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17/09/2019 | FRANCE | N°19MA00878

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 17 septembre 2019, 19MA00878


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 1405976 du 3 juin 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme F... A... tendant à l'annulation de la décision du 28 octobre 2014 par laquelle le président de la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault a prononcé son licenciement.

Par arrêt n° 16MA03120 du 13 mars 2018, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie par Mme A..., a, en son article 1er, annulé ce jugement du 3 juin 2016 ainsi que la décision du 28 octobre 2014 du pré

sident de la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault.

Procédure devan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 1405976 du 3 juin 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme F... A... tendant à l'annulation de la décision du 28 octobre 2014 par laquelle le président de la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault a prononcé son licenciement.

Par arrêt n° 16MA03120 du 13 mars 2018, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie par Mme A..., a, en son article 1er, annulé ce jugement du 3 juin 2016 ainsi que la décision du 28 octobre 2014 du président de la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault.

Procédure devant la Cour :

Par une lettre, transmise par ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Montpellier du 20 novembre 2018 et enregistrée le 23 novembre 2018, Mme A... a demandé l'exécution de l'article 1er de cet arrêt du 13 mars 2018 de la cour administrative d'appel de Marseille.

Par une ordonnance du 18 mars 2019, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a, en application de l'article R. 921-6 du code de justice administrative, procédé à l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 1er avril 2019, Mme A... persiste dans sa demande tendant à l'exécution de l'arrêt du 13 mars 2018 de la cour administrative d'appel de Marseille et demande à la Cour, dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai, d'enjoindre à la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault :

- de procéder à sa réintégration juridique, en position de congé pour affection longue durée du 28 octobre 2014 jusqu'au 22 février 2017 ou jusqu'au 21 juillet 2017, en surnombre du 23 février 2017 ou 22 juillet 2017 jusqu'au 1er septembre 2018, date de sa mise à la retraite ;

- de procéder au règlement des sommes dues pendant sa période d'affection longue durée et des rémunérations dues pour la période du 23 février 2017 ou 22 juillet 2017 au 1er septembre 2018 ;

- de reconstituer sa carrière, ses droits sociaux et ses droits à pension depuis le 28 octobre 2014 jusqu'au 1er septembre 2018 ;

- de lui remettre les bulletins de salaire avec mention des cotisations sociales et "l'ensemble des documents lui permettant de modifier son dossier de retraite" ;

- et à ce qu'il soit mis à la charge de la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle doit être réintégrée juridiquement et voir sa carrière reconstituée ainsi que ses droits sociaux et sa pension pendant la période d'éviction illégale du service au regard de la période de trois années d'affection de longue durée prévue par l'article 48.II du statut du personnel des chambres des métiers et de l'artisanat ;

- elle doit percevoir la différence entre le traitement qu'elle aurait perçu si elle avait travaillé pendant cette période et ce qu'elle a effectivement perçu jusqu'en décembre 2017 ;

- pour la dernière période avant son admission à la retraite, elle doit être placée en surnombre.

La chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault n'a pas produit de mémoire après l'ouverture de la phase juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêt dont l'exécution est demandée ;

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers ;

- le statut du personnel administratif des chambres de métiers et de l'artisanat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me B... représentant Mme A... et Me C... représentant la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. Si le jugement dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai et prononcer une astreinte (...) ".

2. Par arrêt définitif du 13 mars 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé la décision du 28 octobre 2014 par laquelle le président de la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault a procédé à cette date au licenciement pour inaptitude physique de Mme A..., agent statutaire de cette chambre exerçant les fonctions de femme de ménage, au motif que la requérante, qui avait été reconnue en affection de longue durée par la sécurité sociale, ne pouvait pas faire l'objet d'un licenciement pour inaptitude physique avant le terme de trois ans de congés pour cause d'affection de longue durée en application de l'article 48 II du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat. Mme A... demande l'exécution de cet arrêt en tant que l'administration, pour assurer l'exécution de cet arrêt, n'a procédé ni à sa réintégration juridique, ni à la reconstitution de sa carrière, de ses droits sociaux et de ses droits à pension, qu'elle ne lui a pas réglé les sommes qui lui étaient dues et qu'elle ne lui a pas remis ses bulletins de salaire avec mention des cotisations sociales.

