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14/10/2019 | FRANCE | N°19MA00199

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 14 octobre 2019, 19MA00199


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 août 2017 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai et, d'autre part, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans

un délai de deux mois.

Par un jugement nos 1705223, 1705224, 1705357, 1705286, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 août 2017 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai et, d'autre part, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois.

Par un jugement nos 1705223, 1705224, 1705357, 1705286, 1705418 du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 janvier 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il statue sur sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 30 août 2017 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de réexaminer sa demande, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me A... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- en refusant de l'admettre au séjour, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il a porté atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant, en méconnaissance de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990.

La requête de M. B... a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 octobre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... Grimaud, rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Entré pour la première fois en France en 2010 en vue d'y demander l'asile, M. B..., né le 20 janvier 1967 et de nationalité russe, a demandé, le 27 octobre 2016, un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 août 2017, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté cette demande et prescrit l'éloignement de l'intéressé.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

3. Si M. B... peut être regardé comme établissant résider en France de manière stable depuis 2010 en compagnie de son épouse et de leurs enfants, il ne justifie pas d'une insertion socioprofessionnelle particulière. En outre, l'un et l'autre se trouvent en situation irrégulière sur le territoire français, de même que leurs deux enfants les plus âgés, qui se sont vu également refuser le séjour, le 30 août 2017. Par ailleurs, si deux des fils de M. B... sont titulaires de cartes de séjour temporaire d'un an, ils étaient majeurs à la date de la décision contestée et ne résidaient plus avec leurs parents. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la situation médicale de son fils Zaourbek, qui est majeur et s'est vu délivrer une autorisation provisoire de séjour pour soins après l'intervention de la décision attaquée, appellerait la présence impérative de ses parents à ses côtés, faute de pièce l'établissant. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la scolarité de la plus jeune fille de Mme et M. B..., scolarisée en classe de quatrième, ne pourrait être assurée en Russie, d'où toute la famille est originaire. Dans ces conditions, M. B..., qui a vécu jusqu'à l'âge de quarante-trois ans en Russie et qui a, par ailleurs, fait l'objet de plusieurs décisions de refus de séjour et d'une mesure d'éloignement, n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Alpes-Maritimes a porté à son droit à mener une vie privée et familiale normale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté a été pris. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit dès lors être écarté.

4. En deuxième lieu, selon l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

5. Si M. B... affirme qu'il réside en France de manière continue depuis 2010 avec toute sa famille, que ses enfants ont été scolarisés en France, que deux d'entre eux sont malades et qu'il participe à la vie associative locale, ces seuls faits ne peuvent suffire à caractériser l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées. C'est donc sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté la demande de titre de séjour formée par le requérant sur le fondement de ces dispositions.

6. En dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un refus de séjour, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

7. Compte tenu de ce qui précède et en l'absence de toute circonstance mettant M. B... et son épouse, tous deux de nationalité russe, dans l'impossibilité d'emmener leur fille mineure avec eux, l'arrêté contesté, qui ne remet pas davantage en cause la possibilité pour cette enfant de suivre une scolarité, n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 30 août 2017.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée par Me A... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2019, où siégeaient :

- M. David Zupan, président,

- Mme D... E..., présidente-assesseure,

- M. C... Grimaud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 octobre 2019.

5

N° 19MA00199


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00199
Date de la décision : 14/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : AARPI OLOUMI et HMAD AVOCATS ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-10-14;19ma00199 ?
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