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22/07/2020 | FRANCE | N°18MA04298

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 22 juillet 2020, 18MA04298


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme G... H... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1603974 du 18 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille

a prononcé la réduction des impositions supplémentaires mises à la charge des époux...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme G... H... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1603974 du 18 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a prononcé la réduction des impositions supplémentaires mises à la charge des époux H... au titre des années 2010 à 2013 et rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 septembre et 4 décembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mai 2018 en tant qu'il a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme H... ont été assujettis au titre des années 2010 à 2013 ;

2°) de rétablir le déficit foncier de la société civile immobilière (SCI) du Portalet au titre de l'année 2007 à la somme de 45 142 euros et de maintenir l'imputation de ce déficit sur les années 2011 à 2014 ;

3°) de rétablir les recettes de la SCI du Portalet au titre des années 2010 et 2011 à la somme de 54 280 euros ;

4°) de rectifier l'erreur matérielle commise par le tribunal administratif s'agissant du montant des frais liés au litige accordés à M. et Mme H... en retenant la somme de 1 000 euros.

Il soutient que :

- les pièces produites par M. et Mme H... permettent seulement d'établir le paiement, par la SCI du Portalet, de la somme de 3 000 euros par virement au profit des peintures B..., et non de la somme de 39 497,90 euros comme revendiqué par les intéressés et admis par les premiers juges ;

- les travaux effectués par la SCI du Portalet et mentionnés sur la facture de Kap Deco pour un montant de 39 497,90 euros constituent des travaux de construction/reconstruction dès lors qu'ils ont modifié les locaux de façon importante en transformant deux appartements en un seul ; ils ne sont par conséquent pas déductibles des revenus fonciers en application de l'article 31-I-1 du code général des impôts ;

- la dépense de 2 500 euros correspondant à la facture de la société SAR, qui est connexe à ces travaux, n'est pas davantage déductible ;

- il en résulte que le déficit foncier de la SCI du Portalet doit être limité à la somme de 45 142 euros, montant mentionné dans la réponse aux observations du contribuable du 20 avril 2015 ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a fixé les recettes de la SCI du Portalet à la somme de 47 640 euros au titre des années 2010 et 2011, au lieu de 54 280 euros, somme retenue par l'administration et qui ressort des contrats de location fournis par les époux H... ;

- le tribunal a commis une erreur matérielle en mentionnant, dans le dispositif de son jugement, une somme de 1 500 euros à verser aux époux H... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, alors qu'il avait fixé cette somme à 1 000 euros au point 16 du même jugement ;

- l'attestation de l'université HEC Montréal est insuffisante pour démontrer que le fils de M. et Mme H... était étudiant au 31 décembre 2011.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2018, M. et Mme H..., représentés par Me E..., concluent au rejet de la requête et doivent être regardés comme demandant à la Cour, par la voie de l'appel incident :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mai 2018, en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande en décharge ;

2°) de fixer le déficit foncier de la SCI du Portalet à la somme de 88 313 euros au titre de l'année 2007 et le déficit reportable à compter de 2008 à la somme de 69 480 euros ;

3°) de juger que ce déficit est reportable pendant dix ans ;

4°) de fixer les revenus fonciers de la SCI du Portalet à la somme de 17 955 euros en 2010 et de 28 220 euros en 2011 ;

5°) de fixer les revenus fonciers de la SCI de Pigenat à la somme de 11 608 euros en 2010 et de 9 635 euros en 2011 ;

6°) de leur accorder le bénéfice de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 quater F du code général des impôts au titre de l'année 2011 ;

7°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 240 euros au titre des frais liés au litige engagés tant en première instance qu'en appel, en application de l'article L. 761 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les travaux effectués en 2007 par la SCI du Portalet sur les lots des deux immeubles situés 7, rue Manuel à Aix-en-Provence ne constituent pas des travaux d'agrandissement ou de reconstruction mais de simples travaux d'aménagement, sans accroissement de surface, déductibles des revenus fonciers ; l'administration fiscale a d'ailleurs admis en déduction une partie des travaux relatifs à la même opération ;

- les pièces qu'ils produisent permettent de justifier tant du montant, du lieu de réalisation que du paiement s'agissant de la facturation opérée par l'entreprise Kap Deco d'un montant de 39 497,90 euros ;

