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03/07/2020 | FRANCE | N°18MA02684

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 03 juillet 2020, 18MA02684


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association syndicale libre générale (ASLG) Domaine de Séguret, l'association syndicale libre (ASL) Le Séguret, l'ASL L'Estelle, l'ASL Le Sarde, M. AN... G..., M. B... AV..., la société civile immobilière (SCI) Mina, M. et Mme AM... AE..., M. AK... I..., M. AW... AO..., la SCI Les Rochers des Adrets, M. AB... U..., M. K... X..., M. AM... AR..., Mme J... E..., M. et Mme H... V..., M. R... AU..., Mme AS... M..., M. AA... AJ..., M. et Mme AQ... O..., M. AP... W..., Mme AC... D... et M. Y... S..., M. AG... AF.

.., M. F..., M. et Mme AD... N..., la SCI Belille T..., M. AI... T......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association syndicale libre générale (ASLG) Domaine de Séguret, l'association syndicale libre (ASL) Le Séguret, l'ASL L'Estelle, l'ASL Le Sarde, M. AN... G..., M. B... AV..., la société civile immobilière (SCI) Mina, M. et Mme AM... AE..., M. AK... I..., M. AW... AO..., la SCI Les Rochers des Adrets, M. AB... U..., M. K... X..., M. AM... AR..., Mme J... E..., M. et Mme H... V..., M. R... AU..., Mme AS... M..., M. AA... AJ..., M. et Mme AQ... O..., M. AP... W..., Mme AC... D... et M. Y... S..., M. AG... AF..., M. F..., M. et Mme AD... N..., la SCI Belille T..., M. AI... T..., M. F. P..., la SCI Imac Libellule, M. L... Q... et M. A... C... ainsi que Mme AH... AL..., ont demandé au tribunal administratif de Toulon, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2015 par lequel le préfet du Var a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendies de forêt (PPRIF) sur le territoire de la commune des Adrets-de-L'Estérel, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux et, à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant qu'il a classé les parcelles cadastrées section C n° 2145, 2146, 2147, 1474, 1475, 1476, 1478, 1479, 1611, 1612, 1613, 2349, 2350, 2348, 1704, 1628 et 1629 en zone En1 stricte, les parcelles cadastrées section C n° 1698, 1700, 1290, 1291, 1292, 1295, 1296 et 1297 en zone rouge, une partie de la parcelle cadastrée section C n° 2028 et les parcelles cadastrées section C n° 1609, 2031, 2032 et 2024 en zone rouge.

Par un jugement n° 1502798 du 9 avril 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 juin 2018 et 13 février 2020, sous le n° 18MA02684, l'association syndicale libre générale Domaine de Séguret, M. G..., M. AV..., la SCI Mina, M. et Mme AE..., M. I..., M. AO..., la SCI Les Rochers des Adrets, M. U..., M. X..., M. AR..., Mme E..., M. et Mme V..., M. AU..., Mme M..., M. AJ..., M. et Mme O..., M. W..., Mme D... et M. S..., M. AF..., M. F..., M. et Mme N..., la SCI Belille T..., M T..., M. P..., la SCI Imac Libellule, M. L... Q... et M. A... C... et Mme AL..., représentés par Me Z... demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 9 avril 2018 ;

2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du préfet du Var du 30 janvier 2015 et la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2015 en tant qu'il classe les parcelles cadastrées section C n° 2145, 2146, 2147, 1474, 1475, 1476, 1478, 1479, 1611, 1612, 1613, 2349, 2350, 2348, 1704, 1628 et 1629 en zone En1 stricte, les parcelles cadastrées section C n° 1698, 1700, 1290, 1291, 1292, 1295, 1296 et 1297 en zone rouge, une partie de la parcelle cadastrée section C n° 2028 et les parcelles cadastrées section C n° 1609, 2031, 2032 et 2024 en zone rouge ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la communauté d'agglomération Val Estérel Méditerranée (CAVEM) n'a pas été associée à l'élaboration du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendies de forêt en violation de l'article L. 562-3 du code de l'environnement ;

- les modalités de la concertation n'ont pas été fixées par l'arrêté de prescription du plan en litige ;

- la concertation a été insuffisante avec le public, les associations de propriétaires, la chambre de l'agriculture et les professionnels de ce secteur ;

