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11/06/2020 | FRANCE | N°19MA01613

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 11 juin 2020, 19MA01613


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler la décision du 15 janvier 2016 du président du conseil départemental du Var refusant de faire droit à sa demande de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge et la décision du 22 avril 2016 rejetant son recours gracieux et, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter du jugement, de la réintégrer et de procéder à la reconstitution de ses droi

ts sociaux ou, à défaut, de condamner le département du Var à lui verser la somm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler la décision du 15 janvier 2016 du président du conseil départemental du Var refusant de faire droit à sa demande de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge et la décision du 22 avril 2016 rejetant son recours gracieux et, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter du jugement, de la réintégrer et de procéder à la reconstitution de ses droits sociaux ou, à défaut, de condamner le département du Var à lui verser la somme de 49 290 euros en réparation du préjudice financier qu'elle estime avoir subi.

Par un jugement n° 1601856 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 avril 2019 et le 26 février 2020, Mme A..., représentée par la SELARL Carlini et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 7 février 2019 ;

2°) d'annuler les décisions du président du conseil départemental du Var des 15 janvier et 22 avril 2016 ;

3°) d'enjoindre au département du Var de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, de la réintégrer et de procéder à la reconstitution de ses droits sociaux ou, à défaut, de condamner le département du Var à lui verser la somme de 49 290 euros à titre indemnitaire ;

4°) de mettre à la charge du département du Var la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ses conclusions à fin d'annulation n'étaient pas dépourvues d'objet ;

- les premiers juges ont opposé à tort une irrecevabilité concernant les conclusions indemnitaires qui étaient recevables dès lors qu'un recours gracieux a été adressé au conseil départemental ;

- la demande présentée devant le tribunal n'était pas tardive, dès lors que la décision contestée ne constitue pas une décision confirmative de la décision du 15 janvier 2016 ;

- la décision de refus de prolongation d'activité est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée en fait ;

- elle méconnaît les dispositions de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public et de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites ;

- la responsabilité pour faute de la collectivité est engagée du fait de l'illégalité de la décision contestée qui la prive du bénéfice d'une retraite à taux plein et de l'absence de réintégration à la première vacance d'emploi ;

- elle est fondée à solliciter sa réintégration et la reconstitution de ses droits sociaux ou, à défaut, le versement de 30 mois de traitement correspondant à 10 trimestres de cotisations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2019, le département du Var, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est régulier ;

- la décision de radiation des cadres n'ayant pas été contestée, l'agent n'est pas recevable à demander l'annulation de la décision refusant le prolongement de l'activité ;

- à la date du jugement, l'agent avait dépassé la limite d'âge et ne pouvait bénéficier d'une prolongation d'activité ;

- la demande d'annulation d'une décision confirmative d'une précédente décision implicite du 7 janvier 2016 de refus de prolongation est tardive ;

- la demande indemnitaire est irrecevable en l'absence de liaison du contentieux ;

- à défaut, les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;

- la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a désigné Mme E..., présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G...,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant Mme A..., et de Me C..., substituant Me D... représentant le département du Var.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., qui était adjointe administrative territoriale titulaire du département du Var, relève appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 22 avril 2016 de rejet de son recours gracieux formé contre la décision du 15 janvier 2016 du président du conseil départemental du Var ayant rejeté sa demande de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au département du Var de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de ce jugement, de la réintégrer et de procéder à la reconstitution de ses droits sociaux ou, à défaut, de condamner le département du Var à lui verser la somme de 49 290 euros à titre indemnitaire.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les conclusions indemnitaires formées par Mme A... devant le tribunal ont été précédées d'une demande indemnitaire adressée au département du Var. Il suit de là que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables ces conclusions. Par suite, le jugement doit être annulé dans cette mesure.

3. Il y a lieu de se prononcer par la voie de l'évocation sur les conclusions indemnitaires présentées par Mme A....

4. En second lieu, d'une part, il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté. L'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative. Il appartient, en conséquence, au juge administratif, s'il est saisi dans le délai de recours contentieux qui a recommencé de courir à compter de la notification du rejet du recours gracieux, de conclusions dirigées formellement contre le seul rejet du recours gracieux, d'interpréter les conclusions qui lui sont soumises comme étant aussi dirigées contre la décision administrative initiale.

5. Les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 22 avril 2016 rejetant son recours gracieux formé à l'encontre de la décision du 15 janvier 2016 du président du conseil départemental du Var ayant refusé de faire droit à sa demande, présentée le 7 septembre 2015, de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge doivent être interprétées comme dirigées également contre la décision du 15 janvier 2016.

6. D'autre part, aux termes de l'article 1.1 de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. (...) ". Selon l'article 1 de la même loi : " Sous réserve des reculs de limite d'âge pouvant résulter des textes applicables à l'ensemble des agents de l'Etat, la limite d'âge des fonctionnaires civils de l'Etat est fixée à soixante-sept ans lorsqu'elle était, avant l'intervention de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, fixée à soixante-cinq ans ".

7. Ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, le recours tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'un refus de l'administration d'accomplir une action est dépourvu d'objet, et est pour ce motif irrecevable, lorsque l'action en cause est devenue impossible avant l'introduction de ce recours. La radiation des cadres de Mme A... intervenue le 22 février 2016 étant devenue définitive à défaut d'avoir fait l'objet d'un recours contentieux, celle-ci ne se trouvait plus en position d'activité avant même l'introduction de sa demande présentée devant le tribunal, à la date de laquelle sa demande de prolongation d'activité ne pouvait aboutir et elle-même ne pouvait plus prétendre à cotiser les trimestres manquants. Par ailleurs, la requérante, née le 13 avril 1951, avait, à la date du jugement attaqué, dépassé la limite d'âge des fonctionnaires civils de l'Etat qui est fixée à 67 ans par les dispositions précitées de loi du 13 septembre 1984. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de prolongation d'activité contestée comme étant irrecevables, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction par voie de conséquence.

Sur l'évocation partielle :

8. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que Mme A... n'est pas fondée à rechercher la responsabilité du conseil départemental du Var du fait de l'illégalité du rejet de sa demande de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge ni, par suite, à solliciter une indemnisation à ce titre.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties en litige la charge de ses propres frais de procédure et de rejeter les conclusions qu'elles ont présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 7 février 2019 du tribunal administratif de Toulon est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions indemnitaires présentées par Mme A....

Article 2 : Les conclusions indemnitaires présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de Toulon et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions du département du Var présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... A... et au département du Var.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 où siégeaient :

- Mme E..., présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;

- Mme G..., première conseillère ;

- M. A... Sanson, conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juin 2020.

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N° 19MA01613

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01613
Date de la décision : 11/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-01 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite pour ancienneté ; limites d'âge.


Composition du Tribunal
Président : Mme JORDA-LECROQ
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : SCP CARLINI et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-06-11;19ma01613 ?
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