- la facture SAR d'un montant de 2 500 euros payée par chèque débité sur le compte de la SCI du Portalet est déductible ; la SCI ne peut se voir opposer les omissions figurant sur cette facture, dont elle n'est pas responsable ;

- la facture Aix Carrelage Socotra d'un montant de 945,55 euros, dont le solde de 745,55 euros a été payé par chèque, est également déductible ;

- la facture Ferrato de 301,19 euros, qui porte sur du carrelage posé par la société SAR, également payée par chèque, est déductible ;

- la facture Aix Multi Service de 26 euros, qui porte sur la réalisation d'une clé perdue pendant le chantier et payée en liquide, doit être admise en déduction ;

- le déficit foncier de la SCI du Portalet doit ainsi être porté à la somme de 88 213 euros en 2007, correspondant au déficit déjà admis par l'administration de 45 142 euros auquel vient s'ajouter un montant complémentaire de 43 270,64 euros correspondant au montant cumulé des dépenses rejetées à tort par l'administration ; compte tenu des montants déjà imputés en 2007 sur leurs revenus fonciers, le déficit reportable sur les années suivantes s'élève à 69 480 euros ;

- les recettes foncières de la SCI du Portalet des années 2010 et 2011 ont été majorées à tort par l'administration fiscale ; ces recettes s'élèvent à la somme de 17 955 euros en 2010 et de 28 220 euros en 2011, soit un total de 46 175 euros ; l'administration ne justifie pas du montant de 54 280 euros qu'elle retient, les périodes de vacances où aucun loyer n'est perçu ne pouvant être prises en compte dans la détermination des recettes ; l'insuffisance des recettes de la SCI a d'ailleurs contraint les associés à faire régulièrement des apports en compte courant, puis à céder un appartement en 2011 ;

- le déficit foncier relatif à l'appartement sur cour reste imputable sur les revenus fonciers au titre des années suivantes, dès lors qu'il a été loué pendant trois ans avant d'être vendu, conformément aux dispositions du 3° du I de l'article 156 du code général des impôts ;

- s'agissant des locaux de la SCI de Pigenat, les charges communes payées par la SCI doivent être admises en déduction des revenus fonciers dès lors qu'elles ne peuvent être affectées ni à l'un, ni à l'autre des locataires compte tenu de la configuration des lieux qui ne forment qu'un seul et unique appartement, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les factures aient été réglées par le gérant pour le compte de la SCI ; ces charges concernent les factures d'électricité et de gaz, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères et les charges de copropriété ;

- les revenus fonciers nets de la SCI de Pigenat s'élèvent ainsi à la somme de 11 608 euros en 2010 et de 9 635 euros en 2011 ;

- ils sont en droit de bénéficier, en 2011, du crédit d'impôt pour avoir eu à leur charge un enfant poursuivant des études supérieures, dès lorsqu'ils justifient que leur fils D... était étudiant en cours de stage au 31 décembre 2011 ;

- le tribunal administratif a effectivement commis une erreur dans le dispositif du jugement en mentionnant la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles au lieu de 1 000 euros comme mentionné dans les motifs.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant M. et Mme H....

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un examen sur pièces de leur dossier fiscal et de celui des deux sociétés civiles immobilières (SCI) dont ils sont associés à hauteur de 50 % chacun, la SCI du Portalet et la SCI de Pigenat, l'administration fiscale a notifié à M. et Mme H... des rectifications de leurs bases d'imposition à l'impôt sur le revenu au titre des années 2010 et 2011 et à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 2012 et 2013, à raison, notamment, du montant des revenus fonciers à retenir en provenance de ces deux sociétés. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel du jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mai 2018, en tant qu'il a prononcé la réduction des compléments d'imposition ainsi mis à la charge des époux H.... Ces derniers, par la voie de l'appel incident, sollicitent l'annulation de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande en décharge.

I. Régularité du jugement :

2. Il ressort du point 16 du jugement contesté que les premiers juges ont décidé d'allouer à M. et Mme H... une somme de 1 000 euros au titre des frais engagés par eux et non compris dans les dépens, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Toutefois, le dispositif de ce jugement prévoit, en son article 5, le versement à ce titre d'une somme de 1 500 euros aux requérants. Par suite, le jugement contesté qui est, sur la question des frais liés au litige, entaché d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif, est irrégulier et doit, dans cette mesure, être annulé.

