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29/09/2020 | FRANCE | N°19MA00222

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 29 septembre 2020, 19MA00222


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première demande, enregistrée sous le n° 1605934, Mme I... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2016 par lequel le maire de Mauguio-Carnon a délivré à M. et Mme A... un permis de construire en vue du réaménagement et de l'extension par surélévation d'une maison d'habitation.

Par une seconde demande, enregistrée sous le n° 1702273, Mme I... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 15 mars 2017 pa

r lequel le maire de Mauguio-Carnon a délivré à M. et Mme A... un permis de construire...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première demande, enregistrée sous le n° 1605934, Mme I... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2016 par lequel le maire de Mauguio-Carnon a délivré à M. et Mme A... un permis de construire en vue du réaménagement et de l'extension par surélévation d'une maison d'habitation.

Par une seconde demande, enregistrée sous le n° 1702273, Mme I... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 15 mars 2017 par lequel le maire de Mauguio-Carnon a délivré à M. et Mme A... un permis de construire modificatif relatif à cette même construction.

Par un jugement nos 1605934, 1702273 du 15 novembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier, après avoir joint ces demandes, a annulé ces deux arrêtés.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 janvier et 6 juin 2019, M. F... A..., et Mme H... C... épouse A..., représentés par la SELARL Itinéraires Avocats, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 novembre 2018 ;

2°) de rejeter les demandes de première instance présentées par Mme B... ;

3°) à titre subsidiaire, de faire application de l'article L. 60051 du code de l'urbanisme ;

4°) en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, de supprimer un passage injurieux et diffamatoire contenu dans les écritures de Mme B... et de condamner cette dernière à leur verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

5°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier au regard de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme ;

- le tribunal a écarté à tort leurs fins de non-recevoir ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UC 9 du règlement du plan local d'urbanisme n'est pas fondé et a été retenu à tort par le tribunal ;

- les premiers juges auraient dû faire usage des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

- les autres moyens de première instance sont infondés.

Par des mémoires en défense enregistrés les 18 février, 4 septembre et 16 octobre 2019, Mme B..., représentée par la SCP Margall-d'Albenas, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. et Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- les observations de Me E..., représentant M. et Mme A..., et celles de Me J..., représentant Mme B....

Une note en délibéré présentée pour M. et Mme A... a été enregistrée le 16 septembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 11 octobre 2016, le maire de Mauguio-Carnon a délivré à M. et Mme A... un permis de construire en vue du réaménagement et de l'extension par surélévation de leur maison d'habitation implantée sur un terrain, cadastré section EP n° 70, situé 4 impasse des Réganéous et classé en secteur UC2 du plan local d'urbanisme communal. Les intéressés, qui se sont vu délivrer un permis de démolir le 15 février 2017, ont ensuite obtenu un permis de construire modificatif par un arrêté du 15 mars 2017. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les arrêtés du 11 octobre 2016 et du 15 mars 2017. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 15 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, après avoir joint les demandes de Mme B..., a annulé ces deux arrêtés.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Pour annuler les arrêtés contestés, les premiers juges se sont fondés sur un unique motif tiré de ce que le maire de Mauguio-Carnon n'était pas en mesure, au regard des éléments qui lui étaient soumis, d'apprécier si l'emprise au sol du projet respectait les prescriptions de l'article UC 9 du règlement du plan local d'urbanisme.

3. L'article UC 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Mauguio-Carnon prévoit, s'agissant notamment du secteur UC2, que : " L'emprise au sol des constructions ne doit pas excéder 50 % de la superficie totale du terrain d'assiette support de l'opération ".

4. La parcelle d'assiette du projet présentant une contenance cadastrale de 305 mètres carrés, l'emprise au sol maximale des constructions ne doit pas, en vertu des dispositions citées au point précédent, excéder 152,5 mètres carrés. Il ressort des indications concordantes figurant dans la version du dossier de demande de permis de construire modificatif établie au mois de décembre 2016, à la suite d'une demande de pièces complémentaires du service instructeur, que l'emprise au sol totale du projet représente 152,43 mètres carrés et respecte ainsi les exigences de l'article UC 9 du règlement du plan local d'urbanisme de Mauguio-Carnon. Mme B... ne fait état d'aucun élément probant de nature à établir le caractère erroné de ces indications, figurant sur le plan de masse " i3 " ainsi que sur la notice paysagère " i3 ", qui ont mis l'autorité d'urbanisme en mesure de s'assurer que le projet de M. et Mme A... respecte, dans sa dernière version, les dispositions de cet article UC 9.

5. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur le motif mentionné au point 2 pour annuler les arrêtés du maire de Mauguio-Carnon des 11 octobre 2016 et 15 mars 2017. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme B....

