Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme H... F... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, résultant de la rectification du nombre de parts de leur quotient familial ainsi que la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de la même année.
Par un jugement n° 1701104 du 3 octobre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 novembre 2018 et 1er juillet 2019, M. et Mme F..., représentés par Me A..., demandent à la Cour, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 octobre 2018 ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaires d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 et la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de la même année ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les indemnités d'invalidité perçues en 2013 par M. F... ne sont pas imposables en application du 8° de l'article 81 du code général des impôts, dès lors qu'elles lui ont été versées en exécution d'un contrat de prévoyance assurance de groupe souscrit par la société First Sport France dont il était le gérant salarié, auprès de la société Vauban Humanis et auquel il avait adhéré à titre facultatif ;
- ils sont également fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction administrative référencée BOI-RSA-PENS-10-10-20-20120912 n° 40 et de la réponse ministérielle n° 20076 en date du 6 mars 1995, lesquelles prévoient que ne sont pas imposables les rentes d'invalidité versées en application d'un contrat d'assurance de groupe dont l'adhésion était facultative, ce qui est le cas en l'espèce ;
- ils remplissent les conditions pour bénéficier d'une part supplémentaire de quotient familial, en application des alinéas 3 et 4 de l'article 195 du code général des impôts, dès lors qu'ils sont tous deux bénéficiaires d'une pension d'invalidité pour accident du travail de 40 % au moins ;
- l'administration doit justifier que les rôles et l'avis d'imposition en litige ont été régulièrement établis en produisant la copie intégrale des rôles concernés, les décisions d'homologation, l'ensemble des pièces permettant de justifier de la régularité de la délégation consentie par le préfet compétent au profit d'agents de catégories A de l'administration fiscale, de la publication de ces délégations au recueil des actes administratifs et de leur affichage dans des lieux accessibles et ouverts au public, conformément aux dispositions de l'article 1658 du code général des impôts et à celles de l'article L. 104 du livre des procédures fiscales ;
- ils sont fondés sur ce point à se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-REC-PART-10-10-10 n° 90 du 12 septembre 2012 ;
- étant domiciliés en Corse en 2014, l'imposition en litige ne pouvait être établie par le comptable public du service des impôts des particuliers de Marseille (4ème arrondissement), en application des dispositions de l'article 11 du code général des impôts et de l'article L. 45-0 A du livre des procédures fiscales ;
- ils sont fondés à se prévaloir sur ce point de la doctrine administrative référencée BOI-CF-DG-30 n° 280 du 21 décembre 2017.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 23 janvier et 13 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Par une demande, en date du 1er avril 2020, réitérée le 21 août 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a été invité par la Cour, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, à produire une pièce pour compléter l'instruction.
Par un mémoire, enregistré le 9 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a informé la Cour qu'il n'était pas en mesure de produire cette pièce.
Par lettre du 28 septembre 2020, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions aux fins de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013 en tant qu'elles excèdent la demande formulée par les époux F... en première instance.
Des observations en réponse au moyen précité, présentées pour M. et Mme F..., ont été enregistrées le 2 octobre 2020 et non communiquées.
Des observations en réponse au moyen précité, présentées par le ministre de l'économie, des finances et de la relance, ont été enregistrées le 2 octobre 2020 et non communiquées.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme G...,
- et les conclusions de Mme Courbon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme F... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces de leur dossier fiscal à l'issue duquel l'administration a réduit de quatre à trois le nombre de parts de leur quotient familial au titre de l'impôt sur le revenu afférent à l'année 2013. Ils ont par ailleurs sollicité la restitution d'un trop-versé d'impôt sur le revenu au titre de cette même année, correspondant à l'imposition d'une rente d'invalidité perçue par M. F... qu'ils estiment avoir déclarée à tort. M. et Mme F... relèvent appel du jugement du 3 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, refusé de prononcer la décharge de l'imposition supplémentaire à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 résultant de la rectification du nombre de parts de leur quotient familial et, d'autre part, refusé de prononcer la réduction de l'imposition primitive mise à leur charge au titre de la même année.
2. Ils sont par ailleurs recevables à demander à la Cour, dans le dernier état de leurs écritures, la décharge totale, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013, ainsi qu'ils l'avaient sollicitée dans leur réclamation préalable du 26 octobre 2016.
Sur la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013 :
3. Aux termes de l'article 1658 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet (...). / Pour l'application de la procédure de recouvrement par voie de rôle prévue au premier alinéa, le représentant de l'Etat dans le département peut déléguer ses pouvoirs aux agents de catégorie A placés sous l'autorité des directeurs départementaux des finances publiques ou des responsables de services à compétence nationale, détenant au moins un grade fixé par décret en Conseil d'Etat. La publicité de ces délégations est assurée par la publication des arrêtés de délégation au recueil des actes administratifs de la préfecture ". Il résulte de ces dispositions que le rôle homologué permettant le recouvrement de la créance fiscale doit comporter l'identification du contribuable, ainsi que le total par nature d'impôt et par année des sommes à acquitter. En outre, il appartient à l'administration fiscale de justifier que l'agent qui homologue les rôles est titulaire d'une délégation régulièrement publiée.