3. Il y a lieu pour la Cour de statuer par la voie de l'effet dévolutif de l'appel sur les conclusions du ministre de l'action et des comptes publics tendant au rétablissement des impositions dont le tribunal administratif de Marseille a prononcé la réduction et sur les conclusions de M. et Mme H... à fin de décharge des impositions auxquelles ils demeurent assujettis et par la voie de l'évocation sur leurs conclusions de première instance présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II. Conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne les revenus fonciers en provenance de la SCI du Portalet au titre des années 2010 à 2013 :

S'agissant du déficit foncier de la SCI au titre de l'année 2007 :

4. Aux termes de l'article 28 du code général des impôts : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété. ". Aux termes de l'article 31 du même code : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; (...) b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que les dépenses effectuées par un propriétaire et correspondant à des travaux entrepris dans son immeuble sont déductibles de son revenu, sauf si elles correspondent à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement. Doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation notamment dans les locaux auparavant affectés à un autre usage, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction. Doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement au sens des mêmes dispositions les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants. Les dépenses de réparation, d'entretien ou d'amélioration doivent notamment, pour être admises en déduction, avoir été effectuées par le propriétaire et payées au cours de l'année d'imposition. Il appartient au contribuable de justifier de la réalité, de la consistance et, par suite, du caractère déductible de ces charges en produisant des pièces justificatives, qui sont constituées de factures, de plans, de photographies et de tous autres éléments permettant d'établir avec précision la nature, le montant et la réalité des charges supportées.

5. Par acte notarié du 20 mars 2007, la SCI du Portalet a acquis huit lots au sein d'un ensemble immobilier situé 7 rue Manuel à Aix-en-Provence, composé de deux corps de bâtiments dont un en forme de " L " enserrant une cour intérieure, élevé sur cave en sous-sol de rez-de-chaussée et trois étages, desservi par deux escaliers " A " et " B ". Les lots acquis correspondent, pour l'escalier " A ", aux lots n° 4 (local de quatre pièces au premier étage), n° 5 (grande pièce au premier étage), 14 (cave voutée en sous-sol) et n° 36 (partie de placard ouvrant sur le lot n° 5), et pour l'escalier " B ", aux lots n° 19 (pièce au rez-de-chaussée), n° 23 (appartement de quatre pièces au premier étage), n° 24 (petit studio au premier étage) et n° 37 (partie de placard au premier étage, ouvrant sur le lot n° 24). La SCI a également acquis, par acte notarié du 9 juin 2008, un lot supplémentaire correspondant à une cave (lot n° 15).

6. Il ressort de l'acte de modification de l'état descriptif de division et portant nouveau règlement de copropriété du 2 juin 2006, que l'immeuble, dans son entier, avait un usage d'habitation, quand bien même les lots n° 4 et 5 étaient, avant leur acquisition par la SCI du Portalet, utilisés par un médecin pour l'exercice de sa profession. Il résulte également de l'instruction, et notamment des factures, descriptifs, plans et photographies produits par M. et Mme H..., qu'au cours de l'année 2007, la SCI du Portalet a fait réaliser des travaux sur les lots ainsi acquis, qui ont notamment consisté à réunir, d'une part, les lots n° 4, 5 et 36, et d'autre part, les lots n° 23, 24 et 37, situés au premier étage, pour former deux appartements destinés à la location, et à doter ces appartements du confort moderne (rénovation de l'électricité, des sols, des menuiseries, des cuisines et salles de bains). Ces travaux, qui n'ont ni augmenté la surface habitable des locaux existants, ni modifié le gros oeuvre, la réunion des lots, qui communiquaient déjà entre eux, n'ayant nécessité que des modifications, en nombre limité, du cloisonnement interne, doivent être regardés, en dépit de leur coût, comme des travaux d'amélioration au sens des dispositions précitées du I de l'article 31 du code général des impôts, qualification que l'administration n'avait d'ailleurs pas remise en cause dans la proposition de rectification du 16 décembre 2013 adressée à la SCI du Portalet.

