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28/09/2020 | FRANCE | N°19MA03268

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 28 septembre 2020, 19MA03268


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 13 juin 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1809265 du 18 mars 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregist

rée le 16 juillet 2019, Mme B..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 13 juin 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1809265 du 18 mars 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2019, Mme B..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 mars 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 13 juin 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement, d'instruire à nouveau sa demande dans le délai de deux mois suivant cette notification, en lui délivrant dans l'attente un document l'autorisant à séjourner et travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de son conseil, une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement en litige :

- les juges de première instance ont insuffisamment motivé leur jugement en ce qu'ils écartent les moyens tirés du défaut d'examen particulier des circonstances et de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- ils ont omis d'examiner le moyen tiré de l'absence de mention, dans l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, des " éléments de procédure " développé dans le mémoire communiqué du 14 février 2019 ;

- ils n'ont pas examiné distinctement le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur le bien-fondé du jugement en litige :

- faute pour le préfet de produire toute preuve contraire, que la cour devrait lui enjoindre de produire, la décision portant refus de droit au séjour est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'avis du collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été rendu à l'issue d'une délibération collégiale ;

- ledit avis est également irrégulier en ce qu'il ne comporte pas la mention des " éléments de procédure ", prévue à l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- sa pathologie nécessitait qu'elle fasse l'objet d'une convocation ou d'examens complémentaires ;

- le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation ;

- la décision portant refus de droit au séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont insuffisamment motivées ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme B... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mai 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., née 20 septembre 1974 et de nationalité géorgienne, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille, en date du 18 mars 2019, a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 13 juin 2018 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. A l'appui de sa demande, Mme B... soutenait notamment que la procédure préalable à l'adoption de l'arrêté litigieux était irrégulière en ce que l'avis du 30 avril 2018 rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration relatif à son état de santé ne comporte pas la mention des " éléments de procédure ", prévue à l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016. Ce moyen était présenté dans son mémoire enregistré le 14 février 2019, qui devait être examiné dès lors qu'il a été communiqué, ce qui a eu pour effet, en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, de rouvrir l'instruction dont la clôture avait initialement été ordonnée au 11 février 2019. Le tribunal administratif n'a toutefois pas visé le moyen ainsi présenté et n'y a pas répondu. Son jugement a, dès lors, été rendu dans des conditions irrégulières et doit par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens relatifs à la régularité du jugement attaqué, être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Marseille.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 13 juin 2018 :

En ce qui concerne la décision portant refus de droit au séjour :

Quant à la régularité de la procédure :

4. En application des articles 4 et 7 de l'arrêté du 27 décembre 2016 visé ci-dessus, l'étranger qui sollicite un titre de séjour en raison de son état de santé peut être convoqué par le médecin rapporteur ou par le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Des examens complémentaires peuvent également lui être demandés, ainsi que la justification de son identité. Aux termes de l'article 6 de cet arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".

5. En premier lieu, l'avis du 30 avril 2018 au vu duquel le préfet a pris la décision portant refus de droit au séjour contestée porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ". Celle-ci implique nécessairement, à défaut de preuve contraire, que les membres du collège de médecins ont confronté leur point de vue avant de rendre leur avis, même si les modalités de ce délibéré ne sont pas précisées. Par suite, le moyen tiré de ce que ledit avis n'aurait pas été rendu collégialement doit être écarté, sans qu'il soit besoin d'enjoindre au préfet de produire des extraits du relevé informatique Thémis sur lesquels sont mentionnés les échanges entre médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

6. En deuxième lieu, si la requérante soutient que les membres composant ledit collège auraient été incompétents, le préfet a produit la décision portant désignation des médecins appelés à participer à ce collège, parmi lesquels figurent ceux ayant signé l'avis du 30 avril 2018.

7. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient Mme B..., l'identité du médecin rapporteur, qui n'a pas fait partie du collège de médecins, est dûment mentionnée sur ledit avis.

8. En quatrième lieu, cet avis ne comporte pas de précisions relatives aux investigations complémentaires le cas échéant menées au cours de l'instruction par ledit service, qualifiées " d'éléments de procédure " par les dispositions citées ci-dessus de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016. Il résulte toutefois des dispositions dudit arrêté, et particulièrement de ses articles 4 et 7, que la réalisation de vérifications complémentaires par l'auteur du rapport médical préalable ou par les membres du collège est une faculté et non une obligation. Dès lors, s'il n'est pas fait usage d'une telle faculté, l'avis du collège n'a pas à comporter d'indication relative à de telles vérifications complémentaires. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une quelconque vérification complémentaire ait été sollicitée. Le moyen doit, par suite, être écarté.

