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14/01/2020 | FRANCE | N°17MA03911

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 14 janvier 2020, 17MA03911


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Bastia à titre principal, d'annuler le titre de perception 02A000 0023 001 075 485571 2014 00002045 du 18 novembre 2014 d'un montant de 8 862,10 euros, et la décision implicite rejetant sa réclamation formée le 16 janvier 2015, et à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à l'indemniser du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la carence dans la gestion de sa situation administrative, en lui versant une somme correspondant à la créance en litige

et les sommes précomptées sur ses traitements de janvier et février 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Bastia à titre principal, d'annuler le titre de perception 02A000 0023 001 075 485571 2014 00002045 du 18 novembre 2014 d'un montant de 8 862,10 euros, et la décision implicite rejetant sa réclamation formée le 16 janvier 2015, et à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à l'indemniser du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la carence dans la gestion de sa situation administrative, en lui versant une somme correspondant à la créance en litige et les sommes précomptées sur ses traitements de janvier et février 2014, assorties des intérêts bancaires.

Par un jugement n° 1500857 du 22 juin 2017, le tribunal administratif de Bastia a annulé le titre exécutoire émis le 18 novembre 2014 à l'encontre de Mme C..., ainsi que la décision implicite de rejet de sa réclamation " du 19 janvier 2015 ".

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 septembre 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire, demande à la Cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 22 juin 2017.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Bastia, le titre de perception litigieux satisfait à l'exigence de motivation posée par l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, puisqu'il indique les bases de sa liquidation ;

- l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 a été respecté ;

- l'origine des sommes exigées est issue d'une erreur comptable en faveur de Mme C... qui doit rendre les sommes indûment perçues ;

- l'administration n'a commis aucune faute à l'encontre de Mme C... en demandant le reversement du trop-perçu contesté.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 août 2018, Mme C..., représentée par

Me D..., conclut :

- au rejet de la requête ;

- à la décharge de l'obligation de payer la somme de 8 862,10 euros ;

- à l'annulation de la décision implicite rejetant sa réclamation formée le 16 janvier 2015 ;

- à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité correspondant aux sommes réclamées ;

- à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre les dépens.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute pour le signataire de l'appel formé devant la présente Cour de justifier d'une délégation régulière à cet effet ;

- le titre de perception litigieux du 18 novembre 2014 est insuffisamment motivé dès lors qu'elle n'a disposé d'aucune information préalablement aux retenues effectuées sur ses traitements de janvier et de février 2014 portant sur les éléments de calcul des sommes dont le reversement a été exigé ;

- le titre de perception litigieux n'a pas été signé par l'ordonnateur, en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;

- elle est fondée à être payée sur la base de l'indice 450 dès lors que l'arrêté du 1er février 2012 la nommant ingénieur des travaux publics de l'Etat stagiaire ainsi que celui du 15 avril 2013 qui la titularise en qualité d'ingénieur des travaux publics à compter du 1er février 2013 n'ont pas été rapportés dans un délai de 4 mois suivant leur édiction ; par suite, le ministre est mal fondé à lui opposer les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 ;

- le calcul de l'administration pour la période du 1er février 2013 au 3 septembre 2013 est erroné ;

- à titre subsidiaire, le service lui a causé un préjudice manifeste tiré de ses carences dans la gestion de son dossier administratif qui sera réparé en lui versant une somme correspondant à la créance en litige et les sommes précomptées sur ses traitements de janvier et février 2014, assorties des intérêts bancaires.

Par ordonnance du 9 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 9 octobre 2019 à 12h00.

Les parties ont été informées, le 29 novembre 2019, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions présentées par Mme C... par la voie de l'appel incident qui tendent pour la première fois à titre principal à la condamnation de l'Etat, présentent le caractère de conclusions nouvelles, et sont dès lors irrecevables.