Sur la demande d'exécution :

3. En exécution d'un jugement ou d'un arrêt annulant une décision illégale d'éviction d'un agent public, l'autorité administrative est tenue de procéder d'office, sans qu'il soit nécessaire que l'intéressé en fasse la demande, à sa réintégration juridique et à la reconstitution de sa carrière. Quels que soient les motifs d'annulation de la décision d'éviction, cette reconstitution de carrière, qui revêt un caractère rétroactif, à compter de la date d'effet de l'éviction illégale, comprend la reconstitution des droits sociaux, notamment des droits à pension de retraite, que l'agent aurait acquis en l'absence de cette éviction illégale et, par suite, le versement par l'administration des cotisations nécessaires à cette reconstitution. Ainsi, sauf à ce que l'agent ait bénéficié d'une indemnité destinée à réparer le préjudice matériel subi incluant les sommes correspondantes, il incombe à l'administration de prendre à sa charge le versement de la part salariale de ces cotisations, au même titre que de la part patronale. Par ailleurs, il incombe également à l'autorité administrative, de sa propre initiative, de régler la situation de l'agent pour l'avenir, notamment en procédant, en principe, à sa réintégration effective ou, le cas échéant, en prenant une nouvelle décision d'éviction.

En ce qui concerne l'exécution de l'arrêt du 13 mars 2018 pour la période du 28 octobre 2014 au 21 février 2017 :

4. Aux termes de l'article 48 du statut des personnels des chambres des métiers et de l'artisanat : " II. Affection de longue durée. L'agent atteint d'affection de longue durée reconnue comme telle par la sécurité sociale, est mis en congé et bénéficie pendant trois ans de la différence entre le traitement qu'il aurait perçu s'il avait travaillé, y compris le complément attaché à la durée de présence de l'agent dans l'échelon, et l'indemnité journalière qui lui est effectivement versée par la sécurité sociale (...) III Conséquence de l'inaptitude physique. Après trois ans de congés continus ou trois ans de congés successifs pour cause de maladie ou d'affection de longue durée ou accident comptés sur une période de six mois à partir de la première constatation médicale, l'agent qui ne peut reprendre ses fonctions peut être, en fonction du degré d'inaptitude établi par le médecin du travail, reclassé dans un emploi de l'établissement comportant des fonctions pouvant lui correspondre, ou licencié pour inaptitude physique ou, s'il remplit les conditions, être admis à la retraite ; l'agent qui, avant le terme des trois ans de congés continus ou successifs pour cause de maladie ou d'affection de longue duré, fait l'objet d'un avis d'inaptitude définitive à l'emploi occupé établi par le médecin du travail en application des dispositions de l'article D. 4624-47 du code du travail peut être reclassé sur un emploi susceptible de lui correspondre ou licencié pour inaptitude physique ou, s'il en remplit les conditions, admis à la retraite ".

