Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite née le 24 mars 2017 du silence gardé par le directeur du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone sur sa demande tendant au retrait de sa décision du 20 décembre 2016 portant suppression de son droit de visiter son fils, d'annuler la décision du 20 décembre 2016 par laquelle le directeur du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone a supprimé, à titre définitif, son droit de visiter son fils et de condamner l'Etat au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1702424 du 17 avril 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 18 juin 2018, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 avril 2018 ;
2°) d'annuler la décision implicite née le 24 mars 2017 du silence gardé par le directeur du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone sur sa demande tendant au retrait de sa décision du 20 décembre 2016 portant suppression de son droit de visiter son fils et d'annuler la décision du 20 décembre 2016 par laquelle le directeur du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone a supprimé, à titre définitif, son droit de visiter son fils ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure contradictoire a été méconnue ;
- le tribunal a commis une erreur de fait dès lors que la requérante n'était pas en possession de vingt sachets, mais de dix ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 février 2020, la garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de procédure pénale ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 20 décembre 2016, le directeur du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone a supprimé le permis dont Mme A... bénéficiait pour rendre visite à son fils, détenu dans cet établissement. Mme A... demande au tribunal d'annuler cette décision ainsi que celle, implicite et née le 24 mars 2017, de rejet de son recours gracieux par la même autorité.
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) ". Ces dispositions exigent que Mme A... ait été mise à même, préalablement à l'édiction de la mesure de police, de présenter ses observations à l'autorité compétente. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été informée par l'autorité administrative de la possibilité de présenter ses observations écrites ou orales par un courrier simple du vendredi 2 décembre 2016, dont il n'est pas contesté qu'il a été reçu le 7 décembre suivant, ce courrier lui indiquant qu'elle bénéficiait de dix jours pour ce faire et que, passé ce délai, il y aurait lieu de considérer qu'elle avait renoncé à ces droits. Mme A... a présenté ses observations dans le délai de dix jours, par un courrier dont il est constant qu'il a été reçu par l'administration pénitentiaire le 13 décembre 2016. Toutefois, la décision attaquée du 20 décembre 2016 mentionne qu'en réponse à la demande qui lui a été adressée le 2 décembre 2016 " à ce jour nous n'avons aucun retour de votre part ". Ainsi, il ressort des pièces du dossier qu'avant de prendre sa décision, le chef d'établissement n'a pas pris connaissance des observations de Mme A..., pourtant communiquées dans les délais prescrits. Dans ces conditions, c'est illégalement que l'administration a estimé que l'intéressée n'avait pas exercé son droit de présenter des observations pour prendre ensuite et par voie de conséquence la décision de suppression en litige. Les décisions attaquées méconnaissent les dispositions précitées et en l'absence de fin de non-recevoir invoquée en première instance ou en appel, ne peuvent qu'être annulées.
3. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par Mme A... et la garde des sceaux, ministre de la justice devant le tribunal administratif de Montpellier et devant la Cour.
4. Si, en exécution de l'ordonnance du 20 juin 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a suspendu 1'exécution de la décision du 20 décembre 2016, et si le permis de visite de Mme A... a été rétabli, cette ordonnance, pas davantage que le rétablissement du permis de visite n'a pu avoir pour effet de faire disparaître de l'ordonnancement juridique les décisions litigieuses qui, en tout état de cause, ont reçu exécution jusqu'au 23 juin 2017. Par suite, l'exception de non-lieu à statuer doit être rejetée.
5. Comme il a été dit, les décisions attaquées méconnaissent les dispositions de l'article L 221-1 du code des relations avec le public. Elles ne peuvent qu'être annulées. Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Sur les frais du litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à Mme A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 avril 2018 est annulé.
Article 2 : La décision implicite née le 24 mars 2017 du silence gardé par le directeur du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone sur la demande de Mme A... tendant au retrait de sa décision du 20 décembre 2016 portant suppression de son droit de visiter son fils, et la décision du 20 décembre 2016 par laquelle le directeur du centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone a supprimé, à titre définitif, son droit de visiter son fils, sont annulées.
Article 3 : Il est mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Mme A....
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Copie en sera délivrée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2020, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. D..., président assesseur,
- Mme E..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.
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N° 18MA02854