 20 août 2016 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Jeannet et l'Etat la somme de 3 000 euros chacun en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les décisions contestées sont entachées de vices d'incompétence ;
- elles sont entachées d'un vice de procédure ;
- elles sont entachées d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation ;
- la mesure de police est disproportionnée ;
- les décisions sont entachées d'un détournement de pouvoir.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 27 août 2019 et le 7 février 2020, la commune de Saint-Jeannet, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SARL Domaine de la Palombière la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la SARL Domaine de la Palombière ne sont pas fondés ;
- à défaut, il y a lieu de procéder à une substitution de base légale entre les dispositions des articles L. 111-8-3, R. 111-19-11 et R. 123-46 et celles de l'article L. 123-4 du code de la construction et de l'habitation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2020, le ministre des affaires sociales et de la santé conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Domaine de la Palombière ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la SELARL Domaine de la Palombière, et de Me A..., représentant la commune de Saint-Jeannet.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Domaine de La Palombière relève appel du jugement du 8 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 août 2016 du maire de la commune de Saint-Jeannet décidant la fermeture de l'EHPAD " La Palombière " aux motifs de l'absence de conformité de l'établissement en matière de sécurité ainsi que de la décision du 2 septembre 2016 de la même autorité maintenant son précédent arrêté et de l'arrêté du 20 août 2016 du préfet des Alpes-Maritimes décidant la fermeture de cet établissement.
2. Contrairement à ce qui est soutenu par la SARL " Domaine de la Palombière ", la police spéciale des établissements recevant du public, dont relèvent les EHPAD, que le maire tient du code de la construction et de l'habitation, ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre des pouvoirs de police générale prévus aux articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, pour assurer le maintien de la sécurité publique, sauf si cet usage, hors les cas d'urgence, a pour objet ou pour effet de ne pas respecter la procédure prévue par la police spéciale. Par ailleurs, le maire, en faisant usage de son pouvoir de police spéciale ou de son pouvoir de police générale de la sécurité publique pour fermer un établissement recevant du public ne méconnait pas l'étendue de sa compétence ni celle du pouvoir de police spéciale que le préfet tient des dispositions de l'article L. 331-5 du code de l'action et des familles dès lors que la police spéciale instituée par ces dispositions ne fait pas obstacle à ce que le maire prenne au titre de ses propres pouvoirs de police des mesures destinées à assurer la sécurité des résidents d'un EHPAD. Il suit de là que le maire de la commune de Saint-Jeannet était compétent pour prendre l'arrêté et la décision contestés ainsi que l'a jugé à juste titre le tribunal administratif. Par ailleurs, c'est à bon droit que les premiers juges ont rappelé au point 3 du jugement attaqué les dispositions de l'article L. 123-4 du code de la construction et de l'habitation dès lors qu'il rentre dans l'office du juge de déterminer le texte applicable au litige dont il est saisi.
3. Il ressort des pièces du dossier que la signataire de l'arrêté du 20 août 2016, Mme E..., sous-préfète de Nice-Montagne, s'est vu délivrer par arrêté n° 2016-635 du 5 août 2016 du préfet des Alpes-Maritimes régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 12 août suivant une délégation de signature pour " tous arrêtés, actes, circulaires et décisions " en cas d'absence du secrétaire général de la préfecture, du sous-préfet chargé de mission auprès du préfet et du directeur de cabinet à l'exception, pour toutes les communes, des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938, des arrêtés portant convocation des collèges électoraux et des déclinatoires de compétence et arrêtés de conflit.
4. Il revient à la société requérante, qui soutient que le signataire de l'arrêté litigieux n'était pas compétent, d'apporter des éléments suffisamment précis susceptibles d'établir que le secrétaire général, le sous-préfet chargé de mission auprès du préfet et son directeur de cabinet n'étaient pas absents ou empêchés et non, comme elle le soutient, à l'administration d'établir que les titulaires d'une délégation de signature d'un rang supérieur à celui du signataire n'étaient pas disponibles le jour où a été pris l'arrêté contesté. Ainsi, en se bornant à soutenir que l'administration n'apporte pas la preuve que le secrétaire général, le sous-préfet chargé de mission auprès du préfet et son directeur de cabinet n'étaient pas absents ou empêchés, la SARL " Domaine de la Palombière " ne conteste pas utilement la compétence du signataire de l'arrêté qu'elle conteste.
