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04/11/2019 | FRANCE | N°19MA00766

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 04 novembre 2019, 19MA00766


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 21 octobre 2016 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité départementale de Vaucluse a autorisé l'association Mission locale du Comtat Venaissin à procéder à son licenciement pour inaptitude médicale.

Par un jugement n° 1603567 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 fév

rier 2019 et le 13 septembre 2019, l'association Mission locale du Comtat Venaissin, représentée par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 21 octobre 2016 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité départementale de Vaucluse a autorisé l'association Mission locale du Comtat Venaissin à procéder à son licenciement pour inaptitude médicale.

Par un jugement n° 1603567 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 février 2019 et le 13 septembre 2019, l'association Mission locale du Comtat Venaissin, représentée par la SCP Baglio-Roig-Alliaume-Blanco-Axio Avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 décembre 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Nîmes ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'inspectrice du travail n'avait aucunement obligation de communiquer les pièces de la procédure avant de rendre sa décision ;

- la demande de Mme B... tendant à ce que lui soit communiquée copie des pièces de la procédure a été formulée postérieurement à la décision de l'inspectrice du travail autorisant son licenciement ;

- le principe du contradictoire a ainsi été respecté et la procédure est régulière ;

- la circonstance selon laquelle la date de la lettre de notification de la décision querellée est antérieure à celle de la décision elle-même est sans influence sur la légalité de cette dernière ;

- est également sans influence sur la légalité de la décision contestée la circonstance selon laquelle la lettre de notification aurait été signée par un inspecteur du travail incompétent ;

- l'inspectrice du travail a bien vérifié que l'avis d'inaptitude la concernant mentionnait les délais de recours ;

- les délégués du personnel ont été régulièrement consultés sur le projet de licenciement de l'intéressée ;

- la demande d'autorisation de licenciement est sans lien avec l'exercice par l'intéressée de ses mandats représentatifs ;

- les obligations relatives à l'effort de reclassement de Mme B... ont été respectées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 2019, Mme B..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de l'association Mission locale du Comtat Venaissin la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Un mémoire, présenté pour Mme B..., enregistré le 23 septembre 2019, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant l'association Mission locale du Comtat Venaissin, et de Me D..., représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été embauchée par l'association Mission locale du Comtat Venaissin le 1er octobre 2009 pour exercer des fonctions d'assistante administrative. Elle a été élue déléguée du personnel titulaire le 12 mars 2015 et désignée déléguée syndicale le 19 mai 2015. Dans un contexte de tension avec la direction de l'association, Mme B... a été en arrêt maladie du 17 décembre 2015 au 15 février 2016. Après avoir repris ses fonctions, elle a, après avoir exercé son droit de retrait, été arrêté en accident de travail à compter du 19 février 2016. A l'occasion de la visite de reprise à laquelle s'est présentée l'intéressée le 15 juin 2016, le médecin du travail a émis un avis d'inaptitude temporaire. Puis par un second avis du 1er juillet 2016, le médecin du travail l'a déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise, en précisant qu'elle ne pouvait reprendre son poste de travail et qu'un reclassement était à rechercher sur un autre site. Après avoir constaté l'infructuosité de l'effort de reclassement qu'elle a accompli, l'association Mission locale du Comtat Venaissin a sollicité de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier Mme B... pour inaptitude médicale. Par décision du 21 octobre 2016, l'inspectrice du travail a accordé cette autorisation. L'association relève appel du jugement du 20 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé cette décision.

2. En vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé, compte tenu des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi, et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise. A l'effet de concourir à la mise en oeuvre de la protection ainsi instituée, les articles R. 2421-4 et R. 2121-11 du code du travail disposent que l'inspecteur du travail, saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, " procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat ".

3. Le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions mentionnées ci-dessus impose que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, dans des conditions et des délais lui permettant de présenter utilement des observations, sans que la circonstance que le salarié est susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation qui constitue une garantie pour le salarié. A ce titre, le salarié doit, à peine d'irrégularité de l'autorisation de licenciement, être informé non seulement de l'existence des pièces de la procédure, mais aussi de son droit à en demander la communication. Il appartient à l'administration, saisie d'une demande présentée par le salarié concerné par la procédure de licenciement et tendant à ce que, faute d'y avoir eu accès, copie lui soit donnée des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande d'autorisation de licenciement, d'assurer à ce salarié la possibilité soit de consulter librement ces pièces et d'en prendre copie, soit de lui en adresser une copie, le cas échéant sous forme dématérialisée.

4. Il n'est pas contesté que, alors même qu'elle a pu prendre connaissance des courriers par lesquels l'association Mission locale du Comtat Venaissin a sollicité ses partenaires dans le cadre de la recherche de reclassement la concernant lors de l'entretien du 6 octobre 2016 organisé par l'inspectrice du travail dans le cadre de l'enquête contradictoire, Mme B... n'en a toutefois pas obtenu copie alors qu'elle en a fait la demande.

5. La circonstance, à la supposer même établie, que l'intéressée était susceptible d'avoir obtenu ces documents directement de son employeur n'exonérait pas l'inspectrice du travail de son obligation de satisfaire à la demande de copie dont elle était saisie.

6. Enfin, si l'inspectrice a effectivement transmis à l'intéressée les courriers de l'association Mission locale du Comtat Venaissin relatifs à la recherche de reclassement, cette transmission n'a eu lieu que postérieurement à l'intervention de la décision contestée du 21 octobre 2016, par un courrier daté du 7 novembre 2016.

7. Dans ces conditions, Mme B... est fondée à soutenir que le caractère contradictoire de l'enquête n'a pas été respecté et que cette décision est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière.

8. Il résulte de ce qui précède que l'association Mission locale du Comtat Venaissin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 21 octobre 2016 de l'inspectrice du travail.

Sur les frais liés au litige :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge Mme B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'association Mission locale du Comtat Venaissin demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'association Mission locale du Comtat Venaissin une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'association Mission locale du Comtat Venaissin est rejetée.

Article 2 : L'association Mission locale du Comtat Venaissin versera à Mme B... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Mission locale du Comtat Venaissin, à Mme A... B... et à la ministre du travail.

Copie en sera adressée à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi Occitanie.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président-assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 novembre 2019.

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N° 19MA00766

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00766
Date de la décision : 04/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Modalités de délivrance ou de refus de l'autorisation - Modalités d'instruction de la demande - Enquête contradictoire.

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation - Motifs autres que la faute ou la situation économique - Inaptitude - maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : BAGLIO-ROIG-ALLIAUME-BLANCO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-11-04;19ma00766 ?
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