Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet de la Corse-du-Sud a déféré devant le tribunal administratif de Bastia M. A... D... comme prévenu d'une contravention de grande voirie pour avoir occupé, sur le domaine public maritime, sans autorisation, une surface de 136 m² sur la plage de Cala d'Orzu, sur le territoire de la commune de Coti Chiavari.
Par un jugement n° 1700975 du 18 avril 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif de Bastia, d'une part, a condamné M. D... à payer une amende de 1 500 euros, d'autre part, lui a enjoint de remettre les lieux en leur état initial, sous astreinte.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 15 juin 2018 et le 15 novembre 2018, M. D..., représenté par la SELARL d'avocats Mariaggi et Fazai-Codaccioni, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 avril 2018 ;
2°) de le relaxer des poursuites de contravention de grande voirie engagées à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure est irrégulière en ce que le procès-verbal a été notifié au-delà du délai de dix jours prévu à l'article L. 774-2 du code de justice administrative ;
- la compétence des signataires du constat d'infraction et du procès-verbal de contravention de grande voirie n'est pas établie ;
- la procédure a été menée de façon à lui nuire ;
- la matérialité de l'infraction n'est pas établie ;
- les installations ne peuvent être démontées dès lors que les poteaux sont enfoncés à plus de 2,50 mètres dans le sol.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que la requête est irrecevable et qu'en tout état de cause aucun des moyens de cette requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... exploite un établissement de restauration sur la plage de Cala d'Orzu, sur le territoire de la commune de Coti Chiavari. Par arrêté du 12 juin 2017, le préfet de la Corse-du-Sud l'a autorisé à occuper temporairement le domaine public maritime, pour une surface totale de 208 m², dont 144 m² pour un " local à usage de restauration démontable " et 64 m² pour une " terrasse découverte ". Un contrôle effectué le 23 juin 2017 par les services de la direction départementale des territoires et de la mer de la Corse-du-Sud a révélé que M. D... occupait en réalité une surface totale de 344 m² " par l'implantation de locaux de restauration de 94 m² et d'une terrasse démontable de 250 m² ". Un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé à l'encontre de l'intéressé le 16 août 2017 pour cette occupation irrégulière du domaine public maritime. Le préfet a déféré M. D... devant le tribunal administratif de Bastia qui, par jugement du 18 avril 2018, d'une part, l'a condamné à payer une amende de 1 500 euros, d'autre part, lui a enjoint de remettre les lieux en leur état initial, sous astreinte. M. D... relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous ". Aux termes de l'article L. 2132-2 du même code : " Les contraventions de grande voirie sont instituées par la loi ou par décret, selon le montant de l'amende encourue, en vue de la répression des manquements aux textes qui ont pour objet, pour les dépendances du domaine public n'appartenant pas à la voirie routière, la protection soit de l'intégrité ou de l'utilisation de ce domaine public, soit d'une servitude administrative mentionnée à l'article L. 2131-1. / Elles sont constatées, poursuivies et réprimées par voie administrative. ". Aux termes de l'article L. 2132-3 de ce même code : " Nul ne peut bâtir sur le domaine public maritime ou y réaliser quelque aménagement ou quelque ouvrage que ce soit sous peine de leur démolition, de confiscation des matériaux et d'amende. / Nul ne peut en outre, sur ce domaine, procéder à des dépôts ou à des extractions, ni se livrer à des dégradations. ".
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 774-2 du code de justice administrative : " Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal. (...) ".
4. Le délai de dix jours fixé par les dispositions précitées de l'article L. 774-2 du code de justice administrative pour la notification au contrevenant par le préfet du procès-verbal de contravention de grande voirie n'est pas prescrit à peine de nullité de la procédure. En outre, il ne résulte pas de l'instruction que le délai qui s'est écoulé entre le constat par les auteurs du procès-verbal de contravention de grande voirie en cause, le 23 juin 2017, du non-respect par M. D... de l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime qui lui avait été accordée et la date du 16 août 2017 à laquelle le préfet a procédé à la notification à l'intéressé de ce procès-verbal par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit moins de deux mois, aurait eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense de l'intéressé. M. D... n'est dès lors pas fondé à soutenir que la procédure de contravention de grande voirie poursuivie à son encontre serait irrégulière au motif que les dispositions de l'article L. 774-2 aurait été méconnues.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2132-21 du code général de la propriété des personnes publiques : " (...) les agents de l'Etat assermentés à cet effet devant le tribunal de grande instance (...) sont compétents pour constater les contraventions de grande voirie ".
