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22/10/2020 | FRANCE | N°20MA01423

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 22 octobre 2020, 20MA01423


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 11 octobre 2017 du directeur général des finances publiques de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur refusant de faire intégralement droit à sa demande de versement des arriérés de rémunération qu'elle estimait lui être dus à la suite de l'arrêté du 28 décembre 2015 portant révision partielle de sa situation administrative et de condamner l'Etat à lui payer une indemnité correspondant au montant de ces rappels

de rémunération.

Par un jugement no 1709530 du 20 avril 2018, le tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 11 octobre 2017 du directeur général des finances publiques de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur refusant de faire intégralement droit à sa demande de versement des arriérés de rémunération qu'elle estimait lui être dus à la suite de l'arrêté du 28 décembre 2015 portant révision partielle de sa situation administrative et de condamner l'Etat à lui payer une indemnité correspondant au montant de ces rappels de rémunération.

Par un jugement no 1709530 du 20 avril 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18MA02913 du 11 février 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement du tribunal administratif de Marseille, annulé la décision contestée du directeur général des finances publiques en tant qu'elle refusait à Mme B... le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de l'année 2009, a enjoint au ministre de l'économie et des finances d'accorder à Mme B... l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de l'année 2009, de procéder à la reconstitution de sa carrière en lui versant les arriérés de traitement résultant de cette régularisation, a mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais du litige et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de Mme B....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mars 2020 sous le n° 20MA01423, le ministre de l'économie et des finances demande à la cour :

1°) de rectifier les erreurs matérielles entachant l'arrêt n° 18MA02913 du 11 février 2020 de la cour ;

2°) de rendre un nouvel arrêt dans l'instance n° 18MA02913.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- l'arrêt du 11 avril 2019 comporte une erreur de nom au point 6 en ce qu'elle mentionne que " M. A... a présenté sa première demande tendant au bénéfice spécifique d'ancienneté le 4 août 2012 " alors que le litige concerne Mme B... qui a présenté sa demande non le 4 août 2012 mais le 6 août 2014 ;

- au point 2 de son arrêt, la cour a relevé que Mme B... avait exercé ses fonctions en zone urbaine sensible (ZUS) à compter de l'année 2000, alors que l'intéressée a exercé ses fonctions en ZUS entre le 1er septembre 1994 et le 31 janvier 2000 et non à compter de l'année 2000 ; une telle erreur a nécessairement entaché le raisonnement du juge d'appel qui, au point 3 de son arrêt, a relevé que les droits de Mme B... ont été acquis à compter de l'année 2000, alors qu'ils ont été acquis entre le 1er septembre 1994 et le 31 janvier 2000 ;

- le juge d'appel a retenu à tort, au point 7 de son arrêt que les créances détenues par Mme B... n'étaient pas prescrites antérieurement au 1er janvier 2010, mais seulement au titre de l'année 2009, alors que l'administration avait précisé, dès ses premières écritures en défense qu'une erreur de plume affectait la décision du 11 octobre 2017 et que le point de départ de la régularisation financière versée à l'intéressée avait été fixé au 1er janvier 2009 et non au 1er janvier 2010, comme indiqué par erreur dans cette décision ;

- le juge d'appel ne pouvait donc retenir que la prescription quadriennale avait été opposée à tort pour l'année 2009 et, par voie de conséquence, ne pouvait pas annuler le jugement du tribunal administratif rejetant la demande de Mme B... ni enjoindre à l'administration de lui accorder l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de l'année 2009 et de reconstituer sa carrière en conséquence ni, enfin, mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais du litige.

La requête a été communiquée à Mme B... le 20 avril 2020, qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;

- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Alfonsi, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 833-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel (...) est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification ". Il résulte de ces dispositions que le recours en rectification d'erreur matérielle n'est ouvert qu'en vue de corriger des erreurs de caractère matériel qui ne sont pas imputables aux parties et qui ont pu avoir une influence sur le sens de la décision.

2. Par un arrêt n° 18MA02913 du 11 février 2020, la cour a annulé le jugement du 20 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille avait rejeté la demande de Mme B... dirigée contre la décision du 1er octobre 2017 du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur refusant de faire intégralement droit à sa demande de paiement de rappels de rémunération au titre de l'avantage spécifique d'ancienneté prévue au bénéfice des agents qui exercent leurs fonctions en zone urbaine sensible (ZUS). Par ce même arrêt, la cour a enjoint au ministre de l'économie et des finances d'accorder à Mme B... l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de l'année 2009 et de procéder à la reconstitution de sa carrière en lui versant les rappels de traitement résultant de cette régularisation. Le ministre de l'économie et des finances demande à la cour, sur le fondement des dispositions rappelées ci-dessus de l'article R. 833-1, de rectifier les erreurs matérielles dont est entaché cet arrêt et de rendre un nouvel arrêt dans l'instance n° 18MA02913.

3. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que la décision contestée du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur comporte une erreur de plume en ce qu'elle précise que le point de départ de la régularisation financière de la situation de Mme B... a été fixé au 1er janvier 2010, alors que le point de départ retenu en réalité avait été fixé au 1er janvier 2009 et, d'autre part, que l'administration a expressément attiré l'attention de la juridiction à cet égard, tant en première instance qu'en appel, par une note figurant au bas de la page 2 des mémoires en défense qu'elle a produits devant le tribunal et la cour. Ainsi, en jugeant que devaient être versés à Mme B... les rappels de rémunération au titre de l'avantage spécifique d'ancienneté pour l'année 2009 alors que l'administration avait déjà procédé au paiement de ces rappels de rémunération et à la régularisation subséquente de la situation administrative de l'intéressée, la cour a entaché son arrêt d'une erreur matérielle qui n'est pas imputable à l'administration. Cette même erreur a exercé une influence sur le sens du jugement de l'appel, qui aurait dû être rejeté dès lors que la cour avait par ailleurs retenu que l'administration avait opposé à bon droit la prescription quadriennale à Mme B... s'agissant des créances qu'elle prétendait détenir au titre des exercices antérieurs à 2009. Il suit de là que le ministre de l'économie et des finances est recevable à présenter une requête en rectification d'erreur matérielle de l'arrêt du 11 février 2020 de la cour et fondé à en demander la rétractation.

4. Il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il y a lieu, pour la cour, de statuer à nouveau sur l'appel interjeté par Mme B... contre le jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 avril 2018.

5. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat (...) sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis... ". Aux termes de l'article 2 de cette même loi : " La prescription est interrompue par : (...) ; Toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance(...) ; Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption (...). ". L'article 3 de cette même loi dispose : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement. ".

6. Lorsqu'un litige oppose un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit et que le fait générateur de la créance se trouve ainsi dans les services accomplis par l'intéressé, la prescription est acquise au début de la quatrième année suivant chacune de celles au titre desquelles ses services auraient dû être rémunérés.

7. Il résulte de l'instruction que Mme B..., affectée à la trésorerie d'Epinay-sur-Seine, située en zone urbaine sensible (ZUS), entre le 1er janvier 1994 et le 31 janvier 2000, a demandé, le 6 août 2014, à bénéficier de l'avantage spécifique d'ancienneté au titre du dispositif prévu, pour les agents affectés en ZUS, par le décret du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles. Publié au journal officiel du 23 mars 1995, ce décret, d'application immédiate, comporte des dispositions suffisamment précises et inconditionnelles, de sorte que Mme B... ne peut soutenir ni que la créance qu'elle détenait sur l'Etat n'avait pas acquis un caractère certain, liquide et exigible avant le 28 décembre 2015, date à laquelle est intervenu l'arrêté par lequel sa situation administrative a été régularisée, ni qu'elle se trouvait dans l'ignorance légitime de sa créance avant cette dernière date.

8. Par ailleurs, si la prescription instituée par les dispositions rappelées ci-dessus de la loi du 31 décembre 1968 peut être regardée comme ayant été interrompue par la publication, le 23 septembre 2013, d'une note de service du directeur général des finances publiques relative à la mise en oeuvre du dispositif dit " zones urbaines sensibles " au profit des agents de la DGFIP, une telle publication n'a pu avoir pour effet de rouvrir un nouveau délai pour réclamer le paiement des créances de rémunération relatives aux années pour lesquelles la prescription était déjà acquise à la date de publication de cette note, soit les exercices antérieurs au 1er janvier 2009.

9. Il résulte de ce qui précède que l'administration, après avoir opposé à bon droit la prescription quadriennale à Mme B... pour les années antérieures à 2009, a pu, comme il a été dit point 3, régulièrement fixer le point de départ de la régularisation de sa situation au 1er janvier 2009. Il suit de là que Mme B... n'est pas fondée à demander que lui soient accordés des rappels de rémunération au titre de l'avantage spécifique d'ancienneté, ni pour l'année 2009, que l'administration lui a déjà versés, ni pour les exercices antérieurs à l'année 2009, lesquels sont, comme il a été dit ci-dessus, couverts par la prescription quadriennale. Elle n'est, par suite, pas fondée à se plaindre de ce que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais du litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, les frais, non compris dans les dépens, exposés par Mme B... à l'occasion de l'instance d'appel contre le jugement n° 1709530 du 20 avril 2018 du tribunal administratif de Marseille.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative de Marseille n° 18MA02913 du 11 février 2020 est déclaré non avenu.

Article 2 : La requête d'appel de Mme B... contre le jugement no 1709530 du 20 avril 2018 du tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à Mme C... B....

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2020, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président-rapporteur,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, premier conseiller ;

- M. Sanson, conseiller

Lu en audience publique, le 22 octobre 2020

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01423
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Rectif. erreur matérielle

Analyses

54-08-05 Procédure. Voies de recours. Recours en rectification d'erreur matérielle.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Jean-François ALFONSI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-10-22;20ma01423 ?
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