7. S'agissant des dépenses de travaux figurant dans le décompte général définitif de l'entreprise Kap Déco, établi le 15 janvier 2008, l'administration fait valoir qu'elles ne sont pas déductibles en raison de l'irrégularité en la forme des factures présentées et de l'absence de justification de leur paiement. Toutefois, M. et Mme H... produisent, outre le devis établi par l'entreprise B... le 7 février 2007 pour un montant total de 39 726,34 euros, les photographies des deux appartements avant et après réalisation des travaux, les factures d'acompte et de solde établies par l'entreprise B... puis par l'entreprise Kap Déco entre mars et octobre 2007 pour un montant total de 39 297,09 euros, lesquelles mentionnent, d'une part, le numéro de Siret des deux prestataires, et, d'autre part, le 7, rue Manuel à Aix-en-Provence comme lieu de réalisation des travaux, les fax de transmission, par la SCI, de la plupart des factures à sa banque, en vue du déblocage du prêt afférent aux travaux, les relevés bancaires de la SCI faisant apparaitre les débits correspondant à chacune des factures par virement ou par chèque, le décompte général et définitif précité du 15 janvier 2008, des extraits du répertoire SIRENE au 6 janvier 2014 indiquant que les entreprises de M. B... et de M. A... ont cessé leur activité respectivement le 31 août 2011 et le 31 décembre 2008, ainsi qu'une attestation de M. B... du 27 avril 2016 indiquant qu'il a réalisé les travaux entre mars et octobre 2007, qu'à partir de juillet, c'est l'entreprise Kap Déco de M. A... avec lequel il voulait s'associer qui a établi la facturation et que le décompte général et définitif a été validé par ses soins en janvier 2008. Ces différents justificatifs permettent d'établir que les travaux facturés par les entreprises B... et Kap Déco ont bien été réalisés dans les locaux appartenant à la SCI du Portalet destinés à la location et qu'ils ont été payés par cette dernière au cours de l'année 2007, pour le montant de 39 297,09 euros tel qu'il figure dans le décompte général et définitif du 15 janvier 2008, l'administration ne pouvant utilement, à cet égard, se prévaloir de la circonstance que les prestataires n'aient pas déclaré les revenus perçus à cette occasion.

8. S'agissant de la facture de la société Sar Construction du 28 janvier 2008, d'un montant de 2 500 euros, rejetée par l'administration comme irrégulière en la forme et connexe à des travaux non déductibles par nature, celle-ci mentionne le lieu de réalisation des prestations, le détail de celles-ci, à savoir la pose de carrelage dans la cuisine et les salles de bains, et fait état d'un paiement par chèque bancaire n° 4000012 du 18 septembre 2007. La réalité de ce paiement est corroborée par le fax de transmission de la facture à la banque de la SCI et par le relevé bancaire de celle-ci qui fait apparaître un débit par chèque du même montant le 19 septembre 2007. Dans ces conditions, M. et Mme H... établissent, par ces différents justificatifs, le caractère déductible de cette dépense qui fait partie de l'opération de rénovation à laquelle la SCI du Portalet a procédé en 2007.

9. Si, comme le relève l'administration, la facture d'achat de carrelage de référence " série pro Architectura ", d'un montant de 945,55 euros, établie le 2 août 2007 par l'entreprise Aix Carrelage Socotra ne mentionne pas le lieu de réalisation des travaux, M. et Mme H... font valoir que ce carrelage a été posé par l'entreprise Sar Construction, dont la facture précitée du 28 janvier 2008 mentionne " pose à la colle de carrelage fourni par le client après préparation des supports " et précise qu'il s'agit de carrelage " série pro architectura VB ". Ils produisent, en outre, deux fax de commande du 1er août 2007, un courrier de la SCI du 6 août 2007 adressé à cette société en vue du versement d'un acompte de 200 euros, accompagné de la copie du chèque correspondant, les relevés bancaires de la SCI faisant apparaître le débit d'un chèque de 200 euros le 13 août 2007 et le débit du solde, soit 745,55 euros, le 3 septembre 2007. S'agissant de la facture de l'entreprise " Les carrelages Ferrato " du 8 septembre 2007, d'un montant de 301,19 euros, celle-ci porte sur 18 m² de carrelage de dimensions 15x15, également posé par l'entreprise Sar Construction, ainsi que cela ressort de la facture du 28 janvier 2008, qui fait état de la pose de 16 m² de carrelage en terre cuite de même dimension. Cette facture a été payée par la SCI du Portalet ainsi qu'en attestent la télécopie de transmission à la banque du 10 septembre 2007 et le relevé bancaire faisant apparaître un débit par chèque d'un montant de 301,19 euros le 11 septembre 2007. Dans ces conditions, M. et Mme H..., qui démontrent que ces dépenses se rattachent à la rénovation des appartements de la SCI du Portalet et que cette dernière a procédé à leur paiement en 2007, établissent leur caractère déductible des revenus fonciers de la SCI.

