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14/10/2019 | FRANCE | N°18MA03107

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 14 octobre 2019, 18MA03107


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... C... et la SCI Florence ont demandé au tribunal de Bastia d'annuler l'arrêté du 13 avril 2016 par lequel le maire de Porto-Vecchio a délivré à M. F... B... un permis de construire un immeuble de vingt logements sur un terrain situé route de Bonifacio, lieu-dit " Sainte-Catherine " à Porto-Vecchio, parcelle cadastrée section AH n° 96 pour une surface de plancher créée de 1 540 m2 et de mettre à la charge de la commune de Porto-Vecchio, la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761

-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600768 du 9 mai ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... C... et la SCI Florence ont demandé au tribunal de Bastia d'annuler l'arrêté du 13 avril 2016 par lequel le maire de Porto-Vecchio a délivré à M. F... B... un permis de construire un immeuble de vingt logements sur un terrain situé route de Bonifacio, lieu-dit " Sainte-Catherine " à Porto-Vecchio, parcelle cadastrée section AH n° 96 pour une surface de plancher créée de 1 540 m2 et de mettre à la charge de la commune de Porto-Vecchio, la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600768 du 9 mai 2018, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 13 avril 2016.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 3 juillet 2018 et le 24 août 2018, M. F... B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 9 mai 2018 ;

2°) de rejeter la demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de M. C... et de la SCI Florence la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas pris connaissance de la note en délibéré ;

- le délai de jugement est déraisonnable ;

- M. C... et la SCI Florence ne disposent d'aucun intérêt pour agir ;

- la SCI n'a pas communiqué ses statuts ;

- le projet ne se situe pas en zone urbanisée ;

- il ne se situe pas dans un espace proche du rivage.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 18 juillet 2018 et 25 novembre 2018, M. G... C... et la SCI Florence, représentés par Me A... de la SELARL PAP avocats, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande de première instance est recevable ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la commune de Porto-vecchio qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- les observations de Me D..., représentant M. B..., et celles de Me A..., représentant M. C... et la SCI Florence.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 avril 2016, le maire de Porto-Vecchio, sur avis conforme favorable du préfet, a délivré à M. F... B... un permis de construire un immeuble de vingt logements sur un terrain situé route de Bonifacio, lieu-dit " Sainte Catherine " à Porto-Vecchio, parcelle cadastrée section AH n° 96, pour une surface de plancher créée de 1 540 m2. M. G... C... et la SCI Florence en ont demandé l'annulation. M. B... relève appel du jugement du 9 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Bastia a fait droit à cette demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement aux affirmations de M. B..., le tribunal administratif, qui l'a visée, sans l'analyser comme il pouvait régulièrement le faire, a pris connaissance de la note en délibéré. La durée de l'instance, si elle est susceptible, le cas échéant, de faire l'objet d'une demande d'indemnisation, est sans effet sur la régularité du jugement, qui, au demeurant, n'a pas statué au-delà d'un délai raisonnable. Au total, le jugement attaqué n'est pas irrégulier.

Sur les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. En l'occurrence, les requérants de première instance sont les voisins immédiats du terrain devant supporter, aux termes du projet en cause, comme il a été dit, une vingtaine de logements, qui surplomberont leurs propres habitations. Il aura donc une incidence directe sur les conditions de jouissance des logements de M. C... et ceux des associés de la SCI Florence. Si M. B... soutient qu'il n'a pas pu vérifier que le gérant disposait de la capacité à ester, la SCI Florence a communiqué à la Cour ses statuts, qui lui ont été communiqués, lesquels confirment cette capacité. Au total, la demande de première instance était recevable.

Sur le fond :

4. Aux termes de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature. Le plan local d'urbanisme respecte les dispositions de cet accord ".

5. En vertu du I. de l'article L. 4424-11 du code général des collectivités territoriales, le plan d'aménagement et de développement durable de Corse (PADDUC) peut préciser les modalités d'application, adaptées aux particularités géographiques locales, du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l'urbanisme sur les zones littorales. En application de ces dispositions, le PADDUC, approuvé par l'assemblée de Corse le 2 octobre 2015, énonce les critères et indicateurs constituant un faisceau d'indices permettant de caractériser les espaces proches du rivage et procède sur des cartes au 1/50 000, à la délimitation indicative de ces espaces. S'agissant des règles applicables aux espaces proches du rivage, le PADDUC, après avoir souligné que tout projet d'extension limitée de l'urbanisation doit être prévu, justifié et motivé dans un document d'urbanisme local, énonce les critères et indices déterminants permettant d'apprécier le caractère limité de l'extension ainsi que les modalités de mise en oeuvre du principe d'extension limitée de l'urbanisation dans les espaces proches du rivage. Ces prescriptions apportent des précisions et ne sont pas incompatibles avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral.

6. Il résulte de ces dispositions que dans les espaces proches du rivage mais situés à plus de cent mètres de la mer, une extension de l'urbanisation ne peut être effectuée que si, non seulement elle est réalisée soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement, mais encore, si elle conserve un caractère limité et est en outre justifiée et motivée par un document d'urbanisme, ou est conforme à un schéma directeur ou un schéma d'aménagement régional, ou compatible avec un schéma de mise en valeur de la mer, ou autorisée par le représentant de l'Etat après consultation de la commission des sites.

7. Il ressort des pièces du dossier, et il n'est pas contesté, que la parcelle n° 96 où doit s'édifier le projet en cause est située à une distance de 600 mètres environ du rivage, en covisibilité avec la mer ainsi que le montrent plusieurs photographies versées au dossier et notamment la plaquette publicitaire du projet, sans être séparée du rivage par une coupure topographique ou d'urbanisation. Dès lors, le terrain d'assiette du projet, qui est au demeurant regardé comme tel par le livret littoral du PADDUC, est bien situé dans les espaces proches du rivage, contrairement à ce que soutient M. B.... Par ailleurs, ce terrain est entouré par de vastes zones demeurées vierges de toute construction ou ne comportant que des constructions très diffuses et n'est par suite pas en continuité avec un espace déjà urbanisé. Le projet constitue donc par lui-même une extension de l'urbanisation. Comme l'a jugé le tribunal, le permis de construire attaqué, délivré sans qu'une telle urbanisation n'ait été justifiée par un plan local d'urbanisme en vigueur ni autorisée dans les conditions requises, méconnaît donc les dispositions précitées du code de l'urbanisme telles que précisées par le PADDUC.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 13 avril 2016 du maire de Porto-Vecchio autorisant M. B... à construire.

Sur les frais du litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. C... et de la SCI Florence, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. B... la somme de 1 000 euros à verser à M. C..., et 1 000 euros à verser à la SCI Florence.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera une somme de 1 000 euros à M. C... et une somme de 1 000 euros à la SCI Florence.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... C..., à la SCI Florence, à la commune de Porto-Vecchio et à M. F... B....

Copie en sera délivrée au préfet de Corse-du-Sud.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. E..., président assesseur,

- Mme Duran-Gottschalk, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 octobre 2019.

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N° 18MA03107


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