- le classement des parcelles cadastrées section C n° 2145, 2146, 2147, 1474, 1475, 1476, 1478, 1479, 1611, 1612, 1613, 2349, 2350, 2348, 1704, 1628 et 1629 en zone En1 stricte est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- un rapport d'expertise recommande le classement des parcelles nouvellement construites cadastrées n° 1477, 1295 en zone En2 ;

- le classement de certaines parcelles pour partie en zone rouge et pour partie en zone bleu foncé est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'elles sont intégrées à un lotissement qui n'est pas un espace naturel comprenant éventuellement des constructions isolées ;

- il en va de même du classement des parcelles cadastrées section C n° 2028, 1609, 2031, 2032 et 2024 en zone rouge ;

- ce classement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la méthode de qualification des aléas est entachée d'insuffisances concernant l'absence de visite des lieux, l'étude la végétation in situ, la vitesse et la direction du vent de la carte d'occurrence et l'intensité du feu.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2020, la ministre de la transition écologique et solidaire, conclut au rejet de la requête de l'association syndicale libre générale Domaine de Séguret et autres.

Elle soutient que les moyens soulevés par l'association syndicale libre générale Domaine de Séguret et autres ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 ;

- le décret n° 95-1089 du 5 octobre 1995 ;

- le décret n° 2005-3 du 4 janvier 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme AT...,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me Z... pour l'association syndicale libre générale Domaine de Séguret et autres.

Considérant ce qui suit :

1. L'association syndicale libre générale Domaine de Séguret et autres relèvent appel du jugement du 9 avril 2018 du tribunal administratif de Toulon qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2015 par lequel le préfet du Var a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendies de forêt sur le territoire de la commune des Adrets-de-L'Estérel, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'absence d'association de la CAVEM au projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles et de définition des modalités de concertation par l'arrêté du 13 octobre 2003 :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 562-3 du code de l'environnement dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages : " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. / Sont associés à l'élaboration de ce projet les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés. / Après enquête publique menée dans les conditions prévues aux articles L. 123-1 et suivants et après avis des conseils municipaux des communes sur le territoire desquelles il doit s'appliquer, le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé par arrêté préfectoral. Au cours de cette enquête, sont entendus, après avis de leur conseil municipal, les maires des communes sur le territoire desquelles le plan doit s'appliquer. ". L'article L. 562-7 du même code dispose que : " Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application des articles L. 562-1 à L. 562-6. Il définit notamment les éléments constitutifs et la procédure d'élaboration et de révision des plans de prévention des risques naturels prévisibles, ainsi que les conditions dans lesquelles sont prises les mesures prévues aux 3° et 4° du II de l'article L. 562-1. ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 2 du décret du 4 janvier 2005 susvisé : " (...) L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l'étude et la nature des risques pris en compte (...) / Cet arrêté définit également les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet. / L'arrêté est notifié aux maires des communes ainsi qu'aux présidents des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour l'élaboration des documents d'urbanisme dont le territoire est inclus en tout ou partie dans le périmètre du projet de plan (...). ". L'article 10 du décret précité précise que : " Les dispositions de l'article 2 du présent décret sont applicables aux plans de prévention des risques naturels prévisibles dont l'établissement est prescrit par un arrêté pris postérieurement au dernier jour du mois suivant la publication du présent décret. (...)".

4. Ainsi et conformément à l'article L. 562-7 du code de l'environnement, les dispositions de l'article L. 562-3 du code de l'environnement ont fait l'objet de mesures d'application prises à l'article 2 du décret du 4 janvier 2005 modifiant le décret n° 95-1089 du 5 octobre 1995 relatif aux plans de prévention des risques naturels prévisibles. Toutefois, le décret du 4 janvier 2005 prévoit à son article 10 que les dispositions de cet article 2 ne sont applicables qu'aux plans de prévention des risques naturels prévisibles dont l'établissement a été prescrit par un arrêté pris postérieurement au dernier jour du mois suivant sa publication, laquelle est intervenue au Journal officiel de la République française du 5 janvier 2005. L'ASLG Domaine de Séguret et autres ne sont dès lors pas fondés à soutenir que la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 n'a pas prévu que les nouvelles dispositions de l'article L. 562-3 du code de l'environnement fassent l'objet d'un décret d'application, que celles-ci sont suffisamment précises pour être applicables en l'état et ne nécessitaient aucun décret d'application.

