Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... F... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2016 par lequel le maire de l'Isle sur la Sorgue a délivré un permis de construire modificatif au syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua et, d'autre part, d'ordonner la suppression des accès à la terrasse du 1er étage, créée sans autorisation entre janvier et juin 2016, et leur remise à l'état original de fenêtres.
Par un jugement n° 1603085 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du maire de l'Isle sur la Sorgue du 8 juillet 2016 et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 décembre 2018 et le 22 novembre 2019, le syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua, représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 30 octobre 2018 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. F... devant le tribunal administratif de Nîmes ;
3°) de mettre à la charge de M. F... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande de M. F... devant le tribunal est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ;
- il appartenait aux juges de première instance de soulever le moyen d'office tiré du défaut d'intérêt à agir de M. F... contre le permis de construire en cause.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 février 2019 et le 11 décembre 2019, M. E... F..., représenté par la SELARL RS avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que le syndic n'a pas été habilité à agir en justice en vertu de l'article 55 du décret du 17 mars 1967 ;
- la fin de non-recevoir doit être écartée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné le 16 janvier 2020, Mme A..., présidente assesseure, pour assurer les fonctions de présidente par intérim de la 9ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme H...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant M. F....
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 8 juillet 2016, le maire de l'Isle sur la Sorgue a délivré un permis de construire modificatif au syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua en vue de la régularisation de travaux effectués sur un bâtiment existant. Par un jugement du 30 octobre 2018 dont relève appel le syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua, le tribunal administratif de Nîmes a, à la demande de M. F..., voisin, annulé cet arrêté du 8 juillet 2016.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua soutient que les premiers juges ont méconnu leur office en ne soulevant pas d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité manifeste de la demande présentée par M. F... au motif que celui-ci n'avait pas intérêt à agir contre l'arrêté du maire de l'Isle sur la Sorgues du 8 juillet 2016. Devant le tribunal administratif de Nîmes, M. F... a soutenu que le bâtiment dont il est propriétaire édifié sur la parcelle cadastrée section CP n° 622 est contigu à l'immeuble, objet des travaux en litige, implanté sur la parcelle cadastrée section CP n° 628 et il a invoqué l'existence de vues directes sur son bien, susceptibles d'être créées par le projet contesté visant notamment à créer une terrasse accessible au 1er étage. A l'appui de son recours, il a produit des clichés photographiques, une ordonnance rendue par le juge des référés près le tribunal de grande instance d'Avignon du 26 mars 2018 et un procès-verbal d'huissier dressé à la demande de M. et Mme B..., copropriétaires, le 16 février 2018. Contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'eu égard à sa situation de voisin immédiat et aux atteintes susceptibles d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien, M. F... n'aurait pas eu qualité lui donnant intérêt à agir et que sa demande aurait été ainsi manifestement irrecevable devant conduire le tribunal a soulevé d'office l'irrecevabilité désormais alléguée en appel. Ainsi, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".
4. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. Lorsque le requérant, sans avoir contesté le permis initial, forme un recours contre un permis de construire modificatif, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé.
5. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans annexés aux dossiers de permis de construire du 14 septembre 2004 et du 8 juillet 2016, les photographies et le procès-verbal de constat d'huissier du 16 février 2018 que contrairement à ce qu'affirme le syndicat requérant, eu égard à la situation des lieux, M. F... propriétaire de la parcelle cadastrée section CP n° 622, est voisin immédiat du bâtiment sur lequel le permis de construire du 8 juillet 2016 a autorisé les travaux en cause. Les travaux autorisés tendant à la réalisation, au niveau du 1er étage de ce bâtiment, d'une terrasse accessible par une porte-fenêtre jusqu'en limite parcellaire ouest du terrain d'assiette et à celle d'une fenêtre au deuxième niveau sont susceptibles, par les vues directes ainsi créées sur l'habitation de M. F..., d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Ainsi, le syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua n'est pas fondé à soutenir que M. F... n'a pas intérêt à agir contre l'arrêté du 8 juillet 2016 et que sa demande devant le tribunal administratif de Nîmes était irrecevable.
6. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par M. F..., le syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du maire de l'Isle sur la Sorgue du 8 juillet 2016.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. F..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ce syndicat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. F... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête du syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua est rejetée.
Article 2 : Le syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua versera à M. F... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des copropriétaires Piazza Antiqua et à M. E... F....
Délibéré après l'audience du 18 février 2020, où siégeaient :
- Mme A..., présidente assesseure, présidente de la formation de jugement, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme H..., première conseillère,
- Mme G..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 10 mars 2020.
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N° 18MA05463