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21/11/2019 | FRANCE | N°18MA03931

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 21 novembre 2019, 18MA03931


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1606997 du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 août 2018, M. et Mme B..., représentés par la SELARL Louit-A... et associés agissant par Me A..., demande

à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2018 du tribunal administratif de Marseille ;...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1606997 du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 août 2018, M. et Mme B..., représentés par la SELARL Louit-A... et associés agissant par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2018 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition en litige, en droits et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais liés au litige ainsi que les entiers dépens.

Ils soutiennent que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, ils sont fondés à invoquer le paragraphe 30 de l'instruction référencée BOI-IR-BASE-10-10-10-40 du 12 septembre 2009 s'agissant d'une imposition primitive ;

- en l'état des saisies pénales dont les revenus et avoirs de M. C... B... ont fait l'objet au titre des articles 706-145 et 706-155 alinéa 2 du code de procédure pénale, il ne saurait être considéré que les revenus de gérance de ce dernier au titre de l'année 2012 constituent des revenus disponibles au sens de l'article 156 du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 janvier 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour de rejeter la requête de M. et Mme B....

Il fait valoir que les moyens invoqués par les appelants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... ont déclaré, au titre de leurs revenus de l'année 2012, la somme totale de 1 397 734 euros, dont 1 069 087 euros dans la rubrique traitement et salaire au titre de l'activité de M. B..., alors chirurgien-dentiste. Ils relèvent appel du jugement du 15 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) ".

3. L'imposition litigieuse ayant été établie, d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par M. et Mme B... au titre de l'année 2012, les intéressés supportent, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve d'une éventuelle exagération de l'imposition.

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. D'une part, aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année " ; aux termes de l'article 156 du même code : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés aux 1 et 3 de l'article 6, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent (...) ". Les sommes à retenir, au titre d'une année déterminée, pour l'assiette de l'imposition à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des traitements et salaires, sont celles qui, au cours de ladite année, ont été mises à la disposition du contribuable soit par voie de paiement, soit par voie d'inscription à un compte courant sur lequel l'intéressé a opéré, ou aurait pu, en droit ou en fait, opérer un prélèvement au plus tard le 31 décembre.

5. D'autre part, aux termes de l'article 706-145 du code de procédure pénale : " Nul ne peut valablement disposer des biens saisis dans le cadre d'une procédure pénale hors les cas prévus aux articles 41-5 et 99-2 et au présent chapitre. / A compter de la date à laquelle elle devient opposable et jusqu'à sa mainlevée ou la confiscation du bien saisi, la saisie pénale suspend ou interdit toute procédure civile d'exécution sur le bien objet de la saisie pénale. / Pour l'application du présent titre, le créancier ayant diligenté une procédure d'exécution antérieurement à la saisie pénale est de plein droit considéré comme titulaire d'une sûreté sur le bien, prenant rang à la date à laquelle cette procédure d'exécution est devenue opposable ". Aux termes de l'article 706-155 du même code : " Lorsque la saisie porte sur une créance ayant pour objet une somme d'argent, le tiers débiteur doit consigner sans délai la somme due à la Caisse des dépôts et consignations ou auprès de l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués lorsqu'elle est saisie. Toutefois, pour les créances conditionnelles ou à terme, les fonds sont consignés lorsque ces créances deviennent exigibles. / Lorsque la saisie porte sur une créance figurant sur un contrat d'assurance sur la vie, elle entraîne la suspension des facultés de rachat, de renonciation et de nantissement de ce contrat, dans l'attente du jugement définitif au fond. Cette saisie interdit également toute acceptation postérieure du bénéfice du contrat dans l'attente de ce jugement et l'assureur ne peut alors plus consentir d'avances au contractant. Cette saisie est notifiée au souscripteur ainsi qu'à l'assureur ou à l'organisme auprès duquel le contrat a été souscrit ".