5. Il ressort des pièces du dossier que le préfet du Var a pris l'arrêté prescrivant l'élaboration du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendies de forêt sur le territoire de la commune des Adrets-de-L'Estérel le 13 octobre 2003. Son établissement ayant ainsi été prescrit antérieurement au 1er mars 2005, l'élaboration de son projet n'avait pas à associer les établissements publics de coopération intercommunale concernés en application de l'article L. 562-3 du code de l'environnement. Dès lors, par application de l'article 10 du décret du 4 janvier 2005 et faute pour les dispositions de l'article L. 562-3 du code de l'environnement d'être sur ce point suffisamment précises pour être directement applicables, c'est sans méconnaître ces dispositions que la CAVEM n'a pas été associée à l'élaboration du plan contesté, y compris à compter de sa création par arrêté du 13 décembre 2012 et que cet arrêté du 13 octobre 2003 n'a pas défini les modalités de la concertation. Il s'en suit que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de la compétence en matière de schéma de cohérence territorial (SCOT) acquise par la CAVEM à la date de sa création, le 13 décembre 2013. En tout état de cause, le préfet du Var a saisi pour avis cet établissement par courrier du 15 janvier 2014, en application de l'article R. 562-7 du code de l'environnement. Son avis n'ayant pas été rendu dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande, il était réputé favorable en vertu de ces mêmes dispositions.

En ce qui concerne la concertation avec le public :

6. Il ressort du bilan de la concertation établi au mois d'avril 2014 qu'une réunion avec le public a été organisée le 18 décembre 2013 au cours de laquelle une centaine de personnes étaient présentes. L'information de la tenue de cette réunion a été menée, d'une part, par la préfecture via un communiqué de presse et une information sur le site internet des services de l'Etat dans le Var, d'autre part, par la commune des Adrets-de-L'Estérel à l'aide d'un affichage en mairie, dans les quartiers et sur son site internet. Lors de cette réunion, ont été présentés au public, notamment, la méthode de calcul de l'aléa, les enjeux sur le périmètre d'étude, la notion de défendabilité, l'élaboration du zonage réglementaire, une synthèse du règlement et les cartes au format 1/2500°. Les personnes présentes ont reçu également une plaquette d'information portant sur l'essentiel du PPRIF et le projet de plan complet a été mis en ligne sur le site internet des services de l'Etat sans limitation de durée. Par suite, cette consultation a été suffisante.

En ce qui concerne l'absence de concertation avec la chambre d'agriculture :

7. Ni les dispositions de l'article L. 562-3 du code de l'environnement mentionnées au point 2 ni l'article 3 de l'arrêté du 13 octobre 2003 prescrivant la réalisation d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendies de forêt sur la commune des Adrets-de-L'Estérel, qui dispose que : " Les services déconcentrés de l'Etat chargé d'instruire le projet en liaison avec le SDIS (service départemental d'incendie et de secours) le feront en concertation avec la commune, le conseil général du Var et le conseil régional PACA (Provence-Alpes-Côte d'Azur) ", ne prescrivent une concertation avec la chambre d'agriculture. Dès lors l'arrêté précité n'avait pas à organiser des modalités de concertation avec cet organisme ni prévoir de consulter les professionnels de l'agriculture.

En ce qui concerne l'absence de concertation avec les associations de propriétaires :

8. Il ressort du bilan de la concertation et d'une liste de réunions produits au dossier que les représentants des propriétaires étaient présents lors de plusieurs réunions des 19 octobre 2005, 14 février 2006, 22 mars 2006, 26 septembre 2006, 23 septembre 2011 et 18 octobre 2011. La coordination des associations de propriétaires faisait également partie du comité de pilotage départemental, structure de concertation mise en place à l'échelle départementale, parallèlement à la concertation communale, qui s'est réuni les 22 mars 2010, 26 juillet 2020 et 25 juillet 2011. Le bilan mentionne que cette dernière réunion a permis de répondre aux remarques de la coordination des associations de propriétaires. Par suite, cette concertation a été suffisante alors même que le président de la coordination des associations de propriétaires aurait déclaré lors d'une réunion du comité de pilotage départemental du 25 juillet 2011 que les associations n'étaient pas tenues informées de la tenue des réunions d'avancement du plan.