4. L'extrait du rôle n° 921 par lequel l'imposition supplémentaire en litige a été mise en recouvrement, et produit par l'administration fiscale dans la présente instance, comporte l'identification de M. et Mme F... et mentionne le montant des droits à acquitter au titre de l'impôt sur le revenu pour l'année 2013. Ce rôle a été homologué le 2 juin 2015 par Mme E... B..., administratrice des finances publiques adjointe, qui a reçu délégation à cette fin par arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 8 juillet 2013. Si l'administration soutient que cet arrêté a fait l'objet d'une publication au recueil des actes administratifs de la préfecture des Bouches-du-Rhône, le ministre délégué chargé des comptes publics a cependant, par courrier du 7 septembre 2020, informé la Cour, que, " malgré les recherches effectuées auprès des services préfectoraux, l'administration n'est pas en mesure de fournir le justificatif demandé ". Dans ces conditions, le ministre ne peut être regardé comme apportant la preuve qu'à la date du 2 juin 2015, Mme B... était dûment habilitée à signer l'homologation du rôle dont s'agit par un arrêté préfectoral régulièrement publié. Ainsi, l'administration fiscale ne justifie pas avoir respecté les obligations, qui constituent une garantie pour les contribuables, prévues par les dispositions précitées de l'article 1658 du code général des impôts. Il y a lieu, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme F... ont été assujettis au titre de l'année 2013.
Sur la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013 :
5. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement ".
6. Il résulte de l'instruction que M. et Mme F... ont sollicité, par courriers des 6 janvier et 5 mai 2015, la restitution d'un trop-versé d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013 correspondant à la rente d'invalidité perçue par M. F..., qu'ils auraient déclarée à tort alors qu'elle n'est pas imposable. Les requérants ayant été imposés conformément à leur déclaration, il leur appartient, dès lors, d'établir le caractère exagéré de l'imposition mise à leur charge.
7. Aux termes de l'article 79 du code général des impôts : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu. ". Aux termes de l'article 81 du même code : " Sont affranchis de l'impôt : (...) / 8° Les indemnités temporaires, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les prestations et rentes viagères, servies aux victimes d'accidents du travail ou à leurs ayants droit ". Le champ d'application de cette disposition ne s'étend qu'aux indemnités temporaires, prestations et rentes viagères qui ont pour seul objet la couverture des conséquences dommageables d'un accident de travail ou d'un accident de service, d'une maladie professionnelle ou d'une maladie contractée en service et qui sont allouées en vertu d'obligations résultant de la loi ou de dispositions réglementaires prises pour l'application de la loi.
8. Il résulte de l'instruction que M. F... perçoit, depuis 2007, une rente d'invalidité de 2ème catégorie, versée par la société Axa France en application d'un contrat d'assurance de groupe souscrit par son employeur, la société First Sports France auprès de Vauban Humanis Prévoyance. Il ne ressort toutefois d'aucune des pièces produites par les requérants que cette rente d'invalidité lui aurait été versée en qualité de victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle et entrerait, par conséquent, dans le champ de l'exonération prévue par les dispositions précitées du 8° de l'article 81 du code général des impôts. Si M. F... justifie être titulaire d'une pension d'invalidité versée par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, qui a estimé dans la décision de notification du 6 mars 2007 qu'il présentait un état d'invalidité de 66,66 %, cette décision n'apporte aucune précision sur l'origine de cette invalidité, pas plus que les autres documents versés par les appelants. Dans ces conditions, M. et Mme F... n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, de ce que la somme litigieuse ne serait pas imposable. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que cette somme a été incluse dans leurs bases d'imposition au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2013.
9. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".
10. M. et Mme F... ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction fiscale publiée sous la référence BOI-RSA-PENS-10-10-20-20120912 § 40, aux termes de laquelle : " lorsqu'un salarié souscrit un contrat d'assurance ou adhère à un contrat d'assurance de groupe en vue de compléter son régime légal de protection sociale à l'égard notamment de l'invalidité, les rentes d'invalidité servies en exécution de ce contrat sont exclues du champ d'application de l'impôt sur le revenu dès lors que la souscription ou l'adhésion est facultative et que les primes ou cotisations payées par l'assuré ne sont pas déductibles de son revenu imposable (...) / Il n'y a pas lieu de faire de distinction selon que les prestations en cause sont temporaires ou permanentes. En effet, ces rentes ne sont versées qu'en cas de survenance d'un risque assuré et leur perception se situe dans le cadre d'une opération de prévoyance et non dans celui d'une opération de placement. Elles ne constituent donc pas des rentes viagères à titre onéreux au sens de l'article 158-6 du CGI. " ni de la réponse ministérielle à M. D..., publiée au Journal officiel du 6 mars 1995, qui dispose : " lorsqu'un salarié souscrit un contrat d'assurance ou adhère à un contrat d'assurance de groupe en vue de compléter son régime légal de protection sociale à l'égard notamment de l'invalidité, les rentes d'invalidité servies en exécution de ce contrat sont exclues du champ d'application de l'impôt sur le revenu dès lors que la souscription ou l'adhésion est individuelle et facultative et que les primes ou cotisations payées ne sont pas déductibles de son revenu imposable ", dès lors qu'ils contestent une imposition primitive et qu'ils n'ont pas fait application, dans leur déclaration de revenus, de l'interprétation qu'ils invoquent.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F... sont uniquement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.
Sur les frais d'instance :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance exposés par M. et Mme F... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : M. et Mme F... sont déchargés, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.
Article 2 : Le jugement n° 1701104 du 3 octobre 2018 du tribunal administratif de Marseille du 3 octobre 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme F... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme H... F... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lascar, président,
- Mme G..., présidente assesseure,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 5 novembre 2020.
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N° 18MA05042
mtr