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10/02/2020 | FRANCE | N°19MA04782

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 10 février 2020, 19MA04782


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour d'une durée d'un an et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1901901 du 4 juin 2019, le mag

istrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a annulé les déci...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour d'une durée d'un an et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1901901 du 4 juin 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a annulé les décisions du préfet des Alpes-Maritimes du 18 avril 2019 refusant d'accorder un délai de départ volontaire et prononçant une interdiction de retour, et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 novembre 2019, M. E... représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement en ce qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision portant refus de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 18 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de séjour est entaché d'erreur de droit et méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car il n'appartient pas au préfet de statuer sur son droit au séjour au titre de l'asile, la Cour nationale du droit d'asile, du reste saisie, étant compétente pour ce faire ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- il était titulaire d'une attestation de demande d'asile et, le préfet ne l'ayant pas abrogée, il ne pouvait l'éloigner ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 33 de la convention de Genève.

Par courrier du 8 janvier 2020 les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre la décision de refus de séjour en l'absence d'une telle décision dans l'arrêté en litige.

M. E... a répondu à ce moyen par un mémoire enregistré le 8 janvier 2020.

Il fait valoir que ce moyen est infondé et, à supposer qu'il le fût, la mesure d'éloignement n'en serait que plus illégale, faute de décision se prononçant sur le droit au séjour.

Un mémoire en défense présenté par le préfet des Alpes-Maritimes a été enregistré après la clôture automatique de l'instruction intervenue suivant les prévisions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative et n'a pas été communiqué.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... Grimaud, rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Entré pour la première fois en France le 14 août 2018, M. E..., né le 6 février 1980 et de nationalité géorgienne, a demandé quelques semaines plus tard à se voir reconnaître le statut de réfugié. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté cette demande le 18 mars 2019. Par un arrêté du 18 avril 2019, le préfet des Alpes-Maritimes, tirant les conséquences de cette décision, a refusé à M. E... l'octroi de la carte de résident prévue par le 8° l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et prescrit l'éloignement de l'intéressé.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'office statue sur les demandes d'asile dont il est saisi (...) ". En vertu des dispositions de l'article L. 731-2 du même code : " La Cour nationale du droit d'asile statue sur les recours formés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides prises en application (...) ".

3. S'il appartient à la cour nationale du droit d'asile de statuer sur l'octroi de la qualité de réfugié au demandeur d'asile qui conteste la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, il ne ressort pas en l'espèce des pièces du dossier que l'intéressé, qui se borne à produire un accusé de réception attestant de la saisine du bureau d'aide juridictionnelle de la cour nationale du droit d'asile, avait effectivement saisi cette juridiction à la date de l'arrêté attaqué, la seule saisine du bureau d'aide juridictionnelle de cette cour le 4 avril 2019 n'établissant pas l'introduction d'un recours devant elle. Il en résulte que le préfet des Alpes-Maritimes pouvait, sans commettre d'erreur de droit ni méconnaître les dispositions précitées, constater le rejet de la demande d'asile de M. E... par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et refuser de lui délivrer un titre de séjour au titre de l'asile.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, M. E... n'est pas fondé, en l'absence de décision de refus de titre de séjour, à demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français par voie de conséquence de l'illégalité de cette première décision.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : / (...) 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 (...) ". Aux termes de l'article L. 723-2 du même code : " I. - L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 (...) ".

6. L'article 7 de l'arrêté attaqué abroge l'attestation de demande d'asile délivrée à M. E..., comme il était loisible au préfet de le faire en vertu des dispositions précitées. Dès lors, le requérant n'étant plus titulaire de cette attestation, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Alpes-Maritimes ne pouvait l'éloigner. Par ailleurs, il résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 I 6° précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile et de ce qui a été énoncé au point 3 que le préfet peut valablement édicter une telle mesure d'éloignement, lorsque l'étranger concerné est débouté du droit d'asile. Aucune erreur de droit n'a donc en l'espèce été commise à ces titres.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

7. Si M. E... fait valoir qu'il a été battu par les forces de l'ordre et menacé en Géorgie en raison de ses opinions politiques, il ne fait état d'aucun élément de fait précis ou pièce susceptible d'établir la réalité des risques qu'il dit encourir dans ce pays. Le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.

8. M. E..., à qui la qualité de réfugié a été refusée et qui, ainsi qu'il vient d'être dit, n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité des risques que comporterait pour lui un retour dans son pays d'origine, n'est pas fondé à se prévaloir des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le premier juge a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 18 avril 2019. Sa requête doit par suite, et sans qu'il soit tenu compte du mémoire en défense présenté après la clôture de l'instruction par le préfet des Alpes-Maritimes, être rejetée.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. E..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée par Me B... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2020, où siégeaient :

- M. David Zupan, président,

- Mme D... F..., présidente assesseure,

- M. C... Grimaud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 février 2020.

5

N° 19MA04782


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04782
Date de la décision : 10/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : AARPI OLOUMI et HMAD AVOCATS ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-02-10;19ma04782 ?
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