En ce qui concerne l'avis du commissaire enquêteur :

9. Si l'ASLG Domaine de Séguret et autres soutiennent que, dans ses conclusions motivées, le commissaire enquêteur a émis un avis favorable sous réserve d'étudier les propositions de classement en En2 des 5 parcelles du lotissement l'Estelle au domaine de Séguret, des parcelles en crête du lotissement du Sarde, ainsi que les parcelles n° 1622, 1294, 1295 et 1296 du domaine de Séguret, le préfet du Var n'était pas tenu de faire suite à ces réserves.

En ce qui concerne les insuffisances entachant la méthode de qualification de l'aléa :

10. En premier, lieu, la méthode de qualification de l'aléa décrite dans la note de présentation suit les recommandations du guide méthodologique élaborées en 2002 par les ministères de l'intérieur, de l'écologie, de l'agriculture et de l'équipement. Cette note précise que des relevés de terrains ont permis d'affiner la cartographie notamment à proximité des enjeux et d'analyser de manière plus précise les paramètres de contexte physique tels que les massifs boisés, l'exposition au vent et le contexte topographique. Les circonstances que les propriétaires du domaine de Séguret n'ont pas eu connaissance de ces visites effectuées en particulier par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt et que ces visites n'ont été accompagnées d'aucun compte rendu ne sont pas de nature à établir qu'elles n'auraient pas eu lieu. Par ailleurs, cette note de présentation mentionne que les enjeux urbanistiques ont été pris en compte à partir des photographies aériennes de 2011, des plans cadastraux parcellaires, du SCAN 25 de l'IGN, du plan d'occupation des sols, du fichier relatif aux établissements recevant du public et des informations recueillies après discussion avec les acteurs locaux lors des réunions. Elle précise sur ce point que les paramètres analysés sont le nombre de constructions existantes ou envisagées, la forme d'habitat existante ou prévue et la sensibilité des constructions. En outre, deux cartes de ces enjeux figurent en annexe de la note, l'une d'elles montrant que le domaine de Séguret est représenté en espace urbanisé diffus. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le plan de zonage de l'aléa a été déterminé sans aucune prise en compte in situ des caractéristiques du lotissement.

11. En deuxième lieu, la note de présentation comprend une analyse de la végétation laquelle détaille la composition forestière du territoire communal à partir des résultats de l'inventaire forestier national. Elle analyse également l'influence de la végétation sur la propagation d'un feu de forêt. Par ailleurs, la méthode de qualification des aléas prend en compte le paramètre du type de combustible lié à la végétation. La note de présentation mentionne que la carte de l'aléa se base sur une description actuelle de la végétation avec des hypothèses d'évolution pour anticiper cette dernière à court terme, notamment dans les secteurs brûlés récemment. Une carte de la végétation a également été élaborée à partir d'une image satellite puis corrigée à partir des visites sur le terrain. Par suite, la circonstance que la note ne présenterait aucune donnée permettant de classer le stress hydrique de la végétation n'est pas de nature à établir que l'étude de la végétation in situ serait insuffisante.

12. En troisième lieu, il ressort de la note de présentation que le vent a été pris en compte pour évaluer l'aléa déterminé à partir d'une carte du vent modélisée sur tout le département et d'une carte d'intensité de front de feu par application de la formule de Byram et à partir des paramètres cartographiés, laquelle applique notamment un coefficient de réduction du vent à mi-flamme qui traduit la réduction de la vitesse de propagation du feu lié à la végétation. En outre, l'intensité du front de feu est exprimée en kW/m de front de flamme, sur la base d'une classification établie par le Cemagref. L'expert ayant établi le rapport du 11 février 2020 à la demande des requérants reconnaît lui-même que le rôle du vent dans la propagation du feu est juste. Les circonstances à les supposer établies selon lesquelles la note de présentation ne mentionnerait pas l'application d'un coefficient de proportionnalité pour passer de 36 km/h à 54 km/h, la carte d'occurrence ne présenterait aucune information sur les simulations de parcours de feu ou l'intensité de feu tirées de la non application des règles d'utilisation du tableau du Cemagref, ne suffisent pas à démontrer que la méthode de qualification de l'aléa serait insuffisante et que le préfet du Var aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans le classement des parcelles appartenant aux requérants.