6. Il résulte de l'instruction, particulièrement des énonciations des cartes de commissionnement produites par l'administration dans la présente instance, que M. C... B... et M. E... F..., agents de surveillance du domaine public maritime à la direction départementale des territoires et de la mer de la Corse-du-Sud, ont respectivement prêté serment le 30 septembre 2016 et le 2 décembre 2016 devant le tribunal correctionnel d'Ajaccio et étaient commissionnés à l'effet de constater les infractions relevant du code général de la propriété des personnes publiques dans le département de la Corse-du-Sud. Les intéressés étaient ainsi habilités tant à établir le constat de non-conformité des installations en litige au regard de l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime délivrée en date du 12 juin 2017 qu'à dresser le procès-verbal de contravention de grande voirie du 16 août 2017 fondant les poursuites engagées contre M. D....
7. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que, alors qu'il a déposé sa demande d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime au titre de l'année 2017 le 9 janvier 2017, cette demande a été déclarée incomplète à défaut de contenir le justificatif d'acquittement de la redevance correspondant à l'occupation domaniale au titre de 2016. Le préfet de la Corse-du-Sud ne saurait en tout état de cause être tenu pour responsable de ce que ce justificatif, qui relève de la compétence de la direction départementale des finances publiques de la Corse-du-Sud, ne lui aurait pas été adressé spontanément. Il résulte également de l'instruction que, alors que l'autorisation d'occupation temporaire a été délivrée le 12 juin 2017, M. D... a procédé, alors qu'il n'y était pas encore autorisé, à l'aménagement des installations en cause sur le domaine public maritime. Il résulte encore de l'instruction que l'autorisation qui lui avait été délivrée au titre de l'année 2016 portait sur une surface de 208 m², soit une surface équivalente à celle qui lui a été dévolue par l'arrêté précité du 12 juin 2017. Dans ces conditions, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que, en lui délivrant cette autorisation tardivement, pour une surface inférieure à celle qu'il avait sollicitée, et en faisant en outre procéder à un contrôle le jour même où il a réceptionné cet arrêté du 12 juin 2017, l'autorité préfectoral aurait intentionnellement entendu lui nuire.
8. En quatrième lieu, M. D... soutient que " la matérialité de l'infraction relevée est contestée " en se bornant à relever que la différence constatée par les agents contrôleurs entre la surface qu'il occupe et celle dont l'occupation lui a été permise par l'arrêté préfectoral du 12 juin 2017 porte non pas sur les éléments préfabriqués qu'il a installés mais sur la terrasse. Ce faisant, il ne place pas la Cour à même de se prononcer sur le bien-fondé de son moyen, qui doit en conséquence être écarté.
9. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que l'infraction reprochée à M. D... consiste en un dépassement de 136 m² de la surface pour laquelle il a obtenu une autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime, et plus précisément un dépassement de 186 m² au-delà des 64 m² sur lesquels il était autorisé à aménager une terrasse découverte démontable, desquels ont été retranchés le reliquat de 50 m² dont il n'a pas fait usage pour l'installation d'un local de restauration démontable alors qu'il bénéficiait pour ce faire d'une autorisation à concurrence de 144 m². Cette infraction, et par conséquent la remise en état des lieux à laquelle il doit procéder, ne concerne donc que la surface utilisée pour la terrasse découverte démontable. Par suite, , et en tout état de cause, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la remise en état des lieux serait impossible au motif que l'installation de la paillote nécessite la mise en place de dix poteaux de bois enfoncés à 2,50 mètres dans le sol.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué du tribunal administratif de Bastia l'a condamné à payer une amende de 1 500 euros. Par suite, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et à la ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.
Délibéré après l'audience du 19 juin 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique le 3 juillet 2020.
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N° 18MA02808
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