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30/06/2020 | FRANCE | N°19MA01241

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 30 juin 2020, 19MA01241


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Travaux publics Grand littoral et M. A... C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 16 juin 2016 par laquelle le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a informé la SARL Travaux publics Grand littoral qu'elle ne satisfaisait plus à l'exigence de capacité professionnelle prévue par les dispositions du 2° du I de l'article 9-5 du décret du 30 août 1999 relatif aux transports routiers de marchandises et l'a mise

en demeure de régulariser sa situation dans le délai de six mois.

Par un jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Travaux publics Grand littoral et M. A... C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 16 juin 2016 par laquelle le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a informé la SARL Travaux publics Grand littoral qu'elle ne satisfaisait plus à l'exigence de capacité professionnelle prévue par les dispositions du 2° du I de l'article 9-5 du décret du 30 août 1999 relatif aux transports routiers de marchandises et l'a mise en demeure de régulariser sa situation dans le délai de six mois.

Par un jugement n° 1606788 du 8 janvier 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 mars 2019, la SARL Travaux publics Grand littoral et M. C..., représentés par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 janvier 2019 ;

2°) d'annuler cette décision du 16 juin 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision qui est fondée en réalité sur la perte de l'honorabilité professionnelle a été prise sans que la commission régionale des sanctions administratives ait été consultée, ainsi que l'imposait le VIII de l'article 7 du décret du 30 août 1999 ;

- l'administration ne pouvait légalement estimer que l'exigence d'honorabilité professionnelle n'était plus remplie dans la mesure où le II de l'article 7 du décret du 30 août 1999 ne prévoit la perte de cette honorabilité que dans le cas où plusieurs condamnations sont mentionnées au bulletin n° 2 du casier judiciaire ;

- dès lors que M. C..., occupant les fonctions de directeur technique, ne méconnaissait pas l'interdiction de diriger une entreprise assortissant sa condamnation pénale, l'administration ne pouvait considérer que l'exigence de capacité professionnelle n'était plus remplie au sens de l'article 9 du décret du 30 août 1999.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2020, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par la SARL Travaux publics Grand littoral et M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code des transports ;

- le décret n° 99-752 du 30 août 1999 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de M. B..., chef d'unité à la DREAL PACA, représentant la ministre de la transition écologique et solidaire.

Une note en délibéré, présentée pour la ministre de la transition écologique et solidaire, a été enregistrée le 17 juin 2020.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Travaux publics Grand littoral et M. C... font appel du jugement du 8 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 16 juin 2016 du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur informant la SARL Travaux publics Grand littoral qu'elle ne satisfaisait plus à l'exigence de capacité professionnelle prévue par les dispositions du 2° du I de l'article 9-5 du décret du 30 août 1999 relatif aux transports routiers de marchandises et la mettant en demeure de régulariser sa situation dans le délai de six mois.

