Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 29 mai 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire français.
Par un jugement n° 1705203 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 septembre 2018 et le 11 juin 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 10 juillet 2018 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 mai 2017 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône sous astreinte de 100 euros par jour de retard de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'auteur de l'arrêté contesté était incompétent pour l'édicter ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît le 1° de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- sa présence sur le territoire français ne constitue pas une menace grave pour l'ordre public ;
- la mesure d'expulsion méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 septembre 2019.
Me B... a demandé, en raison du mouvement de grève des avocats, le renvoi de l'affaire par un courrier du 17 janvier 2020, auquel il a été répondu négativement par un courrier du 20 janvier 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. E...,
- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.
Me B..., représentant M. C..., a indiqué ne pas présenter d'observations en raison du mouvement de contestation affectant la profession d'avocat.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... fait appel du jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 juillet 2018 rejetant sa demande dirigée contre l'arrêté du 29 mai 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire français.
2. L'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public ". Le 1° de l'article L. 521-2 du même code prévoit en outre que : " l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an " ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique. L'article 371-2 du code civil auquel renvoie ces dispositions précise que : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. " Doit être regardé comme subvenant effectivement aux besoins de son enfant le père ou la mère qui a pris les mesures nécessaires, compte tenu de ses ressources, pour assurer l'entretien de celui-ci.
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté a été signé par M. D... F..., directeur des migrations, de l'intégration et de la nationalité à la préfecture des Bouches-du-Rhône, lequel bénéficiait d'une délégation de signature régulière par un arrêté du préfet du 21 mars 2017, publié le 24 mars 2017 au recueil des actes administratifs de l'Etat dans ce département. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté doit donc être écarté.
4. En deuxième lieu, loin de se limiter à une formule stéréotypée se référant à l'ensemble du comportement de l'intéressé, comme le soutient M. C..., l'arrêté contesté, après s'être référé aux dispositions applicables, précise de façon circonstanciée les faits qui lui sont reprochés et sa situation familiale. Il comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. L'arrêté contesté est par suite suffisamment motivé, conformément aux articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
5. En troisième lieu, M. C..., ressortissant algérien né en 1989, est entré en 2013 sur le territoire français. Il est le père d'un enfant français né le 23 janvier 2015 à Marseille. Interpellé le 29 janvier 2015, il a été placé en détention et était libérable au 29 septembre 2017. Il ressort des pièces du dossier, notamment du dossier détenu, que M. C... recevait des virements mensuels de 100 euros de la part de deux membres de sa famille et était dépourvu d'autres ressources. Les factures produites au dossier concernant l'achat de produits de puériculture après la naissance de l'enfant ne sont pas nominatives. En outre, ces achats ont été réalisés alors que M. C... était incarcéré. M. C... justifie des visites régulières de sa compagne en détention, deux à quatre fois par mois. Cependant, l'enfant de M. C... était inscrit au permis de visite de sa mère, sans que les pièces du dossier ne permettent d'établir qu'il a effectivement accompagné sa mère lors de ses visites. Ces mêmes pièces du dossier ne comportent pas d'autres éléments probants pour établir la contribution de M. C... à l'éducation de son fils de nationalité française, dans les conditions permises par sa détention. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 1° de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
6. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C... a été condamné le 28 janvier 2016 par le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence à huit mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de vol aggravé dans un local d'habitation commis le 2 août 2014, et à trois ans d'emprisonnement le 26 mai 2016 par le tribunal correctionnel de Marseille pour des faits de vol avec trois circonstances aggravantes commis le 20 juillet 2014. Contrairement à ce que soutient M. C..., son comportement lors de son incarcération ne conduit pas à écarter le risque de réitération d'infractions pénales. En considérant que le comportement de M. C... constituait une menace grave à l'ordre public pouvant justifier un arrêté d'expulsion, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas fait une inexacte application de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Enfin, et ainsi qu'il a été dit, M. C..., récemment arrivé en France, a commis plusieurs infractions graves qui ont justifié son incarcération. S'il justifie d'une relation de concubinage avec une ressortissante française, il ne justifie pas, en revanche, contribuer effectivement à l'éducation de l'enfant né de l'union avec cette dernière. Au regard tant de la gravité des faits commis que de la situation familiale de l'intéressé, la décision par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
9. L'Etat n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En conséquence, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. C... sur le fondement de cet article.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2020, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. E..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 3 février 2020.
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N° 18MA04266