5. La chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault ne justifie pas avoir procédé, ainsi qu'il lui appartenait de le faire en exécution de l'arrêt de la cour du 13 mars 2018, à la réintégration juridique de Mme A... et à la reconstitution de sa carrière pour la période d'éviction en litige, soit du 28 octobre 2014, date d'effet de la mesure de licenciement annulée jusqu'à la date du 21 février 2017, soit trois années après la date de la première constatation médicale reconnue rétroactivement à compter du 21 février 2014 en affection de longue durée par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault par lettre du 21 juillet 2014, ni, en outre, avoir versé la moindre rémunération à l'intéressée pendant cette période. En particulier, la chambre consulaire n'a pas procédé, pendant cette période, à une reconstitution des droits sociaux de Mme A..., notamment des droits à pension de retraite qu'elle aurait acquis en l'absence de l'éviction illégale dont elle a fait l'objet le 28 octobre 2014, et, par suite, au versement des cotisations nécessaires à cette reconstitution, y compris la part salariale de ces cotisations. La chambre consulaire ne conteste pas que Mme A... n'a pas perçu d'indemnités journalières de la part de la caisse primaire d'assurance maladie pendant cette période. La circonstance que la chambre consulaire ne pourrait pas calculer ces indemnités journalières au motif que Mme A... ne lui a pas communiqué, malgré la demande de la chambre en ce sens, ses arrêts de travail pendant cette période afin de connaître les indemnités journalières qu'elle aurait éventuellement perçues, est sans incidence sur son obligation de régulariser la situation de son agent dans les conditions prévues au point 3 du présent arrêt. L'exécution de cet arrêt exigeant la seule réintégration juridique de l'agent et non l'allocation d'une indemnité aux fins de réparer le préjudice subi par Mme A... du fait de l'illégalité fautive de son éviction, la chambre consulaire ne peut pas utilement soutenir qu'elle a versé en tant qu'ancien employeur relevant du secteur public, la somme totale de 27 458,79 euros à Mme A... pour la période du 30 octobre 2014 au 21 février 2017 au titre de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. La déduction de cette somme de 27 458,79 euros dans le cadre de la reconstitution des droits de Mme A... soulève un litige distinct du présent litige.

En ce qui concerne l'exécution de l'arrêt à compter du 22 février 2017 au 1er septembre 2018 :

6. Il résulte des termes du III de l'article 48 du statut qu'après trois ans de congés pour cause d'affection de longue durée, l'agent qui ne peut reprendre ses fonctions peut être, en fonction du degré d'inaptitude établi par le médecin du travail, reclassé dans un emploi de l'établissement comportant des fonctions pouvant lui correspondre, ou licencié pour inaptitude physique ou, s'il remplit les conditions, être admis à la retraite.

7. Il ressort des pièces du dossier qu'à compter du 22 février 2017, date à laquelle le congé de trois ans pour affection de longue durée expirait, l'administration n'a pas saisi le médecin du travail pour qu'il se prononce sur l'aptitude de Mme A... à reprendre ses fonctions. En l'absence de constat de son inaptitude, il appartenait à la chambre consulaire de réintégrer Mme A... dans ses fonctions ou de la placer dans une situation régulière.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que l'arrêt du 13 mars 2018 de la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas été exécuté. En conséquence, il y a lieu d'enjoindre à la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault de réintégrer juridiquement Mme A..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, et de produire à la Cour, dans ce même délai, toute pièce justifiant de la réintégration juridique de Mme A... et de la reconstitution de sa carrière pour la période du 28 octobre 2014 jusqu' au 1er septembre 2018, date de son départ à la retraite. En revanche, les conclusions de Mme A... tendant à la production de ses bulletins de salaires présentent un litige distinct et doivent être rejetées

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault la somme de 2 000 euros à verser à Mme A... au titre des frais qu'elle a engagés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Il est enjoint à la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault de réintégrer juridiquement Mme A..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, et de produire à la Cour, dans ce même délai, toute pièce justifiant de la réintégration juridique de Mme A... et de la reconstitution de sa carrière pour la période du 28 octobre 2014 jusqu' au 1er septembre 2018, date de son départ à la retraite. Ces documents devront attester du versement par la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault des cotisations patronales et salariales pendant la période en cause.

Article 2 : La chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault versera la somme de 2 000 euros à Mme A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... A... et à la chambre des métiers et de l'artisanat de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, où siégeaient :

- Mme E..., présidente,

- Mme D..., première conseillère,

- Mme G..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 septembre 2019.

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N°19MA00878


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00878
Date de la décision : 17/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-06-07 Procédure. Jugements. Exécution des jugements.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : LUCAS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-09-17;19ma00878 ?
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