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12/10/2020 | FRANCE | N°18MA01975

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 12 octobre 2020, 18MA01975


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Manif pour tous - PACA et Mme F... B... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 25 mars 2013 par laquelle le conseil municipal de Marseille a autorisé son maire à attribuer une subvention à l'association Lesbian et Gay Parade Marseille d'un montant de 100 000 euros.

Par un jugement n°1500398 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril

2018, l'association Manif pour tous - PACA et Mme B..., représentées par Me C..., demanden...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Manif pour tous - PACA et Mme F... B... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 25 mars 2013 par laquelle le conseil municipal de Marseille a autorisé son maire à attribuer une subvention à l'association Lesbian et Gay Parade Marseille d'un montant de 100 000 euros.

Par un jugement n°1500398 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2018, l'association Manif pour tous - PACA et Mme B..., représentées par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 1er mars 2018 ;

2°) d'annuler la délibération du 25 mars 2013 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Marseille une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la convention de subvention n'était pas jointe à la délibération ;

- cette convention ne contient pas de précision suffisante sur la destination des sommes attribuées, en méconnaissance de l'article 10 de la loi du 12 avril 2000 ;

- la commune ne pouvait légalement apporter son soutien à l'action en cause destinée à intervenir dans un débat national.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2018, la commune de Marseille, représentée par Me A... de la SELARL Parme Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de Mme B... et de l'association Manif pour tous - PACA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant l'association Manif pour tous - PACA et Mme B..., et de Me D... de la SELARL Parme Avocats, représentant la commune de Marseille.

Une note en délibéré, présentée pour l'association Manif pour tous - PACA et Mme B..., a été enregistrée le 29 septembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Manif pour tous - PACA et Mme B... relèvent appel du jugement du 1er mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 25 mars 2013 par laquelle le conseil municipal de Marseille a autorisé son maire à attribuer une subvention à l'association Lesbian et Gay Parade Marseille d'un montant de 100 000 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges ont relevé au point 3 du jugement attaqué que le projet de convention entre l'association Lesbian et Gay Parade Marseille et la commune de Marseille avait été transmis aux conseillers municipaux en annexe de la note de synthèse qui leur avait été adressée en vue de la séance du conseil municipal. Ce faisant, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments invoqués par les requérants destinés à prouver l'absence d'une telle transmission, a suffisamment motivé son jugement.

Sur la légalité de la délibération contestée :

3. En premier lieu, il ressort des mentions en ce sens du rapport de présentation de la délibération adressé aux conseillers municipaux avant la réunion du conseil municipal du 25 mars 2013 et de celles du document intitulé " diffusion des documents annexes à rapports au conseil municipal ", que le projet de convention de subventionnement était joint audit rapport, ainsi que l'ont jugé les premiers juges. La circonstance que la convention de subventionnement produite à l'instance ne porte pas la date de sa signature et n'a été transmise à la préfecture que le 23 avril 2013, postérieurement à la délibération litigieuse, est à cet égard sans incidence. Le moyen tiré de ce que, faute de disposer du projet de convention, les conseillers municipaux auraient disposé d'une information insuffisante au regard des dispositions de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales doit être écarté comme manquant en fait.

4. En deuxième lieu, aux termes du 2ème alinéa de l'article 10 de la loi du 12 avril 2000 : " L'autorité administrative (...) qui attribue une subvention doit, lorsque cette subvention dépasse un seuil défini par décret, conclure une convention avec l'organisme de droit privé qui en bénéficie, définissant l'objet, le montant, les modalités de versement et les conditions d'utilisation de la subvention attribuée. (...) ".

5. Le projet de convention annexé à la délibération litigieuse exposait que la subvention avait pour objet de promouvoir l'organisation à Marseille du 20ème anniversaire de l'Europride 2013, qui se déroulerait du 10 au 20 juillet 2013, confié à l'association Lesbian et Gay Parade Marseille par l'European Pride Organisers Association. Il détaillait les manifestations organisées dans ce cadre, à savoir des concerts d'ouverture et clôture, de nombreux ateliers, débats et conférences, des animations nautiques et sportives, ainsi qu'une parade, à propos desquelles il fournissait certaines précisions. Alors même que le thème précis des rencontres et le nom des personnalités conviées n'étaient pas indiqués, le projet de convention définissait de façon suffisamment précise la destination des sommes attribuées au regard des exigences de l'article 10 de la loi du 12 avril 2000, ainsi que l'ont jugé à bon droit les premiers juges.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2541-12 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal délibère notamment sur les objets suivants : / (...) / 10° L'allocation de subventions à des fins d'intérêt général et de bienfaisance ; / (...) ". En l'absence de dispositions législatives spéciales l'autorisant expressément à accorder des concours financiers ou le lui interdisant, une commune ne peut accorder une subvention à une association qu'à la condition qu'elle soit justifiée par un intérêt public communal. Si une commune ne peut, en attribuant une subvention, prendre parti dans des conflits, notamment de nature politique, la seule circonstance qu'une association prenne des positions dans des débats publics ne fait pas obstacle à ce que la commune lui accorde légalement une subvention, dès lors que ses activités présentent un intérêt public local. Lorsqu'une association a un objet d'intérêt public local, mais mène aussi des actions, notamment à caractère politique, qui ne peuvent être regardées comme revêtant un tel caractère, la commune ne peut légalement lui accorder une subvention, en particulier lorsqu'il s'agit d'une subvention générale destinée à son fonctionnement, qu'en s'assurant, par des engagements appropriés qu'elle lui demande de prendre, que son aide sera destinée au financement des activités d'intérêt public local.

7. En l'espèce, la subvention litigieuse visait à promouvoir, ainsi qu'exposé ci-dessus au point 5, l'organisation de l'Europride 2013 à Marseille, désignée capitale européenne de la culture pour l'année en cause. Il ressort du rapport de présentation de la délibération que des retombées en termes de rayonnement et de fréquentation touristique étaient attendues de cet évènement. Il ne s'agissait pas d'une subvention générale destinée au fonctionnement de l'association Lesbian et Gay Parade Marseille et le reversement de l'aide était prévu dans le projet de convention en cas notamment de non-réalisation de l'opération ou de modification substantielle de ses conditions d'exécution. Dans ces circonstances, l'attribution de cette subvention était justifiée par un intérêt public local, alors même que ladite association ou certains intervenants invités auraient pris position, notamment à l'occasion dudit évènement et dans des débats publics, sur l'accès à la procréation médicalement assistée ou sur la possibilité de recourir à la gestation pour autrui dans le cadre de l'adoption de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, au demeurant antérieure à l'organisation de l'Europride en cause.

8. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Manif pour tous - PACA et Mme B... ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Marseille, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par l'association Manif pour tous - PACA et Mme B... et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ces dernières la somme de 1 200 euros à verser à la commune de Marseille sur le fondement de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'association Manif pour tous - PACA et de Mme B... est rejetée.

Article 2 : L'association Manif pour tous - PACA et Mme B... verseront la somme de 1 200 euros à la commune de Marseille au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Manif pour tous - PACA, à Mme B... et à la commune de Marseille.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme E..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 octobre 2020.

N°18MA01975 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA01975
Date de la décision : 12/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Commune - Attributions - Interventions économiques (voir supra : Dispositions générales) - Aides directes et indirectes.

Collectivités territoriales - Commune - Finances communales - Dépenses.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : BONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-10-12;18ma01975 ?
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