Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Axa corporate solutions assurances a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner conjointement et solidairement la communauté d'agglomération du pays de l'Or et l'Etat à lui verser la somme de 748 500 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2017, en réparation des dommages subis le 22 juin 2015 par l'aéronef immatriculé F-HGIE, dont elle assurait le propriétaire, alors qu'il décollait de l'aérodrome de Montpellier-Candillargues.
Par un jugement n° 1705319 du 20 novembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoire complémentaires enregistrés le 18 janvier 2019, le 22 février 2019, le 24 juin 2019 et le 11 septembre 2019, la société XL Insurance company venant aux droits de la société Axa corporate solutions assurances, représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de condamner conjointement et solidairement la communauté d'agglomération du pays de l'Or et l'Etat à lui verser la somme de 748 500 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2017 ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du pays de l'Or et de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la situation faunistique de l'aérodrome de Montpellier Candillargues justifiait la mise en place d'un service de prévention du péril animalier par l'Etat et la Communauté d'agglomération au regard des dispositions des deux premiers alinéas de l'article D. 213-1-15 du code de l'aviation civile, du c) de l'article D. 213-1-19 du même code et de l'article 1 bis de l'arrêté du 10 avril 2007 relatif à la prévention du péril animalier ;
- cette inaction est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité du préfet de l'Hérault et de la communauté d'agglomération du pays de l'Or ;
- cette faute est en lien direct avec les dommages causés à l'aéronef ;
- le pilote de l'appareil n'a commis aucune faute.
Par des mémoires en défense enregistrés le 29 mars 2019 et le 12 juillet 2019, la communauté d'agglomération du pays de l'Or, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête de la société XL Insurance company ;
2°) de condamner l'Etat à la garantir de la totalité des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de la société XL Insurance company la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la société XL Insurance company ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense enregistrés les 3 juin 2019, 16 juillet 2019 et 24 septembre 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- à titre principal, la requête d'appel est irrecevable dès lors que le président du conseil d'administration de la société XL Insurance company n'avait pas qualité pour agir au nom de cette société, faute de preuve, d'une part, de son identité, d'autre part, de ce qu'il exerce la direction générale de cette société ;
- à titre subsidiaire, la requête de première instance est irrecevable pour les mêmes raisons ;
- les conditions permettant la subrogation de la société XL Insurance company au titre de l'article L. 121-12 du code des assurances et au titre de l'article 1250 du code civil ne sont pas remplies dès lors que la preuve du paiement n'est pas rapportée ;
- le pilote de la société Alma a commis des fautes qui sont à l'origine directe du dommage en décidant d'engager une manoeuvre de décollage alors qu'il connaissait et avait constaté la présence de nombreux oiseaux sur la piste ;
- il n'est pas justifié du coût des interventions et des réparations réellement effectuées sur l'appareil et le préjudice demeure éventuel et incertain dans sa quotité ;
- les moyens soulevés par la société XL Insurance company ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 27 septembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 octobre 2019.
Un mémoire présenté pour la société XL Insurance company et enregistré le 16 mars 2020, n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'aviation civile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E... Grimaud, rapporteur,
- les conclusions de M. B... Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant la société XL Insurance company, et de Me A..., représentant la communauté d'agglomération du Pays de l'Or.
Considérant ce qui suit :
1. Le 22 juin 2015, l'aéronef Piper PA46 immatriculé F-HGIE, exploité par la société Alma et propriété de la société Lixxbail, filiale de la société Crédit Agricole Leasing, a percuté plusieurs oiseaux alors qu'il décollait de l'aérodrome de Montpellier-Candillargues, est sorti de la piste après que le pilote a interrompu le décollage et a subi d'importants dommages. La société Lixxbail, la société Alma et la société Axa corporate solutions assurances, assureur de la société Alma, ont signé un protocole d'accord le 9 mars 2016 par lequel cet assureur a accepté de verser la somme de 748 500 euros à la société Crédit Agricole Leasing en raison des dommages subis par l'appareil. La société Axa corporate solutions assurances, aux droits de laquelle vient la société XL Insurance company, invoquant sa subrogation dans les droits de son assuré, a adressé des réclamations indemnitaires préalables au préfet de l'Hérault, à la communauté d'agglomération du Pays de l'Or et à " l'aérodrome de Montpellier-Candillargues ", réclamations qui ont été rejetées. Elle relève désormais appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 novembre 2018 qui a rejeté sa demande tendant aux même fins, chiffrée à 748 500 euros, dirigée contre l'Etat et la communauté d'agglomération du Pays de l'Or.
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
En ce qui concerne la responsabilité de l'État :
2. Aux termes de l'article D. 213-1-15 du code de l'aviation civile, issu du décret n° 2007-432 du 25 mars 2007 relatif (...) à la prévention du péril animalier sur les aérodromes : " Le présent décret s'applique à tout aérodrome visé aux articles R. 221-1 et D. 232-1 où le préfet exerce le pouvoir de police et dont le trafic, au cours des trois dernières années civiles consécutives écoulées, a totalisé au moins mille mouvements commerciaux annuels d'avions d'une longueur hors tout égale ou supérieure à douze mètres. Au-dessous de ce seuil, lorsque la situation faunistique et la nature du trafic le justifient, le préfet, après consultation de l'exploitant d'aérodrome, décide de la mise en place d'un service de péril animalier adapté.