10. Si M. et Mme H... demandent que soit admise en déduction la facture de 26 euros établie par la société Aix Multi Service le 14 septembre 2007 pour la réalisation d'une clé, cette dépense ne peut être rattachée à l'opération de rénovation des appartements en litige. Dans ces conditions, M. et Mme H... n'établissent pas le caractère déductible de cette dépense.

11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme H... apportent la preuve, qui leur incombe, du caractère déductible des dépenses de travaux des revenus fonciers de la SCI du Portalet à hauteur de la somme de 43 043,83 euros, qui vient s'ajouter à celle de 45 142 euros admise en dernier lieu par l'administration fiscale dans la réponse aux observations du contribuable du 21 avril 2015. Par suite, le déficit foncier de la SCI du Portalet au titre de l'année 2007 doit être porté à la somme totale de 88 185,83 euros, déficit reportable sur les revenus fonciers de la SCI des années 2010 à 2013 ici en litige, ce qui n'est pas contesté par le ministre, compte tenu des imputations déjà effectuées, que ce soit sur le revenu global des époux H... ou sur les revenus fonciers de la SCI du Portalet, au cours des années 2007 à 2009.

S'agissant du montant des revenus fonciers au titre des années 2010 et 2011 :

12. Les revenus fonciers de la SCI du Portalet au titre des années 2010 et 2011 proviennent de la location des deux appartements rénovés en 2007 et d'une cave de l'immeuble situé au 7, rue Manuel à Aix-en-Provence. Ces revenus ont été évalués par l'administration fiscale, au vu des contrats de location produits, à la somme de 25 340 euros en 2010 et de 28 940 euros en 2011.

13. S'agissant de l'année 2010, il résulte de l'instruction, et notamment du contrat de bail portant sur la cave, conclu le 18 juin 2010 avec effet au 20 mai 2010 avec Mme F... H..., pour un loyer mensuel de 120 euros, et des écritures des époux H..., aux termes desquelles ce bail régularisait une location débutée au 1er mars 2010, que, contrairement à ce qu'a retenu l'administration fiscale, la location de ce local a procuré à la SCI un revenu annuel limité à 1 200 euros. En ce qui concerne l'appartement desservi par l'escalier A, il est constant que les loyers couvrant la période du 1er au 30 juin 2010 ont été versés par avance en 2009 et n'ont pas été retenus par l'administration dans la détermination des revenus fonciers de la SCI. L'appartement a ensuite été loué à compter du 25 septembre 2010 à M. M., pour un loyer hors charges de 1 500 euros mensuels, soit des revenus de 4 500 euros pour trois mois de location. L'appartement desservi par l'escalier B a fait l'objet d'un bail conclu avec Mme M. le 5 mai 2009 pour un loyer de 1 600 euros charges incluses. Si l'administration a retenu cinq mois de location en 2010, il ressort des pièces produites par M. et Mme H..., notamment du courrier de congé au 1er février 2010 de la locataire, corroboré par l'état des lieux de sortie daté du 1er février 2010, que la location de cet appartement a cessé à compter de cette date et que la SCI n'a ainsi perçu, en 2010, qu'un mois de loyer, soit 1 600 euros, montant à retenir en l'absence de précision quant au montant des charges locatives. Un nouveau bail a ensuite été conclu le 18 juin 2010 avec Mme R. pour une durée d'un an et un loyer de 1 900 euros charges comprises. Il y a donc lieu de retenir, comme l'a fait l'administration, six mois de location pleins, soit un total de 11 400 euros. Si M. et Mme H... soutiennent que la SCI n'a perçu, en 2010, que 10 415 euros de cette locataire, le loyer de décembre 2010 n'ayant été versé qu'en 2011, ils n'en justifient pas. Dans ces conditions, les revenus tirés par la SCI du Portalet de la location de ses biens immobiliers doivent être fixés à 18 700 euros au titre de l'année 2010, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif.