9. En cinquième lieu, il n'apparait pas, au vu des pièces du dossier et de la pathologie psychiatrique de la requérante, qu'il était manifeste que la réalisation de telles vérifications complémentaires était nécessaire pour éclairer l'examen du cas de Mme B....

Quant à la légalité interne :

10. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation de Mme B..., alors même que la décision attaquée ne mentionne pas le décès de son enfant et de son époux. Il n'en ressort pas davantage que le préfet se serait cru lié par l'avis émis par le collège de médecins. Ces moyens doivent donc être écartés.

11. Aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, (...). ".

12. Pour rejeter la demande de Mme B..., le préfet des Bouches-du-Rhône s'est fondé notamment sur l'avis du collège de médecins du 30 avril 2018 mentionné ci-dessus, selon lequel, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale, d'une part, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et, d'autre part, elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Les pièces médicales produites par la requérante, composées d'ordonnances et de certificats médicaux, dont il ressort que son état neurologique est en rémission ou stable et que son état psychologique n'évolue pas, ne sont pas de nature à remettre en cause cette appréciation. Tel n'est pas davantage le cas de la circonstance qu'elle aurait subi des traumatismes dans son pays d'origine, précisément des violences conjugales et le décès de son fils, alors que ces évènements remontent respectivement aux années 2003 et 2008 et sont ainsi bien antérieurs à son départ de Géorgie en 2015. Par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône, en prenant la décision portant refus de droit au séjour litigieuse, n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

13. Aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

14. Si Mme B... soutient être entrée en France le 8 mars 2015, elle n'établit pas une présence continue sur le territoire depuis cette date. Veuve et sans enfant, elle ne justifie ni avoir des attaches familiales en France, ni ne plus en avoir en Géorgie, où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de quarante ans. Mme B... ne démontre par ailleurs pas une intégration socioprofessionnelle notable. Dans ces conditions, le centre de sa vie privée et familiale n'est pas fixé en France de façon telle que la décision attaquée porterait, au regard des buts en vue desquels elle a été prise, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Le préfet n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en lui refusant le droit au séjour.

15. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / (...) ".

16. Compte tenu notamment de ce qui a été dit aux points 12 et 14 ci-dessus, la situation de Mme B... n'est pas de nature à caractériser des considérations humanitaires ou motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'une carte de séjour temporaire. Le préfet n'a, par suite, pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

17. Il résulte des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans le cas où la délivrance d'un titre de séjour a été refusée à l'étranger. En l'espèce, l'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application, notamment le 3° du I de l'article L. 511-1 qui constitue le fondement légal de la décision portant obligation de quitter le territoire, ainsi que l'avis émis par le collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 30 avril 2018 dont les termes sont repris. L'arrêté mentionne également les éléments de la situation personnelle et familiale de l'intéressée sur lesquels il se fonde. Par suite, la décision portant refus de séjour contenue dans l'arrêté contesté répond aux exigences de motivation fixées par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Dans ces circonstances, alors même que la décision portant obligation de quitter le territoire n'a pas les mêmes conséquences qu'une décision portant refus de droit au séjour, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée.

18. Dès lors que les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile présentés à l'encontre de la décision portant refus de séjour ont été écartés, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît ces dispositions.

19. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / (...) ".

20. Il résulte de ce qui a été dit au point 12 que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet des Bouches-du-Rhône ne pouvait, sans méconnaître ces dispositions, l'obliger à quitter le territoire français.

21. Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus aux points 12 et 14, la décision portant obligation de quitter le territoire ne méconnait pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de Mme B....

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

22. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / (...) / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. ".

23. L'arrêté litigieux vise ces dispositions dont il fait application et mentionne la nationalité de l'intéressée. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision fixant le pays de destination ne peut donc qu'être écarté quand bien même il n'est pas fait mention de l'absence de risque de peines ou traitement inhumains ou dégradants en cas de retour de Mme B... en Géorgie.

24. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... serait personnellement et actuellement exposée à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Géorgie, quand bien même elle y aurait vécu des évènements traumatisants. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaîtrait les stipulations citées ci-dessus doit être écarté.

25. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 13 juin 2018.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

26. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 13 juin 2018 présentées par Mme B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être également rejetées.

Sur les frais liés au litige :

27. Les dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée sur leur fondement pour le compte de Me D..., conseil de Mme B..., soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 18 mars 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée et le surplus des conclusions de sa requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à Me D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 septembre 2020.

2

N° 19MA03268


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03268
Date de la décision : 28/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : YOUCHENKO

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-28;19ma03268 ?
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