La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/12/2019 | FRANCE | N°15MA00323

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 31 décembre 2019, 15MA00323


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner le centre hospitalier intercommunal (CHI) de Toulon - La Seyne-sur-Mer à lui verser la somme de 84 320 euros en réparation des préjudices résultant des conditions de sa prise en charge à la suite de l'accident de la circulation dont elle a été victime le 10 août 2008.

Par un jugement n° 1203342 du 27 novembre 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par un ar

rêt avant dire droit n° 15MA00323 du 4 mai 2017, la cour administrative d'appel de Marseille...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner le centre hospitalier intercommunal (CHI) de Toulon - La Seyne-sur-Mer à lui verser la somme de 84 320 euros en réparation des préjudices résultant des conditions de sa prise en charge à la suite de l'accident de la circulation dont elle a été victime le 10 août 2008.

Par un jugement n° 1203342 du 27 novembre 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par un arrêt avant dire droit n° 15MA00323 du 4 mai 2017, la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur l'appel formé par Mme B... tendant à l'annulation du jugement du 27 novembre 2014, a ordonné une expertise en vue de déterminer, d'une part, si les soins dont Mme B... a fait l'objet lors de son hospitalisation, notamment à la suite des chutes dont elle a été victime, ont été conformes aux règles de l'art et, dans la négative, de décrire le ou les manquements fautifs ainsi que leurs conséquences sur son état de santé en précisant notamment si ce ou ces manquements présentent un lien de causalité direct et certain avec les déplacements secondaires du sacrum et de l'épaule gauche et la survenance de la capsulite rétractile, en dehors de toute évolution naturelle et, d'autre part, si les chutes dont elle a été victime ont pu contribuer de manière directe et certaine au déplacement de la fracture et, dans l'affirmative, dans quelle proportion et, dans cette dernière hypothèse, de donner un avis sur le point de savoir si le ou les manquements éventuellement constatés ont fait perdre à Mme B... une chance de bénéficier d'une prise en charge différente et plus précoce qui aurait limité ses séquelles et de donner son avis, le cas échéant, sur l'ampleur de la chance perdue par l'intéressée de limiter ces séquelles en la quantifiant, et, enfin, de fixer la date de consolidation et de décrire l'ensemble des préjudices pouvant être regardés comme directement et exclusivement imputables aux manquements commis.

Par un mémoire enregistré le 15 octobre 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1203342 du 27 novembre 2014 ;

2°) de condamner le CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer à lui verser une indemnité de 29 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis ;

3°) de mettre à la charge de cet établissement hospitalier la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le CHI a commis des fautes qui sont à l'origine de l'aggravation de son état et ont entraîné des souffrances endurées estimées à 2,5 sur une échelle allant de 1 à 7 et un préjudice sexuel.

Par un mémoire enregistré le 14 novembre 2019, le CHI de de Toulon - La Seyne-sur-Mer, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'expertise ne relève aucune faute ;

- les préjudices ont déjà été indemnisés par le tribunal de grande instance de Toulon.

La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance-maladie du Var, au régime social des indépendants et à la mutualité sociale agricole du Var qui n'ont pas produit de mémoires.

Vu :

- le rapport de l'expertise enregistré le 26 septembre 2019 au greffe de la cour ;

- l'ordonnance du 14 octobre 2019 par laquelle la présidente de la cour a liquidé et taxé les frais et honoraires de l'expertise ;

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- et les conclusions de M. Argoud, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêt du 4 mai 2017, la cour, statuant sur l'appel formé par Mme B... tendant à l'annulation du jugement du 27 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier intercommunal (CHI) de Toulon - La Seyne-sur-Mer à lui verser la somme de 84 320 euros en réparation des préjudices résultant des conditions de sa prise en charge à la suite de l'accident de la circulation dont elle a été victime le 10 août 2008, a ordonné la réalisation d'une expertise. A la suite du dépôt du rapport d'expertise, Mme B... a ramené sa demande indemnitaire, dans le dernier état de ses écritures, à la somme de 29 000 euros, en réparation des seules souffrances endurées et du préjudice sexuel qu'elle estime avoir subis du fait de l'aggravation de son état causée par les chutes survenues lors de son hospitalisation.