14. S'agissant de l'année 2011, la SCI a perçu, au titre de la location de la cave, occupée toute l'année par Mme H... pour son activité professionnelle, une somme de 1 440 euros. L'appartement desservi par l'escalier A, également occupé toute l'année par M. M., a procuré à la SCI un revenu annuel de 18 000 euros. Le bail consenti à Mme R. pour l'appartement desservi par l'escalier B arrivant à échéance le 18 juin 2011, l'administration fiscale a retenu cinq mois de location pleins, soit un revenu de 9 500 euros. Si les époux H... font valoir que la SCI n'a perçu, en 2011, que deux mois de loyers, dont celui de décembre 2010, ainsi que la somme de 2 000 euros correspondant au montant de la caution versée par la locataire, ils n'apportent aucun justificatif permettant de l'établir. Par suite, les revenus tirés par la SCI du Portalet de la location de ses biens immobiliers au titre de l'année 2011 s'élèvent à la somme de 28 940 euros, retenue à bon droit par l'administration fiscale et confirmée par le tribunal administratif.

En ce qui concerne les revenus fonciers en provenance de la SCI de Pigenat au titre des années 2010 et 2011 :

15. Aux termes de l'article 29 du code général des impôts : " (...) le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location, est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire, augmenté du montant des dépenses incombant normalement à ce dernier et mises par les conventions à la charge des locataires. Les subventions et indemnités destinées à financer des charges déductibles sont comprises dans le revenu brut. Il n'est pas tenu compte des sommes versées par les locataires au titre des charges leur incombant. / (...) ". Aux termes de l'article 31 du même code : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / (...) a ter) Le montant des dépenses supportées pour le compte du locataire par le propriétaire dont celui-ci n'a pu obtenir le remboursement, au 31 décembre de l'année du départ du locataire " ; / a quater) Les provisions pour dépenses, comprises ou non dans le budget prévisionnel de la copropriété, prévues aux articles 14-1 et 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, supportées par le propriétaire, diminuées du montant des provisions déduites l'année précédente qui correspond à des charges non déductibles ; (...) / c) Les impositions, autres que celles incombant normalement à l'occupant, perçues, à raison desdites propriétés, au profit des collectivités territoriales, de certains établissements publics ou d'organismes divers (...) ". Il appartient au contribuable qui entend déduire de son revenu brut des dépenses constituant, selon lui, des charges de la propriété de justifier de la réalité, de la consistance et, par suite, du caractère déductible de ces charges.

16. La SCI de Pigenat est propriétaire d'un appartement situé au premier étage d'un immeuble en copropriété localisé au 17 rue du 4 septembre à Aix-en-Provence, dont le rez-de-chaussée appartient à M. et Mme H... et les deuxième et troisième étages à la mère de M. H.... Cet appartement est divisé en deux locaux distincts : la partie sur rue, louée à M. H... pour l'exercice de son activité professionnelle d'architecte d'intérieur et la partie sur cour, louée à une tierce personne à usage d'habitation. L'administration fiscale a remis en cause une partie des charges portées par la SCI en déduction de ses revenus fonciers des années 2010 et 2011.

17. M. et Mme H..., sollicitent, en premier lieu, la déduction de factures de gaz, d'eau et d'électricité, en faisant valoir que l'appartement ne dispose que d'un seul compteur. Toutefois, les factures produites n'ont pas été établies au nom de la SCI de Pigenat, propriétaire de l'appartement, mais au nom de M. G... H.... Par ailleurs, en application de l'annexe au décret n° 87-713 du 26 août 1987, les dépenses d'électricité, d'eau, de combustible ou de fourniture d'énergie, quelle que soit sa nature, constituent des charges récupérables par le bailleur auprès de son locataire et ne sont, par conséquent, déductibles par le propriétaire que lorsqu'il n'a pu en obtenir le remboursement de la part de son locataire au 31 décembre de l'année de son départ, circonstance qui n'est ni établie, ni même alléguée en l'espèce. Il en va de même de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui fait également partie des charges locatives récupérables par le propriétaire et non déductibles par celui-ci. S'agissant des charges de copropriété, il ressort des comptes de la copropriété des années 2010 et 2011 que celles-ci sont constituées, pour l'essentiel, des charges locatives récupérables précitées et non déductibles par le propriétaire. S'agissant de la facture de l'entreprise B..., d'un montant de 2 532 euros, pour des travaux réfection de la cage d'escalier de l'immeuble, validés par l'assemblée générale de la copropriété du 22 juin 2010, qui a précisé que la facture serait payée par M. H... qui serait ensuite remboursé par les autres copropriétaires, M. et Mme H... ne justifient pas, par les pièces qu'ils produisent, du paiement, par la SCI de Pigenat, de la part de 782,40 euros lui revenant. Cette somme ne peut, dès lors, être admise en déduction des revenus fonciers. Par suite, M. et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a refusé d'admettre en déduction les différents postes de dépenses qu'ils invoquent.

