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16/12/2019 | FRANCE | N°19MA03799-19MA03800

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 16 décembre 2019, 19MA03799-19MA03800


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'union des syndicats CGT des agents de l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille, le syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône et le syndicat Sud santé sociaux des Bouches-du-Rhône ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les opérations électorales du 6 décembre 2018 en vue de la désignation des représentants du personnel aux commissions administratives paritaires et à la commission consultative paritaire des agents de la fon

ction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône, au comité ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'union des syndicats CGT des agents de l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille, le syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône et le syndicat Sud santé sociaux des Bouches-du-Rhône ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les opérations électorales du 6 décembre 2018 en vue de la désignation des représentants du personnel aux commissions administratives paritaires et à la commission consultative paritaire des agents de la fonction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône, au comité technique d'établissement et aux commissions administratives paritaires de l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM).

Par une ordonnance n° 1901042 du 28 février 2019, le président de la première chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur protestation.

Procédure devant la cour :

I.- Par une requête, enregistrée le 8 août 2019 sous le numéro 19MA03799, l'union des syndicats CGT des agents de l'AP-HM, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 28 février 2019 du président de la première chambre du tribunal administratif de Marseille en tant qu'elle rejette sa protestation dirigée contre les élections à la commission consultative paritaire des agents de la fonction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône ;

2°) d'annuler les opérations électorales du 6 décembre 2018 en vue de la désignation des représentants du personnel à la commission consultative paritaire du département des Bouches-du-Rhône ;

3°) de mettre à la charge de l'AP-HM la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière, dès lors que sa protestation n'est pas tardive ;

- la liste électorale a été expurgée après le vote électronique ;

- le syndicat FO a exercé des pressions sur la constitution des listes présentées par les autres syndicats ;

- la période fixée pour le vote électronique s'est achevée le 5 décembre 2018, ce qui méconnaît l'article 1er de l'arrêté du 4 juin 2018 fixant la date des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique hospitalière ;

- l'AP-HM n'a pas établi de registre des agents auxquels les documents électoraux sont envoyés par voie postale, ce qui est contraire à l'article 3 de l'arrêté du 1er août 2018 relatif aux documents électoraux utilisés pour l'élection des représentants du personnel aux commissions administratives paritaires locales et départementales de la fonction publique hospitalière ;

- le syndicat FO a incité les agents à voter dans son local syndical, ainsi qu'à lui communiquer leurs identifiants et mots de passe, ce qui contrevient au caractère secret du scrutin ;

- certains agents n'ont pas pu voter car il avait été voté à leur place après une demande de réassort ;

- les anomalies concernant les demandes de réassort entachent la sincérité du scrutin ;

- les résultats du vote électronique ont été inscrits par la direction hors la présence des syndicats ;

- le syndicat FO n'a pas respecté les règles relatives à la propagande électorale.

La requête de l'union des syndicats CGT des agents de l'AP-HM a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.

II.- Par une requête, enregistrée le 8 août 2019 sous le numéro 19MA03800, le syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône, représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 28 février 2019 du président de la première chambre du tribunal administratif de Marseille en tant qu'elle rejette sa protestation dirigée contre les élections à la commission consultative paritaire des agents de la fonction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône ;

2°) d'annuler les opérations électorales du 6 décembre 2018 en vue de la désignation des représentants du personnel à la commission consultative paritaire du département des Bouches-du-Rhône ;

3°) de mettre à la charge de l'AP-HM la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière, dès lors que sa protestation n'est pas tardive ;

- la liste électorale a été expurgée après le vote électronique ;

- le syndicat FO a exercé des pressions sur la constitution des listes présentées par les autres syndicats ;

- la période fixée pour le vote électronique s'est achevée le 5 décembre 2018, ce qui méconnaît l'article 1er de l'arrêté du 4 juin 2018 fixant la date des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique hospitalière ;

- l'AP-HM n'a pas établi de registre des agents auxquels les documents électoraux sont envoyés par voie postale, ce qui est contraire à l'article 3 de l'arrêté du 1er août 2018 relatif aux documents électoraux utilisés pour l'élection des représentants du personnel aux commissions administratives paritaires locales et départementales de la fonction publique hospitalière ;

- le syndicat FO a incité les agents à voter dans son local syndical, ainsi qu'à lui communiquer leurs identifiants et mots de passe, ce qui contrevient au caractère secret du scrutin ;

- certains agents n'ont pas pu voter car il avait été voté à leur place après une demande de réassort ;

- les anomalies concernant les demandes de réassort entachent la sincérité du scrutin ;

- les résultats du vote électronique ont été inscrits par la direction hors la présence des syndicats ;

- le syndicat FO n'a pas respecté les règles relatives à la propagande électorale.

Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'illégalité de l'arrêté du 8 janvier 2018 du ministre de la santé relatif aux commissions consultatives paritaires compétentes à l'égard des agents contractuels de la fonction publique hospitalière, dès lors qu'il a été pris sur le fondement d'une délégation insuffisamment précise.

Un mémoire a été enregistré pour les syndicats requérants le 29 août 2019.

Un mémoire a été enregistré pour l'AP-HM en réponse à cette mesure d'information le 4 novembre 2019. Elle soutient que le moyen relevé d'office n'est pas fondé et, postérieurement à la clôture de l'instruction, que la requête du syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône est tardive.

La requête du syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône a été communiquée au syndicat FO des Hôpitaux de Marseille, qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la fédération CFDT santé sociaux, l'union des syndicats CGT des agents de l'AP-HM et le syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône, et de Me C..., représentant l'AP-HM.

Une note en délibéré présentée pour le syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux a été enregistrée le 3 décembre 2019.