6. Les appelants soutiennent qu'ils n'ont pu avoir la libre disposition des revenus 2012 de M. B... dès lors que ses revenus et avoirs ont fait l'objet de saisies pénales, suite à sa mise en examen le 23 novembre 2012 notamment des chefs d'escroquerie à la caisse primaire d'assurance maladie et de violences volontaires ayant entraîné des mutilations ou infirmités permanentes sur un certain nombre de patients. Cependant, les intéressés n'établissent ni même n'allèguent ne pas avoir effectivement perçu en 2012 les revenus d'un montant total de 1 397 734 euros qu'ils ont spontanément déclarés. En outre, si M. et Mme B... font valoir qu'ils n'ont pu employer librement à compter du 4 décembre 2012, date de deux ordonnances de saisie pénale de la Vice-présidente du tribunal de grande instance de Marseille, les sommes de 4 591,70 euros saisies sur un compte bancaire de M. B... et de 9 248,52 euros saisies sur un compte bancaire de la SELARL dont il était gérant, ils n'établissent pas que ces sommes, sans commune mesure avec les revenus perçus au cours de l'année 2012, correspondaient précisément à des revenus de ladite année, alors que les deux ordonnances de saisies pénales précitées indiquent que ces sommes proviennent du produit des infractions reprochées à M. B... durant toute la période de prévention du 1er avril 2008 au 26 novembre 2012. En outre, les appelants ne démontrent pas davantage que les sommes qui figuraient sur différents comptes d'assurance-vie de M. B..., ayant fait l'objet de saisies pénales par ordonnances du 2 mai 2013 de la même magistrate, pour un montant total de 433 302,59 euros, correspondraient à des revenus de l'année 2012, ces ordonnances indiquant également que les comptes d'assurance-vie en cause étaient crédités par le produit de l'activité professionnelle de M. B... durant toute la période de prévention du 1er avril 2008 au 26 novembre 2012. En toutes hypothèses, les époux B... ont eu la libre disposition de cette somme au titre de l'année 2012, puisqu'il est constant que cette saisie n'a été opérée qu'en 2013. Enfin, la seule circonstance que l'ordonnance de modification du contrôle judiciaire de M. B... en date du 7 mai 2013 mentionne que l'intéressé ne disposait plus que d'une somme totale disponible de 54 632 euros sur ses comptes, est, compte tenu du principe de l'annualité de l'impôt, sans incidence sur l'imposition des revenus déclarés par les appelants au titre de l'année 2012. Par suite, en l'absence de tout élément de nature à établir l'existence et le quantum des sommes au titre des revenus de l'année 2012 dont les époux B... n'auraient pu avoir la libre disposition à raison des saisies pénales invoquées, et alors que ces derniers supportent la charge de la preuve de l'exagération des bases d'imposition, le moyen tiré de l'absence de disposition des revenus déclarés au titre de l'année 2012 ne saurait être accueilli.

En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale :

7. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration ; / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ".

8. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, les dispositions précitées ne s'appliquent qu'aux cas de rehaussements d'impositions antérieures. Dès lors, M. et Mme B... ne sont, en tout état de cause, pas fondés, dans le cadre du présent litige, qui concerne une imposition primitive, à se prévaloir de ces dispositions. Par suite, ils ne sauraient, en tout état de cause, se prévaloir, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 30 de l'instruction référencée BOI-IR-BASE-10-10-10-40 du 12 septembre 2009.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande. Leurs conclusions tendant à l'allocation de frais d'instance seront également, par voie de conséquence, rejetées ainsi que celles tendant aux dépens de l'instance, aucun dépens n'ayant été exposé dans le cadre du présent litige.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2019, où siégeaient :

- Mme D..., présidente,

- Mme E..., présidente assesseure,

- Mme Courbon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 novembre 2019.

N°18MA03931 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA03931
Date de la décision : 21/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme MOSSER
Rapporteur ?: Mme Mylène BERNABEU
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : SCP LOUIT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-11-21;18ma03931 ?
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