En ce qui concerne la réduction d'impôt prévue à l'article 199 quater F du code général des impôts au titre de l'année 2011 :

18. Aux termes de l'article 199 quater F du code général des impôts : " Les contribuables qui ont leur domicile fiscal en France bénéficient d'une réduction de leur impôt sur le revenu lorsque les enfants qu'ils ont à leur charge poursuivent des études secondaires ou supérieures durant l'année scolaire en cours au 31 décembre de l'année d'imposition. (...) / Le bénéfice de la réduction d'impôt est subordonné à la condition que soient mentionnés sur la déclaration des revenus, pour chaque enfant concerné, ses nom et prénom, le nom de l'établissement scolaire et la classe qu'il fréquente ou le nom de l'établissement supérieur dans lequel il est inscrit. ". Il résulte de ces dispositions que la condition de scolarisation des enfants à la charge du contribuable, ouvrant droit au bénéfice de la réduction d'impôt qu'elles prévoient, s'apprécie au 31 décembre de l'année d'imposition.

19. M. et Mme H... produisent, outre une attestation du 6 septembre 2011 de la directrice du " Bureau International-Europe " de l'établissement HEC Montréal selon laquelle leur fils D... H... " a obtenu son diplôme (...) depuis le trimestre d'hiver 2011 ", une attestation du même établissement, datée du 31 octobre 2018, aux termes de laquelle l'intéressé a suivi, au trimestre d'hiver 2011, le programme de baccalauréat en administration des affaires, spécialisation marketing et affaires internationales et qu'il était inscrit " à un stage de fin d'études en France du 17 octobre 2011 au 13 avril 2012 ". Contrairement à ce que soutient l'administration fiscale, ce document est suffisant pour justifier de la qualité d'étudiant de D... H... au 31 décembre 2011. Par suite, M. et Mme H... sont fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale leur a refusé le bénéfice de la réduction d'impôt prévue par les dispositions précitées de l'article 199 quater F du code général des impôts au titre de l'année 2011.

20. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Marseille a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme H... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013.

21. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme H... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a limité à 87 139,90 euros le déficit foncier reportable de la SCI du Portalet au titre de l'année 2007 et refusé de leur accorder le bénéfice de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 quater F du code général des impôts au titre de l'année 2011.

III. Frais liés au litige :

22. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

23. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais liés au litige exposés par M. et Mme H... en première instance et une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par eux en appel.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mai 2018 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions présentées par M. et Mme H... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu assigné à M. et Mme H..., dans la catégorie des revenus fonciers, à raison des parts sociales qu'ils détiennent au sein de la SCI du Portalet au titre des années 2010 à 2013 est réduite à concurrence de la prise en compte d'un déficit foncier de la SCI du Portalet au titre de l'année 2007 reportable égal à 88 185,83 euros.

Article 3 : M. et Mme H... sont déchargés de la différence entre les cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, les cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013 et celles qui résultent de la réduction en base prononcée à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : La cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle à laquelle M. et Mme H... ont été assujettis au titre de l'année 2011 est réduite du montant de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 quater F du code général des impôts.

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mai 2018, en tant qu'il a statué sur les conclusions à fin de décharge présentées par M. et Mme H..., est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : L'Etat versera à M. et Mme H... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête du ministre de l'action et des comptes publics et le surplus des conclusions de l'appel incident de M. et Mme H... sont rejetés.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme G... H... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 3 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

2

N° 18MA04298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA04298
Date de la décision : 22/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Établissement de l'impôt - Réductions et crédits d`impôt.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : CABINET DG CONSULTANTS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-22;18ma04298 ?
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