Une note en délibéré présentée pour l'AP-HM a été enregistrée le 6 décembre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. L'union des syndicats CGT des agents de l'AP-HM, le syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône et le syndicat Sud santé sociaux des Bouches-du-Rhône, par trois requêtes enregistrées sous les numéros 19MA01301, 19MA01374 et 19MA01375, ont fait appel de l'ordonnance du 28 février 2019 par laquelle le président de la première chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté comme tardive leur protestation dirigée contre les opérations électorales du 6 décembre 2018 en vue de la désignation des représentants du personnel aux commissions administratives paritaires et à la commission consultative paritaire des agents de la fonction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône, au comité technique d'établissement et aux commissions administratives paritaires de l'AP-HM.

2. Invités par le greffe de la cour à régulariser les conclusions dirigées contre les élections à la commission consultative paritaire par la voie d'une requête distincte, l'union CGT et le syndicat départemental CFDT y ont donné suite par deux nouvelles requêtes, enregistrées sous les numéros 19MA03799 et 19MA03800. Ces requêtes sont dirigées contre les mêmes élections. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la recevabilité de la protestation :

3. Ni les décrets n° 85-565 du 30 mai 1985 et n° 89-229 du 17 avril 1989 respectivement relatifs aux comités techniques et aux commissions administratives paritaires des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, ni l'article R. 119 du code électoral, relatif au contentieux de l'élection des conseillers municipaux et des membres du Conseil de Paris, ne sont applicables aux élections des représentants du personnel de la fonction publique hospitalière. Il s'ensuit que c'est à tort que le président de la première chambre du tribunal administratif s'est fondé sur ces dispositions pour rejeter comme tardive la protestation des syndicats requérants.

4. Aux termes de l'article 10 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Un décret en Conseil d'Etat pris après avis du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière fixe les dispositions générales applicables aux agents contractuels recrutés dans les conditions prévues aux articles 9 et 9-1. "

5. L'article 2-1 du décret n° 91-155 du 6 février 1991, pris pour l'application de ces dispositions, dispose au deuxième alinéa que : " Les commissions consultatives paritaires comprennent, en nombre égal, des représentants de l'administration et des représentants des personnels mentionnés à l'article 1er. Leur composition et leur fonctionnement sont fixés par arrêté du ministre chargé de la santé. "

6. Il appartenait au Gouvernement de définir avec une précision suffisante dans ce décret les conditions auxquelles la délégation de ces règles était subordonnée, sans pouvoir renvoyer purement et simplement à un arrêté interministériel le soin d'en déterminer, à sa place, le contenu. L'illégalité de ces dispositions entache d'incompétence l'arrêté du 8 janvier 2018 du ministre de la santé relatif aux commissions consultatives paritaires compétentes à l'égard des agents contractuels de la fonction publique hospitalière pris sur leur fondement, ce qu'il convient de relever d'office. Les dispositions de cet arrêté, notamment celles de son article 30, relatives aux contestations portant sur la validité des opérations électorales, doivent en conséquence être écartées pour la résolution du présent litige.

7. Le premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dispose toutefois que : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " En vertu de cette disposition, la juridiction administrative ne peut connaître d'opérations électorales que par voie de recours contre une décision prise, soit d'office soit sur réclamation préalable, par l'autorité qui a organisé les élections.

8. L'union des syndicats CGT des agents de l'AP-HM et le syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône ont chacun formé le 11 décembre 2018 un recours préalable devant le directeur général de l'AP-HM, chargé de l'organisation des élections, qui les a rejetés par deux décisions des 12 et 13 décembre 2018. La protestation des deux syndicats a été enregistrée le 8 février 2019 par le greffe du tribunal administratif de Marseille, soit avant l'expiration du délai de droit commun de deux mois prévu à l'article R. 421-1 du code de justice administrative. Leur protestation, dirigée contre les élections à la commission consultative paritaire des agents de la fonction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône, n'est donc pas tardive.

9. Il y a lieu par suite d'annuler l'ordonnance attaquée dans cette mesure et de statuer immédiatement sur le litige par la voie de l'évocation.

Sur la base légale des commissions consultatives paritaires :

10. Ainsi qu'il a été dit aux points 4, 5 et 6, l'article 2-1 du décret du 6 février 1991, à la deuxième phrase de son deuxième alinéa, renvoie illégalement à un arrêté ministériel le soin de déterminer à sa place les règles relatives à la commission et au fonctionnement des commissions consultatives paritaires des agents de la fonction publique hospitalière sans définir avec une précision suffisante les conditions auxquelles la délégation de ces règles était subordonnée, ce qui entache d'incompétence l'arrêté du 8 janvier 2018 pris sur le fondement de ces dispositions par le ministre de la santé. Les opérations électorales organisées en application des dispositions de cet arrêté en vue de la désignation des représentants du personnel sur le fondement de cet arrêté à la commission consultative paritaire des agents de la fonction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône sont en conséquence entachées d'irrégularité et doivent être annulées.

Sur les frais liés au litige :

11. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance du 28 février 2019 du président de la première chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée en tant qu'elle a rejeté la protestation de l'union des syndicats CGT des agents de l'AP-HM et du syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône dirigée contre les élections à la commission consultative paritaire des agents de la fonction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône.

Article 2 : Les élections à la commission consultative paritaire des agents de la fonction publique hospitalière du département des Bouches-du-Rhône sont annulées.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'union des syndicats CGT des agents de l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille, au syndicat départemental CFDT des services de santé et des services sociaux des Bouches-du-Rhône, au syndicat FO des Hôpitaux de Marseille et à l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille.

Copie en sera adressée pour information à la ministre des solidarités et de la santé et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 2 décembre 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- Mme D..., première conseillère,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 16 décembre 2019.

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Nos 19MA03799 - 19MA03800


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