Un mémoire en réponse au moyen d'ordre public présenté pour Mme C... a été enregistré le 3 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 modifié ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., en service au sein de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) de Corse, a été recrutée à compter du 1er janvier 2010 en qualité d'agent non-titulaire du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Elle percevait alors une rémunération mensuelle brute assise sur l'indice 540. Après sa réussite au concours, Mme C... a été nommée à compter du 1er février 2012 ingénieure des travaux publics de l'Etat stagiaire, au 1er échelon de son grade correspondant à l'indice 349. Le 1er février 2013, elle a été titularisée en qualité d'ingénieure des travaux publics de l'Etat à l'échelon 3 de ce grade avec un indice de rémunération de 401. Par un arrêté du 6 décembre 2013 du ministre chargé de l'écologie, elle a été classée au 4ème échelon de son grade à l'indice 425. Le 18 novembre 2014, un titre de perception a été émis à l'encontre de Mme C... pour obtenir le recouvrement d'un trop-perçu de traitements d'un montant de 8 862,10 euros pour la période du 1er novembre 2012 au 31 mars 2014. Le 19 janvier 2015, Mme C... a contesté ce titre de perception devant le comptable chargé de son recouvrement en demandant son sursis à exécution. Il n'a pas été répondu à cette réclamation. Par un jugement n° 1500857 du 22 juin 2017, le tribunal administratif de Bastia a annulé le titre exécutoire émis le 18 novembre 2014 à l'encontre de Mme C..., ainsi que la décision implicite de rejet de sa réclamation du 19 janvier 2015. Le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la Cour d'annuler ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation (...) ". Ainsi, tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

3. D'une part, il est constant que si le titre de perception litigieux contient un ensemble d'indications portant sur la créance dont le recouvrement est recherché, notamment son objet tiré d'un trop perçu de traitements de 10 724,40 euros brut pour la période du 1er novembre 2012 au 31 mars 2014, ainsi que toutes une série de références relatives à des contributions sociales et à des imputations budgétaires, le calcul précis par lequel le service aboutit à la somme exigée de 8 852,10 euros, par référence au montant précité de 10 724,40 euros n'est pas compréhensible, faute d'un décompte détaillé des bases de liquidation. D'autre part, ce titre qui ne fait référence à aucun fait générateur de la créance n'indique pas non plus la consistance exacte des sommes exigées par période de référence annuelle, s'agissant d'une reprise de traitements d'un fonctionnaire. Par ailleurs, si l'administration fait valoir que Mme C... a disposé de toute l'information nécessaire pour comprendre la nature et le montant des indus de traitement réclamés avant l'émission du titre litigieux par des échanges de mails du 3 et du 12 mars 2014 ainsi que par une lettre du 5 juin 2014 de la direction des ressources humaines du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie à supposer que ces documents contiennent les informations pertinentes exigées par

l'article 24 du décret précité, en tout état de cause, le titre contesté n'y fait pas référence et ils n'ont pas été annexés à ce titre. Dès lors, les premiers juges ont estimé à bon droit que les bases de liquidation du titre de perception émis le 14 octobre 2014 à l'encontre de Mme C... n'étaient pas clairement indiquées et que les mentions portées ne lui permettaient pas de comprendre le montant de la créance réclamée. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, la requête du ministre de la transition écologique et solidaire ne peut qu'être rejetée.

Sur les conclusions d'appel incident de Mme C... :

4. Le présent arrêt confirme le jugement du tribunal administratif de Bastia qui annule le titre exécutoire du 18 novembre 2014, et la décision implicite rejetant son recours gracieux. Le tribunal a ainsi répondu à la demande présentée devant lui, à titre principal par Mme C.... Celle-ci, dans sa demande devant les premiers juges, ne concluait qu'à titre subsidiaire à la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice subi du fait de la carence dans la gestion de sa situation administrative en lui versant une somme correspondant à la créance en litige et les sommes précomptées sur ses traitements de janvier et février 2014, assorties des intérêts bancaires correspondants. Dans ces conditions, les conclusions présentées en appel par Mme C..., par la voie du recours incident, qui tendent pour la première fois à titre principal à la condamnation de l'Etat, présentent le caractère de conclusions nouvelles et sont, comme telles, irrecevables.

Sur les dépens :

5. Si Mme C... demande le versement de dépens au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, elle ne justifie pas en avoir exposé dans la présente instance. Dans ces conditions, ses conclusions présentées à ce titre ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige:

6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête présentée par le ministre de la transition écologique et solidaire est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme C... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et solidaire et à Mme B... C....

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques de Corse.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2019, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 janvier 2020.

2

N° 17MA03911


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17MA03911
Date de la décision : 14/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Questions générales - Motivation - Motivation obligatoire - Motivation obligatoire en vertu d'un texte spécial.

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : ROUSSEL-FILIPPI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-01-14;17ma03911 ?
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