En ce qui concerne les autres moyens invoqués par Mme B... :

6. En premier lieu, l'autorité administrative saisie d'une demande de permis de construire peut relever les inexactitudes entachant les éléments du dossier de demande relatifs au terrain d'assiette du projet, notamment sa surface ou l'emplacement de ses limites séparatives, et, de façon plus générale, relatifs à l'environnement du projet de construction, pour apprécier si ce dernier respecte les règles d'urbanisme qui s'imposent à lui. En revanche, le permis de construire n'ayant d'autre objet que d'autoriser la construction conforme aux plans et indications fournis par le pétitionnaire, elle n'a à vérifier ni l'exactitude des déclarations du demandeur relatives à la consistance du projet à moins qu'elles ne soient contredites par les autres éléments du dossier joints à la demande tels que limitativement définis par les dispositions des articles R. 431-4 et suivants du code de l'urbanisme, ni l'intention du demandeur de les respecter, sauf en présence d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date à laquelle l'administration se prononce sur la demande d'autorisation. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manoeuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manoeuvres destinées à tromper l'administration.

7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la demande de permis initial ne comporte aucune information erronée en ce qui concerne la superficie cadastrale, évoquée au point 4, de la parcelle d'assiette du projet. Si Mme B... se prévaut de la circonstance que l'arrêté du 11 octobre 2016 mentionne une autre superficie, cette mention résultant d'une erreur purement matérielle, qui a d'ailleurs été rectifiée par l'arrêté du 15 mars 2017, n'est pas de nature à révéler l'existence d'une fraude. D'autre part, la circonstance, à la supposer même établie, que la surface de plancher avant travaux déclarée par les pétitionnaires dans leur demande de permis initial serait erronée ne suffit pas, à elle seule, à établir l'existence d'une manoeuvre délibérée destinée à induire l'administration en erreur. Enfin, il en va de même de la circonstance alléguée, au demeurant non établie, que certaines indications figurant dans la demande de permis de construire modificatif et relatives aux surfaces présenteraient un caractère erroné ou incohérent. Par suite, et compte tenu de ce qui est dit au point 9 ci-dessous, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que les permis litigieux auraient été obtenus par fraude.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme : " Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires : / a) Les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à vingt mètres carrés ; / b) Dans les zones urbaines d'un plan local d'urbanisme (...), les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à quarante mètres carrés (...) ; / c) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination (...) ".

9. Mme B... soutient que certains travaux réalisés antérieurement au projet litigieux et entraînant la création, par la transformation d'un patio et d'un passage couvert, d'une surface de plancher totale de 36 mètres carrés, n'ont fait l'objet d'aucune autorisation d'urbanisme. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le projet autorisé par les permis litigieux, ainsi que par le permis de démolir mentionné au point 1, porte sur l'ensemble des éléments de construction présents sur la parcelle d'assiette et, notamment, sur ceux évoqués par Mme B... qui ne sont pas conservés en l'état. Par suite, le moyen, au demeurant imprécis, tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent ne saurait être accueilli.

10. En troisième lieu, des modifications apportées à un projet de construction, qui sont sans influence sur la conception générale du projet initial, peuvent faire l'objet d'un permis modificatif et ne nécessitent pas l'octroi d'un nouveau permis. Il ressort des pièces du dossier que le projet autorisé par l'arrêté du 15 mars 2017 en litige vise à supprimer un passage couvert en béton et à modifier les ouvertures situées en façade sud de la construction. Les modifications en cause ne sauraient être regardées, par leur nature ou leur ampleur, comme remettant en cause la conception générale du projet initial. Par suite, ces modifications ne nécessitaient pas la délivrance d'un nouveau permis de construire.

11. En quatrième et dernier lieu, les moyens dirigés contre le permis initial du 11 octobre 2016 devant être écartés pour les raisons exposées ci-dessus, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le permis modificatif du 15 mars 2017 devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation de ce permis initial.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé les arrêtés du maire de Mauguio-Carnon des 11 octobre 2016 et 15 mars 2017. Par suite, il y a lieu d'annuler ce jugement, sans qu'il soit besoin d'examiner sa régularité, et de rejeter les demandes de première instance de Mme B... sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :

13. Les termes du premier mémoire de Mme B... dont la suppression est demandée, pour regrettables qu'ils soient, n'excèdent pas les limites de la controverse entre parties dans le cadre d'une procédure contentieuse. Dès lors, il n'y a pas lieu d'en prononcer la suppression par application des dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative, ni de condamner Mme B... à verser des dommages et intérêts à M. et Mme A... sur le fondement de ces dispositions.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. et Mme A..., qui ne sont pas la partie perdante, versent à Mme B... la somme qu'elle demande sur ce fondement. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 novembre 2018 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par Mme B... devant le tribunal administratif de Montpellier sont rejetées.

Article 3 : Mme B... versera une somme de 2 000 euros à M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme F... et Caroline A..., à Mme I... B... et à la commune de Mauguio-Carnon.

Copie en sera transmise au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme G..., première conseillère,

- M. D..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.

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N° 19MA00222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00222
Date de la décision : 29/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Régime d'utilisation du permis - Permis modificatif.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL ITINERAIRES AVOCATS CADOZ - LACROIX - REY - VERNE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-29;19ma00222 ?
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