5. Si la SARL " Domaine de la Palombière " soutient que le maire de la commune de Saint-Jeannet et le préfet des Alpes-Maritimes ne pouvaient pas prononcer la fermeture de l'EHPAD dont elle assure la gestion en se fondant sur 9 nouvelles prescriptions figurant dans l'avis de la sous-commission départementale spécialisée pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public du 17 août 2016 sans l'avoir mise préalablement en demeure de lever ces nouvelles prescriptions, il ressort des pièces du dossier que les prescriptions en cause - portant les numéros 5, 7, 8, 10, 13 à 16 et 20 - figuraient déjà dans les prescriptions générales et aux points 6 à 8, 13 à 15, 26, 36 et 43 du précédent avis du 20 juillet 2016. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
6. Il ressort des pièces du dossier que la sous-commission départementale spécialisée pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public a émis des avis les 30 mars 2015, 1er juillet 2015, 1er septembre 2015, 20 juillet 2016, 17 août 2016 et 31 août 2016 défavorables à la poursuite de l'exploitation de l'EHPAD " La Palombière " assortis de prescriptions. La SARL requérante soutient qu'aux dates auxquelles sont intervenus les arrêtés du maire de la commune de Saint-Jeannet et du préfet des Alpes-Maritimes, les 19 et 20 août 2016, 10 de ces prescriptions avaient été entièrement levées et 2 l'avaient été partiellement. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les autres prescriptions figurant dans l'avis du 17 août 2016, dont il n'est pas contesté qu'elles n'avaient pas fait l'objet de levée de réserves, étaient de nature à compromettre gravement la sécurité des occupants de l'EHPAD, de même que les 11 prescriptions émises par la sous-commission dans le procès-verbal du 31 août 2016, qui n'étaient toujours pas levées le 2 septembre 2016 lorsque le maire a décidé de maintenir son arrêté du 19 août. Par suite, et dès lors que l'ensemble des préconisations de la sous-commission départementale spécialisée pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public n'ont pas été exécutées et que la sécurité des usagers n'était pas totalement assurée, le maire de la commune de Saint-Jeannet et le préfet des Alpes-Maritimes ont pu légalement décider la fermeture de l'EHPAD sans entacher les décisions contestées d'une erreur de fait ou d'une erreur d'appréciation.
7. Eu égard, d'une part, au nombre, à la réitération et à la nature des manquements et anomalies relevées dans les avis de la sous-commission départementale spécialisée pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public, d'autre part, aux travaux préconisés et, enfin, aux prescriptions émises, la fermeture de l'EHPAD " Domaine de la Palombière " ordonnée par les arrêtés du maire de la commune de Saint-Jeannet et du préfet des Alpes-Maritimes, qui présentent un caractère provisoire jusqu'à ce que les travaux nécessaires à la mise en conformité de installations au regard des conditions de sécurité soient exécutés ne revêtent pas un caractère disproportionné par rapport aux objectifs poursuivis.
8. Enfin, en se bornant à affirmer que les décisions contestées, qui reposent sur des considérations de sécurité publique et ont pour finalité de faire cesser une situation dangereuse, auraient en réalité pour seul objet de l'obliger à réaliser des travaux d'embellissement et de modernisation de l'établissement, la SARL " Domaine de la Palombière " n'établit pas que ces décisions seraient, comme elle le soutient sans apporter le moindre élément à l'appui de ses allégations, entachées de détournement de pouvoir.
9. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête de première instance, que la SARL " Domaine de la Palombière " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Jeannet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL " Domaine de la Palombière " demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SARL " Domaine de la Palombière " une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Saint-Jeannet.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL " Domaine de la Palombière " est rejetée.
Article 2 : La SARL " Domaine de la Palombière " versera à la commune de Saint-Jeannet une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL " Domaine de la Palombière ", à la commune de Saint-Jeannet, au ministre des solidarités et de la santé et au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020 où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme B..., présidente-assesseure,
- Mme D..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.
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N° 19MA01178