En ce qui concerne le classement des parcelles en litige :

13. Aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. (...) ".

14. Il résulte de ces dispositions que les plans de prévention des risques naturels prévisibles constituent des documents qui, élaborés à l'initiative de l'Etat, ont pour objet de définir, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, des zones exposées à des risques naturels à l'intérieur desquelles s'appliquent, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines, des contraintes d'urbanisme importantes.

15. Il ressort du règlement du PPRIF en cause que la zone En1 correspond à un risque fort à très fort et est appliquée à des zones bâties pour lesquelles toute forme d'extension de l'urbanisation existante est proscrite, en raison d'un aléa le plus souvent élevé ou très élevé et qui sont non défendables parce que les travaux de protection envisagés ou réalisés ne sont pas suffisants pour permettre en temps normal aux moyens de secours de défendre la zone ou que ces travaux ne pas réalisables. Selon ce règlement, la zone rouge (R) correspond à un niveau d'aléa moyen à très élevé ne présentant pas d'enjeux particuliers, mais aussi des zones non directement exposées au risque où certaines occupations ou utilisation du sol pourraient aggraver celui-ci ou en créer de nouveaux. Ces zones sont inconstructibles en règle générale. Quant à la zone En2, elle a trait à un risque modéré à fort, et est appliquée à des zones bâties ou non bâties sur lesquelles est admise une constructibilité future sous réserve de prise en compte d'un certain nombre de prescriptions.

S'agissant du moyen commun tiré de l'erreur de droit :

16. Les requérants contestent le classement en zone rouge d'une partie de leurs parcelles cadastrées section C n° 1290, 1291, 1292, 1295, 1296, 1297, 1698 et 1700 ainsi que celui de leurs parcelles cadastrées C n° 2028, 1069, 2031, 2032 et 2024. Il ressort des pièces du dossier que ces parcelles sont situées en bordure du domaine de Séguret. En outre, les terrains classés dans cette zone sont non bâtis, en contact direct avec le massif forestier et se trouvent dès lors dans une zone ne présentant pas d'enjeux particuliers au sens du règlement de la zone rouge du PPRIF ou dans des espaces naturels comprenant éventuellement des constructions isolées selon le tableau de croisement aléa/enjeu/équipements de défense de la note de présentation. La circonstance que l'enveloppe bâtie du domaine de Séguret soit qualifiée d'espace urbanisé diffus selon la planche 2 de la carte des enjeux de la note de présentation du PPRIF en litige est sans incidence dès lors que le préfet du Var, qui n'est pas tenu par les limites du zonage parcellaire, doit prendre compte les caractéristiques physiques des terrains concernés pour déterminer la nature et l'intensité du risque encouru. Il s'en suit que le préfet du Var n'a pas méconnu la méthodologie qu'il s'était fixé en classant en zone rouge les terrains en litige alors même qu'ils seraient localisés dans le domaine de Séguret. Par ailleurs, la Cour ayant, par l'arrêt n° 18MA02707 du 3 juillet 2020, annulé l'article 1er du jugement n° 1501037 du 9 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé le classement en zone rouge de deux parcelles cadastrées section C n° 1622 et 1294 appartenant à la SI Côte d'Azur Méditerranée se situant dans le lotissement du domaine de Séguret, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de ce jugement pour soutenir que leurs parcelles se situant dans une zone à enjeu, elles ne pouvaient être classées en zone rouge.