2. Selon l'article 2 du décret du 30 août 1999 relatif aux transports routiers de marchandises, en vigueur à la date de la décision attaquée, le préfet de région délivre à l'entreprise qui souhaite exercer la profession de transporteur public routier de marchandises une autorisation d'exercer la profession lorsqu'elle satisfait aux exigences d'établissement, d'honorabilité professionnelle, de capacité financière et de capacité professionnelle prévues aux articles 6 à 9. Aux termes de l'article 9-1 du même décret : " I. L'entreprise qui exerce ou veut exercer la profession de transporteur public routier de marchandises (...) désigne une personne physique, le gestionnaire de transport, résidant dans l'Union européenne, qui satisfait aux exigences d'honorabilité et de capacité professionnelles mentionnées aux articles 7 et 9 et qui dirige effectivement et en permanence ses activités de transport. / Les missions confiées au gestionnaire de transport incluent notamment la gestion de l'entretien des véhicules affectés à l'activité de transport de l'entreprise, la vérification des contrats et des documents de transport, la comptabilité de base, l'affectation des chargements ou des services aux conducteurs et aux véhicules et la vérification des procédures en matière de sécurité. / II. Le gestionnaire de transport justifie d'un lien réel avec l'entreprise en étant notamment employé, directeur ou propriétaire de cette entreprise, ou en la dirigeant, ou, si l'entreprise est une personne physique, en étant cette personne. (...) ". Aux termes de l'article 7 du même décret : " I. Il doit être satisfait à l'exigence d'honorabilité professionnelle par chacune des personnes suivantes : (..) 3° Le gestionnaire de transport de l'entreprise visé à l'article 9-1. / II. Les personnes mentionnées au I peuvent perdre l'honorabilité professionnelle lorsqu'elles ont fait l'objet : / 1° Soit de plusieurs condamnations mentionnées au bulletin n° 2 du casier judiciaire prononçant une interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle ; (...) ". Le I de l'article 9 de ce décret dispose que : " Il est satisfait à l'exigence de capacité professionnelle mentionnée à l'article 2 lorsque le gestionnaire de transport mentionné à l'article 9-1 est titulaire d'une attestation de capacité professionnelle. ". Enfin, aux termes de l'article 9-5 de ce décret : " I. Lorsqu'une entreprise ne satisfait plus à l'une des exigences d'accès à la profession de transporteur public routier de marchandises (...) mentionnées à l'article 2 (...), le préfet de région avise le responsable de l'entreprise de celle des exigences à laquelle son entreprise ne satisfait plus ainsi que des mesures susceptibles d'être prises à son encontre et, après l'avoir informé de la possibilité de présenter ses observations écrites ou orales, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix, le met en demeure de régulariser sa situation dans les délais suivants : (...) 2° Un délai maximum de six mois en cas de cessation d'activité ou de perte d'honorabilité du gestionnaire de transport ou du responsable de l'entreprise, ou lorsque le gestionnaire de transport a fait l'objet d'une condamnation prononçant une interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle ou qu'il ne peut plus se prévaloir de sa capacité professionnelle en raison d'une déclaration d'inaptitude ; (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur s'est fondé pour estimer que la SARL Travaux publics Grand littoral ne satisfaisait plus aux exigences prévues par le décret du 30 août 1999 sur la circonstance que le bulletin n° 2 du casier judiciaire de son gestionnaire de transport, M. C..., faisait mention d'une condamnation emportant " l'interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler toute entreprise artisanale, commerciale ou agricole et toute personne morale pendant huit ans ". Il résulte du jugement public du tribunal de commerce de Salon-de-Provence le 18 septembre 2012 que cette peine a été prononcée en application de l'article L. 653-8 du code de commerce.

4. Dans le cas où le gestionnaire de transport est un salarié de l'entreprise, les missions qui lui sont confiées à ce titre, décrites aux dispositions précitées du second alinéa du I de l'article 9-1 du décret du 30 août 1999, ne permettent pas, à elles seules, de le regarder comme assurant, directement ou indirectement, la direction, la gestion ou l'administration de l'entreprise de transport routier, quelle que soit sa forme juridique. Il ressort en l'espèce des pièces du dossier que M. C..., gérant de la SARL Travaux publics Grand littoral jusqu'au 9 juillet 2011, a été remplacé depuis dans ces fonctions. Il exerçait, à la date de la mise en demeure attaquée, les fonctions de gestionnaire de transports en tant que salarié de cette société et était employé en qualité de directeur technique. L'administration ne démontre pas, ni même n'allègue qu'il aurait exercé d'autres missions portant sur la direction, la gestion ou l'administration de l'entreprise ou qu'il serait dirigeant de fait de cette société.

5. En conséquence, et alors que la perte de l'honorabilité professionnelle n'avait pas été prononcée à son encontre en application de l'article 7 du décret du 30 août 1999, le préfet ne pouvait légalement se fonder, en application des dispositions du 2° du I de l'article 9-5 du même décret relatives à la condamnation du gestionnaire de transport " prononçant une interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle ", sur la peine dont M. C... avait fait l'objet pour regarder la SARL Travaux publics Grand littoral comme ne satisfaisant plus à l'une des exigences d'accès à la profession de transporteur public routier de marchandises.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Travaux publics Grand littoral et M. C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SARL Travaux publics Grand littoral et M. C... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 janvier 2019 et la décision du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur du 16 juin 2016 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à la SARL Travaux publics Grand littoral et M. C... une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Travaux publics Grand littoral, à M. A... C... et à la ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée au préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2020, où siégeaient :

- Mme E..., présidente,

- M. F..., président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 juin 2020.

N° 19MA01241 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

65-02 Transports. Transports routiers.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : ROMIEU

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Date de la décision : 30/06/2020
Date de l'import : 28/07/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19MA01241
Numéro NOR : CETATEXT000042133376 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-06-30;19ma01241 ?
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