Sur les aérodromes pour lesquels ont été constatés, au cours des trois dernières années civiles consécutives écoulées, au moins vingt-cinq mille mouvements commerciaux annuels d'avions d'une longueur hors tout égale ou supérieure à douze mètres, les mesures de prévention du péril animalier ont un caractère permanent. ". Aux termes des dispositions de l'article D. 213-1-16 du même code : " Pour chaque aérodrome, le préfet détermine par arrêté, après consultation de l'exploitant, les périodes minimales durant lesquelles les mesures prévues au b de l'article D. 213-1-14 sont mises en oeuvre. / (...) Lorsqu'elles ont un caractère permanent, les mesures sont mises en oeuvre à partir de trente minutes avant le lever du soleil et jusqu'à trente minutes après le coucher du soleil. / Lorsqu'elles ont un caractère occasionnel, les mesures ne sont mises en oeuvre, qu'à l'occasion des mouvements d'avions mentionnés à l'article D. 213-1-15, à partir de trente minutes avant le lever du soleil et jusqu'à trente minutes après le coucher du soleil. Elles le sont également, dans ces mêmes conditions, chaque fois qu'un équipage ou que l'organisme de la circulation aérienne signale la présence d'animaux susceptibles d'entraîner un danger. ". Enfin, selon l'article D. 213-1-17 de ce code : " Lorsque la situation faunistique d'un aérodrome le justifie, le préfet peut, sur demande de l'exploitant, autoriser la mise en oeuvre, de jour comme de nuit, des mesures appropriées d'effarouchement ou de prélèvement d'animaux. / Cette autorisation précise la période de l'année durant laquelle elle est applicable. / Toute demande doit être appuyée par une expertise préalable analysant notamment la situation faunistique locale, les causes de l'attrait que l'aérodrome présente pour les animaux et les caractéristiques du trafic aérien sur l'aérodrome considéré. ".
3. D'une part, il est constant que l'aérodrome de Montpellier-Candillargues enregistre moins de mille mouvements commerciaux annuels d'avions d'une longueur hors tout égale ou supérieure à douze mètres. Il résulte dès lors des dispositions du premier alinéa de l'article D. 213-1-15 du code de l'aviation civile que cet aérodrome n'entre pas, en principe, dans le champ d'application des dispositions relatives à la prévention du péril animalier sur les aérodromes mais qu'il était seulement loisible au préfet de l'Hérault, au vu de la nature du trafic de l'aérodrome et de la faune présente sur ses installations ou aux alentours, de prescrire la mise en place d'un service de péril animalier en vertu des dispositions du deuxième alinéa de l'article D. 213-1-15 ou, en raison de la situation faunistique, la mise en oeuvre de mesures d'effarouchement et de prélèvement d'animaux sur le fondement de l'article D. 213-1-17 du même code.
4. D'autre part, si la société XL Insurance company fait valoir que l'aérodrome est situé en zone Natura 2000 et, notamment, à proximité d'un plan d'eau accueillant de nombreuses espèces d'oiseaux, ce qu'elle établit effectivement en produisant un rapport dressé par la société ASA France, qui ne fait toutefois pas état de la présence de nombreux oiseaux sur les installations de l'aérodrome elles-mêmes, il résulte de l'instruction que celui-ci, bien qu'ouvert à la circulation aérienne publique, est classé en catégorie D au sens de l'article R. 222-5 du code de l'aviation civile et est ainsi destiné à la formation aéronautique, aux sports aériens et au tourisme. Le ministre de la transition écologique et solidaire soutient par ailleurs, sans être contredit, que cet équipement accueille 28 000 mouvements par an, correspondant essentiellement à un trafic local d'avions légers, et il ne résulte pas de l'instruction qu'un nombre significatif de vols commerciaux y soient accueillis. Enfin, si la société XL Insurance company rappelle la survenance, en 2017, d'un accident aviaire sur l'aérodrome de Montpellier Méditerranée, elle ne rapporte pas la preuve de précédents de même nature sur l'aérodrome de Montpellier-Candillargues. Dans ces conditions, c'est sans commettre de faute que le préfet de l'Hérault a pu estimer que la situation faunistique et le trafic de l'aérodrome ne justifiaient pas la mise en place d'un service de prévention du péril animalier ou la mise en oeuvre de mesures d'effarouchement ou de prélèvement au vu de sa seule situation faunistique.
En ce qui concerne la responsabilité de la communauté d'agglomération du pays de l'Or :
5. Si la société XL Insurance company invoque les dispositions de l'article D. 213-1-19 du code de l'aviation civile et de l'arrêté du 10 avril 2007 qui prévoient les obligations de l'exploitant dans le cadre du service de péril animalier, un tel service n'a pas été mis en oeuvre sur l'aérodrome de Montpellier-Candillargues. Par suite, ces dispositions ne sont pas applicables et la communauté d'agglomération du Pays de l'Or n'a commis aucune faute en s'abstenant d'indiquer au préfet les situations et les zones de l'aérodrome particulièrement attractives pour les oiseaux.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par le ministre de la transition écologique et solidaire, que la société Axa corporate solutions assurances n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande. Sa requête doit, dès lors, être rejetée.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat et la communauté d'agglomération du Pays de l'Or, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, versent à la société XL Insurance company la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu au contraire de mettre à la charge de la société XL Insurance company le paiement à la communauté d'agglomération du Pays de l'Or, sur le fondement de ces mêmes dispositions, d'une somme de 2 000 euros.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société XL Insurance company est rejetée.
Article 2 : La société XL Insurance company versera une somme de 2 000 euros à la communauté d'agglomération du pays de l'Or au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société XL Insurance company, à la communauté d'agglomération du pays de l'Or et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 3 juin 2020, où siégeaient :
- M. David Zupan, président,
- Mme F... G..., présidente assesseure,
- M. E... Grimaud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 juin 2020.
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N° 19MA00258
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