S'agissant du classement de certaines parcelles en zone En1 :

17. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées C n° 2145, 2146, 2147, 1474, 1475, 1476, 1477, 1478, 1479, 1611, 1612, 1613, 2349, 2350, 2348, 1704, 1628 et 1629 en cause sont situées en haut d'un versant boisé ou à proximité immédiate de sa ligne de crête, lequel versant est exposé au vent dominant et présente une forte pente montante se situant ainsi dans une zone très exposée. Si l'ASLG Domaine de Séguret et autres se prévalent d'actions de débroussaillement annuel sur 200 mètres du côté de l'autoroute depuis 2004, de la création de pistes DFCI, d'une aire de retournement pour les pompiers, de travaux d'entretien des espaces, ainsi que de la présence de 17 hydrants, ces aménagements et équipements, pour utiles qu'ils soient, ne peuvent constituer que des moyens d'appoint d'une efficacité limitée dans la lutte contre les incendies. Il en va de même du fait que les parcelles n° 2348, 2349, 1704 et 2350 comporteraient des piscines positionnées vers la bande de débroussaillement. Ces circonstances sont ainsi sans incidence sur le classement opéré au regard des objectifs poursuivis par le plan qui vise à prévenir les risques naturels d'incendies de forêt. Par ailleurs, le préfet du Var fait valoir que la défendabilité du secteur repose sur la disponibilité en eau de chaque hydrant et se prévaut des déclarations d'un représentant de la commune au commissaire enquêteur selon lesquelles, en cas d'incendie, l'approvisionnement en eau du réseau communal qui dépend de l'électricité serait défaillant car les pompes alimentant les réservoirs d'eau seraient arrêtées en raison de l'interruption du l'alimentation électrique. Par suite, la circonstance que les moyens de défendabilité entre les parcelles en litige classées en zone En1 et celles situées en zone En2 seraient identiques n'est pas de nature à établir que leur classement serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Il en va de même du fait que le rapport d'expertise établi le 11 février 2020 à la demande des requérants relève une limite du calcul indiciaire en périphérie du massif forestier et zone urbaine du fait de l'existence de pixels épars qui sont au demeurant peu nombreux et de ce que la parcelle n° 1477 serait nouvellement construite depuis 2013. L'ASLG Domaine de Séguret et autres ne peuvent utilement se prévaloir de deux courriers des 17 septembre 2007 et 13 mai 2008, par lesquels le sous-préfet du Var a estimé que certaines parcelles de la zone du Sarde pouvaient passer en zone En2 sous réserve de la réalisation de certains travaux de débroussaillements et que les conditions semblaient requises pour que l'ensemble du domaine de Séguret passe en zone En2.

S'agissant du classement de certaines parcelles pour partie en zone rouge et pour partie en zone En2 :

18. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées C n° 1290, 1291, 1292, 1295, 1296, 1297, 1698 et 1700 se situent en bordure du lotissement du domaine de Séguret et donnent directement sur des espaces naturels boisés. Le préfet du Var fait valoir que la partie de ces tènements bordant la route est classée en zone En2 dès lors qu'elle est facilement accessible pour les services de secours sur une distance de 30 m des voies d'accès, correspondant à la longueur des tuyaux, le reste étant classé en zone rouge. Les requérants ne démontrent pas que les parties de parcelles classées en zone rouge seraient accessibles par les services de secours. S'ils se prévalent du classement en zone En2 de la parcelle n° 1832 laquelle est voisine de la parcelle n° 1290, les photos et plans produits au dossier établissent qu'elle ne se situe pas dans la même configuration que les parcelles en litige. En outre, aucune disposition législative ou réglementaire ne proscrit le classement d'une parcelle dans deux zones différentes du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendies de forêt, lequel n'a pas à suivre les limites parcellaires du cadastre. Par suite, l'ASLG Domaine de Séguret et autres ne sont pas fondés à soutenir que ces parcelles n'entrent pas dans la catégorie " sans enjeu particulier " de la zone rouge du PPRI en litige. Ce classement n'est dès lors pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

19. Il résulte de tout ce qui précède que l'ASLG Domaine de Séguret et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2015 et de la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'association syndicale libre générale Domaine de Séguret et autres au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'association syndicale libre générale Domaine de Séguret et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association syndicale libre générale Domaine de Séguret, nommée en qualité de représentant unique, et à la ministre de la transition écologique et solidaire.

Délibéré après l'audience du 19 juin 2020, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme AT..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 3 juillet 2020.

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N° 18MA02684

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA02684
Date de la décision : 03/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-05-08 Nature et environnement. Divers régimes protecteurs de l`environnement. Prévention des crues, des risques majeurs et des risques sismiques.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SELARL MAUDUIT LOPASSO GOIRAND et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-03;18ma02684 ?
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