Sur la responsabilité et les préjudices :

2. D'une part, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que Mme B... a chuté à plusieurs reprises de son lit au cours de son hospitalisation les 19, 20 et 21 août 2008 en raison d'un état de confusion et d'agitation. Si une sangle abdominale a effectivement été posée après la première chute, la circonstance que l'intéressée ait, néanmoins, été victime d'une deuxième chute et plus encore d'une troisième chute révèle un défaut de surveillance, laquelle aurait dû être particulièrement attentive eu égard à l'état connu d'agitation de la patiente. La responsabilité du CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer est donc engagée à ce titre.

3. Il résulte encore de l'instruction que ces chutes sont à l'origine d'un déplacement secondaire des branches ilio-pubiennes et ischio-pubiennes et que ce déplacement, s'il n'a entraîné aucune séquelle fonctionnelle, notamment sexuelle, a toutefois induit des douleurs séquellaires plus importantes en rapport avec le cal vicieux. Dès lors, il sera fait une juste appréciation de ces souffrances endurées par Mme B..., estimées par l'expert à 2,5 sur une échelle allant de 1 à 7, et notamment ressenties lors des rapports sexuels, en lui allouant une somme de 5 000 euros.

4. D'autre part et en revanche, il résulte également de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que le déplacement secondaire modéré de la fracture de l'épaule n'est pas en rapport avec les chutes de la requérante au cours de son hospitalisation et que le choix thérapeutique d'immobilisation pendant trois semaines sur une fracture non déplacée était indiqué et d'autant plus justifié que la discussion sur la réalisation d'une intervention chirurgicale d'emblée aurait nécessité des explorations, en particulier une imagerie par résonance médicale, qu'il n'était pas possible de réaliser du fait de l'état général et de l'état neuropsychologique de Mme B.... En outre, il résulte encore de l'instruction que le retour au domicile de Mme B... à compter 3 septembre 2008 n'était pas contre-indiqué par le médecin spécialiste, chef de service de neurologie, qui a établi le rapport de sortie, et n'est pas en lien avec un quelconque préjudice.

5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire mais qu'il n'y a lieu de condamner le CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer qu'à lui verser une somme de 5 000 euros.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Les frais de l'expertise ordonnée par l'arrêt de la cour du 4 mai 2017, liquidés et taxés aux sommes de 840 euros et de 480 euros, sont mis à la charge définitive du CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer, en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens. En revanche, les conclusions du CHI de Toulon- La Seyne-sur-Mer présentées sur le même fondement doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 27 novembre 2014 est annulé.

Article 2 : Le CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer est condamné à payer à Mme B... une somme de 5 000 euros.

Article 3 : Les frais de l'expertise ordonnée par l'arrêt de la cour du 4 mai 2017, liquidés et taxés aux sommes de 840 euros et de 480 euros, sont mis à la charge définitive du CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer.

Article 4 : Le CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer versera à Mme B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Les conclusions présentées par le CHI de Toulon - La Seyne-sur-Mer sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B..., au centre hospitalier intercommunal de Toulon - La Seyne-sur-Mer, à la caisse primaire d'assurance-maladie du Var, au régime social des indépendants et à la mutualité sociale agricole du Var.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2019, où siégeaient :

- Mme E..., présidente de la cour,

- Mme F..., présidente assesseure,

- M. Sanson, conseiller.

Lu en audience publique, le 31 décembre 2019.

5

N° 15MA00323


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15MA00323
Date de la décision : 31/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-01-01-06 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute simple : organisation et fonctionnement du service hospitalier. Existence d'une faute. Défauts de surveillance.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Jean-Michel LASO
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : CABINET HERVÉ ANDREANI ET VIRGINIE PIN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-12-31;15ma00323 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award