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17/09/2020 | FRANCE | N°19MA02494

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 17 septembre 2020, 19MA02494


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 2 septembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1807360 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregi

strée le 31 mai 2019, M. B... E..., représenté par Me Decaux, demande à la Cour :

1°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 2 septembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1807360 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 mai 2019, M. B... E..., représenté par Me Decaux, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 2 septembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit dès lors que le relevé TelemOFPRA produit par le préfet n'est pas probant ;

- ils ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur de droit commise par l'autorité préfectorale qui s'est estimée liée par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

- ils ont méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- ils ont commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. B... E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 avril 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Tahiri a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... E..., ressortissant malgache né en 1981, fait appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 septembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. L'appelant ne peut donc utilement se prévaloir de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation que les premiers juges auraient commises pour demander l'annulation du jugement attaqué.

3. En second lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment du jugement attaqué, que le tribunal a visé le moyen invoqué par M. B... E... tiré de ce que le préfet aurait méconnu l'étendue de sa compétence en se croyant lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et y a répondu au point 4 du jugement. Ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal, qui n'a pas omis de statuer sur ce moyen, n'a pas entaché son jugement d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet ne s'est pas uniquement fondé sur l'examen effectué par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides des risques personnels encourus par M. B... E... en cas de retour dans son pays d'origine, mais a examiné si l'intéressé établissait la réalité des risques qu'il soit personnellement soumis à des traitements inhumains ou dégradants visés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. B... E... n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le préfet se serait estimé lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et aurait commis une erreur de droit en méconnaissant l'étendue de sa compétence.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ". Aux termes du III de l'article R. 723-19 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire. ".

6. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé. Cette preuve peut être rapportée par la production d'un extrait du système d'information de l'Office, dont les données relatives à la notification à l'intéressé de la décision statuant définitivement sur sa demande d'asile font foi jusqu'à preuve du contraire.

7. En l'espèce, le préfet des Bouches-du-Rhône a produit en première instance un extrait de la base de données " TelemOfpra ", relative à l'état des procédures des demandes d'asile dont il ressort que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 25 février 2015 rejetant la demande d'asile de M. B... E... lui a été notifiée le 20 mars suivant. L'intéressé, qui se borne à faire valoir que le préfet ne produit pas cette décision et l'avis de réception de sa notification, n'apporte aucun élément permettant de penser que les données fournies, qui comme il a été dit font foi jusqu'à preuve contraire, seraient inexactes. Le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que le 2 septembre 2018, date à laquelle l'arrêté contesté a été pris, il bénéficiait du droit de se maintenir en France, en application de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. M. B... E... se prévaut de la durée de sa résidence en France depuis 2012, de la présence de ses deux frères et fait valoir qu'il est en mesure de s'insérer professionnellement, ayant signé en novembre 2017 un contrat à durée indéterminée en tant que chauffeur livreur qui s'est conclu par son licenciement en raison de son impossibilité de fournir un numéro de sécurité sociale. Toutefois, il est constant que l'intéressé est célibataire et sans enfant. Il n'établit pas l'ancienneté de sa présence en France par les pièces produites, son passeport périmé en 2017 comportant des visas de sortie apposés par les autorités malgaches en septembre 2012 et en août 2013. En outre, aucune pièce n'a été produite pour la période de mars à décembre 2015. M. B... E... n'est entré en France selon ses déclarations qu'à l'âge de trente et un ans après avoir toujours vécu dans son pays d'origine où il n'établit pas être isolé. Dans ces conditions, l'arrêté en litige n'a pas porté une atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

10. Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

11. M. B... E... ne produit pas plus en appel qu'en première instance d'éléments probants sur la réalité et l'intensité des menaces dont il ferait l'objet en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige méconnaît les stipulations précitées.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... E... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 2 septembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président,

- Mme Bernabeu, présidente assesseure,

- Mme Tahiri, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 septembre 2020.

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N° 19MA02494

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02494
Date de la décision : 17/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Samira TAHIRI
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : DECAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-17;19ma02494 ?
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